
r ô le ; & ce fy ftêm e ne peu t a v o ir p ou r la nation
q u ’i l concerne aucune perfection , qu ’autant q u 'il
ie ra autorifé & connu par l ’u fa g e na tion a l , parce
q ue la perfection des lignes dépend de la conno if-
fance de leu r lignifica tion.
N u l pa rticu lie r ne' do it fe flatter d o p é re r fu t i lem
en t une ré v o lu tio n dans le s ch ofes q u i intére l-
fent tou te une grande fo c ié té , furtout fi ces chofes
ont une ex iftence permanente y 8c i l ne do it pas
p lu s fe p romettre d’arrêter l e cours des variations
des chofes dont l ’ ex iltence eft. paffagère & dépendante
de la m u ltitud e. O r l ’ exprellion de la penfée
p a r la v o ix eft n éceffa iiement va r ia b le , parce
q u ’e l l e eft p a ffa g è re , & que par là e l l e fixe moins
l e s traces fenfibles q u 'e lle peut mettre dans l ’ Imag
in a tion ; verba volant : au contraire l ’exprelfion
.de l a p a ro le p a r l ’écriture eft p e rm an en te , pa rc e
q u ’e l l e offre aux ieux une im a g e durable > que l ’on
l e repréfente auifi fouvent & au fil lo n g temps qu’ on
l e ju g e à p r o p o s , & qu i par conféquent fa it dans
l ’ ima g in a tion des traces plus profondes ; & fcripta
marient. C ’eft donc u n e . prétention ch imérique ,
q u e de v o u lo ir mener l ’écriture p a ra llè lem e n t av ec
l a p a ro le : c’ eft v o u lo ir perv ertir l a nature des
ch ofes , donner de la m o b ilité à c e lle s q u i font
effen c ie llem en t permanentes, & d e la Habilité à c e lle s
q u i font e f fen c ie llem en t changeantes & v ariab le s.
Devons-nous nous plain dre de l ’in c om p a tib ilité
des natures de deux chofes qu i ont d’a illeu r s entre
e lle s d’autres rela tion s fi intimes ? A p p lau d iffo n s
nous au contraire des avan tage s ré e ls q u i en ré fu l-
ten t. S i l ’ Orthographe eft moins fuje tte que la
v o ix à fubir dés changements de fo rm e , e l l e dev
ie n t pa r là même dépofitaire & tém o in de l ’ancien
n e p rononciation des mots j e l l e fa c ilite ainfi
l a eonnoiffance des é tym o lo g ie s , dont on a démontré
a illeu r s l ’importance. V oye\ Etymologie.
« A in f i , dit l e préfident de Brpffes , lo rs même
.» qu ’on ne retrouve p lu s rien dans l e fon, ôn retrouve
» to u t dans la figure a v e c un peu d’examen. . . .
» E x em p le . S i je dis q ue l e mo t françois foeau
» v ien t du la t in fig illum , l ’id entité de fign ifica -
» t io n me po r te d abord à cro ire que je dis v ra i :
» l ’o r e i lle au contraire me do it fa ir e ju g e r q ue je y» dis f a u x , n’ y ay an t aucune reffemblance entre
» l e fon f o que nous p ro n o n ço n s , & l e la lityfigil-
» lum. Entre ce s deux juges , qu i font d’o p i -
» n ion contraire , je fais q ue l e premier eft l e
» m e illeu r q ue je p u iffe a v o ir en p a r e ille m a -
» tiè r e , pou rvu qu’ i l fo i t a p p u y é d’ a illeu r s ;
>» ca r i l ne p ro u v e ro it rien feu l. C o n fu lto n s donc
» l a figure ; & fachant q ue l ’ancienne terminaifon !
» franço ife en el a été récemment ch an g ée en eau
» dans plufieu rs termes , que l ’on difo it f e e l au
» l ie u de f c e a u , & que c e tte terminaifon ancienne
» s’eft même confervée dans le s comp ofés du mot
» q u e j’ examine , p u ifq u e l ’on dit Contrefcel &
» non pas Çontrefceau , je retrouv e alors dans l e
» la t in & dans l e françois la même fuite de con-
» fonnes ou d’a r ticulations ; fgl en l a t in , f c l en
» françois, prouvent que les mêmes organes ont
» agi dans le même ordre en formant les deux
” Éar, ou Je v°is que j’ai eu rai fon de~ déférer
» a 1 identité du fens, plus tôt qu’à la contrariété
» des fons ».
C e raifonnement étymologique me paroît d’autant
mieux fo'ndé & d’autant plus propre à devenir
univerfel , que l ’on doit regarder les articulations
comme la partie effencielle des langues , 8c les con-
fonnes comme la partie effencielle de leur Orthographe.
Une articulation diffère d’une., autre , ou
par un mouvement différent du même o rgane, ou
par le mouvement d’un autre organe ; cela eft diftind
& diftinttif : au contraire une voix diffère à peine d’une
autre parce que c’eft toujours une fimpie émiffion
1 -jtir par 1 ouverture de la bouche, variée à la
vérité félon les circonftances j mais ces variations font
fi peu marquées , qu’elles ne peuvent opérer que
des diftinaions fort légères. D e là le mot de Wachter,
dans fon Glojfaire germanique ( Præf. ad germ.
§. x , not. k ) , L in g u a s à dialeclis f ie difiinguo ,
ut differentia linguarUm f i t à confonantibus ,
dialectorum à vocalibus. D e là auffi l ’ancienne
manière d’écrire des hébreux, des chaldéens, des
fyriens , des famaritains, &c ,_ qui ne peignoienc
guères que les confonnes, & qui fembloient ainfi
abandonner au gre des leéteurs l e choix des voix
& des voyelles ; ce qui a occafîonné le fyftême des
points mafforéthiques, & depuis, le fyftême beaucoup
plus fimpie de Mafclef.
On peut trouver de fort bonnes chofes fur l ’Orthographe
ufuelle & fur le Néographifme dans les
Grammaires françoifes de l ’abbé Regnier & du
P. Buffier .L e premier raporte hiftoriquement le s
efforts fucceflifs des néographes françois pendant
deux fiècles, & met dans un fi grand jour l ’inutilité,
le ridicule , & les inconvénients de leurs fyftêmes ,
que l ’on fent bien qu’i l n’y a de siir &- de raifoii-
nable que celui de l ’Orthographe ufuelle. ( Traité
de /’Orthographe, pa g . 7 1 , in -i 1 , p . 75, i/z-40).
L e fécond difeute , avec une impartialité louable 8c
avec beaucoup de jufteffe, les raifons pour & contre
le s droits de l ’ufage en fait d'Orthographe y & eu
permettant aux novateurs de courir tous les rifques
du Néographifme, i l indique ,avec affez de cir,conf-
peétion , les cas où les écrivains fages peuvent abandonner
l ’ufage ancien , pour fe conformer à un autre
plus aprochant de la prononciation (n°. 185— zop ).
( q C ’eft ainfi que je m’étois expliqué dans l e -
Dictionnaire raifonné des S c ien c e s , des A r t s ,
& des Métiers : mais je dois ajouter ici quelques
réflexions analogues à celles que j’ai déjà faites à
l ’article N éographisme , auquel je renvoie. J’y
ai répondu à ce qu’on dit ic i de l’autorité de l ’ufage ,
en déterminant les bornes légitimes qui la circonf-
crivent j & je crois ne les avoir point franchies
dans les corre&ions que je propofe , puifque je
n’introduis aucun caraélère nouveau & que je n’emp
lo ie ceux qui exiftent que d’une manière conforme
à leur deftination primitive.
J’avoue que j’ai un peu moins d’égard pour les
■ étymologies étrangères •; parce qu’i l me paroît
ridicule', indécent, & même injufte, de rendre notre
langue étrangère à nos concitoyens, pour complaire
au péaantifme de quelques érudits, qui après
tout n’ont aucun befoiri d’entraver notre Orthographe
pour reconnoître les générations des mots.
Je ne rejette pas toutefois certaines combinaifons
de lettres qui nous viennent de cette fource; comme
)th au lieu du fimpie t dans T k a lie , Théologie ,
A ntipa th ie , Orthographe , Thuriféraire , Thaumaturge
, &c ; p h au lieu de f dàns Phaéton ,
P h é b u s , Philofophe , Phlog ifiiqu e , Phofphore,
P h ra fe , P h t ijie , 8cc. C ’eft que ces caractères ne
caufent aucun embarras dans la prononciation ni
aucune difficulté dans l ’art de lire , & que le but
d’une Orthographe fage & raifonnée ne doit être
que de faciliter l ’une & l'autre‘
Les néographes dont l ’abbé Regnier rapporte les
tentatives & le peu de fuccès qu’elles ont eu , avoient
porté leur réforme jufqu’aux excès en effet les plus
révoltants 5 & i l fallo it qu’ils éçhouaffent. Leurs
efforts du moins n’auront pas été inutiles , n’euffent-
îls fervi qu’à montrer les écueils que doivent éviter
ceux qui entreprendront de propofer des réformes
à l ’Orthographe ufuelle. Si leur exemple ne contribue
pas à fauver mon fyftême du naufrage, i l
m’a fervi du moins à me dérober à beaucoup de
périls j & peut-être les perfonnes fages penferont-
elles que j’ai pu raifonnablemenr efpérer quelque
fuccès.) ( M. BEAUZÉE. )
v. (N.) O R TH O G R A P H IE R , v. a. Suivre, en
écrivant, les règles d’un fyftême raifonné à’ Orthographe.
On orthographie bien, quand on fe conforme
aux règles d un fyftême reçu , ou d’un fyftême
que l ’on juftifie. On orthographie. mal , quand on
mit un fyftême vicieux à quelque égard, ou qu’on
écrit au hafard & fans aucun principe. ( M . B e a u -
ZÉE. W f
( N . ) O R T H O G R A P H IQ U E , adj. Dans le
langage grammatical, ce mot fignifîe Propre ou
néceflaire à éOrthographe, R e la tif à YOrthogra-
,poe, c’eft à dire , à la repréfentation régulière de
la parole. CaraCtère orthographique , Diphthongue
orthographique, Dictionnaire orthographique.
i ° . Des Caraétères orthographiques, font ceux
qui ne fervent en effet qu’à la régularité de l ’ O r -
ihographe, ne repréfentant par eux-mêmes aucun
des fons élémentaires qui doivent fe prononcer ,
mais avertiffant feulement ou de l ’origine du mot,
ou des variations que fubiffent les lettres félon
qu’elles font ou ne font pas accompagnées de ces
fignes. Th , p h , au 3 eau , font des carâCtères orthographiques
de la première eipèce , parce que
par eux-mêmes ils ne repréfentent rien autre choie
que les lettres Amples t -, ƒ , o. Nos accents figurés,
la cédille, la diérèfe, font des caractères orthographiques
de la féconde efpèce , parce qu’ils in-
diluent des variations dans la prononciation des.
mêmes lettres : Ye final des mots tigres , degrés,
progrès, fe prononce différemment, à raifon de
la diverfité des accents ; i l en eft de même du c
dans recul3 reçu, à caufe de l a c é d ille^ & de oi
dans Mo'ife 8c moifi , à caufe de l a diérèfe.
z ° . U n e D ip h to n g u e orthographique, eft une
v o y e l le com p ofé e de deux v o y e lle s fimples p ou r
repréfenter une v o ix f im p ie } comme t f/p o u r é dans Lùdeur, & p o u r è dans laide y gne ur ei p o u r é dans fei
, & pour è dans pleine y au p ou r o dansÿau- vneouîtrr ye oi p ou r é dans roldeur, 8c p o u r / dans con- y eu, ou pour le s v o ix qu’on entend dans feu , fou.
C ’ eft l ’abbé G ira rd qu i a im a g in é ce tte dénomin
a t io n , p ou r fa ire entendre qu’ i l y a unité de v o ix
fous le s apparences illu fo ir e s de T Orthographe,
qui femb le en annoncer deux. O n donne p lu s com munément
à c e t a ffem b la g e la dénomination d e
Diphthongue impropre ou oculaire : mais au fond
i l n’ y a p o in t de d ip h th o n g u e , p u ifqu ’i l n’ y a pas
deux fons j ' c ’ eft proprement une v o y e l le com p o fé e .
30. Un Dictionnaire orthographique, eft celui
où les mots d’une langue font recueillis & orthographiés
félon ies vues d’un fyftême raifonné, avec
la juftification des principes adoptés , répandue dans
les différents articles qui le compofent. T e l eft le
Traité de l ’Orthographe fran çoife du Prote de
Poitiers, corrigé & augmenté en 17.65 par Reftaut.
L e Syftême d Orthographe que je propofe à Y artic
le N éographisme paroitroit peut-être moins
étrange , fi j’y joignois un Dictionnaire orthographique
, qui montrerait en détail que la langue
n’y eft pas fi défigurée que veulent le faire entendre
les cenfeurs. ( M . B e a u z é e . )
O R T H O L O G I E , f. f . C e m o t eft l ’un de
ceux qu e l ’on a cru de vo ir rifque r dans l e P r o f -
peCtus que l ’on a donné de la G ram m a i r e , au
mot G rammaire : on y a e x p liq u é c e lu i- c i par
fon é t ym o lo g ie , p ou r juftifier l e fens qu ’on y a
attaché. L a G ram m a ire confidère la p a ro le dans
deux états , ou comme prononcé e ou comme écrite •
v o ilà un m o t i f bien naturel de divifer en deux
cla ffe s l e corps entie r des obfervations g ram m a tica
le s : toutes c e lle s qu i concernent l a p a ro le p ro noncée
font de la prem ière c la f f e , à la q u e lle conv
ien t fo r t l e nom SO r tho log ie , pa rc e que c’ eft
e l l e qu i aprend -tout ce qu i ap partien t à Y art de
parler y toutes c e lle s qu i regardent la p a ro le é c rite
, font de l a féconde c la f fe , q u i eft de tou t temps
ap p e lé e Orthographe, pa rc e que c’ eft e l l e qu i aprend
Y art d ’écrire. ' ( M . B e a u z é e . )
(N .) O U V R A G É D E L ’E S P R I T , O U V R A G E
D ’E S P R I T . Synonymes.
Q u o iq u e l ’efp r it a it p a rt à l ’ un & à l’ autre , c e
qu i fa it l a fyn o n ym ie des deux expreffionsj ce fon t
pou rtan t des chofes différentes.
T o u t ce q ue le s hommes inventent dans le s
fciences & dans le s a r t s , eft un Ouvrage de Tejprit.
L e s compos itions ingénieu fe s des g en s de L e tt r e s f