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(îe nos verbes , un autre fyftêmc de modes & de
temps que celui qu’on a adopté & juftifié ailleurs ; &c.)
(M . B e a u z é e . ) '
(N-l F O U , E X T R A V A G A N T , IN SEN SÉ ,
IM B É C ILE . Synonymes.
L e F o u manque par- la raifon, & fe conduit
par la feule impreflion méchanique. E x tr a vagant
manque par la r è g le , & fuit fes caprices.
L ’ln jen fé manque par l'efprir, & marche fans
lumière. L*Imbécile manque par les organes , &
va par le mouvement d'autrui fans aucun difcerne-
ment.
Le s F o u s ont l'imagination forte : les E x tra va g
a n ts ont les idées fingulières : les Infenfés les ont
bornées : lts lm b é c ille s n'en ont point de leur propre
fonds. [ L ’ abbé G i r a r d . )
(N .) F R E L E , F R A G IL E . Synonymes.
Ces deux termes indiquent également une con-
fiftance fo ib le , & qui oppofe peu de réfiftance à la
force : en voici les différences. [M . B e au zé e . )
U n corps fr e le eft celui q u i , par fa confiftance
é l a f t i q u e , m o lle , & déliée, eft,facile a ployer ,
courber , rompre ; ainfi, la tige d'une plante eft
f r ê l e , la branche de l ’ofier eft fr ê le . I l y a donc
entre F rag ile & Frêle cette petite nuance, que le
terme Fragile emporte la f o i b l e f l e du Tout & la
raideur des parties 5 & Frêle pareillement la foi-
bleffe du T o u t , mais la molleffe des parties. On
ne dirait pas âuffi bien du verre , qu’i l eft fr ê le ,
que io n ait q u i l eft fra g ile ; ni d’un rofeau, qu'il
eft f r a g ile , comme on dit qu’i l eft fr ê le .
O n ne dit point d’une feuille de papier ni d’un
taffetas, c[ue ce font des corps fr ê le s ou fra g ile s :
parce qu ils n’ont ni raideur ni élafticité , &
qu'on fes p lie comme on veut fans les rompre.
( M . D i d e r o t . )
Une confiftance fr ê le eft aifément altérée,- mais
e lle fe rétablit ; une conftftance frag ile, eft aifément
détruite, & elle ne fe rétablit plus. : la foi- -
bleffe eft le caractère commun de l'une & de
l'autre.
Cette diftinftion indique le choix qu'il faut faire
de ces termes, quand on les tranfporte au fens
figuré.
O n dit d'une fan té qui s'altère aifément & que
peu de chofe dérange, qu'elle eft fr ê le ; d’un protecteur
dont le crédit eft aifément effacé par un
plus grand, que les moindres difficultés arrêtent
facilement, que les obftacles rebutent, qui met peu
de chaleur dans fes démarches, que c'eft un fr ê le
appui que le ften. On dit de tout ce qui n’eft pas
foiidement établi & qui peut aifément fe détruire
qu'il eft f r a g ile : la fortune, les richeffes , les
grandeurs de ce monde, la plupart de nos efpérances
font des chofes fr a g ile s . ( M . B eauzée. ) ’
F R É Q U E N T A T IF , adj. Grammaire. C'eft
F R É
la dénomination que l'on donne aux verbes dérivés',
dans lefquels l ’idée primitive eft modifiée par une
idée acceffoire de répétition $ tels font dans la
langue latine les verbes clamitare , dqrmitare,
dérivés de clamare, -dormire. Clamare n’exprime
que 1 idee de l ’adtion de crier ; au lieu que ciami-
tare^, outre cette idée primitive , renferme encore
lid e e modifiqative-.de répétition , de.forte qu’i l
équivaut à clamare feepe ; criailler eft le mot
français qui y correfpond : de même dormire ne
preiente a l'efprit que l ’ idée de dormir; & dormi-
ta/ f i F l l * cette i^ e Pri micive celle d'une répétition
fréquente , de manière qu'il ftgnifie dormire
fr éq uen te r , dormir à différentes reprifes ; c’eft
l'état d'un homme dont le fommeil n’eft ni fuivi ni
continu , mais coupé & interrompu.
L e fupin doit être regardé, dans la langue la tine
, comme le générateur unique & immédiat,
ou la racine prochaine des verbes fr éq uen tatifs ■:
1 on .voit en effet que leur formation eft analogue
a la terminaifon du fù p in , & qu'ils en confervent
la confonne figurative : ainfi, de fa ltum , fupin
de f a l io , vient falta r e > ■ de verfum , fupin de verto,
vient verfare ; & S amplexum , fupin d’amplectory
vient amplexari. D ’ailleurs les verbes primitifs
auxquels l ’ufage a refufé un fupin, font également
privés de i ’efpèce de dérivation dont nous parlons,
quoique l'a&ion qu’ils expriment foit fufceptible en
elle-même de l ’efpèce de modification qui cara&érife
les verbes fr éq u en ta tifs .
I l faut cependant avouer que le détail préfente
quelques difficultés qui ont induit en erreur ^ ’habiles
grammairiens : mais on va bientôt reconnoître
que ce font ou de Amples écarts qui ont paru préférables
à la cacophonie, ou des irrégularités qui ne
font qu'apparentes , parce que la racine génératrice
n'eft plus d'ufage.
A in fi, dans la dérivation des F r équentatifs,
dont les primitifs font de la première conjugai-
fo n , l'ufage, qui tâche toujours d’accorder le plaifir
de l'o re ille avec la fatisfa&ion de l ’efprit, a autorisé
le changement de la v o y elle a du fupin
générateur terminé en a tum , afin d’éviter le concours
défagréable de deux a canfécutifs : au lieu
donc de dire clamatare , rogatare , félon l ’analopie
des fupins clamatum, rogatum, on dit clamitare,
rogitare : mais î l n’en eft pas moins évident que
le fupin eft la racine génératrice de cette formation.
Dans la féconde conjugaifon , on trouve hcerere ,
dont le fupin hcefum fernble deyoir donner pour
fr éq u en ta tif hoefare ; & cependant c’eft hæfuaret.
c’eft que le fupin hcefum^n’eft effectivement rien
autre chofe que hcefitum , infenfiblement altéré par
la fyncope ; & ce fupin hæfitum eft analogue aux
fupins territum, latitum , des verbes terrere, la-
tere , de la même conjugaifon, d’où viennent ter-
ritare, la tita r e , félon la r^ègle générale. Au refte,
i l n'eft pas rare de trouver des verbes avec deux
F R É
fupins ufîtés, l ’un conforme aux lois de l'analogie ,
& l ’autre défiguré par la fyncope.
C ’eft par la fyncope qu’i l faut encore expliquer
la génération des Fréquentatifs des verbés qui ont
la leconde perfonne du préfent abfolu de l ’indica
tif en g i s comme a g o , ag is ; leg o , le g is ; fu g io ,
fu g is . rrifeien prétend que cette féconde perfonne
eft la racine génératrice des Fréquentatifs Ugitare ,
legitare , fu g ita r e : mais c’eft abandonner gratuitement
l ’analogie de cette efpèce de formation,
puifque rien n’empêche de recourir encore ici au
fupin. Pourquoi ago & lego n’auroienr-ils pas eu
autrefois les fupins agitum & légitum, comme
fu g io a encore aujourdhui fa g itum , Son f ugitare
eft dérivé? Ces fupins ont dû affez naturellement
fe fyncoper. Les latins ne donnoient à lettre g que
le fon foible de k , co'mme nous le prononçons dans
guerre : ainfi , ils prononçoient agitum , leg itum ,
comme notre mot guitarre fe prononce parmi nous :
ajoutez que la vo y e lle i étant brève dans la f y l-
labe g i de ces fupins , les latins la prononçoient
avec tant de rapidité qu'elle échapoit dans la
prononciation & étoit en quelque forte muette;
de manière qu’i l ne reftoit quagtùm, legtum ,
où la foible g fe change néceffairement dans, la
forte c , à caufè du t qui fu it , & qui eft une conforme
forte ; l ’organe ne peut fe prêter à produire
de fuite deux articulations , l ’une foible , & l ’autre
fo r te , quoique l ’orthographe femble quelquefois
préfenter le contraire.
C ’eft par ce méchanifme cpe forbeo a aujourdhui
pour fupin forptum , qui n eft qu’une ' fyncope de
l ’ancien fupin forbitüm , qui a effectivement exifté,
puifqu’i l a produit forbitio : & c’ eft par une raifon
toute contraire que les verbes de la quatrième conjugaifon
n’ont point de fupin fyncopé, & forment
régulièrement leurs Fréquentatifs ; parce que l ’i
du fupin étant lon g , rien n’en a pu autorifer l a fup-
preffion.
I l faut prendre garde cependant de donner deux
Fréquentatifs à plufieuis verbes de la troifième
conjugaifon , q u i , d’après ce que nous venons d’ex-
p o fe r , paroitroient en avoir deux : tels que canere,
face re , jacere , qui ont cantare & cantitare ,
fa c la r e & fa c îita r e , jac la r e & ja c lita r e . Les
premiers , qui peut-être n’étoient effectivement que
Fréquentatifs dans leur origine , font devenus depuis
des verbes augmentatifs, pour exprimer l ’idée
acceffoire d’ étendue ou de plénitude que l ’on veut
quelquefois donner à l ’aCtion; & les autres en ont
été tires conformément a l ’analogie que nous indiquons
i c i , pour les remplacer dans le fervice des Fréquentatifs
.
I l eft donc confiant, nonobftant toutes les irrégularités
apparentes, que tous les verbes fréquenta
t if s font formés du fùpin du verbe primi.if; &
cette conféquence doit fervir à réfuter encore Prif-
c ien , & après lu i la Méthode de Port R o y a l, qui
prétendent que les verbes vellico & fo d ico -font
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fr équentatifs. Outre que cette terminaifon n’a aucun
rapport au fupin des primitifs vello & f o d i o ,
la figniiication de ces dérivés comporte une idée
de diminution qui ne peut convenir aux Fréquent
a t i f s ; & d’ailleurs les mêmes grammairiens regardent
comme de vrais diminutifs les verbes al-
b ico , candico , n igrko , frohdico , qui ont une
terminaifon fi analogue avec ces deux-là : par quelle
finguiarité ne feroient - ils pas placés dans la même
c la ffe , ayant tous la même terminaifon & le même
fens acceffoire ?
I l eft vrai cependant que l ’idée primitive qu’un
verbe dérivé renferme dans £a lignification, y eft
quelquefois modifiée par plus d’une idée acceffoire;
ainfi , forbïllare , avaler peu à peu & à differentes
reprifes,, a tout à la fois un fens diminutif & un
fon % fr éq u en ta tif Donnera-t-on pour cela plufieurs
dénominations différences à ces verbes ? N o n , fans
• do ite; i l n’en faut qu’une , mais i l faut la choifir :
& le fondement de ce choix ne peut être que la
terminaifon, parce qu’elle fort comme de fi anal
pour raffembler dans une même claffe- des mots
affujeteis à une même marche , & qu’elle indique
d’ailleurs le principal point de vue qui a donné
naiffance au verbe dont i l eft queftion ; car voilà
la manière de procéder, dans toutes les langues :
quand on y crée un mot , on lu i donne forupuleu-
fomeht la livrée de l ’efpèce à laque lle i l appartient
par fa fignification; i i n’y feroit-pas fortune, s’i l
avoit à là fois contre lui la nouveauté & l ’anomalie :
fi l ’on trouve donc enfuite des mots qui dérogent à
l'an alo gib , c’ eft i'effec d’une altération infenfîble &
poftérieure.
Jugeons après cela fi Turnèbe, & Voftius après
l u i , ont eu raifon de placer dormitare dans la
claffe des défîdératifs, parce qu’i l préfente quelquefois
ce fens, & . fpécialemenc dans l ’exemple de
Plau te, cité par Turnèbe , dormitare te aiebas. I l
faudrait donc auflî l ’appeler d im in u tif, parce qu’i l
fîgnifie quelquefois dormire leviter, comme dans
le mot d’Horace, quandoque bonus dormitat H o -
: me rus i & augmentatif, puifque Cicéron l ’a emp
lo y é dans le fens de dormire altè. L a vérité eft ,
que dormitare eft, originairement & en vertu de Pana-
i « lo g ie , un verbe fr éq u en ta tif i & que les autres fens
qu on y a attachés depuis, découlent de ce fens
primordial, ou viennent du pur caprice de l ’ufage.
Une dernière preuve que les la:ins n’avoient pas
prétendu regarder dormitare comme défidératif, c’ eft
qu’ils avoient leur dormiturire deftiné à exprimer ce
fens acceffoire.
Nous remarquerons i ° . que tous les Fréquentatifs
latins font terminés en a r e , & font de la première
conjugaifon.
2.°. Qu’ ils fuivent invariablement la nature de leurs
primitifs ,, étant comme eux abfolus ou relatifs ; l'ab-
folu dormitare vient de. l ’abfblu dormire ; le relatif
agitare. vient du ttizxiîagere. -
Voyons maintenant fi nous avons des Fréquentatifs