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Ce fut dans ces jardins, où par mille décours
Inachus prend plaiflr à-prolonger Ton cours;
Ce fut fur ce charmant rivage
Que fa fille volage
Me promit de m’aimer toujours.
Le Zéphyr fut témoin , l’Onde fut attentive,
Quand la Nymphe jura de ne changer jamais;
Mais le Zéphyr léger ôc l’Onde fugitive
Ont bientôt emporté les ferments qu’elle a faits.
C eft là le modèle du f ly le fleu r i. On pourroit
donner pour exemple du ftyle. doux, qui n’eft pas
le doucereux & qui eft moins agréable que le
f t y le f le u r i , ces vers d'un autre Opéra :
Plus j’obferve ces lieux , & plus je les admire ;
Ce fleuve .coule lentement,
. Et s’éloigne à regret d’ un féjour fi charmant..
L e premier morceau eft f le u r i , prefque toutes
les paroles font des images riantes; le fécond eft plus
dénué de ces fleurs . i l n’eft que doux. ( VOLTA
IR E . |
(N.) F O I B L E , adj. Qui n’a pas toute la vigueur
dont i l eft capable. Les articulations variables font
fo ib le s ou fortes. V oye \ V ariable. On appelle
fb ib le s celles qui n interceptent pas la voix avec
toute la vigueur dont eft capable la réflftance de
la partie organique qui en eft le principe. B , V ,
D , G , Z , J , font des articulations variables ƒ bibles.
V oy e \ A rticulation& F ort..( M. B e a u -
ZÉE. )
F O IB L E , FO IB L E S S E . Synonymes*
I l y' a la même différence entre les F oib les &
les Foibleffes , qu’entre la caufe & l ’effet ; les Foibles
font la caufe , les FoibleJJes (ont l ’effet. U n
Foible eft un penchant, qui peut être indifférent ;au
lieu qu’une Foibleffe eft une faute, toujours repréhén-
iib le . ( A n o n ym e . )
F O IB L E (Ame) y C oeur F O IB L E , Esprit F O I B
L E . Synonymes.
L e fo ib le du coeur n’eft point celui de Yefprit;
le fo ib le de Yume n’eft point celui du coeur. Une
ame fo ib le eft fans' relfort & fans a&ion ; e lle Ce
laiffe a lle r à .ceux qui la gouvernent. Un coeur
fo ib le s’araolit aifément , change facilement d’inclinations,
ne réfifte point à la féduélion , à l ’af-
Cendant qu’on veut prendre for lu i , & peutfubflfter
avec un efprit fort ; car on peut penfer fortement
& agir foiblement. V efpr it fo ib le reçoit les impref-
fions fans les combattre , embrafle les opinions
fans examen, s’effraie fans caufe , tombe naturellement
dans la fuperftition. ( V o l t a i r e . )
(N . ) F O IB L E , IN C O N S T A N T , L É G E R ,
V O L A G E , IN D IF F É R E N T . Synonymes.
Une fefcune f ç ib le eft ce lle à qui l ’on reproche
f o r
une faute, qui fe la reproche à elle-même , donc
le coeur combat la raifon , qui veut guérir,. qui ne
guérira jamais, ou qui ne guérira que bien tard :
une femme inconflante eft ce lle qui n’aime plus :
une légère, ce lle qui déjà en aime un autre : une
volage , ce lle qui ne fait fi elle aime & c e q u e lle
aime : une indifférente, celle qui n’aime rien.
Les femmes accufent les hommes d’être volages ;
& les hommes difent q u e lle s font légères. ( L a
B r u y è r e . ) . v
F O R C E , f. f. Grammaire & Littérature. C e
mot a ete traulporte du Ample au figuré.
Force fe dit de. toutes les parties du corps qui
font en mouvement, en aftion ; la Force du coeur,
que quelques-uns ont fait de quatre-cents livres, &
d autres de trois onces ; la Force des vifcères, des
poumons, de la voix; à Force de bras.
O n dit par an a lo g ie , Faire Force de vo ile s , de
rames ; rafleinbler fes 1- orce s ; connoître, mefurer
les Forces j aller , entreprendre au delà de les F o r -
ces ; le travail de l ’Encyclopédie eft au deffùs 'des
f orces de ceux qui fe font déchainés contre ce l i -
vre. O u a long temps appelé Forces de grands
cileaux ; & c eft pourquoi, dans les États de la L i gue
, on fit une eftampe de l ’ambaffadeur d’E lp a -
gn e , cherchant avec fes lunettes lès cifeaux qui étoient
à terre, avec ce jeu de mots pour infeription : F a i
perdu mes Forces. :
L e ftyle très-familier admet encore, fo r c e gens ,
fo r ce g ib ier, force fripons, fo r ce mauvais critiques.
O n dit, K fo r c e de travailler i l s’eft épuifé; le fers’af-
foiblit i fo r ce de le polir.
L a Métaphore qui a tranfporté ce mot dans la
M o ra le , en a fait une vertu cardinale. L a F o r c e ,
en ce fens, eft le courage de foütenir l ’adverfité , &
d’entreprendre des chofes vertueüfes & difficiles, animi
fo rtitud o.
L a Force de l ’cfprit eft la pénétration & la profondeur,
ingenii v is . L a nature la donne comme
ce lle du corps ; le travail modéré les augmente , &
le_travaii outré les diminue.
L a Force d’un raifonnement conAfte dans une
expofîtion claire des preuves expofées dans leur jour,
& une conclusion jufte ; elle n’a point lieu dans
les théorèmes mathématiques , parce qu’une démonf-
tration ne peut recevoir plus ou moins d’évidence,
plus ou moins de Force ; elle peut feulement procéder
par un chemin plus lon g ou plus cou rt, plus
Ample ou plus compliqué. L a Force du raifonnement
a furtout lieu dans les queftioqs problématiques.
L a Force de l ’Éloquence n’eft pas feulement
une fuite de raifonnements juftes & vigoureux, qui
fubfifteroient avec la sèchereffe ; cette Force demande
de l ’embonpoint , des images frapantes,
des termes énergiques. Ainfi, l ’on a dit que les fermons
de BourdaLoue avoient plus de Force , ceux
de Maffillon plus de grâces. Des vers peuvent avoir
de la Force , & manquer de toutes les autres beautés.
L a Force d’un vers dans notre langue vient pria-
F o R
empalement de l ’art de dire quelque chofo dans chaque
hémiftiche
Ec monte fur le faîte , il afpire à defcendre ;
L’Éternel eft fon nom, le monde eft fon ouvrage.
Cés deux vers , pleins de Force Fl. d’élégance , font
le meilleur modèle de la PoéAe.
L a F once y dans la Peinture, eft l ’expreffion des
mufcles , que des touches reffemies font paroître
en aétion fous la chair qui les couvre. I l y a trop
de Force quand ces mufcles font trop prononcés.
Les attitudes des combattants ont beaucoup de Force
dans les batailles de Conftantin, deflxnées par Raphael
& par Jules Romain; & dans celles d’Alexandre
, peintes., par L e Brun. L a Force outrée eft
dure dans la Peinture , ampoulée dans la Poéfie.
Des philofophes ont prétendu que la Force eft
une qualité inhérente à la matière ; que chaque
particule invifible , ou plus tôt monade , eft
douée d’une Force aélive : mais i l eft aufli difficile
de démontrer cette affertion, qu’i l l e feroit de prouver
que la blancheur eft une qualité ' inhérence à la
matière, comme le dit le Dictionnaire de Trévoux à
l ’article Inhérent.
L a Force de tout animal a reçu fon plus haut
degré, quand l ’animal a pris toute fa croiffance ;
e lle décroît, quand les mufcles ne reçoivent plus
une nourriture é g a le ; & cette nourriture cefle d’être
é g a le , quand les efprics animaux n’impiiment plus
à ces mufcles le mouvement accoutumé. I l eft fi
probable que ces efprits animaux font du, feu , que
les vieillards manquent de mouvement , de F o r ce ,
à mefüre qu’ils manquent de chaleur.. ( VOLT
A IR E .) ■
F O R M A T IO N , f. £ Grammaire. C ’eft la
manière de faire prendre à un mot toutes les formes
dont i l eft fufceptible , pour lui foire exprimer
toutes les idées acceffoirès que l ’on peut joindre à
l’idée fondamentale qu’i l renferme dans fa lignification.
Cette définition n a pa s, dans l ’ufove ordinaire
des grammairiens, toute l ’étendue qui lui convient
effectivement. Par F orm ation , ils n’entendent ordinairement
que la manière de foire prendre à un
mot les différentes terminaifons ou inflexions que
l ’ufoge a établies d pour expri mer les différents
rapports du mot à l ’ordre de l ’énonciation. Ce ri’èft
donc que ce que nous défîgnons aujou’rdhai par les
noms de D é c lin a i fo n .& de Conjugaifon ( voye%
ce s deux mots) & que les anciens compfenoienc
fous le nom général & unique de Dé clin aijon .
Mais i l eft encore deux autres efppces de Form
a tion , qu'r méritent Angulièrement l’attention du
grammairien philofophe ; parce qu’on peut le§
regarder comme les principales clefs des lan gués :
ce font la Dérivation & la Compofition. Elles ne
font pas incônnues ..aux grammairiens , qui , dans
l ’énumération de ce qu ils appellent les A c c id en ts
F O R i ip
des m o ts , comptent l ’elpèce & la figure ; ainjî ;
difent-ils, les mots font de l ’efpèce primitive ou
dérivée , & ils font de la figure Ample ou compofée*
V oy e \ A ccident. ].■ :)
Peut-être fe font-ils crus fondés à ne pas réunir
la dérivation & la eompoAtion avec la déclinaifon
&■ la conjugaifon, fous le point de ' vue général de
Formation ; car c’eft à la Grammaire , peut - on
dire , d’apprendre les inflexions deftinées par l ’ufage
à marquer les diverfes relations des mots à l’ordre
dé rénonciation, afin qu’on- ne tombe pas dans l e
défaut d’employer l ’une pour l ’autre au lieu que
la dérivation & la compofition ayant pour objet
la génération même des mots, plus tôt que leurs
formes grammaticales, i l femble que la Grammaire
air droit de fuppofer les mots tout faits, & de n’en
montrer que l ’emploi dans le difeours.
C e raifonnement, qui peut avoir quelque chofe
de fpécieux, n’eft au fond qu’un pur fophifme. L a
Grammaire n’eft, pour ainfi d ire, que le code des
décidons de l ’ufege Air tout ce qui appartient à l’art
de la Parole ; partout où l ’on trouve une certaine
uniformité ufuelie dans les procédés d’une langue ,
la Grammaire doit la foire remarquer , & en foire
un princ ipe, une lo i. O r on verra bientôt que la
dérivation & la compofition font affujetties à cette
uniformité de procédés, que i ’ufage foui peut introduire
& autorifer. L a Grammaire doit donc en
traiter , comme de la déclinaifon & de la conju-
gaifon ; & nous ajoutons qu’elle doit en traiter
.fous le même titre , parce que les unes-comme
les autres envifogent les diverfes formes qu’un
même mot peut prendre pour exprimer, comme on
l ’a déjà dit , les idées acceffoires , ajoutées & fu-
bordonnées à l ’idée fondamentale renfermée effen-
ciellement dans la lignification de ce mot.
Pour .bien entendre la doétrine des Formations,
i l fout remarquer que les mots font eftèncicllemenc
les fignes des idées , & qu’ils prennent différentes
dénominations, félon la différence des points de vue
fous iefqnels on envifoge .leur génération & les idées
qu’ils expriment. .C’eft de là que les mots font p r i m
itifs ou dérivés , jim ples ou cornpofés.
U n mot eft p r im it if relative ment aux autres mots
qui en font formés , pour exprimer avec la même
idée originelle qu elque idée aeceftdire qui la modifie;
& ceux-ci Convies dérivé s, dont le primitif eft en
quelque forte le germe.
U n mot eft fitnple relativement aux autres mots
qui en font formés , pour exprimer avec la même
idée quelqu’autre idée particulière qu’on lui aflocie ;
& ceux-ci font'les cornpofés, dont le Ample eft en
quelque forte l ’élément.
O n donne en général, le nom de racine J ou de
mot radical y à tout mot dont un autre eft form é ,
foit par dérivation foit par eompoAtion ; avec cette
différence néanmoins , qu’on peut appeler racine's
génératrices les mots primitifs à l ’ égard de leurs