
 
        
         
		eue l’on  regarde  communément comme futur coin-  
 pol'é  ,  &   quelques-uns  comme futur du  mode  fub-  
 lonriif, &  l’on diroit dafts le fens a£lif, quand j'aurai  
 débité cet^e marckàndife. 
 Cette  obfervation me fait entrevoir que  hbs  verbes  
 paffifs tie  font  pas  encore  bien  connus  de  nos  
 Grammairiens, de  ceux même qui reconnoifTerit que  
 notre ufage a âutorifé des tours exprès &  üneconjn-  
 gaifon  pour le  fens pajjif.  Qu’ils y  prennent  garde :  
 Je vendre ,êtrc vendu, avoir été vendu , font  trois terns  
 différens de l’infinitifpajfif-, du verbe vendre ; cela eft  
 -évident, &  entraine la néceffité d’établir un nouveau  
 'fyftème  de conjugaifon pajfive.  ( B. E. R. M.  ) 
 Passif  ,  ( Jurifpr..)  lignifie  c-e  qui  ejl fougère.  Un  
 droit pajjif de  fervitude  eft  lorfqu’on  eft  obligé  de  
 fouffrir  que quelqu’un  exerce une  fervitude fur fon  
 héritage.  Un  droit  aftif de  fervitude  eft  celui  que  
 l’on  exerce fur autrui,  Loye^ Servitude,  (■ d) 
 PASSIGNIANO, (  Géeg. mod.  ) petite ville  d’Italie 
  dans le Pérugin, fur le  lac de Pénjgia.  Long. zç).  
 Sû.lat. 4 j .   12. 
 PASSIONS,  f. f. pl.( Philof.  Logique, Morale.) Les  
 penchans, les  inclinations, les defirs &  les averfions,  
 pouffes à un  certain degré de  vivacité, joints  à  une  
 lenfation confiife de plaifir ou de douleur,  occafion-  
 nés  ou  accompagnés  de  quelque mouvement irrré-  
 gulier du  fang &   des  efprits  animaux  ,  c’eft  ce que  
 nous  nommons pajjions.  Elles vont jufqu’à ôter tout  
 'ufage de la liberté, état oii  l’ame eft en quelque maniéré  
 rendue pajjive ; de-là le nom de pajjions. 
 L’inclination ou certaine  difpofition de l’ame, nait  
 de  l’ppinion oii nous fommes qu’un grand bien ou un  
 grand  mal  eft  renfermé dans  un  objet qui  par  cela  
 même excite la pajjion. Quand donc cette inclination  
 eft mile  en jeu ( &  elle y  eft mife par tout ce  qui eft  
 pour nous plaifir ou peine )  , aufli-tôt l’ame,  comme  
 frappée  immédiatement par  le  bien du par  le  mal,  
 ne  modérant  point  l’opiniorç  oîi  elle  eft  que  c’eft  
 pour  elle une  chofe  très-importante,  la  croit par-là  
 même digne de toute fon attention ; elle fe tourne entièrement  
 de  fon  côté, elle s’y  f ix e ,  elle  y   attache  
 tous  fes fens , &  dirige  toute  fes facultés  à  la confi-  
 dérer ; publiant dans  cette  contemplation,  dans  ce  
 defir ou dans cette crainte prefque tous les autres objets  
 :  alors  elfe  eft dans  le  cas  d’un  homme  accablé  
 d’une  maladie aiguë ;  il n’a  pas la liberté de  penfer à  
 autre chofe qu’à çe qui  a  du rapport à fon mal. C’eft  
 encore  ainfi  que  les pajjions  font  les  maladies  de  
 l’ame. 
 Toutes nps  fenfations  ,  nos  imaginations , même  
 les  idées  intellettuelles , font accompagnées de plaifir  
 ou de peine ,  de  fentimens  agréables  ou  douloureux  
 ,  &   ces  fentimens  font  indépendans  de  notre  
 volonté ;  car  fi ces  deux fources de  bien  &c  de mal  
 pouvoient  s’ouvrir &  fe  feriner  à  fon  gré,  elle dé-  
 tourneroit la douleur, &   n’admettroit que le plaifir.  
 Tout Ce qui produit en nous ce  fentiment  agréable,  
 tout  ce  qui eft  propre  à nous  donner  du  plaifir,  à  
 l’entretenir,  à  l’accroître,  à écarter pu  à adoucir la  
 peine ou la douleur, nous le nommons bien. Tout ce  
 qui  excite un fentiment oppofé , tout ce qui produit  
 un effet contraire, nous l’appelions mal. 
 Le plaifir  la  peine font donc  les  pivots fur  lef-  
 quels  roulent toutes nos affe&ions, connues fous  le  
 nom d’inclinations ôc de pajjions, qui ne font que les  
 différens degrés  des modifications de notre ame. Ces  
 fentimens font donc liés intimement  aux pajjions ; ils  
 en font les principes, &  ils naiffent eux-mêmes de di-  
 verfes fources que  l’on peut réduire à ces quatre. 
 l°. Les plaijirs & les peines des fens.  Cette douceur  
 ou   çette amertume jointe à  la fenfation,  fans  qu’on  
 en gonnoiffe la caufe, fans  qu’on  fâche comment les  
 objets  excitent ce fentiment, qui  s’élève  avant  que  
 Ton ait prévu fe bien ou le mal que la préfence de ï ’u» 
 fiige  de  Cet  objet peut procurer; ce que ï’pn eh peut  
 dire , c’eft que la bonté divine a attaché un fentiment  
 agréable  a  l'exercice modéré de  nos facultés  corporelles•.  
 Tout ce qui fatisfait nos befoins fans  aller  au-delà.,  
 donne  le fentiment de plaifir.  La  vue  d’une lumière  
 douce,  des  couleurs  gaies  fans  être  :ébfouiflànte$ *  
 des objets à notre portée, des fôns nets, éclatons qui  
 n’étourdiffent pas, des  odeurs  qui n’ont ni fadeur ni  
 trop de force, des goûts qui  ont une pointe fans être  
 trop  aiguë  ,  une  chaleur tempérée,  l’attouchement  
 d’un corps uni ; tout  cela plaît parce que cela exerce  
 nos facidtés fans les  fatiguer» Le contraire ou l’excès  
 produit un  effet  tout  oppofé. 
 2°:.  Les plajjirs  de  l'ëfprit  oïl de  l'imagination  forment  
 la féconde fouree de nos pajjions: tels font ceux  
 que  procure  la  vue  ou la  perception  de  la beauté  
 prife dans un fens général,  tant pour  les  beautés de  
 la  nature &  de  l’art, que pour celles  qui ne font fai*  
 fies que par  les  yeux de  l’entendement, c’eft-à-clire  
 celles  qui fe  trouvent dans les vérités  univerfelles  
 celles  qui  découlent  des  fois  générales,  des  caufes  
 fécondes. Ceux qui  ont  recherché le principe général  
 de la beauté, ont remarqué que les objets propres  
 a faire naître  chez nous un  fentimentde plaifir, font  
 ceux qui réunifient  la variété avec  l'ordre  ou Y,uniformité. 
  La variété nous occupe par la multitude d’objetà  
 qu’elle nous préfente ; l’uniformité en rend la perception  
 facile, en nous mettant à portée de les  faifir raf-  
 lemblés fous  un même  point  de  vue. On peut donc  
 dire que les plaifirs de l’ëfprit, comme ceux des fens,  
 ont une  même origine,  un  exercice modéré de  nos fa -  
 cul tés. 
 Recourez à l’expérience ; voyez  dans la Mufique  
 les  confonnances  tirer leur  agrément de  ce qu’elles  
 font fimples &  variées ;  variées,  elles  attirent  notre  
 attention ; fimples,  elles ne nous  fatiguent  pas  trop*  
 Dans l’Architecture, les belles proportions font celles  
 qui gardent un jufte milieu entre  une uniformité  en-  
 nuyeufé, &  une  variété  outrée qui  fait  le  goût gothique. 
   La  Sculpture  n’a-t-elfe  pas  trouvé  dans  les  
 proportions  du  corps  humain  çette  harmonie,  cet  
 accord dans  les rapports, &£ cette  variété  des  différentes  
 parties qui  Conftituent la  beauté d’une ftatue ?  
 La Peinture eft affujettie aux mêmes réglés. 
 Ppur remonter de  Part à  la nature, la beauté d’un  
 vifage n’empninte-t-elle pas fes charmes des couleurs  
 douces, variées, de la régularité des traits, de l’air qui  
 exprime différens fentimens  de l’ame ?  Les grâces du  
 corps ne confiftent-elles pas dans un jufte rapport des  
 mouvemensà la fin qu’on s’y  propofe ? La nature elle-  
 même embellie de fes couleurs douces &  variées, de  
 cette  quantité d’objets proportionnés,  &  qui tous fe  
 rapportent  à  un  tou t,  que  nous  offre-t-elle }  une  
 unité combinée fagement avec la variété la plus agréable. 
   L’ordre &  la proportion ont  tellement droit  de  
 nous p laire, que nous l’exigeons jufque dans les productions  
 fi  variées  de l’entnoufiafine,  dans ces peintures  
 que  font  la Poéfie &   l’Eloquence des  mouve-  
 mens tumultueux de l’ame. A plus  forte raifon l’ordre  
 doit-fi  rogner  dans  les  ouvrages  faits pour inftniire.  
 Qu ’eft-ce qui nous les fait trouver beaux ?  fi ce  n’eft  
 l’unité de deflein,  l’accord  parfait  des  diverfes  parties  
 entr’elles &  avec  le  tout,  la  peinture ou l’imitation  
 exaCte des objets des mouvemens, des fentimens,  
 des  pajjions,  la  convenance  des moyens  avec  leur  
 fin , un jufte rapport des  façons de penfer &   de s’exprimer  
 avec le but qu’on fe propofe. 
 C’eft  ainfi  que  l’entendement trouve  fes  plaifirs  
 dans la même fouree de  l’ëfprit &  de l’imagination  ;  
 il fe  plaît à méditer des vérités univerfelles qui comprennent  
 fous des  exprçffions  claires  une  multitude  
 de vérités particulières, &   dont les  conféquences fe  
 multiplient prefque  à  l’infini.  C’eft  ce  qui  fait pour  
 certains  efprits fes  charmes de  la Métaphyfique,  de 
 la  Géométrie  &:  des  fciençes  abftràitqs^  qui  fans  
 cela n’aûf oient rien que'dé rebutant. C ’efe çette forte  
 de beaiité  qui  fait  naître miffe' plaifirs  dé  la  découverte  
 dés  lois' géherâîës'qû.è route, la ' natufè1. Ôbferve  
 avec une fidélité inviolable ,.‘dedà contemplation des  
 fcaufés fëcôfides  qiti fe divërfifién^ àTinfefeîiahs  leurs  
 e f f e t s . q u i  toutes  font  foiimïi£S ,'jî ifefe  iiiffque  &   
 première  caufë. 
 L’on peut  étendre  ce  principe  de nqs(.plaifirs.&   
 fa privation^ foüfç'e de nos  peinés, $ir -'felR ie^plgets  
 qui  font du  réffôrTclé  l’efcrit.  On ,1e  trouvera.partout  
 ;  &.  s’il  èfe quélqifes  excéptions'.  elfes  nè font  
 dans lé fond qifapparentés", &:  peuvent, yenîr ou  de  
 préventiqhs arbitraires , fur lefquçliés, même’ il ne fe-  
 roit  pas  difficile  de  faire voir  que  lé  principe  n’eft  
 point altéré",.'Ou dé çefoüe nôtrè vue eft trop, bornée  
 fur des objets  fins &  délicats.. 
 3 °. Un troisième ordre de plaifirs &  dé peinés font  
 ceux qui  en affeCtant le coeur font haîtrècn lions tant  
 d’inclinatîq'ns otï dé pajjiôns fi  différentes;  La toùtce  
 en  eft dans le fentiment de nôtre ptrfcUïoffoîfde notre  
 imperfection ,  de  nos vertus ou de nos  vices. De tou-  
 tés -fes beàûtés, il en eft peu qui nous  touche plus que  
 celle de la'vertu qui conftïtüe notre perfection; &  de  
 toutes leS laideurs ,  il  n’en eft  point  à laquelle nous  
 foyons ou n.ôjis devions’êtfé plus fenfible.s qu’à çërië  
 du v ice .L’impur de nous-mêmes, cèttèpajpdn  ûnaturelle., 
  fi üniverfelle,‘ &  qui  eft, on peut le <lire;. la  
 bafé de routés nos  affeftions, nous  fait chercher fans  
 Ceffe en nous  &  hors de nous, des preuves de ce que  
 nous  fônïmes  à’ l’égard de  là peffeûion  ; mais ôîiles  
 prouver,? Sçroit-ce dans.l’ufage  de nos  facultés  eon-  
 venablë à' nôtre nature ? ou dans  un ufage  conforme  
 à l’intention du Créateur ?  ou  au but  que nous nous  
 propofons,  qui  eft  la  félicité? Réuniflbns  çës  trois  
 differentes  façôns d’enyifàger  la félicité ,  &   nous  y   
 trouverons  la  tegle  que:  nous  preferit  ce  trôifiemé  
 prineipe'dç'ftpspfeifirS^'deiips  peines.'C’eft  que  
 notre  perfection  &   la félicité  confident  à pofféder  6- d  
 faire ufage des fatuités propres a nous procurer un folid/i  
 bonheur ,  conforme aux intentions de notre auteur ,  ma-  
 nifeflées  dans 'la nature qu'il nous a donnée. 
 Dès-lofs  .nous  ne  pouvons  àppercevoir en  nous-  
 mêmes  çés  facilites  ,  &   feritir’que  nous  en  faifons  
 im  ufage" convenable à notre nature , à leur deftina-  
 tion &  à nôtre but, fan? éprouver une joie fecrete &   
 une fatisfa&ion intérieure, qui eft le plus agréable  de  
 tous  les  fentimens.  Celui-là  au  contraire  qui regardant  
 en lui-même n’ÿ  voit qu’imperfeaion  &   qu’un  
 abus continuel des .tâlens dont Dieu l’a doué, a  beau  
 s applaudir  tout  haut  d’être parvenu  par  fes  défor-  
 dres  au  comble de  la fortune , fon ame  èft  en fecret  
 déchirée par de cuifans  remords qui  lui mettent fans  
 ceffe devant les yeux fa honte, &  qui lui rendent fon  
 exiftence  haiffable. En  vain  pour  éfoiiffër  ce  fendillent. 
  douloureux,  ou pour  en  détourner fon attention  
 il  fe livre  aux plaifirs  des fens, il  s’occupe  il  
 le diftrait, il cherche  à fe  fuir  lui-même ;  il ne  peut  
 fe dérober à ce juge terrible qu’il porte en lui &  partout  
 avec lui. 
 , C’eft donc  encore un ufage modéré de  nos facul-  
 tes , foit du cçeur,  foit de l’ëfprit, qui en fait la  per-  
 tettion ; &   cet  ufage  fait naître  chez nous des fentimens  
 agréables,  d’oîi.fe.produifent  des  inclinations  
 q s P f jo n s  convenables à  notre nature. 
 4  .J  ai dit que l’amour de nous-mêmes nous faifoit  
 chercher hprs de  nous  des preuves de  notre perfection: 
  cela meme  nousTait  découvrir une quatrième  
 iource de  plaifirs &   de  peines  dans  le bonheur &  le 
 W Ê Ê Ê m   ■ ■ ■   perception  que  
 nous en  ayoqs.quand nons  en  fommes  les témoins. 
 I l   y  penfons fqrt.emeqt ,  fait une image  afc 
 fez l'emblabie-.à  fon ■ ■  pour  nous  toucher à-peu-  
 pres copim^ fi nous  éprouvions aaueUèmérit le ïentiment  
 meme tp,!c::o  reptcil-me i' Ou y  a-fâl quelque  
 operation,  fecrcte  deja /ïamre  c[ui npus  avant tous  
 ■ B B   vàuUVÏier  les  Uns 
 m x  aufçes  en nous rendant .Çnlibles  auxiiens &  aux  
 mauxde nds femUaBlesT Quoi qu'ifen S t  , 1a chofe  
 «S fm ^ t^ p té t t e .fq fp è A d u ' parJ’ail  
 fe  manifefee.infeilliblenrenfedansi  t ^ e s  ïes'Occa-  
 fions  ou  rién  ne l ’empêché  de  fe' ‘devel&ppej;:il  fe  
 fe y é jitó^ ,  différens  
 iffiKSfc îi? rforetç itpImeéBi'téqBèlqîJèfeié çlfffp pr;n„  
 SffiÇrfÿl'iffiîS'dé ; qn e t  dqrgqur le.n)eçlrantpu pour  
 re8ar<k  £9^me  dans le. monde, dans 
 la  vue  de  les  rendr^. bons,  ou pour les mettre  hors  
 d’etat de nuire  aux  autres.  Cette fenfibilité n’eft pas  
 P,0^  îous ^es hommes ;  ceux qui pnt gagné notre  
 amitié  notre  eftime  par <ïe  bons pffices  ,  par  
 des qualités  eftimables,  pa rles  fentimens  réciproques; 
   ceux  qui  nous  font  attachés par "les  liens  du  
 faPe>?' de  l’habitude,  d’une  commune  patrie,  d’un  
 même parti,  d’une, même.p ro fe ff io n d ’une même,  
 religion , tous  ceux-là  ont  différens  droits  lur notre  
 fentiment.  Il s’étend  jufqu’aux  carafteres  de  roman  
 ou de tragédie ; nous  prenons, part au  bien  &  au mal  
 qui leur arrive , plus encore fi nous fommes  convaincus  
 que ces  caractères font vrais.  De-là  les  charmes  
 de l’Hiftoire , qui en nous mettant fous  les  yeux  des  
 tableaux  de l’humanité,.nous touche &  nous émeut à  
 ce  point  précis de  vivacité  qui fait naître  les fenti-  
 mens  agréables.  De-là en un mot toutes  les inclinations  
 &  les pajjions qui nous affeûent fi aifémentpar  
 une fuite de notre fenfibilîté  pour le  genre humain. 
 Telles  font  les  fources  de  nos  fentimens  variés  
 fuivant les  différentes  fortes  d’objets  qui  nous  plai-  
 fent par eux-mêmes &  que l’on peut appeller les biens  
 agréables  ;  mais  il  en eft  d’autres  qui  nous  portent  
 versies biens  utiles,  c’eft4 -dire  vers  des  objets  qui  
 fens  produire  immédiatement  en  nous  ce?  biens  
 agréables ,  fervent  à nous en procurer  ou à nous  en  
 alfurer la jouiftànce.  On peut  les  réduire  fous  trois  
 chefs.:  le defir  de la, gloire , le pouvoir, les richefles.  
 Nous  avons  vû  déjà  que  tout  ce  qui  femble  nous  
 prouver que nous ayons quelque perfeÛion, ne peut  
 manquer dè nous  plaire :  de-là le  cas  que  nous  fai-  
 fpns. de  l’approbation,  de  l’amour ,.d ë l’eftime  des  
 eloges des autres :  de-là  les  fentimens  d’honneur  Pu  
 de confufion :  de-là l’idée que nous nous formons du  
 pouvoir, du crédit qui  flattent la  vanité  de  l’ambitieux  
 , &  qui, ainfi que les richefles, ne font envifasés  
 par l’homme fage que  comme un moyen de parvenir  
 H quelque  choie de mieux. 
 Mais  il  n’arrive que  trop  fouvent  que  l’on defire  
 ces. biens utiles pour eux-memes, en confondant ainfi  
 le moyen avec  la fin. L ’on veut  à  tout prix  fe  faire  
 une réputation bonne ou mauvaifé ; l’on ne voit dans  
 les honneurs rien au-delà des honneurs mêmes ; l’oii  
 defire les  richefles  pour les pofféder &  non pour  en  
 jouir. Se livrer ainfi à des pajjions auffi inutiles qu’ elles  
 font,  dangereufes  ,  c’eft  fe  rendre  femblable  à  ces  
 malheureux  qui  paffent  leur  trifte v ie  à fouiller  les  
 entrailles de la terre  pour  en tirer des  richefles dont  
 la jouiffance  eft refervée à d’autres.  Il faut en conven 
 ir, Cet abus des biens  utiles vient  fouvent de l’édu-  
 cation ,  de la coutume,  des  habitudes , des fociétés  
 qu’on fréquente qui  font dans  l’ame  d’étranges  affo-  
 ciations d’idées , d’où naiffent des plaifirs &  des  peines  
 ,  des goûts  ou  des  averfions,  des  inclinations  ,  
 pajjions pour  des  objets  par  eux-mêmes très-in-  
 différons. A  l’imitation de  ceux avec qui nous vivons,  
 nous attachons notre bonheur à l’idée de la pofleflion  
 d’un bien frivole qui nous  enlevé par-là toute  notre  
 tranquillité ; nous  le  çhériffons avec une pajjion qui  
 étonne ceux qui ne font pas  attention que  la Iphere  
 de nos penfées &  de nos defirs  eft hornée-ià.