
 
        
         
		moins  regardé  comme  des  êtres  intelligens  oui  fe  
 connoiflent eux-mêmes, qui obéifîentaux ordres de  
 D ieu ,  qui avancent ou retardent leurs courfes,  ainli  
 qu’il  le  leur  prefcrit.  Origène  va  encore  plus  loin,  
 8c il foupçonne que les aftres ont la liberté de pécher  
 &  de  fe repentir de leurs fautes.  Sans doute que lui',  
 qui allégorifoit toutes chofes ,  prenoit à  la lettre ce  
 paffage  de Job  :  les deux  & les ajlres ne font pas purs  
 devant Dieu.  Que  d’erreurs  groflîeres  font  nées  de  
 l’ignorance de l’Aftronomie !  combien les découvertes  
 modernes nous ont dévoilé de vérités  capitales  ,  
 de points importans ! 
 Les  peuples les  plus anciens  du  nord  8c  du fud,  
 les Suèves, les Arabes ,  les  Africains,  qui  ont vécu  
 long-tems fans être civilifés,  adoroient tous les corps  
 céleftes.  M. Sale, auteur anglois,  entièrement verfé  
 dans l’hiftoire des Arabes  ,  rapporte qu’après de longues  
 obfervations 8c expériences fur les changemens  
 qui  furviennent dans  l’air,  ces  peuples attribuèrent  
 enfin aux étoiles une puiflance divine.  Les Chinois,  
 les Péruviens  8c les Méxicains paroilTent  aulïi avoir  
 d’abord adoré les corps céleftes; actuellement même  
 les  Chinois lettrés qui  forment une feéte  particuliere, 
  femblent fe faire une  divinité d’une certaine vertu  
 répandue  dans  l’univers  ,  &   fur-tout  dans  le  ciel  
 matériel. 
 En  un mot,  toute l’antiquité  eft unanime  fur  ce  
 point  ,  8c  elle  nous  apprend  que  le  premier culte  
 religieux rendu à des créatures,  a eu pour objet les  
 corps  céleftes  ;  c’étoit  une  vérité  fi  évidente &  'fi  
 univerfellement reconnue, que Critius fameux athée,  
 a  été  obligé  de l’admettre.  Il ne peut y  avoir que  la  
 force de la vérité qui  lui  ait arraché  cet aveu,  puif-  
 que cela  même  détruit entièrement  fon fyftème fur  
 l’origine de la religion ;  voici le paflage. 
 »  II y   eu un  tems où l’homme  vivoit en fauvage ,  
 » fans lois, fans gouvernement,  miniftre  8c  inftru-  
 » ment  de la violence  ,  où la vertu n’avoit point  de  
 » récompenfe,  ni  le vice  de  châtiment.  Les lois  ci-  
 » viles furent  inventées pour refréner le mal ;  alors  
 »  la  juftice  préfida  à  la  conduite  du  genre  humain.  
 » La force devint l’efciave du droit, &  un châtiment  
 » inexorable pourfuivitle coupable; ne pouvant plus  
 »  déformais violer ouvertement la juftice,   leshom-  
 » mes  confpirerent  fecretement  pour  trouver  le  
 » moyen  de  nuire  aux  autres.  Quelque  politique  
 » rufé, habile dans la connoiftance du coeur humain,  
 » imagina  de  combattre  ce  complot  par  un autre ,  
 » en  inventant quelque  nouveau  principe,  capable  
 »  de tenir dans  la  crainte les méchans  ,  lorfque mê-  
 » me  ils  diroient  ,  penferoient  ou  feroient  du  mal  
 »  en fecret ;  c’eft ce  qu’il exécuta  en propofant  aux  
 » peuples la créance d’un Dieu immortel, être d’une  
 » connoiftance  fans bornes, d’une nature  fupérieure  
 » 8c  éminente.  Il  leur dit  que ce Dieu pouvoit  en-  
 » tendre &  voir  tout ce que les mortels faifoient 8c  
 « difoient ici bas,  8c que la première idée  du crime  
 » le plus caché ne pouvoit point’fe dérober à la con-  
 » noiffance  d’un être,  dont la connoiftance étoit l’ef-  
 » fence même de fa nature';  c’eft ainfi que notre poft  
 litique  en  inculquant  ces notions ,  devint l’auteur  
 »  d’une doctrine merveilleufementféduifante, tandis  
 » qu’il cachoit la vérité fous le voile brodé de  la fic-  
 » tion ;  mais  pour  ajouter  la  terreur  au  refpeâ,  il  
 »  leur  dit que  les  dieux  habitoient  les  lieux  confa-  
 »  crés  à tous  les phantômes &  à ces horreurs  pani-  
 » ques,  que les hommes ont été fi ingénieux à ima-  
 »  giner pour s’épouvanter eux-mêmes,  ajoutant des  
 » miferes  imaginaires  à  une vie  déjà  furchargée  de  
 » maux.  Ces  lieux  où la  lumière  foudroyante  des  
 » météores enflammés » accompagnée des éclats hor-  
 v ribles  du  tonnere,  traverfe  la  voûte  étoilée  des  
 i*  cieux, l’ouvrage admirable de ce vieux &  fage ar-  
 » chite&e, le tems ou les cohortes aflociçes  des fphe- 
 1  »  res  lumineufes,  rempliflent  leurs  révolutions  ré- 
 I  »  gulieres 8c bienfaifantes, 8c d’où des pluies  rafrai- 
 I  »  chifîantes  defeendent pour  recréer  la  terre  alté-  
 » rée ;  telle fut l’habitation qu’il aftigna à fes dieux ,  
 » place propre à  l’exercice de leurs fondions ;  telles  
 » furent  les  terreurs  dont il  fe fervit pour prévenir  
 » les maux,  étouffer les défordres dans leur naiflan-  
 » c e ,  faire jouer le  reflort de fes lo is ,  8c introduire  
 » la  religion  fi  néceflaire  aux  magiftrats.  Tel  eft à  
 » mon  avis,  l’artifice  dont  on s’eft  fervi  pour  faire  
 » croire  à  des  hommes mortels,  qu’il  y   avoit  des  
 »  êtres immortels. 
 Ce  feroit  abufer  de  la patience du  leôeu r,  que  
 d’accumuler  les  citations ;  mais comme  l’Egypte 8c  
 IaaGrece, de  tous les pays, font ceux où la politique  
 8c l’économie  civile prirent les racines les plus profondes  
 8c  s’étendirent  de-là prefque  par-tout,  effacèrent  
 la mémoire de l’ancienne idolâtrie, par l'ido-*  
 lâtrie  plus  récente  de déifier les  hommes après  leur  
 mort, 8c que plufieurs auteurs modernes en ont conclu, 
  que ce dernier genre d’idolâtrie avoit été le premier  
 de tous  ;  je rapporterai ici  feulement  deux témoignages  
 de l’antiquité-,  pour prouver que l’adoration  
 des  corps céleftes a été  le premier genre d’idolâtrie  
 dans  ces  deux p ays,  aufîi-bien que  dans tous  
 les autres.  »  Il me  paroît,  dit Platon dans fon Cra-  
 » tylus, que  les premiers  hommes  qui  ont habité la  
 » Grece ,  n’avoient  point d’autres  dieux  que  ceux  
 » que  plufieurs  barbares  adorent  encore  a&uelle-  
 » ment ;  favoir,  le foleil, la lune,  la terre , les étoi-  
 » le s ,  les cieux ».  Par ces  nations barbares  ,  Platon  
 entend également, celles qui étoient civilifées 8c celles  
 qui ne l’étoient pas ;  favoir, les Perfes 8c les fau-  
 vages d’Afrique,  qui au  rapport  d’Hérodote,  adoroient  
 également les aftres, dont  la lumière  bienfai-  
 fante renouvelle toute la nature. 
 Le  fécond  témoignage  que  j’ai  à  rapporter ,  regarde  
 les Egyptiens, 8c il eft tiré du premier livre de  
 Diodore de Sicile.  » Les premiers hommes  ,  dit-il,  
 »  en parlant de  cette nation, levant les yeux vers le  
 » c ie l,  frappés de  crainte &  d’étonnement  à  la vue  
 » du  fpe&acle  de l’univers,  fuppoferent  que  le  fo-  
 » leil  8c  la  lune  en  étoient  les  principaux dieux 8c  
 » qu’ils  étoient  éternels  ».  La raifon  que cet hifto-  
 rien  rapporte  rend fa propofition  générale,  l’étend  
 à  toutes  les  nations  ,  8c  fait voir  qu’il croyoit  que  
 ce genre d’idolâtrie avoit été le premier en tout autre  
 lieu aufli-bien  qu’en Egypte. 
 En général,  les anciens croyoient que tout ce qui  
 fe meut de lui-même 8c d’une maniéré réglée ,  participe  
 bien  furement  à  la divinité,  8c que le  principe  
 intérieur par lequel il fe meut,  eft non-feulement  in-  
 créé,  mais encore exempt de toute altération.  Cela  
 fuppofé,  on  voit  que dans la  penfée où  étoient les  
 anciens ,  que les  aftres fe mouvoient  d’eux-mêmes,  
 ils  dévoient  néceflairement les regarder comme  des  
 dieux,  comme  les  auteurs  8c les  confervateurs  de  
 l’univers. 
 Au refte, c’étoient le foleil &  la lune, qui par leur  
 éclat 8c  leur lumière  fe  rendoient dignes  des principaux  
 hommages,  dont le peuple fuperftitieux hono-  
 roit les aftres.  Le  foleil fe  nommoit le  roi,  le maître  
 8c le J'ouverain; 8>C la lune la reine, laprincejfe du ciel.  
 Tous  les  autres  globes  lumineux pafloient  ou pour  
 leurs fujets, ou pour leurs confeillers, ou pour leurs  
 gardes,  ou pour  leur  armée.  L’Ecriture-fainte  paroît  
 elle-même  s’accommoder à  ce langage, en  rai-  
 fant  mention  de  la  milice  du  ciel,   à  qui le  peuple  
 offroit fes hommages. 
 Théodoret,  en  voulant piquer  les payens  fur le  
 culte qu’ils rendoient encore de fon tems aux aftres  ,  
 fait une  réfléxion bien  fenfée.  Le  fouverain  arbitre  
 de  la nature,  dit-il,  a doué  fes  ouvrages de toutes  
 les  perfections  dont  ils  étaient  fufccptibles  ;  mais 
 . comme  il a craint que l’homme fôible 8t timide n’en  
 fût  ébloüi,  il  a  entremêlé  ces  mêmes ouvrages  de  
 quelques  défauts 8c de quelques imperfections,  afin  
 que  d’un  côté  ce  qu’il y   a de  grand  8c de merveilleux  
 dans l’univers s’attirât notre admiration, &  que  
 de  l’autre  ,  cè  qui  s’y   trouve  d’incommode  8c  de  
 différence,  nous ôtât  la penfée  de lui rendre  aucun  
 culte divin.  Ainfi de  quelque  éclat,  de quelque  lumière  
 dont  brillent  le  foleil  8c  la  lune  ,  il  ne  faut  
 qu’un fimple  nuage pour effacer  l’un en plein midi,  
 oc  pour  obfcurcir  l’autre  pendant  les  plus  belles  
 nuits  de l’été.  Ainfi la terre eft une fourcê inépuifa-  
 ble de tréfors,  elle ne reflent  aucune vieillefle , elle  
 renouvelle  fes  libéralités en  faveur des hommes  laborieux  
 ;  mais de  peur qu’on  ne fût  tenté de  l’adorer  
 8c  de  lui  offrir  des  refpefls >  Dieu  en  a fait  un  
 théâtre des plus grandes agitations, le féjour des maladies  
 cruelles  8c  des  guerres  fanglantes.  Parmi  les  
 animaux utiles fe trouvent les  ferpens  venimeux, 8c  
 parmi  les  plantes  falutaires  fe  cueillent  des  herbes  
 qui  empoifonnent. 
 On  invoquoit  plus  particulièrement  le foleil  fur'  
 les hauts  lieux  ou toîts des maifons,  à la lumière 8c  
 en  plein jour :  on invoquoit  de la même maniéré la  
 lune  dans  les  bocages  8c  les  vallées,  à  l’ombre  &   
 pendant la nuit;  8c c’eft à ce culte fecret  qu’on doit  
 rapporter l’origine de  tant d’adions  indécentes,  de  
 tant de coutumes folles, de tantd’hiftoires impures,  
 dont il eft étonnant  que des hommes, d’ailleurs  fen-  
 fes 8c raifonnables,  ayent pû faire une matière de religion. 
  Mais  de quoi ne font  pas  capables  ceux qui  
 viennent  à  s’oublier  eux-mêmes,  8c qui font céder  
 la lumière de l’efprit aux rapides égaremens du coeur ?  
 A cette  adoration  des aftres  tenoit  celle du f eu ,  en  
 tant  qu’il eft le plus noble, des élémens,  8c une vive  
 image du foleil.  On ne voyoit même autrefois aucun  
 làcrifice ni aucune  cérémonie religieufe,  où il n’entrât  
 du feu.  Celui quifervoit  à parer les autels, 8c à  
 confumer  les  vittimes  qu’on  immoloit  aux  dieux,  
 etoit  traite avec beaucoup d’égard 8c  de diftinélion.  
 On feignoit qu’il avoit été apporté  du c iel, &  même  
 fur  l’autel  du  premier  temple que Zoroaftré  avoit  
 fait bâtir dans la ville de  Zix  en Médie.  On n’y  jet-  
 toit rien de gras  ni d’impur ; on n’ofoit  même le  regarder  
 fixément :  tanta gentium in rébus frivolis,  s’écrie  
 Pline, plerumque religio éjl.  Pour en impofer davantage  
 ,  les prêtres payens toujours fourbes  &im-  
 pofteurs,   entretenoient  ce feu fecrettement,  8c  faifoient  
 accroire  au  peuple, qu’il étoit  inaltérable  8>C  
 fe nourriffoit de lui-même.  Le lieu dit monde où l’on  
 revéroit davantage le  feu,  étoit la Perfe.  Il  y  avoit  
 des enclos fermés  de murailles  8c  fans  toît,  où  l’on  
 en faifoit affidument,  8c où le peuple fournis venoit  
 à  certaines heures  pour prier.  Les perfohnes qualifiées  
 fe  ruinoient à y  jetter  des  eftences  précieufes  
 &  des fleurs  odoriférantes.  Les  enclos qui fubfiftent  
 encore  peuvent  être  regardés  comme  les  plus  anciens  
 monumens de la fuperftition. 
 Ce qui embarrafîe les Savans fur  l’origine de l’idolâtrie  
 ,  c’eft  qu’on n’a  pas  fait  allez  d’attention  aux  
 degrés  par  lefqilels  l’idolâtrie  des  hommes  déifiés  
 après leur mort,  a fiqîplanté l’ancienne  8c primitive  
 idolâtrie des corps celeftes. Le  premier pas  vers l’a-  
 pothéofe  a  été de donner  aux héros &   aux bienfaiteurs  
 publics le nom de l’être qui étoit le plus eftimé  
 &  le plus révéré.  C’ eft ainfi qu’un roi  fut  appellé  le  
 foleil y  à  caufe  de  fa munificence ,  8c  une reine  la  
 lune y à caufe de fa beauté. C e même genre d’adulation  
 fubfifte encore parmi les nations orientales, quoique  
 dans un degré fubordonné ;  ces  titres  étant  aujourd’hui  
 plutôt un compliment civil, qu’un compliment  
 religieux.  A  mefure qu’un  genre  d’adulation fit des.  
 progrès,  on  retourna la phrafe,  8c  alors  la planete  
 l(ut appellée du nom  du héros,  afin  fans doute d’açêôUtui’îiér  
 pltfs  facilement  à  ce  nouveau  genre cl’a-  
 dorati'on , ce peuplé  déjà accoutumé  à celle des planètes. 
   Diodore de Sicile après avoir dit qué  le foleil  
 8c la  lune furent les premiers dieux d’Egypte, ajoute  
 qu’on àppella  le foleil du nom d’QJïris, 8c la lune du  
 nom d’Ifs. 
 Par cette maniéré d’introdiurë  un nouveau genre  
 d’idolâtrie,  l’ancienne &  la nouvéllefurent confondues  
 enfemblè.  On  peut  juger  de  l’excès  de  cette  
 cortfulîon par la favante colleftion de Voftîus,  fur la  
 théologie des payens, Où l’on voit de combien d’obf-  
 curites  on a  embrouillé  ce point  de  l’antiquité,  en  
 fe prôpofant de l’expliquer ,• dans ia fuppOfition qu’un  
 dé ces deüx  genres  d’idolâtrie,  n’étoit qu’une idée  
 fymboliqlie de l’autre. 
 M.  l’abbé Pluche,  dans  fon hiflôlre  du d ê l,  a inventé  
 un nouveau fyftème fiuTprigihé de l’idolâtrie.  
 Il  prétend  qiic  ce  ri’eft  point  l’admiration  du foleil  
 qui  a  fait  adorer  le  foleil  à la place de fon  auteur.  
 Jamais, dit-il, ce fpeétacle del’univërs n’a corrompu  
 les homniés ; jamais il ne les à détournés de ia penfée  
 d’uh  être moteur dé  tou t,  &   de  la  recon'noiflance  
 qu’ils doivent à une providence toujours féconde  en  
 nouvelles libéralités  ;  il  les  y   rappelle,  loin  de  les  
 en détouhter.  L’écriture fymboliqlie des Egyptiens;  
 fi  on l’en c ro it , par l’abus que la cupidité  en a fait,  
 eft la foiirCé du mal. Toutes lés nations s’y  forit em-  
 poifonnées, en recevant les cara&eres  de cette  écriture  
 fans en recevoir le fens. Une autre coriféquencc  
 de ce fyftème,  tout aiiflî naturelle,  é’eft que les  anciens  
 dieux  n’ont  point  été  des  hommes  réels ;  là  
 feUle  méprifé  des  figures  hiéroglyphiques  a  donné  
 haifiance aux dieux, aux déefles, aux métamorpho-  
 fés,  aux  augures,  8c  auX  oracles.  C’ert-là  ce qu’il  
 appelle rapporter toutes les branches de l’idolâtrie ù  
 une feule  8c même racine ;  mais  ce fyftème  eft  démenti  
 par les rîiyfteres fi  célébrés parmi  les payens ;  
 on  y  erlfeignoit avec foin que les dieux  étoient  des  
 hommes  déifiés  après  leur  mort.  M.  l’abbé  Pluche  
 tâche  de prouver fon fentiment par l’aiitOrité de Cicéron  
 , 8c Cicéron dit pofitivemént dans fes tiifcula-  
 nes,  que les  cieux font remplis du genre humain.  ïl  
 dit encore dails fon traité  de la nature des dieitx, que  
 les  dieux1  étoient  des  hommes  puiflahs  &; illultres,  
 qui avoient été  déifiés  après  leur mort.  Il rapporte  
 qu’Evhemerus eiiféigne où ils font enterrés, faits par-'  
 ler,  ajoute-t-il, de de qui s’enfeigne dans les  invite-*  
 res d’Eleufis  8t  de Samothrace.  Cependant malgré  
 des  preuves  fi  décifives, M.  l’abbé Pluche,  en parlant  
 des m yfteres,  prétend que ce ne font point des  
 dieux qu’il faut chercher fous ces enveloppes, qu’elles  
 font plutôt deftinées  à  nous apprendre  l’état des  
 chofes  qui  nous intéreflent ;  8c ces  chofes  qui nous  
 intéreflent né font, félon lui,  que le  fens dès fi°nres  
 qu’oil  y   rèpréfentoit,  réduit  aux  régleinens  du  labourage  
 encore informe  ,  aux avantages  de la paix,  
 &   à  la  juftice  qui  donne  droit  d’elperër  une meilleure  
 vie. 
 Mais pour renvêrfer de fond en comble tout le ly-  
 ftème de M.  l’abbé Pluche,  je vais rapporter un témoignage  
 décifif, tiré de deux des plus grands-peres  
 de l’Eghfe , 8c qui prouve que  l’hiérophante dans les  
 myftères même  d’Egypte,  où M.  l’abbé  Pluche  a  
 placé  le  heu  de  la feene,  enfeignoit  que  les  dieux  
 nationnaux  étoient des hommes qui avoient été déifiés  
 après leur mort.  Le trait dont il.s’agit eft du  te'ms  
 d’Alexandre,  lorfque l’Egypte n’avoit  point encore'  
 fuccé l’efprit fubtil 8c fpéculatif de la philofophie des  
 Grecs.  Ce  conquérant écrit à fa mere  que le  fuprenie  
 hiérophante  des myftères  égyptiens  lui  avoit  
 découvert en fecret les inftrutlions m y ftérieufes que  
 l’on y  donnôit,  concernant la nature  des  dieiix  nationnaux. 
   Saint Auguftin &   faint Cyprien nous ont  
 conferyé ce fait curieux del’hiftoirc ancienne ; voici