
 
        
         
		^ ±   A-» 
 Peste , f. f.  ( Hijl. anc. &  mod. ) 
 Voilà ce mal qui répand par-tout la  terreur , 
 Mal que le ciel en fa  fureur  
 Inventa pour punir Us crimes de la terre. 
 Je  ne  peindrai pas les rigueurs  de ces climats, où  
 cette cruelle  fille  de ladéeflë Néméfis,  defcendfur  
 les  villes  infortunées.  Cette  grande  deftruétrice  eft  
 née des bois empoifonnés de l’Ethiopie, des  matières  
 impures  du  grand C aire, 6c des  champs  empuantis  
 par des armées  de fauterelles , entafîes  6c putréfiées  
 en nombre innombrable. Les animaux échappent à fa  
 terrible  rage  tandis  que  l’homme  leul  lui  fert  de  
 proie.  Elle  attire un nuage  de mort  fur  fa  coupable  
 demeure,  que  des vents tempérés 6c bienfail'ans ont  
 abandonnée. Tout alors n’eft que défaftre. LaSageffe  
 majeftueufe  détournefon  oeil vigilant;  l’épée &   la  
 balance  tombent des mains  de  la  Juftice  fans  fonctions  
 ; le commerce ne  porte  plus fes fecours  utiles ;  
 l’herbe croît dans les rues dépeuplées ; les  demeures  
 des hommes fe changent en  des  lieux pires que  les  
 déferts  fauvages ;  perfonne ne fe montre, fi ce  n’eft  
 quelque  malheureux  frappé  de  phrénéfie  qui  brife  
 fes  liens, 6c qui s’échappe  de la maifon fatale, féjour  
 funefte  de  l’horreur. La  porte qui  n’eft  pas  encore  
 infeftée,  n’ofe  tourner  fur  fes  gonds, elle  craint  la  
 fociété, les  amis,  les  parens, les  enfans mêmes  de  
 la  maifon. L’amour  éteint par le malheur, oublie  le  
 tendre lien 6c le doux engagement du coeur fenfible ;  
 le  firmament &   l’air qui  animent tout, font infeôés  
 des  traits  de  la  mort ;  chacun  en  eft  frappé  à  fon  
 tour,  fans  recevoir  ni  foins  ni  derniers  adieux, 6c  
 fans  que  perfonne ordonne fon  trifte cercueil : ainfi  
 le noir Defefpoir étend fon aile fiinebre fur les villes  
 terraflees, tandis que pour achever la fcene de d é f lation  
 , les  gardes  inexorables difperfés  tout-autour,  
 refùl'ent  toute  retraite,  6c  donnent  une  mort  plus  
 douce  au malheureux qui la fi-iit. 
 Les  annales  de  l’hiftoire  font  mention  de  deux  
 pelles  à  jamais  mémorables  ,  6c  qui  ravagèrent  le  
 monde, l’une 431  ans avant  Jefus-Chrift, 6c l’autre  
 dans  le  xiv.  fiecle de  l’ere chrétienne. Thucydide,  
 Diodore  de Sicile, 6c Plutarque,  vous  inftruiront  
 fort  au  long  de  la  première,  qui  parcourut  une  
 Vafte  étendue de pays, 6c dépeupla la Grece fur fon  
 paffage ,  fous te régné  d’Artaxercès  Longue - main ;  
 cette pelle commença en Ethiopie ; d’où elle  defcen-  
 dit  en  Lybie,  en Egypte,  en  Judée,  en Phénicie,  
 en S yrie, dans  tout  l’empire de Perfe, 6c fondit  en-  
 iùite dans l’Attique, &  particulièrement fur Athènes.  
 Thucydide qui en fut attaqué lui-même,  en a décrit  
 expreffément  les 'circonftances  6c  les  fymptômes,  
 afin, dit-il,  qu’une  relation  exaéle  de  cette affreufe  
 maladie,  puiflë fervir  d’inftruclionàla  poftérité  fi  
 un pareil malheur arrivoit une fécondé fois. 
 « Premièrement, dit  cet  hiftorien ( liv.  IL   de  la  
 » guerre du Péloponnèfe) ,   cette année fut exempte  de  
 »toute  autre maladie, &lorfqu’il  en  arrivoit  quel-  
 » qu’une, elle  dégénéroit en celle-ci ; à  ceux qui fe  
 » portaient  bien,  elle  prenoit  fubitement  par  un  
 » grand mal de tête, avec des yeux rouges 6c enflam-  
 » més, la langue 6c le gofier fanglans, une haleine in-  
 » fecle,une refpirationdifficile fuivie d’éternuemens  
 » &  d’une  voix  rauque. De - là defcendant  dans  la  
 » poitrine,  elle excitait une  toux  violente :  quand  
 » elle  attaquoit l’eftomac  elle  le faifoit  foulever, & 
 » caufoit desvomiffemens de toute forte de bile avec  
 » beaucoup  de  fatigue.  La  plupart  des  malades  
 » avoient  un hoquet  fuivi de  convulfions  qui  s’ap-  
 » paifoient  aux uns pendant  la maladie, aux autres  
 » long-tems après. Le  corps rougeâtre &  livide étoit  
 » couvert de puftules, 6c ne paroiffoit pas fort chaud  
 .» au toucher , mais brûloit tellement au-dedans qu’-  
 » on ne pouvoit fouffrir aucunç  couverture, fi bien 
 » qu’il falloit demeurer nud.  On prenoit  lin  plaifif  
 » infini à fe  plonger  dans  l’eau  froide,  &   plufieurs  
 • » qu’on n’avoit pas  eu  foin  de  garder,  fe précipite-  
 »  rent  dans, des  puits, prefles  d’une  foif qu’on  ne  
 » pouvoit  éteindre,  foit  qu’on  but  peu  ou  beau-  
 »coup. 
 » Ces fymptômes  étoient fuivis  de veilles 6c d’a-  
 » gitations continuelles, fans que le  corps s’affoiblît,  
 » tant que la maladie  étoit  dans  fa force ; la  plupart  
 » mouroient  au  feptieme  ou  au  neuvième  jour  dë  
 » l’ardeur  qui les brûloit, fans  que leurs  forces fuf-  
 » fent  beaucoup diminuées. Si l’on pafloit ce terme i  
 » la maladie defcendoit dans le bas-ventre, &  ulcé-  
 » rant les  inteftins ,  caufoit  une  diarrhée immodé-  
 » ré e , qui faifoit mourir les malades  d’épuifement ;  
 » car  la  maladie attaquoit fucceffivement  toutes  les  
 » parties  du  corps,  commençant  parla  tête,  6c  fe  
 » portant, fi  on échappoit, aux  extrémités.  Le  mal  
 » le jettoit tantôt fur les bourfes, tantôt fur les doigts  
 »  des  piés  6c  des  mains ;  plufieurs  n’en  guérirent  
 » qu’en perdant l’ufage de ces  parties ;  6c quelques-  
 » uns même  celui de  la  vue :  quelquefois  revenant  
 » en fanté, on perdoit la mémoire jufqu’à fe mécon-  
 » noître  foi-même 6c fes amis. 
 » La maladie donc, ajoute-t-il peu  après, laiffant  
 »  à  part beaucoup d’accidens  extraordinaires,  diffé-  
 » rens  dans les  différens fujets,  étoit en général  ac-  
 »  compagnée des  fymptômes  dont  nous  venons  de  
 »  faire l’hiftoire. Quelques-uns  périrent faute  de  fe-  
 » cours, &  d’autres  quoiqu’on  en  eût beaucoup  de  
 »  foin ;  on  ne  trouva  point  de  remede  qui pût  les  
 » foulager, car ce  qui faifoit du bien aux uns nuifoit  
 » aux  autres ;  enfin  la  contagion  gagnoit  ceux  qui  
 » affiftoient  les malades,  6c c’eft  ce  qui  produifit  le  
 » plus grand  défdftré ». 
 Hippocrate  qui  s’y   dévoua noblement, a fait  de  
 fon côté une courte defcription de  cette pefle en médecin  
 , 6c Lucrèce  en grand poëfe.  Artaxercès  avoit  
 invité  Hippocrate  de  venir  dans  fes  états,  traiter  
 ceux  qui étoient  attaqués  de  cette  cruelle  maladie.  
 Ce prince y  joignit  les  offres  les plus  avantageufes,  
 ne  mettant  du côté  de  l’intérêt  aucune borne  à  fes  
 récompenfes, 6c  du  côté  de  l’honneur  promettant  
 de  l’égaler  à  ce  qu’il y  avoit de  perfonnes  les  plus  
 confidérables  à fa  cour ;  mais tout  l’éclat de  l’or 6c  
 des dignités ne fit pas la moindre impreffion fur l’ame  
 d’Hippocrate. Sa réponfe fut qu’il  était fans  befoins  
 &fans defirs, qu’il devoit fes foins à fes  concitoyens,  
 &  qu’il  ne  devoit rien aux barbares  ennemis déclarés  
 des Grecs., 
 En effet,  dès qu’il fut mandé à Athènes  il s’y  rendit  
 , 6c ne fortit point  de la ville  que la pefle ne  fut  
 ceffée.  Il fe  confacra  tout entier au  fervice  des  malades  
 , 6c pour fe multiplier  en  quelque forte, il envoya  
 plufieurs  de fes éleves dans tout le pays, après  
 les  avoir  inftruits  de  la maniéré  dont  ils  dévoient  
 traiter  les peftiférés. Un zele fi généreux pénétra  les  
 Athéniens  de  la  reconnoiffance  la plus vive. Ils  ordonnèrent  
 par  un  decret public, qu’Hippocrate  fe - .  
 roit  initié aux grands m yfteres, de la même maniéré  
 que  l’avoit été Hercule, le fils de Jupiter ;  qu’on  lui  
 donneroit une  couronne d’or  de  la  valeur  de  mille  
 ftatères, 6c que le decret  qui la  lui  accordoit  feroit  
 lu  à haute voix par im héraut  dans les jeux  publics,  
 à la grande fête des panathénées; qu’il auroit en  outre  
 le  droit  de bourgeoifie,  6c  feroit nourri  dans le  
 prytanée  pendant  toute  fa  v ie , s’il le  vçuloit,  aux  
 dépens  de  l’état ;  enfin  que  les  enfans  de  ceux  de  -  
 Gôs,  dont la ville  avoit  porté un fi  grand homme ,  
 pourroient être  nourris 6c  élevés  à Athènes  comme  
 s’ils  y   étoient nés. 
 Il ne manqua à  la gloire d’Hippocrate que d’avoir  
 eu la fatisfa&ion de compter Périclès parmi les malades  
 auxquels  il  fauva la vie.  Ce grand capitaine, le  
 premier 
 P  E   S 
 premier., homme  de  l ’état-,  dont  la .fageffe  6c l’habileté  
 avoient foutenu le poids dés. affaires  de la république'pendant  
 quarante  ans  ,  après  avoir  perdu  
 tous fes parens  de  la pefle, en mourût lui-même entre  
 les bras d’Hippocrate, &  malgré tous les fecours  
 de fon art. 
 Mais  quelque cruelle  qu’ait été là pefle dont  nous  
 Venons  d'é  parler,  elle  le fut  encore  moins  par  fa  
 violence  6c par fon étendue, que  celle  qui  ravagea  
 le monde vers l’an  1346  de Jefus-Chrift. La defcription  
 qu’en font  les  hiftoriens  contemporains  au défaut  
 d’obfervateurs  médecins  qui  nous  manquent  
 ic i, ne 'fe  peut lire fans frémir. La contagion  fut générale  
 dans tout notre hémifphere.  Elle  commença  
 au royaume de Cathay, partie  feptentrionale  de  lâ  
 Chine, par une vapeur de  feu, dit-on, horriblement  
 puante,-qui infeéfa  l’air , &   confuma avec une prom-  
 titude  incroyable  deux  cens  lieues  de  pays ;  elle  
 parcourut le refte  de  l’Afie, paffa  en Grece, de - là  
 en Afrique, 6c finalement.en Europe,  qu’elle  facca-  
 gea  jufqu’à  l’extrémité du nord.  Ici elle  emporta  la  
 vingtième, lâ elle détruifit  la  quinzième partie  des  
 habitans ;  ailleurs  ce fut la huitième  partie,  comme  
 en  France,  ailleurs même,  comme  en Angleterre,  
 le  tiers, ou  le  quart  des  habitans ;  j’en  parle  ainfi  
 d’après  le  témoignage  des  écrivains  des  deux  nations. 
 La  derniere  pefle  qu’on  ait vûe  en  Europe ;  eft  
 celle de Marfeille en  17x0 6c  1721. Elle enleva dans  
 .cette feule ville environ  cinquante mille perfonnes ;  
 la mémoire  en  eft  encore  récente. 
 Toutes nos connoiffances fur cette horrible maladie  
 fe bornent à favoir qu’elle  fe répand  par  contagion; 
  qu’elle eft la plus  aiguë  des  maladies  inflammatoires; 
   qu’elle  eft  accompagnée  de  fymptômes  
 très-ditférens 6c très-variés ; qu’elle fe  termine  par  
 des tumeurs  vers  les parties  glanduleufes  qui  dégénèrent  
 en abfcès ;  que  cette  crife  eft  d’autant  plus  
 falutaire qu’elle eft prompte ; que  ce mal a fes  tems  
 de décroiffement  6c  de  diminution, 6c qu’alors  les  
 fecours de l’art font d’une grande utilité ; que la contagion  
 s’adoucit 6c fe détruit par  de  grands  froids ;  
 qu’en conféquence elle eft plus rare &  fait moins de  
 ravages  dans  les  pays  fepteritrioriaux que  dans  les  
 pays méridionaux ; qu’elle marche quelquefois  feule  
 , mais qu’elle  a plus  communément pour  compagnes  
 deux  autres  fléaux non moins  redoutables, la  
 guerre  6c  la famine ; 6c  dans ce  cas fi  elle n’attaque  
 pas  les  hommes,  les  beftiaux  en  font  la  viftime :  
 voilà les faits dont l’hiftoire  ne fournit que  trop  de  
 triftes monumenSi 
 Il femble que le meilleur moyen de fe  garantir de  
 . la pefle,  feroit  de  fuir de bonne heure  les  lieux  où  
 elle  régné. Si  cela  n’eft pas  poffible,  il  faut  tâcher  
 de fe féqueftrer dans un domicile  convenable,  bien  
 aéré, y  éviter,  autant qü’on p eut,  toute  communication  
 au-dehors ; vivre fans  frayeur, ufer d’acides,  
 en particulier de citrons,  fe  gargarifer de  vinaigre,  
 s’en laver le corps, les hardes, &c. purifier l’air  des  
 àppartemens  par  la vapeur du bois 6c des  baies  de  
 genievre, ufer d’alimens oppofés à la pourriture, 6c  
 pour boiffon de  vins  blancs  acidulés pâr préférence  
 ûux autres. 
 Ce ne font pas les livres qui manquent fur la pefle,  
 le  nombre en eft  fi  confidérable,  que la  colle&ion  
 des  auteurs qui en  ont fait  des traités  exprès,  for-  
 meroitune petite bibliothèque. La feule pefle de Marfeille  
 a  produit plus de deux cens volumes  qui font  
 déjà tombés dans l’oubli; en un mot, de  tant  d’ouvrages  
 fur cette horrible  maladie,  à  peine en peut-  
 on compter une douzaine qui méritent d’être recherchés. 
 Celui de Mindererus, de pefUUntia ,  Aug. Vindel.  
 1608, in-8°. n’eft pas méprifàble.  Il faut lui joindre  
 Tome X IL 
 P _E  S  45? 
 Meadf Richard )  a  shojrt difcourfe.conceming peflilen-  
 tial contagion, Lond.  172.0 ,'z n-8°. Hodge,  de pefle.  
 Maratdri  f  Ludov. Anton, fd c l governo medico e poli-  
 tico delle'pefle, in Brefcia  1721,  in-8°'. &  lë traité fui-  
 vant  qui  eft  fort  rare.  Vander  M y e ,  de  morbis  &  
 fymptomdtibus popülaribiis Brïdanis ,  Umpor'e  obfidio-  
 nis  hujüs,urbis grajfantibus,  Antiierp.  1627;  i n - f 3'.  
 niais  j’bubliôis  que  je ne me  fuis  propofé  dans  cet  
 article  qüe de traiter de  la  pefle  en hiftorien; ainfi,  
 voye^ P e s t e  , Médec. ( Le chevalier d e   J à u Co r t . ) 
 P e s t e   d ’O r i e n t ,   du V L  flecle,  ÇEUJt.delaMcd.')  
 tette  affreufe pefle  a  été décrite  par  Evagre  &   par  
 Procopfe.  Voici lé  précis  dé  leurs  dèfcriptions  ;  je  
 commence par celle d’Evagrë. 
 Selon  cet hiftorien  êccléfiaftiqüe,  là pefle dont  il  
 s’agit arriva l’an de J. C.  5 4 3 ,6c fit pendant cinquante 
 deux  ans  un  horrible ravage prefque  dans  toute  
 l’etendué de la terré ;  elle commença deux ans après  
 que  la ville  d’Antioche  eut été prife  par les Perfes j  
 6c parut en quelques chofes fémblable à la pefle d’A-  
 thenes qui a été décrite pàr Thucydide,  6t en  d’aii-  
 tres  chofes fort différente; 
 Elle tomba d’abord fur l’Ethiopie,  6c de-là fe répandit  
 fucceffivement  fur prefque  toutes  les parties  
 de l’univers.  Quelques villes en furent fi cruellement  
 affligées,  qu’elles perdirént tous leurs habitans.  I l y   
 avoir des perfonnes qii’ëllé attaquoit par la tête, par  
 le vifagé,  par les yeiix qui paroiffbient extrêmement  
 enflammés i, puis defcendant à  la gorge,  elle les  emportait  
 impitoyablement: d’autres avoient des dévoie-  
 meris ;  d’autrés  dés abfcès  dans l’aine ;  d’autres  des  
 fièvres dont ils mouroienf,  le fécond ou le troifieme  
 jour ;  d’autres tomboient en délire  avant que de périr  
 ;  d’autres en pétillant,  avoient tbût le ebrps couvert  
 de puftules 6c de charbons.  Quelques-iins âyant  
 été attaqués une bu deux fois de ce fléau, 6c y  ayant  
 réfifté, y  fuccomboierit la troifieme fois. 
 Il  y   avoit différentes  maniérés  &   fort difficiles  à  
 comprendre,  de contra&er cette maladie.  Plufieurs  
 moururent poiir être feulement entrés dans des mai-  
 fons  infeftéés ;  d’autres pour  avoir légèrement touché  
 des malades,  &  d’autres  fans aucune  communication  
 ,  prenoient  le mai  dans les  campagnes  6c les  
 placés publiques.  Quelques-uns s’en preferverent en  
 fuyant des villes  peftiférées,  6c ne  laiffërent pas  de  
 communiquer la peflè.  Quelques autres demeurèrent  
 au milieu des malades, fans crainte 6c fans y  trouver  
 la mort,  6c même  fans  accident.  Evagre  rapporté  
 qu’il  étudioit la grammaire,  lorfque cette pefle commença; 
   qu’il  en fut  attaqué;  mais  qu’il perdit  dans  
 la fuite fa femme,  quelques-uns de fes enfànS, de fes  
 parens ;  6c de fes efclaves.- 
 Procope nous  a donné  la defcription dë cétte maladie  
 ,  avec  autant  d’art  que  d’exâ&itude,  6c auffi-  
 bien que s’il avoit été médecin de  profeffion.  Selori  
 lu i,  ce fléau confuma prefque tout le genre humain:  
 11 n’affligea  pas une feule partie de la terre,  &  ce ne  
 fut pas dans une  fâifon particulière dë  l’année,  niais  
 dans  toutes  indiftinélément.  Elle n’épargnà, ni condition  
 , ni âg e, ni fexe, quoiqu’il y  ait urte fi grande  
 diverfité  dans  les  tempéramens  6c  dans  les  difpofi-  
 tions;  La différente fitùatioil des  lieux,  la diete, les  
 complexions ,  les  moeurs,  rien  ne  put  fauver  les  
 malades. 
 Elle commença parmi les Egyptiens de Pélufe,  fe  
 répandit à Alexandrie,  dans le refté de l’Egypte, 6c  
 dans  ces  parties de  la Paleftine,  qui  confinent à  l’Egypte; 
   enfûite  avançant toujours  avec une marche  
 réglée ;  elle parcourut le monde,  comme  fi elle eût  
 eu pour but de travailler fucceffivement à tout ravager; 
   La terre-ferme,  lès îles ; les cavernes ,  les fom-  
 mets des montagnes,  tous les lieux oh il y  avoit des  
 hommes en furent infe&és. Des côtes de la mer, elle  
 s’étendit fur l.es terres,  6c quand elle fautoit par^def-,  
 M m m