
 
        
         
		loi influe  fur toutes  [les  fenfations;  il eft  des  couleurs  
 dont l’affortiflement plaît  aux y eu x,  c’eft que  
 dans  le fond de  la rétine, elles  forment, pour  ainfi  
 dire, une confonnance ; cette même loi s’étend apparemment  
 aux  êtres  qui  font  à portée d’agir fur l’odorat  
 8c fur le goût; leur agrément cara&érife , il eft  
 vrai, ceux qui nous font falutaires, mais il ne paroit  
 point  parfaitement  proportionne  à  leur  degre  de  
 convenance  avec  la fante. 
 a0. Si le corps a fesplaifirs, l’efprit a aufïi les fiens ;  
 les occupations foit férieufes  foit frivoles, qui exercent  
 fa  pénétration fans le  fatiguer,  font accompagnées  
 d’un fentiment agréable. A  voir un joueur d’échecs  
 concentré en  liu-meme, &   infenfible  à  tout  
 ce  qui frappe  fes  yeux  &  fes  oreilles,  ne  le  croi-  
 roit-on pas intimement occupé du foin de  fa fortune  
 ou du falut  de  l’état? Ce  recueillement fi profond  a  
 pour  objet le plaifir d’exercer l’efprit par la pofition  
 d’une pièce  d’ivoire. C’efl  de  ce doux  exercice  de  
 l’efprit que  naît  l’agrément  des penfées  fines,  qui  
 de même que  labergere deVirgile, fe cachent autant  
 qu’il le faut pour  qu’on  ait le plaifir de les trouver.  
 Il y   a eu des hommes à  qui  on  a donné  le nom  de  
 philofophes, 8c  qui ont  cru que l’exercice  de l’efprit  
 n’étoit  agréable que  par la  réputation qu’on fe fiat-  
 toit d’en  recueillir. Mais tous les jours ne fe  livre-ton  
 pas  à  la lefture  &   à  la  réflexion,  fans  aucune  
 vue fur  l’avenir,  8c fans  autre deflein  que  de  remplir  
 le  moment  préfent ?  Si  on  fe  trouvoit  condamné  
 à  une  folitude  perpétuelle,  on  n’en  auroit  
 que  plus  de goût pour des  le&ures que la vanité ne  
 pourroit point mettre à profit. 
 30. Le coeur comme  l’efprit 8c le  corps a fes mou-  
 vemens  8c  eft  fou des plaifirs,  dès  qu’ils ne doivent  
 point  leur naiflance à la  vue  d’un mal  préfent  ou  à  
 venir. Tout objet eft fûr de nous plaire, dès que fon  
 impreflion confpire  avec  nos inclinations : une fpé-  
 culation morale  ou politique , peu amufante  dans la  
 jeunefle, intérefle  dans un  âge plus  avancé,  &  une  
 niftoire  galante  qui  ennuie  un  vieillard,  aura  des  
 charmes pour un  jeune  homme. Dans  la  peinture  
 que la Poéfie fait des paflîons, ce n’eft point la fidélité  
 du  portrait  qui  en  fait  le principal  agrément;  
 c’eft que telle eft leur contagion, qu’on ne peut guere  
 les  voir fans les reflentir  ; la trifteffe même  devient  
 quelquefois délicieufe,  par  cette  douceur fecrette,  
 attachée à toute émotion de l’ame. La tragédie divertit  
 d’autant mieux, qu’elle fait couler plus de larmes ;  
 tout  mouvement  de tendrefîe, d’amitié,  de  recon-  
 noiffance,  de  générofité  8c de bienveillance, eft un  
 fentiment  de plaifir :  aufli  tout  homme  né  bienfai-  
 fant  eft-il naturellement  gai,  8c  tout  homme  né  
 gai  eft-il naturellement  bienfaifant.  L’inquiétude ,  
 le chagrin,  la haine,  font des fentimens  qéceflaire-  
 ment  défagréables,  par  l’idée du  mal qui nous menace  
 ou nous afflige ; aufli tout homme malfaifant eft-  
 il  naturellement  trifte.  On  trouve  cependant  une  
 forte de douceur dans  le mouvement de l’ame,  qui  
 nous porte  à  afliirer notre confervation  &  notre félicité  
 ,  par  la  deftruôion  de  ce  qui  fait  obftacle ;  
 c ’eft qu’il y   a peu de  fentimens  qui  ne foient pour  
 ainfi  dire  compofés,  8c  ou il  n’entre quelque portion  
 d’amour ;  on  ne  hait  guere, que parce  qu’on  
 aime. 
 40. -Enfin, il y  a du plaifir attaché à l’accomplifle-  
 ment  de  nos  devoirs  envers Dieu,  envers  nous-  
 mêmes  &  envers les autres. Epicure fier  d’avoir attaqué  
 le dogme  d’une  caufe  intelligente,  fe  flattoit  
 d’avoir anéanti une puiflance ennemie de notre bonheur. 
  Mais  pourquoi  nous former  cette idée fuper-  
 ftitieufe  d’un être  qui en nous  donnant des  goûts,  
 nous  offre  de  toutes parts des  fentimens agréables ;  
 qui  en nous compofant  de  divers facultés,  a voulu  
 qu’il  n’y   en  eût aucune  dont  l’exercice  ne  fût un 
 plaifir ?  Les biens que  nous  pofledons  font-ils donc  
 empoifonnés par l’idée que ce font des préfens d’une  
 intelligence bienfaifante ? N’en doivent-ils pas plutôt  
 recevoir un nouveau  prix, s’il  eft vrai que l’ame ne  
 foit  jamais  plus  tranquille  8c  plus  parfaite,  que  
 quand  elle  lent qu’elle  fait  de  ces  biens  un  ufage  
 conforme  aux  intentions  de fon auteur ?  Cette  idée  
 qui épure nos plaifirs, porte  le calme dans le coeur,  
 8c en  écarte  l’inquiétude  8c le  chagrin. Placés  dans  
 l’univers comme  dans le jardin d’Eden, fi  la  providence  
 nous défend l’ufage d’un fruit par l’impuiflan-  
 ce de  le cueillir, ou par les  inconvéniens qui y  font  
 attachés,  n’en acceptons pas  avec moins  de recon-  
 noiflance  ceux  qui  fe  préfentent  à  nous de  toutes  
 parts  ;  jouiflons de  ce qui nous eft offert, fans  nous  
 trouver malheureux  par  ce qui nous  eft  refufé :  le  
 defir  fe  nourrit  d’efpérance, 8c s’éteint par  l’impof-  
 fibilité d’atteindre à fon objet : nous devons à la puifi  
 fance  de D ieu ,  le tribut d’une foumiflion parfaite  à  
 tout  ce  qui  réfulte  de  l’établiffement  de  fes  lois ;  
 nous devons à fa fpgefle l’hommage d’une perfuafion  
 intime ; que fi nous étions admis à fes confeils, nous  
 applaudirions aux  raifons  de  fa conduite.  Ces fentimens  
 refpeftueux, un fentiment de plaifir les accompagne  
 , une heureufe tranquillité  les fuit. 
 Il  y   a  aufli du plaifir attaché à  l’accompliflement  
 de  nos  devoirs envers  nous-mêmes ;  le plaifir  naît  
 du  fein de  la vertu. Quoi de plus heureux que de  fe  
 plaire dans  une  fuite  d’occupations  convenables  à  
 fes  talens  8c  à  Ion  état?  La  fagefle  écarte  loin de  
 nous  le  chagrin, elle garantit  même  de  la douleur,  
 qui  dans  les tempéramens  bien conformés  ne  doit  
 guere  fa  naiflance  qu’aux  excès:  lorfqu’elle  ne  
 peut  la prévenir, elle en émoufle du moins l’impref-  
 fion,  toujours  d’autant  plus  forte  qu’on  y   oppofe  
 moins de  courage. Les  indiennes,  les fauvages, les  
 fanatiques marquent de la gaité dans le fein des douleurs  
 les plus vives ; ils  maîtrifent leur attention  au  
 point  de  la  détourner du fentiment  défagréable qui  
 les frappe,  &   de  la fixer fur le phantôme de perfection  
 auquel ils fe  dévouent.  Seroit-il poflîble  que la  
 railon 8c la  vertu apriffent de  l’ambition 8c  du  préjugé  
 à affoiblir aufli le  fentiment  de la douleur  par  
 d’heureufes  diverfions ? 
 Si nous voulons remplir tous  nos devoirs  envers  
 les  autres hommes, foyons  juftes 8c bienfaifans,  la  
 morale  nous  l’ordonne,  la  théorie  des  fentimens  
 nous y  invite ; l’injuftice, ce principe fatal des maux  
 du  genre humain ,   n’afflige  pas  feulement ceux  qui  
 en  font les viftimes ,  c’eft  une  forte de  ferpent qui  
 commence par déchirer le fein de  celui qui  le porte.  
 Elle  prend  naiflance dans  l’avidité  des  richefles  ou  
 dans  celle  des honneurs, 8c  en  fait  fortir avec  elle  
 un germe d’inquiétude  8c de chagrin.  L’habitude de  
 la juftice &   de  la  bienveillance  qui nous  rend  heureux  
 ,  principalement  par les mouvemens  de notre  
 coeur,  nous  le rend  aufli  par  les  fentimens  qu’elle  
 infpire  à  ceux  qui  nous  approchent;  un  homme  
 jufte &   bienfaifant,  qui ne v it  que pour  des  mouvemens  
 de bienveillance, eft aimé  8c  eftimé de tous  
 ceux  qui l’approchent. Si l’on a  dit  de la  louange,  
 qu’elle étoit pour  celui à qui elle s’adreflbit, la plus  
 agréable  de  toutes  les mufiques,  on  peut  dire  de  
 même  qu’il  n’eft point  de fpeftacle  plus  doux que  
 celui de fe voir aimé ; tous  les  objets  qui s’offriront  
 lui feront agréables, tous les mouvemens  qui s’élèveront  
 dans fon coeur, feront des plaifirs. 
 Il y  a plufieurs fortes de plaifirs ;  lavoir,  ceux du  
 corps 8c ceux de l’efprit, 8c ceux du coeur ; c’eft une  
 fuite de ce que  nous venons  de  dire. Il  fe  préfente  
 ici une queftion importante  ,  qui bien avant la naif-  
 fance d’Epicure 8c de Platon,  a partagé  le genre humain  
 en deux fefites différentes.  Les plaifirs des fens  
 l’emportent-ils fur ceux de l’ame ? Et parmi les plaifirs  
 de  l’ame,  ceux  de  l’efprit font-ils préférables  à  
 ceux  du coeur ?  Pour en juger,  imaginons-les entièrement  
 fép'arés  les' uns  des  autres  &  portés  à  leur  
 plus haut point de perfection.  Qu’un être, infenfible  
 a ceux de  l’efprit goûte  ceux du corps  dans toute là  
 durée ;  mais que prive  de toute connoiflancé,  il ne  
 fe  fouvienne  point de  ceux  qu’il  a  fentis,  qu’il  ne  
 prévôye point  ceux qu’il fentira,  &   que  renfermé  
 pour ainfi  dire  dans fon  écaille ,  tout  fon  bonheur  
 conlifte  dans  le fentiment  fourd 8c aveugle qui l’af-  
 feéte  pour  le  moment préfent.  Imaginons  au  contraire  
 , un homme mort à tous  les plaifirs des fens,  
 mais  ën  faveur  de  qui  fe  raflemblent  tous  ceux  de  
 l’efprit  8c  du  coeur ;  s’il eft  feul,  que  l’hiftoire,  la  
 géométrie,  les belles-lettres,  lui fourniflent de belles  
 idées,  8t  lui marquent chaque moment de fa retraite  
 par  de  nouveaux témoignages  de  la  force 8c  
 de l’étendue  de fon  efprit ;  s’il fe livre  à la fociété,  
 qiie  l’amitié,  que la g loire,  compagne naturelle  de  
 la vertu,  lui fourniflent hors de  lui des preuves toujours  
 renaiffantes  de la  grandeur &   de la beauté  de  
 Ion ame,  8>C que  dans le  fond  de  fon  coeur  fa conformité  
 à  la raifon foit toujours accompagnée d’une  
 joie fecrete  que  rien ne puifle  altérer ;  il me femble  
 qu’il eft  peu  d’hommes nés  fenfibles aux plaifirs de  
 l’efprit &  du corps ,  qui  placés  entre ces deux états  
 de  bonheur,  à-peu-près  comme  un philofophe  l’a  
 feint d’HercuIe, préféraflent au fort de l’être intelligent  
 la félicité d’une huitre. 
 Les plaifirs  du  corps ne font jamais plus  vifs  que  
 quand  ils  font des  remedes à la  douleur ;  c’eft l’ar-  
 aeiir  de  la  foif qui  décide  du plaifir qu’on reffent à  
 l’éteindre.  La plûpart des plaifirs du coeur Sc de l’efprit  
 ne font point altérés par ce mélange impur de la  
 douleur.  Ils l’emportent d ’ailleurs par leur agrément;  
 ce que la volupté a de  délicieux,  elle l’emprunte  de  
 l ’efprit  8c  dû  coeur ;  fans  leur fecours  elle  devient  
 bientôt fade 8c infipide à la fin.  Les plaifirs du corps  
 n’ont  guere  de durée, que  ce  qu’ils  en empruntent  
 d’un befoin paflàger ;  dès qu’ils vont au-delà, ils deviennent  
 des  germes de douleur ;  les plaifirs de l’efprit  
 8c du coeur leur font donc bien fupérieurs, n’euf  
 lent-ils  fur  eux  que  l’avantage  d’être  bien  plus  de  
 nature  à remplir le vuide de la vie. 
 . Mais parmi les plaifirs de l’efprit 8c du coeur, auxquels  
 donnerons-nous  la préférence  ?  Il me  femble  
 qu’il n’en  eft point de plus touchant, que ceux que  
 fait  naîtffc  dans  l’ame  l’idée  de  perfection ;  elle  eft  
 comme un  objet de notre  culte,  auquel on  facrifie  
 tous les  jours les  plus  grands établiflemens,  fa confidence  
 même &  fa  perfonne.  Pour fe garantir de la  
 flétrifliire  attachée  a  la  poltronnerie,  elle  a  précipité  
 dans le fein de  la mort des hommes,  flattes d’acheter  
 à  ce prix  la confervation de  ce qui leur étoit  
 cher.  C’eft elle  qui rend  les  indiennes  infenfibles à  
 l’horreur  de fe  brûler v iv e s ,  8c qui  leur ferme  les  
 yeux  fur tous  les chemins que  leur ouvre  la libéralité  
 &C la religion de  leur prince, 'pour les  dérober à  
 ce fupplice volontaire ;  les vertus, l’amitié,  les paf-  
 fions  ,  les  vices  mêmes empruntent  d’elle la  meilleure  
 partie de leur agrément. 
 Un  comique grec trouvoit qu’on  ne  prenoit  pas  
 d’affez  juftes  mefures  ,  quand  on  vouloit  s’affurer  
 d’un prifonnier.  Que n’en  confie -t -  on la garde  au  
 -plaifir} Que ne l’enchaîne-t-on par les délices ? Plaute  
 &  l’Ariofte  ont  adopté  cette  plaifanterie  ;  mais  
 tous ces poètes auroient peu connu le.coeur humain,  
 s’ils  euffent  cm  férieufement  que jamais  leur  captif  
 n’auroit brifé  fes chaînes.  Il n.’eûf pas éténéceflaire  
 de  faire briller à  fes yeux  tout -l’éclat  de  la  gloire ;  
 qu’il fe fut trouvé méprifable dans fa prifon,  ou qu’il  
 y   eût  craint  le  mépris  des  autres  hommes  ,  il  eût  
 bientôt été tenté  de préférer  un péritftlluftre  à une  
 volupté honteufe.  La gloire a  plusd’attrait pour les  
 ‘  Tome X IJ. 
 âmes bien nées, que la volupté; tous craignent moins  
 la douleur 8c la mort, que  le mépris. 
 Les qualités de  1 efprit,  il  eft vrai,  fourniflent  à  
 ceux que  la paflion n’éblouit pas,  un  fpeélacle  encore  
 plus  agréable  que  celui  de  la figure ;  il  n’y   a  
 que  l’envie  ou la  haine  qui  puiflent  rendre  infenfible  
 zw plaifir d’appercevoir en  autrui  cette pénétration  
 v iv e ,  qui  faifit dans  chaque objet les faces qui  
 s’affortiffent  le mieux  avec la  fituation  où l’on  eft -  
 mais  la  beauté  de  l’efprit, quelque brillante  qu’elle  
 fo i t ,  eft effacée par la beauté  de l’ame.  Les faillies  
 les  plus  ingénieufes  n’ont  pas  l’éclat  des traits  qui  
 peignent vivement une ame courageufe,  défintéref-  
 fée, bienfaifante.  Le genre humain  applaudira dans  
 tous les fiecles ,  au regret qu’avoit Titus d’avoir perdu  
 le tems qu’il n’avoit pas employé à faire des heureux  
 ;  8c les échos de nos théâtres applaudiflent tous  
 les jours  aux  difeours  d’une  infortunée ,  qui  abandonnée  
 de  tout le genre humain ,  interrogée fur les  
 refîources  qui  lui  relient  dans  fes  malheurs, moi ,   
 répond -  elle, 8c  deflaffe^  Il  eft peu de  perfonnes  
 qui foient du cara&ere d’Alcibiade,qui étoit plus fen-  
 fible  à  la  réputation  d’homme  d’efprit *  qu’à  celle  
 d honnete homme ;  tant il eft vrai que -les fentimens  
 du coeur flatent plus que les plaifirs de l’efprit.  En un  
 mot,  les  traits  les  plus  réguliers  d’un  beau  vifage  
 font moins touchans que  les  grâces  de l’efprit,  qui  
 font effacées  à  leur tour  par  les fentimens 6c par les  
 aérions  qui  annoncent  de  l’élévation  dans  l’ame  6c  
 dans le courage : l’agrément naturel des objets fe gradue  
 toujours dans l’ordre que je viens d’expofer  8c  
 c’eft ainfi que la nature nous apprend  ce que l’expérience  
 confirme, que la beauté de l’efprit donne plus  
 de droit à  la félicité,  que celle du corps,  8c qu’elle  
 en donne moins que  celle de  l’ame. 
 Parmi les plaifir s ,  il y  en a qui font tels par  leur  
 jouiflance ,  que  leur privation n’eft  point douleur :  
 la vapeur des parfums ,  les fpeélacles de  l’Architecture  
 , de la Peinture, &. de la déclamation ; les charmes  
 de la Mufique,  de la Poéfie ,  de la Géométrie  
 de  l’Hiftoire,  d’une fociété choifie ;  tous ces plaifirs  
 font  de ce  genre.  Ce ne  font point  des  fecours  qui  
 •foulagent notre  indigence ,  ce  font  des  grâces  qui  
 -nous enrichiflent& augmentent notre bonheur: combien  
 de gens qui les connoiflentpeu , 8c qui jouiflent  
 pourtant d’une vie douce ?  Il n’en eft pas ainfi de.quel-  
 que autres fortes de fentimens agréables ;  la  lo i, par  
 exemple, qui nous invite à nous nourrir ne fe borne  
 point à récompenfer notre docilité,  elle punit notre  
 défobéiflance.  L ’auteur de la  nature ne s’eft pas  re-  
 pofé fur le plaifir (eul du foin  de nous convier à notre  
 confervation,  il nous  y  porte par  un reflort  encore  
 plus puiflant,  par la douleur. 
 P L A I T , f. m.  (Jurifprud.) du latin placitum,  eft  
 un droit feigneurial, connu particulièrement en Dauphiné  
 ;  c’eft une efpece de  relief qui eft dû aux mutations  
 de feigneur &  de vaflal,  ou  emphitéote  ou  
 aux mutations de  l’un ou deff’autre  feulement  fui-  
 vant ce qui  a été ftipulé par  le titre d’inféodation au  
 bail  emphitéotique. 
 Il a lieu fur les fiefs , comme fiir les rotures. 
 Il  n’eft dû  qu’en vertu  d’une  ftipulation exprefle,  
 cependant il fe divife en trois fortes ;  favoir le plaît  
 conventionnel,   le plait  accoutumé  ,   8c  le plait  à  
 mercy. 
 Le plait  conventionnel  eft celui  dont  la  quotité  
 eft réglée par le titre ;  il peut être impôfé en argent,  
 en grain ou en plume. 
 Le plait accoutumé eft celui dont la quotité fe réglé  
 fuivant  l’ufape dû lieu ,  ou.en tout cas,   fuivant  
 l’ufage le plus général du Dauphiné. 
 Le plait à mérci eft  communément le revenu d’uu  
 an,  comme le relief dans là.coûtume de Paris.  Koyt^  
 Salvaing ,   de l'jifage des  Fiefs ;   Guyot en fon fécond  
 S S s s   ij