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Difons à préfent un mot de. la mere d’Henri IV.
dont Pau eft auffi la patrie.
C’eft à la naiflanee de ce fils 8c dans le plus fort
des douleurs que Jeanne d’Albret, héroïne digne
d’admiration à tant d’autres égards, fit encore paraître
un courage fingulier. Le roi de Navarre fon mari
promit de lui remettre fon teftament dès qu’elle ferait
accouchée, à condition néanmoins que dans
l’accouchement elle lui chanterait une charifon, afin,
dit-il, que tu ne me faffes pas un enfant.pleuréux ôc
rechignant. La princeffe s’y engagea 8c eut tant de
force fur elle-même, que, malgré lès vives douleurs,'
elle tint parole, 8c chanta en fon langage béarnois
la chanfon du pays , qui commence par ces mots :•
Nofie-Donne deou cap deou pon, adjouda me in aqueße-
hourc j c’eft-à-dire , Notre-Dame du bout du pont,
aideç-moi à cette heure.
Jeanne d’Albret préfenta Henri IV. à l’âge de quatorze
ans au prince de Condé fon beaufrere, 8c le
voua tout jeune qu’il étoit à la défenfe de la caufe
commune , avec toutes fes bagues & joyaux qu’elle
engagea pour les frais de l’armée. Elle fit, en mourant
a l’âge de 44 ans, & non fans foupçon d’avoir
été empoifonnée , un teftament qui contenoit des
ehofes admirables en faveur de ce fils , qui depuis fa
tendre enfance rempliflbit déjà les hautes efpérances
qu’elle en avoit conçues. Je n’en veux pour preuve
qu’une de fes reparties à l’âge de 15 ans , reparties
que fon augufte mere nous a confervées dans un recueil
imprimé in-12. en 1570, fous le titre d'Hißoire
de notre tems.
Catherine de Médicis, de concert avec le cardinal
de Lorraine , avoit envoyé vers la reine de Navarre
le fieur de la Motthe-Fénelon , pour la détourner de
joindre fes forces à.celles que les Réformés afl'em-
bloient en 1568 , fous le commandement du prince
de Condé. Un jour que la Motthe Fénelon s’adref-
fant au prince de Navarre, affeâoit de paraître fur-
pris de ce que fi jeune encore il prenoit parti dans
une querelle qui ne regardoit que le prince de Condé
8c les Huguenots qui faifoient la guerre au roi : « Ce
» n’eft pas vraiment fans raifon, repartit avec viva-
» cité le jeune prince , puifque fous le prétexte de la
» rébellion qu’on impute fauffement à mon oncle 8c
» aux Huguenots , nos ennemis ne fe propofent pas
» moins que d’exterminer toute la branche royale
» de Bourbon ; ainfi nous voulons mourir enfem-
» ble les armes à la main, pour éviter les frais du
» deuil ».
Enfin, je le répété, on ne lit pas la vie de ce grand
roi fans admiration , ni fa mort tragique arrivée en
1610 , fans attendriffement. Les bons princes font
dans l’hiftoire ,.ce qui fixe le plus nos regards 8c notre
amour.
Les habitans de Pau défraient dernièrement d’avoir
dans leur ville une ftatue de Henri IV. On leur
a donné celle de Louis X IV. au-bas de laquelle ils
ont mis dans leur jargon : Celui-ci eß petit-fils de notre
bon roi Henri. (D. J. )
Pau , (Hiß. mod. Art militaire.') lorfque lesTarta-
res Monguls firent la conquête de la partie fepten-
trionale de la Chine en 123z; ils employoient une
machine appellée pau dans les fiéges. Il y en avoit
de deux elpeces : l’une fervoit à lancer des pierres,
& s’appelloit ché-pau ou pau à pierres ; l’autre fervoit
à lancer du feu, 8c s’appelloit ho-pau ou pau à
feu. Le pere Gaubil jéfuite millionnaire, n’ofe décider
fi ces paus étoient de vrais canons femblables
aux nôtres ou à nos pierriers ; cependant il paroît
convaincu, que les Chinois ont eu l’ufage de la poudre
1600 ans avant qu’elle fût découverte en Europe
; ces peuples faifoient ufage d’abord de morceaux
de bois creufés ou de canons de bois pour j etter des
pierres.
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Pau , f. m. (Mefure de longueur.) c’eft Une elpece
d’aulne dont l’on fe. fert à Loango , 8c dans quelqueS-
autres lieux de la côte d’Angola, en Afrique.
Il y a à Loango trois fortes de paux, le pau du
roi 8c de fon premier miniftre, le pau des fidalgues
ou capitaines , & le pau des particuliers. Le pau àw
roi a 28 pouces de longueur, 8c égale trois macoutes.
C ’eft à ces différenspaux que les Européens qui
font la traite des negres, mefurent les- étoffes 8c les
toiles qu’ils donnent en échange des efclaves & des
autres marcnandifes, comme poudre d’or , morfil ,
cire, &c. qu’on tire de la côte d’Angola. (D . J .)
PAVAGE, f. m. (Commerce.) on appelle en quelques
provinces de France, particulièrement en Bretagne
droit de pavage, un droit qui fe leve fur certaines
marchandifes à l’entrée des v illes, pour la réparation
8c entretien de leur pavé. Voye1 Pa v é .
Le droit de pavage de la ville de Nantes eft de
deux deniers par charrette, 8c d’un denier par fom-
me. Diclionn. de Commerce.
Pa v ag e , ( Jurifprud. ) fe difoit quelquefois anciennement
pour péage. PÉAGE.
Pa vage , f. m. terme de Paveur ; il fe dit de l’ouvragé
qui fe fait avec du pavé, aufîi-bien que de l’action
de celui qui pave.
g PAVANE, f. f. ( Orcheßriq. ) danfe grave , venue
d’Efpagne , oîi les danfeurs font la roue l’un devant
l’autre, comme les paons.font avec leur queue, d’où
lui eft venu- ce nom. C ’étoit une danfe férieufe que
les gentilshommes danfoient avec la cape & l’épee ;
les gens de juftice avec leurs longues robes; les princes
avec leurs grands manteaux ; 8c les dames avec
les queues de leurs robes abaiflees 8c traînantes : on
l’appelloit le grand bal, parce que c’étoit une danfe
majeftueufe & modefte. Il s’y faifoit plufieurs affiet-
tes de piés, paffades 8c fleurets, 8c des découpemens
de piés pour en modérer un peu la trifte gravité. La
tablature de la pavane eft décrite dans Thoinot Ar-
beau, en fon Orchéfôgraphie. Cette danfe n’eft plus
en ufage ; elle eft trop férieufe pour plaire à la vivacité
des jeunes gens ; les contre-danfes font plus de
leur goût, 8c c’eft tout naturel. (D . J.)
Pavane , (Mußq.) la pavane eft un chant à deux
tems : on la clivilë en grande 8c en petite ; celle-ci
n’a que douze mefures en tout, de quatre en quatre
mefures. Il faut qu’il y ait un repos 8c une cadence ;
la grande a trois parties, qui fe terminent par des cadences
différentes ; la fécondé partie doit avoir deux
mefures de plus que la première, 8c doit être plus
gaie ; la troifieme doit avoir deux mefures de plus
que la fécondé, & avoir encore plus de gaieté.
La pavane eft du genre des fonates , & elle eft:
comprife dans la fécondé efpece des fonates que les
Italiens appellent fonata da caméra, fonate de chambre.
Voye\ S o n a t e .
PA V A TE, f. f. (Hiß, nat. Êotan. exot.) arbriffeau
des Indes, haut fuivant Acofta', de huit à neuf piés,
médiocrement rameux, gris, chargé de peu de feuilles
femblables aux petites feuilles de l’oranger, fans
queue, d’une belle couleitr verte. Sa fleur eft p etite,
blanche, compofée de quatre pétales, portant au milieu
une étamine blanche qui finit en pointe verte.
Cette fleur reffemble en figure au chèvrefeuille , 8c
en a l’odeur ; cette plante croît le long des rivières
Mangate & Cranganor ; les Indiens s’en fervent beaucoup
en Médecine. (D . J.)
P A V E , f. m. ( Archit. rom. ) pavimentum, terme
qui chez les Latins, fignifie le fo l d’une place de quelque
matière qu’il foit fait ; plâtre, terre, fable, gra-
vois, cailloux, brique, carreaux de terre cuite, marbre
, 8c autre natur e de pierres, pourvû que ledit fol
ait été affermi, battu &; frappé, & consolidé fur la
fuperficie de la terre ou d’un plancher, pour en produire
une croûte & un plan ferme, fervant à porter
ce
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•ce qui doit fepofer ou paffer par-deffus ï pavimentum
tnim , dit Vitruve , ejl folidamèntum Jive incrufiatïo
quant gradiendo Catcamus. -
- Selon Ifidore , les Carthaginois voifins de Barbarie
, ont- été les premiers qui ont pavé leur .ville de
pierres; enfuite à leur imitation, Appius-Claudius
Cæcus fit paver la ville de Rome 188 ans après l’ex-
pulfion des rois ; c’eft ce qu’on nomma la voie Ap-
pienne: Enfin, les Romains entreprirent les premiers
de paver les grands chemins hors de leur v ille , 8c
infenfiblement ils ont pouffé cet ouvrage prefque par
tout le monde : per omnernpenè orbem vins difpofuerunt,
comme parle le même Ifidore.
Les Romains eurent deux maniérés différentes de
•paver leurs grands chemins; les uns fe pavoient de
pierres, & les autres étoient cimentés de fable 8c de
terre-glaife. Les premiers étoient à trois rangs, à ce
que l’on a obfervé dans les veftiges qui en f ont refilés
; celui du milieu qui fervoit aux gens de pié étoit
tin peu plus élevé que les deux autres, de façon que
les eaux ne s’y pouvoient arrêter. On le pavoit à la
ruftique , c’eft-à-dire de gros carreaux de pierre à
joints incertains, au lieu que nos pavés font équar-
Jris ; les deux antres-rangs étoient couverts de fable
lié avec des terres graffes, fur quoi les chevaux mar-
choient fort à l’aife. D ’un intervalle à l’autre , on
irouvoit fur les bordages de groffes pierres dreffées
à une hauteur commode, quand on vouloit monter
à cheval ; parce que les anciens n’avoient pas l’ufa^e
des étriers. On trouvoit encore les colonnes miliaires
fur lefquelles on voyoit écrites les diftances de
tous les lieu x, & le côté du chemin qui menoit d’un
lieu à un autre ; ce fut une invention de C. Grac-
thus. '
Les chemins pavés de la fécondé maniéré, c’eft-
à-dire feulement de fable 8c de terre-glaife, étoient
en dos -d’âne, tellement que l’eau ne s’y pouvoit arrêter
, & le fond étant aride 8c prompt à fiécher, ils
demeuraient toujours nets de fange , 8c fans pouflïe-
!re. On en voit-un dans le Frioul que les habitans
nomment le pojlhume, lequel va dans la Hongrie, &
un autre fur le territoire de Padoue, qui partant de
la ville même aboutit aux Alpes.
• Aurelius-Cotta eut la gloire de faire paver la voie
Aurélienne l’an 512 de la fondation de Rome. Fia-
miniüs fut l’auteur de la voie Flaminienne, 8c la voie
Emilienne fut exécutée parles ordres d’Emilius. Les
cenfeurs ayant : été établis firent des ordonnances
pour multiplier les pavés des grands chemins, en. dé-
terminer-les lieux, l’ordre 8c la maniéré. Paffons à
la conftruôion des pavéf intérieurs des édifices de
Rome;
L es pavés qu’ils formoient fur des étages de charpente
, s^appelloient cdntignatapavintenta, & les éta- :
gès contignàtiànes. Le premier foin des ouvriers étoit
de faire enforte que nulle partie de‘ leur pavé.ne s’avançât
pas fur les murs ; mais que l’ouvrage entier
fut aflis fur la charpente, de peur que le bois venant
à fe retirer par la féchereffe , ou à s’affermir par le i
poids de la mâçonnerie, ne produisît des fentes au
pavé tout le long de ladite mâçonnerie ; c’eft ce que
.Vitruve a détaille clairement, confultez-le.
Les pavés de planchers, qu’ils appelloient coaxa-
tiones ou coaffationes, fe faifoient de planches de l’ef-
pece de chene nommé efculus, à caufe. qu’elle eft
moins fujette à fe cambrer ; & même pour les défendre
contre-la vapeur de la chaux quivfe mêle aux
matières que l’on jette defliis, iis les couvraient d’un
lit de fougere ou de paille, comme les laboureurs
en mettent fur leurs tas de bip , pour empêcher le
grain de fouffrir l’humidité de la terre. - ,
Cétoit fur ce premier lit de fougere ou de paille,
que les ouvriers pofoient & affeyoient leur mâçon-
perie-par cF afre différentes couches. La première
.Tome X l l t *
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cïo:t cftmpofée cîe pierres ou caillou**, lius ensemble
avec chaux & eîmènt. Cette première couche de niâ-*
çonnerie qtù fàifoitr la fondation de l’ouvrage fe
noinmoit ftatumen.
La fécondé couche ie mâçonnerie fèi feifoit da
plulieurt tnoilofts euh pierrailles , calices & mêlde*
avec de la chaux ; c’étoitrià Ce qu’ils appelloient n»
dus ; & fi cette matiere itoit de pierres brifées quî
n euffent jamais fervi , ils appelloient cette mariera
■ mdùs lÿniim, & la mêlaient en parties'égales aven
■ de.la chaux vivér; fi cette matière provenoit de dé-<
cambres qui avaient déjà été miles en oeuvre, elle f e
mnnmoit rudus ridivîvum. On ne mêlait que deux
parties de chaux à cint* de telle matière ; & l’appli-.
cation qu’oii en faifoit à coup de h ie& de battoir
pour l’affermir, applanir.& égalifer, s’appelteitru&i
ratio ; il falloit que tout ce terraffement, tant de càil-
de décombres, eût au,moinsflettf pouces
d epaifl’eur, apres avoir été fufKfamntent battu, êé mari
five. '
Sur ce terra fTcnïer.t, on fàifoitpoiu troifiême critta
che un ciment, cumpofé d’nne partie d.e chaux, contre
trou de brique ou de.pots çaffés , on dé tuiles bat.
tues. Oa étendoit ce cimentfur himUnaSm'.-icom.
nie une couche mdle,U{s»ury affeoirrla quatrlem'e
couche de/>a«.qui fervoit de derniere Gsuverturê à.
l’ouvrage entier, & qu’on nommoit par cette taifon
fumma cru fia.
Les Architefres donnoient à la troifieme couche
de leur mâçonnerie le nom de nucléus, qui fignifie ce
qui eft de plus tendre & bon à manger dans les noix*
les amandes 8c les autres fruits à noyaux ; cette
comparaifon fë trouve affez conforme à ce vers : de
Plaute.
Qui è mice niicleüm ejfe vult, frangat nucem.
Ainfi la couche de. ciment appellée.par les Archiv
e s nucléus, eft la plus tendre & læ plus, molle par»
tie du pavé, qui fe trouve entre les deux parties plus
dures, qui font là rudération par-deffous, Scies car-»
reaux de la derniere couche par-deffus. '
• Enfin, les Romains enrichis des dépouilles des na»
tions, pavèrent les cours de leurs palais, leurs falles
leurs chambres, & lambrifferent même, leurs murailles
de mofaïque ou de marqueterie. La mode en vint
à Rome fous Sylla, qui en. fit ufage dans le temple
•de la Fortune de Prénefte. Ces pavés étoient faits de
petites pierres de diverfés couleurs, jointes & comme
enchâffées dans le ciment, repréfentant différentes
figures, par leur arrangement 8c parla variété de
leurs couleurs. On donna, à ces fortes de pavés le
beau nom'de müfaa:,,mujia ou mujiva, parce qu’on
attribuoit aux Mufes l’invention de ces ouvrages ingénieux
, 8c qu’ils repréfentoient quelquefois ces aimables
déeffes. (£>. J.)
Pa v é , f. m. ( Architecl. m o d .) Ce mot a deux lignifications
: d’abord c’eft l’aire pavée fur laquelle on
marche, 8c en fécond lieu la matière qui l’affermit
comme le caillou , le gravôis , .avec mortier de chaux
& de fable, le grès 8c la pierre dure, comme on va
l’expliquer.
, Pavé de briques,pavé qui eft fait de-,briques pofées
de champ 8c en ép i, femblable au point d’Hongrie ,*
tel-eft le pavé de la ville de Venife ; ou de carreau
barlong à fix pans figurés, comme les bornes de verre
adoffées : c’eft ainfi qu’étoit pavé l’ancien Tibur à
Rome.
•_ Pave de grès , c’eft un. pavé qu’on fait de quartiers
de grès, de huit à neuf pouces, prefque de figure cu-
bique, dont on fe fert en France pour paver les grands
chemins, rues * cours , &cv,
On appelle pavé refendu le pavé qui eft de la .demi-
épaiffeur du précédent, 8c dont on paVe les*petites
cours, les cuïfines, écuries, &e. Et pavé dy’éç.han-
£ k