
foit par quelque qualité qu’ils tenoient d’eu x, comme
de barons , de pair ou d’évêque , foit en vertu
d’une nomination perfonneffe.
Ainfi, quoique-la cour du-roi ait réuni les affaires
que l’on traitoit dans l’affemblée de la nation , on ne
peut pas dire que ce foit la même affemblée, puifqiie
la conftitutiôn de l’une & de l’autre efl: toute différente.
Au furplus, toutes ces affemblées générales ou particulières
qui fe tenoient fous l’autorité du ro i, ne
portoient pas le nom de parlement.
Sous la première race on les appelloit mallus ou
mallum , mot qui vient du teutonique malien , qui lignifie
parler ; enforte que mallum étoit la même chofe
que parlamentum. Voye^ le préambule de la loi fali-
que , où il efl dit per très mallos convenantes, &c.
On appelloit auffi ces affemblées conjilium feniorum
& fidelium ; quelquefois conjilium ou Jynodus, placitum.
Grég, de Tours.
Sous la fécondé race , on les appelloit encore mallum
, placitum generale, Jynodus, cohjîlium ou collo-
qtùum.
Sous la troifieme race , on leur donnoit pareillement
le nom de conjilium ou placitum ; & depuis que
la cour du roi eut réuni les fondions de l’affemblee
générale avec celles qu’elle avoit auparavant, elle fe
trouve ordinairement défignée fous les titres de curia
regis, curia regalis , curia Francice, curia gallicana ,ju-
dicium Francorum ; & en françois la cour le roi , la
cour le roi de France, la cour du roi.
Dans la fuite , bri lui donna àufli le nom de parlement.
Ce terme parlement étôit ufité dès le tems de Louis
le Gros pour exprimer toute affemblée où on parloit
d’affaire. L’avocat Orléans a remarqué que celui qui
a fait les geftes de Louis le Gros, dit qu’après le retour
de fon armée, l’empereur & le roi de France j
& les autres princes, collegerunt iterum parlamentum
ubi magni barones cum minoribus, Jicut antea fecerànt,
zonvenerunt.
Il dit de même en un autre endroit, que les princes'
s’affemblerent, & ad illudparlamentum fluit Conra-
dus imperator, &c.
On trouve auffi des exemples que l’on donnoit le
nom de parlement à la cour du roi dès le tems de
Louis VII. fuivant ce qui efl: dit dans fa vie. Eodem
anno , cafl.ro verflalici, magnum parlamentum cohgrega-
vit, ubi archiepijcopi , epifleopi & abbates , & magna pars
baronum Francice convenerunt.
Il efl dit de Louis VIII. qu’il tint un parlement à
Peronne : Ludovicus rex parlamentum indicit apud Pe-
ronam ; & en 12.27 , fous S. Louis, il efl dit, rex te-
nuit parlamentum. Lettres hiftoriques.
On le trouve qualifié de parlement de Paris dans les
olim de l’an 1308, nojtra curia Parijienjis, & même dès
Pan 1x91, dans une ordonnance qui y fut faite dans
les trois femaines après la Touffaint de ladite année ,
pro celeri & utili parlamentorum nojlrorum Parijientium
expeditione Jic duximus ordinandum ; & il efl à croire
que ce furnom de parlement de Paris fut ajouté dès que
ce parlement commença à tenir fes féances ordinairement
dans cette ville, quoiqu’il n’y fut pas encore ab-
folument fédentaire.
On l’appelloit auffi quelquefois conjilium, le con-
feil du roi ; Joinville l’appelle le conjeil juré, parce
que ceux qui y étoient admis prétoient ferment, à la
différence du confeil étroit ou fecret, où le roi admettait
ceux qu’il jugeoit à-propos, fans leur faire
prêter ferment ; le titre de parlement n’empêche pas
qu’il n’ait auffi confervé celui de cour : on dit encore
la cour de parlement; le roi en parlant du parlement
d i t , notre cour de parlement ; & le parlement, en parlant
de lui-même j ou en.prononçant quelque arrêt
dit la cour, ainfi le parlement efl toujours la cour du
roi & la cour des pairs.
Les anciennes ordonnances l’appellent le flouv train
conjifloire des rois , la cour de France , la cour royale ,
la cour capitale & Jouveraine de tout le royaume , repré-
Jentant Jans moyen la perjonne & la majeflé de nos rois,
étant en cette qualité le miroir , la Jource , Vorigine de
la juflice dans l'etat flous l'autorité du Jouverain.
Le parlement de P ans étant autrefois le feul pour
tout le royaume , étoit fouvent nommé le parlement
de France, ou la cour de France : une charte de l’an
1211 le nomme judicium curice Gallicana ; & dans
l’épitaphe de Pierre de Courthardy, premier préfi-
dent, inhumé au Maine en 1512, il efl encore nommé
parlement de France. Comme le parlement dans fon
origine étoit le confeil du ro i, il conferva auffi pendant
long-tems ce nom , on l’appelloit parlement ou
conjeil indifféremment, & même lorlque le roi y ve-
noit fiéger , ce tribunal n’étoit plus defigné que fous
le titre de conjeil du roi.
Les affemblées, foit générales ou particulières des
grands du royaume , qui fe tinrent fous les deux premières
races, ne furent pas uniformes pour le nombre
des perfonnes qui y étoient admifes , ni pour les
tems ou les lieux où ces affemblées fe tenoient.
Nous n’entrerons point ici dans le détail de tout ce
qui concerne les affemblées de cette efpece qui fe
tinrent fous les deux premières races de nos rois, nous
nous contenterons de rapporter ce que dit M. de la
Rocheflavin du confeil ou parlement, tel qu’il fut établi
par Pépin le B ref, & qui femble avoir fervi de
modèle pour la forme des affemblées qui furent établies
au commencement de la troifieme race.
Pépin le Bref, dit .cet auteur, ayant réfolu d’aller
en perfonne en Italie au fecours du pape contre le
roi des Lombards ; & voyant qu’il ne pouvoit plus
aflîfter aux affemblées qui fe tiendroient pendant
fon abfence pour les affaires d’état & de la juflice,
comme lui & fes prédéceffeurs avoient coutume de
faire ; que la plupart des princes & grands feigneurs
du royaume l’accompagnant en Italie , ils ne pourraient
pas' non plus affûter à leur ordinaire à ces affemblées
; il ordonna un confeil ou parlement com?
pofé de certain nombre , gens de favoir & d’expérience
, pour en fon nom &c fous fon autorité , con-
noître & décider des affaires les plus importantes, &
rendre la juflice fouverainement quoiqu’il fut abfent
du royaume : il deftina le tems le plus voifin des
grandes fêtes annuelles pour tenir ces affemblées ;
favoir, vers les fêtes de Pâques, la Pentecôte, la
Notre-Dame d’Août, la Touffaint & N o ë l, en mémoire
de quoi, lorfque le parlement eut été rendu
fedentaire, on conferva pendant long-tems l’ufage de
prononcer en robes rouges la veille de ces grandes
fêtes les jugemens des enquêtes qui n’acquieroient le
caractère d’arrêt & de jugement public que par cette
prononciation; il paraît que dans la fuite,voyant l’inutilité
de cette prononciation , & que c’était un tems
perdu,on fe réduifit peu-à-peu à prononcer feulement
les arrêts qui dévoient être plus connus, & qu’il étoit
de quelqu’importance de rendre publics. Cette forme
a ceffé entièrement depuis la mort de M. le premier
préfident de Verdun, arrivée le 16 Mars 1627;
le grand ufage de l’impreflion a donné la facilité de
rendre publics les arrêts qui dévoient l’être ; l’ordonnance
de 1667 a même abrogé formellement les formalités
des prononciations d’arrêts & jugemens.
Ils n’avoient point de lieu fixe pour leurs féances.
On les affembloit dans le lieu que le roi trouvoit le
plus commode, & félon que les affaires le deman-
doient.
Avant que le parlement eût été rendu fedentaire à
Paris, le roi envoyoit prefque tous les ans dans les
provinces des commiffaires appelles mijji dominiâ,
lefquels après s’être informes des abus quipouvoient
avoir été commis par ies feigneurs ou par leurs officiers
, rendoient la juflice aux dépens des évêques,
abbés & autres feigneurs qui auraient dû la rendre
& rapportaient au roi les affaires qui leur paroiffoient
le mériter.
Ces grands qui avoient été envoyés dans les provinces
pour y rendre la jüftice , fe raffembldiertt en
certains tems , ou pour les affaires majeures auprès
du r a i , avec ceux qui étoient demeurés près de fà
perfonne pour fon confeil ordinaire ; cette réunion
de tous les membres de la cour du roi formoit alors
fa cour pléniere ou le plein parlement : l’entier parlement
, lequel fé tenoit ordinairement vers le tems
des grandes fêtes ; les féances ordinaires n’étoiertt
communément que des prolongations ou des fuites
de ces cours plénieres ; mais lorfque le parlement eut
été rendu fédentaire à Paris, on ceffa d’envoyer
ces fortes de commiffaires dans les provinces.
L’affemblée des grands du royaume continua d’être
ambulatoire après que Pépin fut de retour des
deux voyages qu’il fit en Italie, & encore apres fort
décès , fous fes fuCceffeurs même, fous les premiers
rois de la troifieme race.
Ces affemblées furent auffi convoquées par Charlemagne
pour les affaires lés plus importantes.
Elles devinrent encore plus recommandables fous
le régné de Louis le Débonnaire , & commencèrent
à fe tenir ordinairement deux fois l’an , non pas à
jours certains & p réfix, comme cela fe pratiqua depuis
; mais félon ce qui étoit avifé par l’affemblée
avant de fe féparer ; on convenoit du tems & de la
ville où on fe raffembleroit.
Hugues Capetaffembla les grands encore plus fou-
vent que fes prédéceffeurs.
Cette affemblée des barons ou grands _vaflaux
avoit, comme on l’a d it , pris le nom de parlement
dès le tems de Louis le Gros ; mais il paroît qu’elle j
ne commença à fe former en cour de juflice , Comme
elle efl préfentement, que du tems de S. Louis,
vers l’an 1254.
En effet, le plus ancien regiftre du parlement que
mous ayons , qui efl le regiftre des enquêtes, ôt qui
efl le premier de ceux qu’on appelle les olim, ne remonte
point au-delà de l’année 1254: car il ne faut
pas regarder comme.des regiftres du parlement, ni le
regiftre de Philippe-Augufte, ni le regiftre intitulé
regiflrum curia Francia , qui remonté jufqu’en 1214.
Ces regiflrès , qui font au tréfor des Chartres, rte font
autre chofe que des inventaires dès Chartres, ordonnances
, & autres pièces.
Quelques autres, tels que la Rocheflavin, tiennent
que le parlement fut ambulatoite jufqu’àu tems
de Philippe le Bel ; que ce prince délibérant d’aller
en Flandre , & prévoyant qu’il y ferait long -tems, :
réfolut d’y mener fon confeil ; mais que né voulant
pas que les fujets fuflèht fans ju flice, & furtout à Paris
, ville capitale du royaume, qui était dès-lors fort
peuplee , & où les affaires fe préferttoieht en grand
nombre, & auffi pour le foulagement de fon cOrtfeil,
qui était incommodé d’être obligé de fe tràhfporter
tantôt dans un lieu & tantôt dans Un autre, pour
rendre la juflice, il ordonna , le 23 Mats 1302, que
pour la commodité de fes fujets & l’expédition des
caufès, l’on tiendrait deuxparletnens à Paris chaque
année;
Quelques perfonnes peu inftruiîes ont cru que
cette Ordonnance etoit l’epoque dé l’inftitution dupar-
kment, ou du môihs que'celui dont elle parle étoit;
un nouveau parlement, qui fut alors établi : il efl
néanmoins certain que le parkmetu exiftoit déjà fous
ce titre long-tems avant cette ordonnance, & que
celui dont elle règle les féances, & qui a taùjOurs
fiiblifté depuis Ce tems, efl le même qui étoit âtabu-
Tomt X I I .
latoire à la fuite de nos rois, ainfi que l’obferva Le
garde dés fceaux de Marillac, dans un difeours qu’il
fit au parlement.
En effet, l’ordonnance de 1302 parle par-tout du
parlement, comme d’un tribunal qui étoit déjà établi
d ancienneté : elle parlé dés caufes qui s’y difeutent,
de fes audiences, de fes rôles pour chaque bailliage
, de fes enquêtes, de fes arrêts, de fes membres :
il y efl auffi parlé de fes confeillers, qui étoient déjà
reçu,s & des fondions qu’ils continueraient; & il efl
dit, que fi quelque baillif a été reçu membre du parlement
t il n’en ferâ aucune fon&ion tant qu’il fera
baillif. n
Auffi les olim, en parlant de certains ufages du parlement
(ows la date de 1308, difent-ils hoc dudum factum
fluijfle ; & en 13 29 il efl encore dit, in par lamenta
longis temporibus objervàtum JuiJJe , ce qui fuppofe né-
ceflkirement qu’il exiftoit longtems avant l’ordonnance
de 130!*
Cette ordonnance ne fit donc que fixer le lieu &
le nombre des féances du parlement ; & en effet les
olim difent, en 1308, en parlant d’ufages qui s’obfer-
yoient au parlement, hoc dudum faclum ; & en 1329
il efl dit in parlementa longis temporibus objervàtum
Juijfe. Pafquier fait mention d’une ordonnance de 1304
ou 1305 , femblable à celle de 1302 ; mais celle dont
il parle, ne paroît qu’une exécution de la précédente.
D ’autres tiennent que le parlement étoit déjà fédentaire
à Paris longtems avant 13 02.
En effet, dès le tems de Louis le Jeune, les grands,
du royaume s’affembloient ordinairement dans le, palais
à Paris pour juger, tellement que le roi d’Angleterre
offrit de s’en rapporter à leur jugement,/Wi-
dicium in palatio P arijienji Jubire proceribus G allia re-
Jidentibus.
Quelques-uns tiennent que dès le tems de S. Louis
le parlement ne fe tenoit plus ordinairement qu’à Paris,
& qu’il ne devoit plus fe tenir ailleurs, & que
ce fut ce prince qui donna fon palais à perpétuité,
pour la féance du parlement; & en effet, la chambre
ou fe tient ia tournelle criminelle- conferve encore I e
nom de la fallé de S. Louis, comme étant le demie p
prince qui l’â.occupée.
L’ordonnance dé 1291 veut que les avocats foient
prefëns dans le palais, in palatio, tant que les maîtres
feront dans la chambre ; ainfi le parlement fe t i
noit déjà ordinairement dans le palais à Paris dès e
tems de Louis VII. Nos rois ne lui avoient pourt ant
pas encore abandonné le palais pour fa demeure : on
tient que ce fut feulement Louis Hutio^qui le lui céda
apfes la condamnation de Marigny qui avoit fait bâtir
cè palais.
Quoi qu’il en foit de cette époque , il efl certain
que les 69 parlemens qui forent tenus depuis 1254
jufqu’en 1302 Ont prefque tous été tenus à Paris ; il.
y eh â un à Orléans, en 1254 ; un à Melun ÿ en Sep*
tembré 1257 ; des 67 autres, il efl dit expreffémené
de 33 qii’ils ont été tenus à Paris, le lieu des autres
n’eft pas marqué ; mais i l efl évident que c’étoit à
Paris ; car cette omiffion de lieu qui fe trouve uniformément
dans les vingt années qui ont immédiatement
précédé 1302, fé continue de même jufqu’à la
fin dés olim, qui vont jufqu’en 1318, tems auquel le
parlement étoit bien certainement fédentaire ; & cette
Oiniflion de lieu même, femble une preuve que ces
parlemens ont été tous tenus dans le même lieu.
Mais quoique le parlement fe tînt le plus fouvent à
Paris ; & què dès 1291 il fe trouve qualifié parlement
de Paris, ce n’eft pas à dire qu’il fut dès-lors féden-
taifé à Paris. Il y a lieu de croire qu’on ne lui donna
pour-lors le furnom de parlement de Paris que pour
le diftinguer du parlement qui fe tenoit à Toufoufe;
& fi l’on examine bien l’ordonnance de 1291, on