
 
        
         
		:-s>  chez les Romains  ;  car une branche de  l’illuftre fa-  
 w mille des Fabius en a tiré le  furnom  de Pictor,  &  le  
 ■ r> premier qui le porta,  peignit le  temple de la déeffe  
 t>  Salus  en  l’an  de  Rome  450 :  l’ouvrage  a  fiibfifté  
 » jufqu’à notre tems ,  que le temple a été brûlé fous  
 -y» l’empire de  Claude ».  11  y  a  dans  ces  paroles une  
 #ineflé  &   une  exactitude  finguliere  :  on  y   fent une  
 -différence entre  ce que Pline dit, &  ce qu’il voudroit  
 pouvoir  dire.  Il voudroit pouvoir  avancer  que  Part  
 -avoit été pratiqué fort anciennement  à Rome par des  
 -citoyens ; &  en hiltorien ex aft, il joint à l’exprefîion  
 -de bonne-heure la détermination de  l’époque , qui  ne  
 Va  pas à  400  ans  d’antiquité.  Il  voudroit  pouvoir  
 ajouter que  l’exercice de la Peinture y  fut  dès-lors en  
 honneur , &  il dit uniquement qu’on y  fit honneur à  
 ■ la Peinture: enfin il voudroit pouvoir vanter la beauté  
 des ouvrages de Fabius ; &  tout l’éloge  qu’il en fait,  
 -e’eil  qu’ils  s’étoiènt  confervés  jufqu’au  régné  de  
 Claude. 
 Le feu! ouvrage  de peinture que. l’auteur nous faffe  
 remarquer à Rome dans  le  fieefe qui  fuivit  l’époque  
 de Fabius Piû or, c’eft un tableau que  Valerius Mef-  
 fala  fit  faire  de fa viâoire  de  Sicile en  l’an  264 ,  &   
 qu’il expofa  fur  un  côté  de  la  curie Hojlilia.  Le  fi-  
 ience de Pline fur le nom du peintre,  nous fait  afi'ez  
 comprendre  que  l’artifte  étoit  grec  ;  les  Romains  
 ■ étendant déjà pour lors leur domination fur le canton  
 d’Italie appelle la grande Grèce, &   fur la Sicile pareillement  
 peuplée  de  Grecs.  L’exemple  de  Valérius  
 Mefl'ala fut fuivi dans la fuite par Lucius Scipion, qui  
 après avoir défait en Afie le roi Antiochus, etala dans  
 Rome le tableau de fa victoire en l’an  100 avant Jefus-  
 Chrifi. 
 L ’année fuivantei 8 9, Fulvius Nobilior afliégea &   
 prit Ambracie,  oit Pirrhus  avoit  autrefois  raffemblé  
 plufieurs  rares  productions  des arts  cultivés dans  la  
 Grece. Le  conful romain, dit Pline, ne laiffa que les  
 ouvrages  en  plaftique  de  Zeuxis,  &  tranfporta  les  
 mufes  à  Rome  :  c’étoient  neuf  ftatues  où  chaque  
 inufe en particulier étoit  repréfentée  avec  fes  attributs. 
  Tite-Live dit aufïi que Fulvius enleva d’Ambra-  
 cie les ftatues de bronze &  de marbre, &  les tableaux;  
 mais  il paroît  que  les  tableaux ne  furent*pas  tranf-  
 portés a Rome,  ou qu’ils n’y   furent  pas  livrés  à  la  
 curiofité du public , puifque  Pline ne marque  qu’en-  
 fiiite  l’époque du premier tableau  étranger qu’on ait  
 étalé  dans la ville.  Les Romains  n’étoient  point  encore  
 curieux de peinture comme ils l’étoient de fculp-  
 ture : les ftatues des mufes apportées d’Ambracie, forent  
 repréfentées chacune dans des médailles particulières  
 ,  qu’on trouve  expliquées fort  ingénieufement  
 dans Vaillant. 
 Vers l’an 180, Caius Terentius Lucanus , fi c’eft,  
 comme  l’a  cm Vaillant,  le  frere  de Publius,  maître  
 du poète Térence, fut  le  premier  qui fit  peindre  
 à  Rome des combats de gladiateurs. 
 Paul Emile, deflruCteur du royaume de Macédoine  
 en  i 6'8 , emmena d’Athènes à Rome Métrodore, qui  
 étoit en même tems philofophe &  peintre.  Il ne vou-  
 loit un peintre  que pour  le faire travailler aux décorations  
 de fon triomphe. 
 Vers l’an 154, Pacnvius, neveu maternel d’Ennius,  
 cultivoit à Rome &  la Poéfie &  la Peinture. Entre Fabius  
 PiCtor &  lui,’ dans un efpace d’environ  150 ans,  
 Pline  n’a point de peintre romain à nous produire  il  
 dit que les pièces  de théâtre de Pacuvius  donnèrent  
 plus  de  confidération  à la  profeflion  de peintre, &   
 que cependant après lui  elle  ne  fut  guère  exercée à  
 Rome par d’honnêtes gens. Qu’on juge enfuite fi  l’écrivain  
 a prétendu nous  laiffer une grande  idée  des  
 peintres  romains ! 
 En l’an  147 ,  Hoftilius  Mancinus ,  qui  dans  une  
 tentative fur Carthage  étoit le  premier entré jufque  
 dans la ville, expofa dans Rome le tableau de la fituation  
 de la place , &: de  l’ordre des  attaques.  L’année  
 fuivante  ,  Mummius,  deffruCieur  de  Corinthe  ,  fit  
 tranfporter à Pvome le premier tableau étranger qu’on  
 y  ait  expofé en public :  c’étoit un  Bacchus d’Ariftide  
 le thébain , dont le roi Attalus donnoit fix cens mille  
 fefterces,  cent dix-fept mille  cinq cens livres ; mais  
 le  général romain rompit le marché, dans la perfua-  
 fion qu’un  tableau de  ce  prix  renfermoit  des  vertus  
 fecrettes.  La  fomme  offerte  par Attalus  ne paroîtra  
 pas exorbitante  ,  fi  l’on  confidere qu’il  acheta  dans  
 une autre occafion un tableau du même Àrifîide cent  
 talens  ,  quatre  cens  foixante-dixTmille livres ;  &   ce  
 dernier fait étant rapporté par Pline en deux  différens  
 endroits , nous ne devons point y  foupçonner de l’er-  
 reur dansles chiffres,comme il ne nous arrive que trop  
 fouvent de  fuppofer des fautes de  copiftes, &  même  
 des fautes d’ignorance dans les hiftoriens de l’antiquité  
 , quand ce qu’ils attellent n’efl pas  conforme à nos  
 idées &   à  nos  ufages ; vrai moyen d’anéantir  toute  
 l’ancienne hiftoire.  ' 
 La conduite de Mummius fait voir que les Romains  
 ri’avoient point encore de fon tems le goût de la Peinture  
 , quoiqu’ils euffent  celui de  la Sculpture  depuis  
 la  fondation  de  leur  ville.  Pour  un  tableau que  ce  
 général rapporta d’Achaïe, il en tira un fi grandi nombre  
 de  ftatues,  qu’elles  remplirent,  fuivant  l’exprefîion  
 de  Pline,  la ville  entière de  Rome.  Nous  
 voyons aufïi que dans la Grece le nombre  des  fculp-  
 teurs &  des  ouvrages de Sculpture,  l’a  de  tout tems  
 emporté  fur le nombre des peintres &   des  ouvrages  
 de Peinture; c’eft,  comme  l’a remarqué M. le  comte  
 de Caylus, que  ces deux peuples jaloux de  s’éterni-  
 f e r , préféroient les monumens plus  durables à ceux  
 qui l’étoient moins. 
 Cependant  peu  après  l’expédition de Mummius  
 les  Romains  commencèrent à fe  familiarifer davantage  
 avec un art  qui leur paroiffoit comme étranger.  
 On  vit  à  Rome pendant la jeuneffe de  Varron ,  environ  
 l’an 100 avant Jefus-Chrift, Lala de Çyzique ,   
 fille qui vivoit dans le célibat &  dans l’exercice de la  
 Peinture ;  on y   voyoit dans ce tems-là même un Sor  
 polis &  un Dionyfius, dont les tableaux  remplirent  
 peu  à-peu tous les cabinets. 
 En l’an 99, Claudius Pulcher étant édile, fit peindre  
 le premier la feene pour une célébration des jeux  
 publies ; &  il eft  à croire qu’il  y   employa le  peintre  
 Sérapion :  Pline ajoutant que  le  talent  de  cet artifte  
 fe bprnoit  à  des  décorations de feene, &  qu’un feu!  
 de fes tableaux cou vroit quelquefois au tems de Varron  
 , tous les  vieux piliers du Forum. Sylla, quelque  
 tems après, fit peindre dans fa maifon de plaifance de  
 Tufculum,  qui  paffa  depuis  à  Cicéron  ,  un  événement  
 de  fa  vie  bien flatteur ; c’étoit la circonftance  
 o ù ,  commandant  l’armée  l’an  89  fous  les  murs  de  
 Noie  en  qualité  de  lieutenant,  dans  la  guerre  des  
 Marfes , il reçut  la couronne obfidionale. 
 Les Lucullits firent  venir à Rome un grand  nombre  
 de ftatues, dans le tems apparemment de leur édi-  
 lité , en 79 ;  &  l’aîné des deux freres, le célébré Lucius  
 Lucullu5, étoit  alors  abfent :  on  ne  peut  donc  
 mieux placer  qu’en  cette occafion  l’achat  qu’il  fit,  
 félon Pline, dans Athènes aux fêtes de Bacchus, de la  
 copie d’un tableau de Paufias, pour fa fomme de deux  
 talens  ( neuf mille  quatre  cens  livres )  difpropor-  
 tion  toujours vifible  dans  le  nombre  des  ouvrages  
 de Peinture &  de Sculpture. Lucullus ramaflà dans  la  
 fuite  une grande quantité  des  uns &   des  autres ; &   
 Plutarque  le blâme de ce  goût pour les ouvrages de  
 l’a r t , autant qu’il le  loue du  foin qu’il avoit de faire  
 des cplle&ions de livres.  La façon de penfer de Plutarque  
 ne doit pas  nous furprendre ; elle a des exemples  
 dans tous les fiecles qui ont connu les Arts &  les  
 Lettres ; elle  en  a parmi nous,  parce qu’il  n’apparr  
 tient qu’à  un  très-petit nombre de favans  de relîembler 
 hier à Pline, &  de n’avoir point de goût  exclufif. 
 Il nous marque un progrès dans la curiofité des particuliers  
 &  du public pour la Peintute,  vers  l’an 75  ,  
 en difant que l’orateur Hortenfius, après avoir acheté  
 les Argonautes de Cydias cent quarante-quatre mille  
 fefterces ( vingt-huit mille cent dix  livres),  fit  bâtir  
 dans  fa  maifon  de  Tufculum,  une  chapelle exprès  
 pour ce tableau, &: que le  forum étoit déjà  garni  de  
 divers  ouvrages de Peinture, dans le tems oùCraffus,  
 avant de  parvenir aux grandes magiftratures, fe dif-  
 tinguoit dans le barreau. 
 Pour l’année 70, on trouve une apparence  de contrariété  
 entre  la chronologie de Cicéron &   celle  de  
 Pline, fur l’âge de Timomachus de Byzance, peintre  
 encauftique.  Cicéron  écrivoit en  cette  année-là  fon  
 quatrième  difeours  contre Verrès: il y  parle de quelques  
 tableaux, parmi un grand nombre d’ouvrages de  
 Sculpture enlevés  à la Sicile, &  tranfportés à  Rome  
 par l’avide préteur. «  Que feroit - ce , dit-il  à l’occa-  
 » fion  de ces  tableaux  , fi  l’on enlevoit aux habitans  
 » de Cos leur Vénus ,  à  ceux d’Ephefe  leur  Alexan-  
 » dre, à ceux de Cyzique leur Ajax ou leur Médée » ?  
 Cet Ajax &  cette Médée font vifiblement i’Ajax &  la  
 Médée  que Jules-Céfar acheta depuis à Cyzique.  Or  
 félon Pline  , la Médée étoit demeurée imparfaite par  
 la mort de  Timomachus,  antérieure  à  l’an  70 ;  & ,   
 félon le même écrivain, Timomachus fut contemporain  
 de Céfar  diftateur, en l’an  49: Telle  eft la  difficulté  
 ,  qui  difparoîtra,  fi  l’on  veut  confidérer  que  
 Timomachus a  pu mourir  vers  l’an  69 , environ  20  
 ans avant la diftature de Céfar, &  avoir été contemporain  
 de  Céfar  ,  mais  contemporain  plus  ancien.  
 L’exprefïïon de Pline, Ccefaris dicta toris  cetate, fignifie  
 donc  dans  le  tems de  Céfar  celui  qui  fut dictateur,  
 &  non pas dans le  tems que Céfar  etoit dictateur. 
 Il faut fouvent faire ces fortes  d’attentions  dans  la  
 chronologie de Pline ,  où  le  titre  des  magiftratures  
 défigne quelquefois l’époque des événemens, &  quelquefois  
 la  feule diftinétion des  perfonnes  d’un même  
 nom que des leêteurs pourroient confondre.  Le titre  
 de dictateur qu’il donne par-tout à Céfar,  eft de  cette  
 derniere efpece ; mais il y  a d’autres exemples où par  
 les titres  de préteur, d’édile ou d’imperator, il  indique  
 habilement l.es dates que fa méthode élégante &   pré-  
 cife ne  lui permettoit pas de fpécifier plus particulièrement. 
 Le préteur Marcius Junius ( c’étoit l’an 67) fit placer  
 dans le temple d’Apollon, à la folemnité des jeux  
 apollinaires  ,  un  tableau  d’Ariftide  le  thébain.  Un  
 peintre  ignorant  qu’il  avoit  chargé  immédiatement  
 avant le jour de  la fête de nettoyer le  tableau, en effaça  
 toute la beauté. 
 Dans le  même  tems,  Philifcus  s’acquit  de  l’honneur  
 à Rome par un  fimple  tableau dans lequel il re-  
 préfentoit tout  l’attelier d’un peintre,  avec un  petit  
 garçon qui fouffloit le feu. 
 Les édiles Varron  &  Muréna  ( c ’étoit l’an 60) firent  
 tranfporter  à Rome  ,  pour  l’embelliffement du  
 comice,  des enduits  de peinture à firefque, qu’on enleva  
 de deffus des murailles de brique à Lacédémone,  
 &  qu’on enchâffa foigneufement dans des quadres de  
 Lois ,  à  caufe de l’excellence des peintures  :  ouvrage  
 admirable par lui-même.,  ajoute Pline, il le fut bien  
 plus  encore par  la circonftance du transport. 
 •  Pendant l’édilité  de Scaurus en l’an  5 8 , on vit des  
 magnificences qui nous paroîtroient incroyables fans  
 l’autorité de Pline, &  incômpréhenfibles lans les ex-  
 •plications  de M. le comte de  Caylus  fur les jeux de  
 Curion ,  qui  fuivirent  d’affez  près ceux de Scaurus.  
 Pour ne parler que  de  la peinture, Scaurus  fit venir  
 de Sicyone,  oii l’art &  les artiftes avoient fixé depuis  
 .long-tems leur principal féjour, tous les tableaux qui  
 .pouyoïent  appartenir  au- public  &   que  les habitans  
 vendirent pour acquitter les  dettes de la ville. 
 Tome X I I . 
 Les faisions qui  régnoient dès-lors  dans Rome  &   
 qui  renverferent bientôt la république ,  engagèrent  
 Varron  &  Atticus à fe livrer totalement  à leu? goût  
 pour la littérature &  pour les beaux-arts. Atticus, le  
 ndele  ami  de Cicéron ,  donna  un  volume  avec  les  
 portraits deffines de  plufieurs  illuftres  perfonnages  
 &  Varron diftribua dans tous les endroits de l’empiré  
 romain  un recueil  de  fept cens figures  pareillement  
 demnees avec le nom de ceux qu’elles repréfentoient.  
 Le meme  \  arron atteftoit l’empreffement du peuple  
 romain pour  d’anciens reftes de peinture.  Quand  on  
 voulut  réparer le temple de Cérès, que Démophile  
 oc  Gorgafus  avoient  autrefois  ©rné  d’ouvrages  de  
 peinture &  de plaftique, on détacha des murs les pein-  
 tures  a  frefque, &   on eut  foin de  les encadrer ;  on  
 dilperla  auffi les figures  de plaftique. 
 Jules Céfar parvenu à la diftature l’an 49, augmenta  
 de  beaucoup  l’attention  &   l’admiration  des Romains  
 pour la Peinture, en dédiant l’Ajax &  la Médée  
 de Timomachus  à l’entrée du temple  de Vénus Gé-  
 mtnx :  ces  deux tableaux  lui  coûtèrent  80  talens  
 ( 376 mille livres). En l ’année 44, qui fut celle de  la  
 mort de Cefar, Lucius MunaciusPlancus ayant reçu le  
 titre d’tmperator, expofa au capitole le tableau dèNi-  
 comachus oii étoit repréfentée l'image de la Viftoire  
 conduifant  un  quadrige  au  milieu des  airs.  Obfer-  
 vons que  dans  tous  ces  récits  qui regardent Rome  
 ce font des peintres grecs qu’on y  voit paroître ; l’auteur  
 nomme  cependant pour  ces tems -  ci  Arellius  
 peintre romain,  qu’il place peu avant le régné d’Au-  
 gulte.^Arrêtons-nous donc fur ce peintre de°Rome. 
 Pline nous donne fon portrait  en ces mots  : Romtz  
 celeberfuit Arellius,  nijifiagitio  injigni corrupiffet ar-  
 tem, femper alicujus foeminæ amore Jlagrans ,  &  ob  id  
 deaspingens, fed dilectarum imagine, /. X X X V . c. 1 o.  
 Il faifoit  toujours les  déeffes  femblables  aux coiirti-  
 fanes,  dont  il  étoit  amoureux.  On  fait  que  Flora  
 étoit  fi  belle,  que  Cécilius Metellus  la fit peindre,  
 afin de confacrer  fon portrait dans  le temple de Caf-  
 tor & de Pollux. 
 On a remarqué que ce ne fut ni la première, ni la  
 derniere  fois  que  le portrait  d’une  courtifane reçut  
 un pareil honneur.  La  Vénus fortant des  eaux  étoit  
 ou le portrait de Campafpe maîtreffe d’Alexandre le  
 • grand,  félon P line,  ou bien celui  de  la  courtifane  
 Phryne ,  félon Athenée ,  1. X I I I . Augufte le confa-  
 cra dans le temple de  Jules Céfar.  Les  parties  inférieures  
 en etoient gâtées, &  perfonne ne fut capable  
 de  les  rétablir,  le  tems  acheva  de  ruiner  le  relie ;  
 alors on fit  faire une autre Vénus par Dorothée,  &   
 on la fubftitua à celle d’Apelle.  Pendant  que Phryné  
 fut jeune, elle fervit d’original à ceux qui peignoient  
 la déeffe  des amours.  La Vénus de Gnide fut encore  
 .tirée  fur  le  modèle  d’une  courtifane  que  Praxitèle  
 aimoit  éperdument.  Arellius  n’eft  donc pas  le  feul  
 peintre  ancien qui  peignit les  déeffes  d’après  quelques 
 unes de fes maîtreffes. 
 Le  Chriftianifme  n’eft  pas  exemt de  cette  pratique  
 ,  nous  avons plus  d’une Vierge peinte  par  les  
 modernes  d’après  leurs propres amantes.  M.  Spon,  
 dans fes mifcellannées  antiq.  érudit, p.  13  ,  rapporte  
 l’explication d’une médaille de l’empereur Julien, fur  
 laquelle on voit d’un côté Sérapis qui  reffemble parfaitement  
 à Julien,  &  de  l’autre la figure d’un Her-  
 manubis.  Il  n’étoit point  rare  de  voir  des  ftatues  
 d’hommes  toutes  femblables  à  celles  de  quelques  
 dieux.  La  flatterie ou la vanité  ont  fouvent produit  
 cette idée. 
 Juftin martyr dit, en fe moquant'des païens, qu’ils  
 adoroient  les maîtreffes de  leurs peintres' &   les  mignons  
 de  leurs  fculpteurs : mais n’a^t-on pas tort de  
 rendre les païens  refponfables des traits d’un Zeuxis  
 ou d’un Lyfippe ? Ceux qui, parmi les Chrétiens, vénèrent  
 les images de S. Charles Borromée, ne véne-  
 M  m 
 à