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» me en , y 6c .....6°. Les fyllabés ci ,là 6c dà,
» ainfi que les enclitiques ne, ve, que des Latins, &
» l’enclitique t» des Grecs, font auffi des/?<*mc«/«...|.v
„ 7°. Il y a d’autres fortes de particules qui fervent à
» la compofition des mots, & comme elles ne font
,» jamais de mots à part, on les nomme des par-
» ticules inféparables, comme re, de, des, mes, dis,
&c......Tous ces différens ufages des particules, 6c
» l’utilité dont il eft de connaître la force qu’elles
» ont dans le difcours , pourroit faire croire que ce
» rie feroit pas mal fait de faire de la particule une
» dixième partie d’oraifon ».
Il paroît évidemment par cet extrait de ce qu’a
écrit fur les particules le favant abbé de Dangeau,
qu’il y a fur cet objet une incertitude finguliere 6c
une confufion étrange dans le langage des Grammairiens
; 6c j’ajoute qu’il y a bien des erreurs.
i°. Donner le nom de particule à certains petits
mots, quand on ne fait fous quel genre ou partie d’oraifon
on les doit ranger; c’eft conftater par un nom
d’une fignification vague , l’ignorance d’un fait que
l’on laide indécis par malhabileté ou par pareffe. Il
feroit & plus fimple & plus fage , ou de déclarer
qu’on ignore la nature de ces mots , au lieu d’en
impofer par un nom qui femble exprimer une idee,
du d’en rechercher la nature par voies ouvertes à
la fagacité des Grammairiens.
i° . Regarder comme particules de petits mots qui
à divers égards peuvent fe ranger fous diverfes parties
d’oraifon, ou qui font, dit-on, quelquefois préposion
s & quelquefois adverbes ; c’eft introduire
dans le langage grammatical la périffo'logie 6c la
confufion. Quand vous trouvez, il efl f i favant,
dites que /eft adverbe ; & dans je ne fais f i cela efl
entendu, dites que f i efl conjonction : mais quelle né-
ceffité y a-t-il de dire que f i foit particule > Au refie,
il arrive fouvent que l’on croit mal-à-propos qu un
mot change d’efpece , parce que quelque ellipfe dérobe
aux yeux les caraCieres de fyntaxe qui conviennent
naturellement à ce mot : le mot apres, dit
M. de Dangeau, efl prépofition dans cette phrafe ,
Pierre marche après Jacques ; il efl adverbe dans celle-
ci , Jacques marchoit devant, & pierre marchoit après :
c’eft une prépofition dans la derniere phrafe comme
dans la première, mais il y a ellipfe dans la fécondé
, 6c c’eft comme fi l’on difoit , Jacques marchoit
devant ( ou plutôt avant j Pierre , ^ & Pierre marchoit
après Jacques. On peut dire en général qu’il efl très-
rare qu’un mot change d’efpece ; 6c cela eft tellement
contre nature, que fi nous en avons quelques-
uns que nous fommes forces d’admettre dans ^plu-
fieurs claffes, ou il faut reconnoître que c’eft l’effet
de quelque figure de conftmCtion ou de fyntaxe que
l’habitude ne nous laiffe plus foupçonner mais que
l’art peut retrouver , ou il faut l’attribuer à différentes
étymologies : par exemple, notre adverbe fi vient
certainement de l’adverbe latin f i e , &-notre conjonction
f i eft fans altération la conjonction latine/.
3°. Je ne crois pas , quoique M. de Dangeau le
dife très-affirmativement, que l’ori doive donner le
nom de particule à nos petits mots d u , des , au, aux.
La Grammaire ne doit point juger des mots par l’étendue
de leur matériel, ni les nommer d’après ce
jugement ; c’eft leur deftination qui doit fixer leur
nature. Or les mots dont il s’agit, loin d’être des
particules dans le fens diminutif que préfente ce mot,
équivalent au contraire à deux parties d’oraifon,
puifque du veut dire de le , des veut dire de les, au
veut dire aie, Sc aux veut dire à les. C ’eft ainfi qu’il
faut les défigrier, en marquant que ce font des mots
compofés équivalens à telle prépofition & tel article.
C’eft encore à-peu-près la meme chofe des mots
en, y & dont : celui-ci eft équivalent à de lequel , de
laquelle , de lefqiiels, ou de lefquelles : les deux autres
font de vrais adverbes, puifque le iriot en fignifie de
lui, d'elle, de cela , de ce lieu , d'eux , d'elles , de ces
ckofes, de ces lieux ; 6c que le mot y veut dire à cela ,
à ces chofes, en ce lieu, en ces lieux : or tout mot équivalent
à une prépofition avec fon complément, eft
un adverbe. V t>ye{ A dverbe.
4°. Enfin je fuis perfuadé, contre l’avis même de
l’habile grammairien dont j’ai rapporté les paroles,
que ce feroit très-mal fait de faire des particules une
nouvelle partie d’oraifon. On vient de voir que la
plupart de celles qu’il admettoit avec le gros des
grammairiens, ont déjà leur place fixée dans les parties
d’oraifon généralement reconnues , 6c par confisquent
qu’il eft au moins inutile d’imaginer pour
ces mots une claffe à part.
Les autres particules , dont je n’ai rien dit encore ,
& que je trouve en effet très-raifonnable de défigner
par cette dénomination, ne conftituent pas pour
cela une partie d’oraifon , c’eft-à-dire , une efpece
particulière de mots : 6c en voici la preuve. Un mot
eft une totalité de fons devenue par ufage, pour ceux
qui l’ entendent , le figne d’une idée totale : voyeç
Mot : or les particules, que je confens de reconnoître
fous ce nom, piufqu’il faut bien en fixer la notion
par un terme propre, ne font les fignes d’aucune idée
totale ; la plupart font des fyllabés qui ne deviennent
fignificatives, qu’autant qu’elles font jointes à d’autres
mots dont elles deviennent parties, de forte
qu’on ne peut pas même dire d’aucune que ce foit une
totalité de fons, puifque chacune devient fon partiel
du mot entier qui en réfulte.
Au lieu donc de regarder les particules comme des
mots, il faut s’en tenir à la notion indiquée par l’étymologie
même du nom , 6c dire que ce font des
parties élémentaires qui entrent dans la compofition de
certains mots, pour ajouter a l idee primitive du mot finir.
pie auquel on les adapte , une idée acceffoire dont ces élé-
mens font les fignes.
On peut diftinguer deux fortes de particules, à caufe
des deux maniérés dont elles peuvent s’adapter avec
le mot fimple dont elles modifient la fignification primitive,
les unes font prépofitives ,«ou préfixes , pour
parler le langage de la grammaire hébraïque , parce
qu’elles fe mettent à la tête du mot ; les autres font
pofipofitives , ou affixes , parce qu’elles fe mettent à
la fin du mot. _ f
Les particules que je nomme prépofitives ou préfixés
, s’appellent communément prèpofitions inféparables
; mais cette dénomination eft doublement vi-
cieiifie : i° . elle confond les élémens dont il s’agit ici
avec l’efpece de mots à laquelle convient exclufive-
ment le nom de prépofition .* z°. elle prefente comme
fondamentale l’idée de lapofition de ces particules ,
en la nommant la première ; 6c elle montre comme
fubordonnée & acceffoire l’idée de leur nature élémentaire
, en la defignant en fécond : au lieu que la
dénomination de particule prepofitive ou préfixe n a-
bufe du nom d’aucune efpece de mot, & prefente les
idées dans leur ordre naturel. On ne fauroit mettre
dans ces termes techniques trop de vérité , trop de
clarté , ni trop de jufteffe.
Voici dans l’ordre alphabétique nos principales
particules prépofitives.
A , ou ad, particule empruntée de la prépofition
latine ad, marque , comme cette prépofition, la ten?
dance vers un but phyfique ou moral. Onfe fiert dey
dans les mots que nous compofons nous-mêmes à l’imitation
de ceux du latin , 6c même dans quelques-
uns de ceux que nous avons empruntés : aguerrir ( ad
bellum aptiorem facere ) , améliorer ( ad melius du-
cere ) , anéantir ( réduire à néant, ad nihilum ) ;
avocat que l’on écrivoit 6c que l’on prononçoit anciennement
advocat ( ad alienam caufam dicendam
vocatus ). On le fert de ad quand le motfimple com-
P A R p a r Ï G t
Jnence par une voyelle, par un h muet, par la con-
fonne ni, & quelquefois quand il .commence pary ou
par y: adapter ( aptar.e ad ) , adhérer ( hærere ad ) ,
admettre ( mettre dans ) , adjoint ( junétus ad ) , adverbe
( ad verbum junétus ) , &c. Dans quelques cas,
le d de Æ^fe transforme en la confonne qui commence
le mot fimple , fi c’eft un ç ou un q , comme accumuler
, acquérir ; ijn f , comme affamer ; un g , comme
avgréger ; un l , comme allaiter ; un n , comme annexer
; un p , .comme applanir, appauvrir, appofi-
tion ; un r , comme arranger, arrondir ; un f , comme
affaillir, ajfidu , affortir ; un t coriime attribut, atténué
, &c.
Ab ou abs , qui eft fans aucune altération la prépofition
latine , marque principalement la fépara-
tion ; comme abhorrer, abjuration, ablution, abnégation
, abortif, abrogé y abfolution, abfiinence., ab lirait,
abufif y &cc.
A m i marque quelquefois la priorité, & alors il
vient de là prépofition latine a n te, comme dans antidate
; mais ordinairement nous .confervons le latin
en entier , antéçejfeur. Plus fouvent il vient du grec
dv-t), contra, & alors il marque oppofition : ainfi le
poeme immortel du cardinal de Polignac , dont M.
de Boijgainville a donné au public une excellente
traduûion, porte à jufte titre le nom d'Antilucr.ece,
puifque la do&rine du poète moderne eft tout-à-fait
oppofée au matérialifine abfurde & impie de l’ancien.
Voyc{ Ant i.
CoyCom, colycor&ccon, eft une particule empruntée
de la prépofition latine cùm (avec) dont elle garde le
fens dans la compofition. On fe fert de co devant un
mot fimple qui commence par une v o y elle ou par un
h muet ; coadjuteur y coéternel, coïncidence^ coopération,
cohabiter , cohéritier. On emploie corn devant une des
confonnes labiales b , p , ou m ; combattre compétiteur
, commutation. On fe fert de col, quand le mot
fimple commence par l ; collection, colliger, collu-
fion : le mot colporteur n’ eft point contraire à cette
réglé , il fignifie porteur au col. On fait ufage de cor
devant les mots qui commencent par r, corrélatif, cor-
refpondance. Dans toutes les autres oeeafions on fe
fert de con ; concordance , condenfer, confédération ,
conglutiner , conjonctif, connexion , conquérir , con-
fentir , confpirer, contemporain , convention.
Contre , fervant comme particule , conferve le même
fens d’pppofition qui eft propre à la prépofition;
contredire , contremander , .contrevenir : contrefaire c’eft
imiter contre la vérité ; contrefait veut quelquefois
dire , fait contre les lois ordinaires & les proportions
de la nature ; contretirer une .eftampe, c’eft la
tirer dans un fens oppofé & contraire. Mais dans
contrefigner, contre veut feulement dire auprès.
D é fert quelquefois à étendre la fignification du
mot ; elR eft ampliative , comme dans déclarer ,
découper, detremper, devorer : d’autres fois elle eft négative
fie fert à marquer la fiippreffion de l’idée
énoncée par le mot fimple , comme dans débarquer,
décamper, dédire , défaire, dégénéré, déloyal, dé-
mafqué , dénaturé, dépourvu , dérèglement, défabu-
fe r, détorfe, dévalifer.
Dès eft toujours-négative dansie mêmefens que l’on
vient d e y oir; defaccorder, dèjennvyer, déshabiller ^déshérité,
déshonneur ydéfintéreffement ydéfordre , défunion.
D i eft communément une particule extenfive ; di-
riger, c’eft régler de point en point ; dilater, c’eft
donner beaucoup d’étendue ; diminuer, c’eft rendre
plus menu, &c.
Dis eft plus fouvent une particule négative ; dif-
cordance , difgrâce , difpmportion , dijparité. Quel-
cjuefois elle marque diverfité ; difputer ( difputare )
lignifie littéralement diverfaputare , ce qui eft l’origine
des difputes; diftinguer, félon M. l’abbé de Dan-
■ geau ., ( Opufc. p, pgcf, ) vient de dis 6c de tingere
( teindre ) , 6c fignifie proprement teindre d'une cou»
leur differente , ce qui eft très-propre à diftinguer »
difeerner, voir les différences ; dfpofer, placer 6 s diverses
parties, &c Dans diffamer, difficile, difforme l
c elt la particule dis dont le s final eft changé .en/ à
caufe du /initial cl(es mots fimples , 6c elle y eft négative.
' " J
E ' 6c ex font des particules qui viennent fies pro-
pofitions latines mm e x , 6c qui dans la compofition
marquent une idée acceffoire d’exfraétion oui de fé-
paration: èbrancher, ôter les branches; écervelé, qui
a perdu la cervelle ; édenter, ôter les dents \ effréné
qui s’eft fouftrait au frein ; élargir, c’eft fé,parer davantage
les paities élémentaires ou les bonnes ; émij-
fion , i’aétion de pouffer hors de foi ; énerver , ôter la
force aux nerfs ; épouffeter, ôter la pouffiere , & c .
exalter, mettre au-delfus des autres ; excéder ’ aller
hors des bornes ; ex hereder, oter l’hentage ; ex fier ,
être hors du néant ; expofer, mettre au .dehors ; exterminer
, mettre hors des ternies o.u des bornes &c.
Il ne faut pas croire au refte, comme le donne à entendre
M. l’abbé Regnier , ( Grapinu franç. in-i i.p .
545- vx-4r°.pag. J74. ) que ce foit la particule é qui
le trouve à la tête des mots écolier , épi, éponge,
état, étude, efpace , efprit , efpece , Scc. 6c de plu-
fieurs autres qui viennent de mots latins commençant
par s fuivie d’une autre confonne , fcholaris ,
fpica, fpongia, ftatus ,- ftudium , fpadum, fpiritus
fpecies., 6$.c.
La difficulté que l’on trouva à prononcer de fuite
les deux confonnes initiales, fit prendre naturellement
le parti de prononcer la première comme dans
l’alphabet, es ; & dès lors on d it, 6c l’on écrivit en-
fuite , efeolier , efpi , efponge , eftat, efpace , efprit ,
efpece , &c. l’euphonie dans laluite fupprima la 1er-
tre s de la prononciation fie quelques-uns de ces
mots , 6c 1 on dit ecolier , épi, éponge, état, étude ;
6c ce n’eft que depuis peu que nous avons fupprimé
cette lettre dans l'orthographe : elle fubfifte encore
dans celle des mots efpace , efprit, efpece , parce
qu’on l’y prononce. Si cet e ne s’eft point mis dans
quelques dérivés de ,ces mots, ou dans d’autres mots
d’origine femblable , c’eft qu’ils fe font introduits
dans la langue en d’autres tems, & qu’étant d’un
ufage moins populaire, ils ont été moins expofésà
fouffrir quelque altération dans la bouche des .gens
• éclairés qui les introduifirent.
La particule en , dans la compofition , conferve le
■ même fens.à-peu-près que la prépofition, 6c marque
pofition ou' difpofition: pofition, comme dans en-
caiffer , endoffer , enfoncer , engager , enlever , enjeu ,
enregifirer , enfevelir , entaffer, envifager : difpofition ,
comme dans encourager , endormir -, engroffer , enhardir
, enrichir , enfanglanter, enivrer. Lorfque le mot
fimple commence par une des labiales^ , p ou m, la
particule en devient em ; embaumer, empaler , emmailloter
: & l’abbréviatem- fie Richelet, M. l’abbé Gou-
j e t , pèche contre ‘l’ufage & contre l’analogie, lorf-
qu’il écrit enmailloter, emmancher , enménqger ,enmener.
In eft une particule qui a dans notre langue, ainfi
qu’elle avoit en latin , deux ufages très-différens.
1 °. Elle confervè en plufieurs mots le fens de la prépofition
latine in, ou de notre particule françoife en,
6c par conféquent elle marque pofition ou difpofition
; pofition , comme incarnation , infufer, ingrédient
, inhumation , initier, inné , inoculation , inf-
crire, intrus , invafion', difpofition , comme inciter ,
induire , influence , innover, inquifition , infigne, intention
yinverfion. In6cen ont tellement le même fens,
quand on les confidere comme venues de la prépofition
, que l’ufage les partage quelquefois entre des
mots fimples qui ont une même origine 6c un même
fens individuel , 6c qui ne différent que par le fens
fpécifique : inclination , enclin ; - inflammation., en