1 5. Le mot eft le figne d’un concept cle l’efprit, il
eft ou fimple 6c incomplexe, ou complexe ; fimple ,
fi le concept ou la perception eft fimple, & la perception
fimple n’eft ni vraie, ni faufle ; ou la perception
eft complexe , 6c participe de la fauflete 6c de
la vérité ; 6c le terme eft complexe.
16. Le nom eft un mot d’inftitution , fans rapport
au teins . , dont aucune des parties prife féparement
Sc en elle-même n’a de fignincation.
17. Le verbe eft un mot qui marque le tems, dont
aucune partie ne fignifie par elle-même , 6c qui eft
toujours le figne des chofes qui fe difent d’un autre.
■ 1,8. Le dïfcours eft une fuite de mots d’inftitution ,
dont chaque partie féparée 6c l’enfemble lignifient.
19. Entre les difcours, lefeulquifoit énonciatif 6c
appartenant à l’hermeneutique, eft celui qui énonce
le vrai ou le faux ; les autres font ou de la rhétorique
ou dé la poéfie. Il a fonfujet, fon prédicat 6c fa copule.
ao. Il y a cinq fortes de propofitions , clés fimples
& des complexes, des affirmatives & des négatives,
des univerfelles, des particulières, des indefinies 6c
des fingulieres, des impures 6c modales. Les modales
font ou néceflaires ou poffibles, ou contingentes, ou
impoffibles.
a i. Il y a trois chofes à confidérer dans la propofition
, l’oppofition , l’équipollence & la converfion.
22. L’oppofition eft ou contradictoire ou contraire
ou fous-contraire.
23. L’équipollence fait que deux propofitions délignent
la meme chofe, 6c peuvent être enfemble
toutes les deux vraies ou toutes les deux faillies.
24. La converfion eft une tranfpofition de termes,
telle que la propofition affirmative 6c négative foit
toujours vraie.
25. Le fyllogifme eft un difcours oîi de prémilfes
poféës il s’enfuit néceffairement quelque chofe.
26. Trois termes font toute la matière du fyllogifme.
La difpofition de ces termes, félon les figures &
les modes, en eft la forme.
27. La figure eft une difpofition du terme moyen
6c des extrêmes , telle que la conféquence foit bien
tirée. Le mode eft la difpofition des propofitions, eu
egard à la quantité & à la qualité.
28. Il y a trois figures de fillogifme. Dans la première
, le terme moyen eft fujet de la majeure , 6c
prédicat de la mineure ; 6c il y a quatre modes où
la conféquence eft bien tirée. Dans la fécondé , le
terme moyen eft le prédicat des deux extrêmes ,. 6c
i l y a quatre modes qui concluent bien. Dans la troi-
fieme, le moyen eft le fujet aux deux extrêmes, 6c
il y a fix modes oii la conclulion eft bonne.
29. Tout fyllogifme eft dans quelqu’une de ces figures,
fe parfait dans la première, 6c peutfe réduire
à fon mode univerfel.
• 30. Il y a fix autres formes du raifonnement ; la
converfion des termes , l’induction , l’exemple, l’ab-
duCtion, l’ inftance, l’enthymème. Mais toutes ayant
force de fyllogifme , peuvent 6c doivent y être réduites.
31. L’invention des fyllogifmes exige 1. les termes
du problème donné ; 6c la fiippolition de la chofe
en queftion, des définitions, des propriétés, des ân-
técedences , des conféquences , des répugnances. 2.
Le difeernement des effentiels, des propres, des accidentels
, des certaines 6c des probables.'3. Le choix
de conféquences univerfelles. 4. Le choix d’antécédences
dont la chofe foit une conféquence univer-
felle. 5. L’attention de joindre le figne d’univerfalité
non au cônféquent, mais à l’antécédent. 6. L’emploi
de conféquences prochaines & non éloignées. 7. Le
même emploi des antécédens. 8. La préférence de
conféquences d’une chofe univerfeUe, 6c de conféquences
univerfelles d’une chofe.
La fineffie & détendue d’efprit qu’il y a dans toutes
ces obfervations eft incroyable. Ariftote n’auroit découvert
que ces chofes, qu’il faudroit le regarder
comme un homme du premier ordre. Il eût perfectionné
tout d’un coup la logique , s’il eût diftingué
les idées de leurs Lignes , 6c qu’il fe fût plus attaché
aux notions qu’aux mots. Interrogez les Grammairiens
fur l’utilité de fes dift mêlions.
3 2. Tout difcours feientifique eft appuyé fur quelque
penfée antérieure de la ,chofe dont on difeourr.
33. Savoir, c’eft entendre ce qu’une chofe e ft,
qu’elle e ft, que telle eft fa caufe, 6c qu’elle ne peut
être autrement.
3 4. La démonftration eft une fuite de fyllogifmes
d’où naît la fcience.
3 5. La fcience apodiêlique eft des caufes vraies,
premières, immédiates ; les plus certaines , 6c les
moins fujettes à une démonftration préliminaire.
36. Il n’y a de fcience démonftrative que d’une
chofe néceflaire ; la démonftration eft donc compofée
de chofes néceflaires.
37. Ce qu’on énonce du tou t, eft ce qui convient
au tou t, par lui-même 6c toujours.
3 8. Le premier univerfel eft ce qui eft par foi-même
, dans chaque chofe, parce que la chofe eft
chofe.
39. La démonftration fe fait par des conclufions
d’éternelle vérité. D ’où il s’enfuit qu’il n’y a ni démonftration
des chofes paflageres, ni fcience, ni meme
définitions.
40. Savoir que la chofe eft, eft un, 6c favoir pourquoi
elle e f t , eft un autre. De-là deux fortes de dé-
monftrations, l ’une à priori^ l’autre àpo/Ieriori.La.
démonftration à priori eft la vraie 6c la plus par-,
faite..
41. L’ignorance eft l’oppofé de la fcience; ou c’eft
une négation pure, ou une dépravation. Cette dernière
eft la pire; elle naît d’un fyllogifme qui eft faux,
dont le moyen pèche. T elle en l’ignorance qui naît
du vice des fens.
42. Nulle fcience ne nait immédiatement des fens.'
Ils ont pour objet l’individuel ou fingulier , 6c la
fcience eft des univerfaux. Ils y conduifent, parce
que l’on palfe de l’individuel connu par le fens à
l’univerfel.
43. On procédé par induêlion, en allant des indi-;
viduels connus par le fens aux univerfaux.
44 .Le fyllogifme eft dialeêlique, lorfque la con-
clufion fuit de chofe probable : or le probable eft ce
qui femble à tous ou à plufieurs , aux hommes inf-
truits & fages.
45. La dialeêlique n’ eft que l’art de conjeêhirer.
C’en par cette railon qu’elle n’atteint pas toujours fa
fin.
46. Dans toute propofition, dans tout problème
on énonce ou le genre , ou la différence, ou la définition
, ou le propre, ou l’accident.
47. La définition eft un difcours qui explique la
nature de la chofe, fon propre , non ce qu’elle eft ,
mais ce qui y eft. Le genre eft ce qui peut fe dire de
plufieurs efpeces différentes. L’accident eft ce qui
peut être ou n’être pas dans la chofe.
48. Les argumens de la dialeêlique procèdent ou
par l’induêlion ou par le fyllogifme. Cet art a fes lieux.
On emploie l’induûion contre les ignorans, le fyllogifme
avec les hommes inftruits.
49. L’élenchus eft un fyllogifme qui contredit la
conclulion de l’antagonifte ; fi l’élenenus eft faux, le
fyllogifme eft d’un fophifte.
50. L’élenchus eft fophiftiqueou dans les mots ou
hors des mots.
51. Il y a fix fortes de fophifmes de mots, l’homo-
nilme , l’amphibologie , la çompofition, la divifion^
l’accent, la figure du mot.
<2. Il ÿ a fept fortes de fophifmes hors des mots ;
le lophifme d’accident, léfophifme d’univerfalité, ou
de conclufion d’une chofe avouée avec reftriêlion à
une chofe fans reftriêlion ; le fophifme fondé fur
l’ignorance de l’élenchus; Je fophifme du confisquent;
la pétition de principe ; le fophifme de caufe
fuppofée telle ,& non telle ; le fophifme des interrogations
fucceffives.
53. Le fophifte trompe ou par des chofes faillies ;
ou par des paradoxes, ou par le folécifme, ou parla
tautologie. Voilà les limites de fon art.
.De La philofàphie naturelle cTArifiott. II difoit i . le
-principe des chofes naturelles n’eft: point un, comme
il a plu aux Eléatiques ; ce n’eft point l’homéomérie
d’Anaxogore ; ni les atomes de Leucippe & de Dé-
mocrite ; ni les élémens fenfibles de Thaïes 6c de fon
école, ni les nombres de. Pithagore, ni les idées de
Platon.
2. Il faut que les principes dès èhofes naturelles
foient oppofes entr’eux, par qualités 6c par privations.
3 . J’appelle principes, des chofes qui ne font point
réciproquement les unes des autres -, ni d’autres cho1
fes , mais qui font d’elles-mêmes , 6c dont tout eft.
Tels font les premiers contraires. Puifqu’ils font premiers
, ils ne font point d’autres ; puifqu’ils font
contraires, ils ne font pas les uns des autres.
4. Ils ne font pas infinis ; fans cette condition , il
n’y a nul accès à la connoiffance de la natufe. Il y en
a plus de deux. DeuX le mettroient en équilibre à
la fin, ou fe détmiroient, 6c rien ne ferOit prd*
duit.
5. Il y a trois principes des chofes naturelles ; deux
contraires , la forme 6c la privation ; Un troifiéme
également fournis aux dèiix autres, la matière, La
forme & la matière conftituent la chofe. La priva*
tion n’eft qu’accidentelle. Elle n’entre point dans la
matière. Elle n’a rien qui lui convienne*
6. Il faut què Ce qui donne origine aux chofes foit
une puiffance. Cette puiffance eft la matière première.
Les chofes ne font pas de ce qui ëli aêtuelle-
ment, ni de ce qui n’eftpas actuellement, car ce n’eft
rien.
7. La matière ni ne s’èngendre, ni rie fe détruit ;
car elle eft première ; le fiijet infini de tout. Les chofes
font formées premièrement, non pas d’ elles*
mêmes, mais par accident. Elles fe refondront ou fe
réfolvent en elle.
8. Des chofes qui fon t, les unes font par letir nature
, d’autres par des caufes. Les premières ont en
elles le principe du mouvement ; les fécondés ne l’ont
pas. La nature eft le principe 6c la caufe du mouvement
ou du repos en ce qui eft premièrement de foi
6c non par accident; ou elles fe repofent 6c fe meuvent
par leur nature ; telles font les fubftartces matérielles.
Les propriétés font analogues à la nature qui
confifte dans la matière 6c dans la forme. Cependant
la forme qui eft un aêle eft plus de nature que la ma*
tiere, ■ '■
Ce principe eft très^obfcilr. On ne fait ce que le
philofophe entend par nature. Il femble avoir pris ce
mot fous deux acceptions différentes, l’une de pro*
priété effentielle , l’autre de caufe générale.
9. Il y a quatre efpeces de caufes ; la matérielle $
dont tout eft ; la formelle, par qui tout e ft , 6c qui
eft la caufe de l’effencede chaque chofe ; l’efficiente,
qui produit tout ; & la finale pour laquelle tout eft.
Ces caufes font prochaines ou éloignées ; principales
oïl acceffoires ; en aêle ou en puifl’aneé ; particu*
lieres ou univerfelles.
10. Le hafard eft caufe.de beaucoup d’effets. G’eft
un accident qui furvient à des chofes projettées,..Le
fortuit fe prend dans une acception plus étendue.
C ’eft un accident qui furvient àdes chofes projettées
parla nature, du moins pour une fin matquée.
11. La nature n’agit point fortuitement, au hafard
,& fans deffein : ce que nature prémédite a lieu 3
en tout ou en partie , comme dans les, monftres;
12. Il y a deux néceffités, l’une abfolue, l’une conditionnelle.
La premiere eft de la màtiete;fa fécondé;
de la forme ou fin:
13. Le mouvement eft un aêle de la puiffance ert
aêlion:
14. Ce qui paffe fans fin eft infini. Il n’y a point
d’aête infini dans la nature. Il y a cependant des êtres
infinis en puiffance.
15. Lé lieu eft une furface immédiate 6c immobile
d’un corps qui en contient un autre. Tout corps
qu’un autre contient eft dans le lieu; CeqUi n’eft pas
contenu dans un autre n?eft pas dans le lieu. Les corps
ou fe repofent dans leur lieu naturel, ou ils y tendent
comme des portions arrachées à un tout;
16. Le vuide eft un lieu dénué de corps. Il n’y en
a point de tels dans la nature. Le vuide fe fuppofe ;
il n’y auroit point de mouvement. ■ Car il n’y auroit
ni haut, ni bas, ni aucune partie où le mouvement
tendît.
17. Le temS eft le calcul du mouvement relatif à la
priorité & à la poftériorité. Les parties du tems touchent
à -l’inftant préfent, comme les parties d’une
ligne au point.
18. T o u t mouvement & tout changement fe fait
dans le tems ; & il y a dans tout être mu, vîteffe ou
lenteur qui fe peut déterminer par le tems. Ainfi le
ciel, la terre & la mer font dans le tems, parce qu’ils
peuvent être mus.
19. Le tems étant un nombre nombre ; il faut qu’il
y ait un être nombreux qui foit fon fupport;
20. Le repos eft la privation du mouvement dans
un corps confidéré comme mobile.
21. Point de mouvement qui fe falle en uninftanti
Il fe fait toujours darts le tems.
231 Ce qui le meut dans un tems entier, fe meut
dans toutes les parties de ce tems.
24. Tout mouvement eft fini ; car il fe fait dans lë
tems*
25. Tout ce qui fe meut eft mu par un autre qui
agit ou an-dedans ou an-dehors du mobile.
26i Mais comme ce progrès à l’infini eft impofli-
ble ; il faut donc arriver à un premier moteur, qui
ne prenne fon mouvement de rien, 6c qui foit l’origine
de tout mouvement.
2<5. Ce premier moteur eft immobile, car s’il fe
mouvoit, de feroit par un autre ; car rien ne fe meut
de foi. Il eft éternel, car tout fe meut de toute éternité
, 6c fi le mouvement avoit commencé , le premier
moteur n’auroit pu mouvoir, 6c la durée ne
feroit pas éternelle. Il eft indivifible & fans quantité.
Il eft infini ; car le moteur doit être le premier*
puifqu’il meut de toute éternité. Sa puiffance eft illimitée
; or une puiffance infinie ne peut fe fuppofef
dans une quantité finie, telle qu’eft le corps.
27. Le diel compofé de corps parfaits,comprenant
tout, & rien ne le comprenant, eft parfait.
28. Il y a autant de corps fimples que de différences
dans le mouvement fimple. Or il y a deux mou*
vemens fimples , le reêldigrte & le circulaire. Celui-
là tend à s’éloigner du centre ou en approcher, fans
modification ou avec 1 modification. Comme il y a
quatre mouvemens reêtilignes fimples, il y a quatre
elemens ou corps fimples. Le mouvement circulaire
étant de nature contraire au mouvèment reêliligne ,
il faut qu’il y ait une cinquième effence, differeftte
des autres , plus parfaite , divine, c’eft le cieh
; 29. Le ciel n’eft ni pelant, ni leger. Il ne tend
ni à s’approcher,. ni à s’éloigner du centre comme
les graves & les légers, Il fe meut circulairement,
30. Le ciel n’ayant point de contraire * il eft fana