6 $ 2 P I Q
due d’une plaie où un nerf avo.it été-piqué, avec de
l’huile de térébenthine bouillante ; cette cautérifation
faifoit ceffer les. accidens , comme on détruit la douleur
de dents, en brûlant avec un fer rouge, le nerf
qui eft a découvert par la carie : lorfque la cautéri-
fation né réuflifl'oit pas, on n’héfitoit point à faire
des incifions tranfverfales pour couper abfolument
les parties dont la tenfion étoit l’origine de maux
formidables. /
La piquure ou morfure des animaux venimeux a
des fuites très-funeftes, tant par la qualité délétère
du poifon, que par la blefliire des parties nerveufes..
Dans les pays où la morfure des animaux venimeux
eft la plus dangéreufe, comme en Afrique, les ha-
bitans ne fe guériflent que. par des applications exté-,
rieures; lesfecours de l’art ont toujours été dirigés
dans la vue d’empêcher le venin de s’étendre ,
& de lui ouvrir une iflùe au-dehors ; c’èft ce qui
a fait prefcnre de fortes ligatures au-defliis de la
blefliire; & de laver promptement la plaie avec
de l’urine ou de l’eau falée, de l’eau-de-vie, du vin
chaud, du vinaigre, dans laquelle lotion on faifoit
diffoudre de la plus vieille thériaque qu’on pouvoit
trouver ; le malade y tiendra la partie piquée affez
de tems, & la liqueur doit être la plus chaude . qu’il
pourra la fupporter : on applique enfuite de la thériaque.
Ambroifé Paré dit qu’il n’a jamais manqué'
de guérir ceux qu’il a traités, ainfi, à moins que le
venin n’eût déjà gagné les parties nobles. Pour attirer
le venin , il recommande l’application des animaux
ouverts tout vivans, & enfin la cautérifation
pour conferver & détruire la partie infeéféeT Les
cordiaux alexipharmaques, éto.ient prefcrits pour
l’intérieur, dans l’intention de pouffer le virus au-
dehors.
Ce traitement a fans doute eu fouvent le fuccès
qu’on en efpéroit : des perionnesnrès-robuftes ont
pu réfifter à l’aôion des remedes chauds pris intérieurement,
d’autres s’en font très-mal trouyé; il
Faut fuivre les indications particulières que l’état
des chofes préfente, & être'inftruit par l’expérience
qui conduit dans ces cas mieux que le raifonne-
rnent.
La morfure des chiens enragés caufe rarement
des accidens primitifs, & les plaies qui en réftiltent
fe guérilfent aifément : cela n’empêche pas que vers
le quarantième jour de la blefliire, ceux qui ont été
mordus, ne foient attaqués d’hydrophobie, maladie
cruelle , dont on guérit par les antifpafmodiques.
Voyt{ Hydrophobie & R age. Le venin qui caufe
ces accidens a une nature particulière, & les effets
font différens de tout autre venin connu. Des obfer-
vations affez bien conftatées femblent faire croire
que fi on eût dilaté & cautérifé les plaies, on auroit
pû prévenir l’hydrophobie ; les fririions mercurielles
, dans l’intervalle du tems qui fe paffe entre la
morfure & la manifeftation des fymptômes de la
rage, peuvent détruire le principe venimeux ; &
les antifpafmodiques ont réufîi à guérir la rage
carafiérifée. Voye^ un ejfaifur Vhydrophobie Jfpar le
dofteur Nugent, traduit en françois, & qu’on trouv
e chez Cavelier.
La morfure des viperes ne donne pas tant de délai
; en peu d’heures les perfonnes mordues fouffrent
des anxiétés mortelles, le teint devient jaune, elles
vomiffent de la bile verte ; le membre piqué devient
douloureux, fe gonfle prodigieufement Sc devient
noir.
L’alkali volatil a été découvert par M. de Jufîieu,
comme un fpécifique contre le venin de la vipere,
mais oh n’a pas de meilleur remede que de faire
tremper promptementla partie bleffée dans de l’huile
d’olive chaude : c’eft un fpécifîque éprouvé, qui guérit
comme par enchantement, en faifant ceffer les
P I R
accidens qui paroiffent être produits par l’a&ion du
venin fur les parties vitales. Voye^ les obfervations
de M.Ponteau, célébré chirurgien de Lyon , dans un
ouvrage qu’ifa publié en 1760, fous le titre de Mé-~
langes de. Chirurgie. ( Y )
PiQUXJRE, terme d'Ouvrières ;...ornemens que l’on
fait fur une étoffe par compartiment & avec fyrné-
trie, en la piquant & coupant avec un emporte-pieçe
de fer tranchant. C’eft aufli un corps de femme piqué
par le tailleur, avant qu’il foit couvert d’étoffe.. BHH . ■ ■ I Piquu re, terme de Couturière ; cofps de toile, garni
de baleine & piqué, qu’on met aux enfans pbur
leur conferVëf la taille ; mais pour y reuflir, il faut
tourner tous les jours ces Portés de corps, ' '
PIQUITINGÄ, ( Ichthyolög.) petit poiffon des rivières
du Bréfil ; il eft à peine de deux pouces'de*
long; fes .yeux gros & noirs ont l’iris blanche ; il a
f ix nageoires , outre la queue qui eft fourchue. Sa
bouche paroît fort petite ; fa tête eft d’un blanc argentin
; fon dos eft olivâtre ; fon ventre eft couvert
d’écaiUes argentines ; fes nageoires font toutes felaii-
ches, & les larges raies qu’il a fur les côtés font extrêmement
brillantes:'
PIRAEMBU, (Hiß. nat.) poiffon des mers du Bréfil,
qui rèffemble à celui que les François des îles
d’Amériquë Ont appellé ronfleur^ caufe du bruit qu’il
fait. Il eft de huit ou neuf piés de longueur ; fa chair
eft très-bonne à manger. Il a dans la gueule deux os
fort durs, dont il fe lert pour brifer les coquillages,
qui' font fa nourriture ordinaire.
PIRAGUERA, (Ichthyol.') poiffon d’Amérique, M.
F reri er dit qu’il eft long de quatre à cinq p iés, délicat,
de la figure de la carp e, & couvert de grandes feuilles
rondes;c’eft à-peu-près' ne rien dire pour le faire' con-
noître ; on ne lit dans les voyageurs que des deferip-
tion de cette nature, qui n’inftruifent de rien. (D.J.')
PIRANO, (Géog.~niod.) villé d’Italie dans l’Iftrie,
environ à 14 milles de Capo d’Iftriâ, en tirant vers
le midi occidental. Elle eft fur une petite prefqu’île
formée par le golfe Largone, & celui de Triefte. Les
V énitiens en font les maîtres depuis 1583. Long. 31.
4&. lat. 4S. 48.
PIRATE , f. m. (Marine.) on donne ce nom à des
bandits, qui, maîtres d’un vaiffeau, vont fur mer attaquer
les vaiffeaux marchands pour les piller-& les
voler. Ils fe retirent pour l’ordinaire dans des endroits
écartés & peu fréquentés, où ils puifîent être à l’abri
de la punition qu’ils méritent. -
On aura de la peine à croire que la piraterie ait été
honorable , & l ’emploi des Grecs & des Barbares ,
c’eft-à-dire , des autres peuples qui cherchoient des
établiffemens fixes , & les. moyens de fubfifter. Cependant
Thucidide nous apprend , dès le commencement
de fon hiftoire : « que lorfque les Grecs &
» les Barbares, qui étoient répandus fur la côte &
» dans les îles, commencèrent à trafiquer enfemble ;
» ils firent le métier de pirates fous le commandement
» des principaux, autant pour s’enrichir, que pour
» fournir à la fubfiftance de ceux qui ne pouvoient
» pas vivre par leur travail; ils attaquoient les bourgs,
» les villes qui n’étoient pas en état de fe défendre,
» & lés pilloient entièrement : enforte que par ce
» moyen, qui bien loin d’être criminel, paffoitpour
» honorable, ils fubfiftoient & faifoient fubfifter leur
» nation ».
L ’hiftorien ajoute que l’on voyoit encore des peuples
de la terre , qui faifoient gloire du pillage ; &:
dans les anciens poèmes, on voit de même que, lorf-
qu’on rencontroitdans le cours de la navigation quelque
navire, ils fe demandoient réciproquement s’ils
etoient pirates. Mais il y apparence que le métier de
pirate, n’a pas été long-tems un métier honorable ;
il eft trop contraire à toutes fortes de droits, pour
P I R
n’être pas odieux à tous les peuples qui en fouffrent
des dommages confidérables.
On convient que les Egyptiens & les Phéniciens
commencèrent à exercer le commerce par la voie de
la mer ; les premiers s’emparèrent de la mer ftouge,
& les autres de la Méditerranée, fur laquelle ils établirent
des colonies, & bâtirent des villes qui ont été
depuis fameufes ; ils y tranfportetent l’ufage de la
piraterie & du pillage ; & quoiqu’on ait fo.uvent tâché
de les, détruire, çommô étant des voleurs publics di-
gnesdes plus cruels fupplices ; ils fe trouvèrent en fi
grand nombre fur la Mediteranée, qu’ils fe rendirent
redoutables aux Romains qui chargèrent Pompée de
les combattre.
On meprifa d’abdrd des.gens errans fur la mer,
fans chef, fans, difcipline : la guerre contre Mitri-
date étoit un objet plus preflant, & occupoit entièrement
le fénat, qui d’ailleurs étoit divifé par les brigues
des principaux citoyens. Enforte que les pirates
profitant de l’occafion, s’aggrandirent & s’enrichirent
par le pillage des villes fituées fur le bord de
la mer, & par la prife de ceux qu’ils rencontroient.
Plutarque a même remarqué que des perfonnes confidérables
par lqurs richelfes & par leur naiflance ,
armèrent des vaiffeaux, où ils s’embarquèrent & fe
firent pirates, comme fi par la piraterie on pouvoit
acquérir beaucoup de gloire.
Il faut avouer que de la maniéré dont Plutarque
nous décrit la vie des corfaires , il n’eft pas furpre-
nant que des perfonnes riches, &. même d’une famille
illuftre, aient pris leur parti. Leurs vaiffeaux
étoient magnifiques, l’or & la pourpre ÿ eclatoient
de toutes parts , leurs rames mêmes étoient argentées
; & s’etant rendus maîtres d’une partie de la côte
maritime, ils defeendoient pour fe repofer, & tâ-
choient de fe dédommager de leurs fatigues par toutes
fortes de débauches. On n’entendoit, dit Plutarque
, tout le long de la côte que des concerts de
voix & d’inftrumens ; & ils foutenoient les dépenfes
qu’ils faifoient, par les groffes rançons qu’ils exi-
geoient des perfonnes & des villes, & même par le
pillage des temples.
Les Romains commençant à fe reflentir du voifi-
nage des pirates, qui caufoient une difette de denrées,
& une augmentation de prix à toutes chofes ; on ré-
folut de leur faire la guerre, & l’on en donna la com-
miflion à Pompée , qui les diflipa dans l’efpace de
quarante jours , & les détruifit aifément par la douceur
; au lieu de les faire mourir , il les rélegua dans
le fond des terres , & dans des lieux éloignés des
bords de la mer. C ’eft ainfi qu’en leur donnant
moyen de vivre fans piraterie , il les empêcha de pirater.
(D.J.') ’ 1'
PIRATER, (Marine.) c’eft faire le métier de pirate.
PIRA-UTOAH , (Hifl. nat.) poiffon du genre des
orbes, qui fe trouve dans les mers du Bréfil ; il eft ,
dit-on, d’une forme monftrueufe ; il a deux cornes
offeufes recourbées en arriéré ; fa queue eft faite en
fpatule ; fes levres font épaiffes, & fa gueule s’ouvre
d’une maniéré hideufe.
PIRE, adj. (Gram.) degré comparatif de mauvais.
Les hommes fe plaignent toujours que le tems pré-
fent eft pire que le tems pafle. Il y a des hommes qui
croient au fond de leur coeur, & qui font tout pour
paroître incrédules,ils font pires qu’ils ne paroiffent ;
d’autres au contraire font incrédules au fond de leur
coe u r, & ils affectent la croyance commune ; ils tâchent
de paroître meilleurs qu’ils ne font.
PIRÉE, LE, (Géog. anc. ) Trtipetioç , OU ■ vt/petit oç,
de «Bt/puv, traverfer, faire un trajet, en latin pirceus.,
par les Grecs modernes Porto-draco, & par les Francs
Porto-lione.
Je doute qu’il fe trouve aucun leéleur de l’Ency-
P I R 653
clopédie qui prenne avec le finge de la Fontaine, le
pirée pour un nom d homme; perfonne n’ignore que
c etoit le port de la ville d’Athènes. Mais il y a bien
des chofes à en dire que tout le monde ne lait pas*
Le port de Phalère ne fe trouvant ni affez grand,
ni affez commode, on fit un triple port d’après i’aVis"
de Thémiftoçle, & on l’entoura de murailles': de
forte qu’il égalait la ville en beauté, Si la furpaffoit
en dignité; c’eft Cornélius Nepos qui parle ainfi. U eft
certain que Thémiftoçle eut raifon de préférer le port
de Pirée à celui de Phalere ; car il forme par fes courbures
trois ports que l’ancrage , l’abri & la capacité
rendent excellens. Son entrée eft étroite, mais quand
on eft dedans , il eft de bonne tenue, bien fermé ,
fans rocher ni brifans Cachés. Quatre cens bâtimens,
félon Strabon, y pôuVoient mouiller fur 0 , 10 à 1 i
bràffes ; cependant, aujourd’hui que nos vaiffeaux
font des vaftes machines, il paroît que 40 auroient
de la peine à.s’y ranger.
Des trois ports, celui du milieu eft proprement le
Porto-Lione. On voit encore fur des rochers dans la
mer quelques piles de pierres qui foüteno.ient la chaîne
pour le fermer. Dans fon enfoncement, il y a un
moindre baflin où fe retirent les galere,s. C ’eft ce que
lés Italiens nommens darfe. Lès anciens appelloient
un des trois ports Aphrodion^ à Caufe du temple de
Vénus, qui étoit tout proche; ils nommoient le fe-
Cond Cantharon, à caufe du héros Çantharus ; & l e
troifieme Zéna, parce qu’il étoit deftiné à décharger
du blé.
La première chofe que nous fîmes ën prenant terre
, dit M. de la Guilletiere , ce fut de maudire les
Romains & le barbare Sylla, qui, après avoir ' fac-
cagé la ville d’Athèries, ruinèrent aufli le Pirée. Nous
vîmes donc avec un fenfible déplaifir ,'la défolatioii
& la folitude de Pbrto-Lione. Nous nous demandâmes
l’un à l’aiitre des nouvelles des temples célébrés
de Jupiter," de Minerve & de Vénus; de ces cinq
portiques qui, ayant été joints l’un à l’autre , furent
appellés Macra Stoa , à l’exemple - d’un pareil qui
étoit à Athènes,‘ de ce théâtre de Bacchus, dont Thucydide
& Xenophon ont parlé ; de cette grande place
publique , appellée la place d.'Hippodame, & de
la fameufe bibliothèque du curieux Apollicon, où
l’on trouvoit ces imcomparàbles exemplaires que I’oni
neconnôîtplus,quepar le dénombrement qu’ena fait
Diogene LaërCe. Quelle perte, & quelle douleur
pour les gens de lettres !
Nous nous demandions le tribunal phréattys, remarquable
par la féance de fes juges , q ui, dans les
caufes criminelles, fe venoient placer r le bord de
la mer ; & par le privilège des coupables qui étoient
montés fur un vaiffeau quand on les interrogeoit.*
Enfin , tous nous demandions ce fuperbe arfenal
de marine , qui étoit un chef-d’oeuvre de l’inimitable
archite&e Philon ; ces admirables couverts où l’on
mettoit lés galeres à l’abri : & il nous falloit bien
faire ces queftions l ’un à l’aiitre, puifqu’il ne s’y trouve
pas prefentement un feul habitant.
Où eft le tems où l’on voyoit partir de ce port juf-
qu’au nombre de quatre cens vaiffeaux à la fois , &
qu’un grand peuple d’un côté, & une infinité de matelots
de l’autre, fe crioient réciproquement en fe
quittant agati tuki, bonne aventure, euploia, bon
voyage, pronoïa fojou^a, que la providence nous
conferve! Que fo'rit venus, difions-nous , tant dè
thalafliarques ou chefs d’efeadre , & ces deux magif-
trats qu’ils nommoient apôtres, & que nous appelions
inttndans de la marine? Enfin, où font tous les trié-
raques ou riches bourgeois , qui étoient obligés de
bâtir & d’équiper à leurs dépens, un certain nombre
de vaifl’eaux à proportion de leurs richefles ?
Le Pirée a eu la gloire d’avoir vu dans l’enceinte
de fes murailles quelques-unes des premières écoles