
de votre plancher enfumé vos corbeilles d’ofier ; rempliflez-les de la
terre que vous voulez éprouver, & verfez-y de l’eau douce : après quelle
fe fera écoulée goûte a goûte à travers l’ofier, trempez-y le doigt, &c
portez-le fur vos lèvres; fi la terre eft falée, l’eau le fera aufïi.
U n autre moyen de connoître une terre graffe, c’eft d’examiner fi
elle ne fe diffout point entre les doigts, & fi elle s’y attache comme
de la poix.
Les terres humides fe diftinguent par la grandeur & la quantité des
herbes quelles produifent ; mefiez-vous toujours de la trop grande
fécondité de la terre.
I l eft moins aifé de connoître les terres froides; les pierres, les iris, le
lierre noir qu’on y voit croître, font le feul indice de cette mauvaife qualité.
Culture de la vigne. Celui qui veut planter un vignoble, doit
commencer, avant que d’enfouir le jeune plant, de labourer le coteau
qu’il lui deftine; il doit y creufer des folles, & expofer les mottes aux
froids rigoureux des aquilons. Les meilleures terres pour la vigne font
celles qui font molles & tendres : on les rend telles, en les expofant
aux vents, aux frimats, & en les faifant fouiller par un robuftè vigneron.
Si elles ne font pas de la même qualité que celles dont on a tiré le
plant, le cep court grand rifque de dégénérer; c’eft pourquoi certains
vignerons marquent fur l’écorce des marcottes, quelle étoit leur expo-
fition, afin de leur en donner une pareille. Le terrein eft-il gras? Il
faut ferrer davantage les plants, les ceps n’en feront pas moins féconds.
Eft-on obligé de planter fur le penchant d’un coteau ou fur de hautes
collines ! Laiffez des intervalles égaux entre les ceps , & difpofez
régulièrement tous ces efpaces, afin que fous vos plants tirent de la
terre une égale nourriture, & que la vigne puiffe s’étendre utilement.
Lorfqu’il s’agit de faire des provins, il n’eft pas néceffaire de creufer
des folles profondes; il fuffit de faire de limples filions, &c d’y coucher,
non pas les farmens du haut de la tige; mais plutôt ceux qui font
au bas du cep, parce que les branches qui font moins éloignées de la
terre, ont plus de force & de vigueur.
Quelle que foit l’autorité des confeils qu’on peut donner, un vigneron
ne s’avifera point de remuer la terre, lorfqu’elle eft relferrée par le fouffle
de Borée : fon fein eft alors fermé, & la gelée ne permet pas aux fucs
de pénétrer la racine de la vigne nouvelle.
Quiconque veut planter une vigne, doit choifir un lieu expofé au
midi, la polition du couchant eft la plus défavantageufe. L’arnvée de
çes oifeaux qui font la guerre aux ferpens (i), & les premiers froids de (l)
(l) l,çs cicognes.
l’automne, annoncent qu’il eft teins de la planter; mais la faifoit
la plus favorable, c’eft le retour du printems; le pampre ne craignant
alors ni les vents du midi, ni les pluies froides que 1 aquilon
amène, pouffe fes bourgeons fans danger, & fe plaît à étaler fon feuillage.
Ces premiers foins en exigent d’autres qui ne font pas moins importans,
Lorfque vous aurez enfoui vos plants, ne manquez pas* de les couvrir
de fumier, & d’élever de la terre à l’entour; mettez dans la foffe des
pierres fpongieufes ou des coquilles ; par ce moyen, l’eau s’écoulera
plus aifément; l’air s’infinuera autour de la racine, & fera pouffer les
fiirgeons. Il eft bon de couvrir les nouveaux plants de pierre ou de
têts de pots caffés, pour les défendre des pluies orageufes & de la
fécherelfe de la canicule.
Quand la vigne eft plantée, il faut ramener fouvent la terre au
pied du cep, & lorfqu’elle commence à s’élever, on doit la loutenir
avec des échalas, afin quelle puiffe réfifter à la fureur des vents, &
monter jufqua la cime des ormes. Dans le tems quelle pouffe fes
premières feuilles, ménagez un bois fi tendre; & même, lorfqu’il
eft devenu plus fort, & qu’il s’eft élevé à une plus grande hauteur,
abftenez-vous d’y toucher avec le fer ; arrachez adroitement les feuilles
avec la main : mais auffi-tôt que le bois eft devenu ferme, folide, & que
les branches de votre vigne commencent à embraffer l’ormeau, ne
craignez pas de les tailler ; n’épargnez ni fon bois ni fon feuillage; elle
ne redoute plus le fer. Tous ces foins feroient fuperflus, fi fon ne
travailloit à fouftraire la vigne à la dent des troupeaux; c’eft pourquoi
un vigneron prudent entourera fes ceps d’une haie pour empêcher les
animaux d’y pénétrer. D ’autreS tems, d’autres foins. La culture de h
vigne exige des travaux fans celle renaiffans; trois ou quatre fois par
an, il ell néceffaire de retourner la terre avec la bêche, de brifer les
mottes avec le hoyau, & de retrancher les feuilles inutiles. Lorfque le
froid aquilon a enlevé aux arbres leur parure, le vigneron attentif
reprend l’arme de Saturne, taille & façonne la vigne; il enlève les
farmens pour les briller, &. remporte dans fa maifon les échalas. Il doit
être toujours le premier à finir fes travaux, lorfque la faifon eft arrivée,
& le dernier a cueillir les railîns. Tous ces différens travaux font indiqués
par la nature meme : aeux fois par an, les vignes font ombragées
par les herbes qui croiffent au milieu d’elles : deux fois elles font furchargées
de feuillages inutiles, Dans ces circonftances, on emploie tour-à-tour
le hoyau & la ierpe pour défricher & pour tailler les branches. Tout
omme inftruit dans la culture des vignes, vante un grand vignoble ,
& fe contente d’en avoir un petit;
Ne defire donc pas un enclos fpacieiur 7
Le plus riche eft celui-qui cultive-le mieux,