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E U X I EME DI SCOURS ,
P a r M. l’Abbé T e s s i e r .
Influence $e
la terre.
Principes de la Vége'tation, & parties-des Plantes.
Q d o iq u e Li connoiffance des principes de la végétation appartienne
plutôt à la théorie qu’à la pratique de l’agriculture , cependant
je crois devoir expofer ici, en peu de mots, ce qui les concerne.
Les phyficiens, qui liront cet ouvrage, ne feront peut-etre pas fâches
de les y retrouver rapprochés ; ces principes ont une grande influence
fur l’agriculture, puifqu’ils en font une partie effentielle. Te ne me
permettrai de la théorie que dans cette occafion, tout le rçfte du
dictionnaire étant confacré aux faits & aux pratiques. D ailleurs 1 auteur
de celui qui a pour objet la culture des arbres, le propofe de traiter
de la phyfique végétale, avec quelqu’étendue. Il a des titres héréditaires
qui le mettront dans le cas de s’en acquitter mieux que moi.
Quant aux parties des plantes, il eft neceflaire que j en parle ; mais
je les confidérerai relativement à l’agriculture. On fait qu’on cultive,
les unes pourries racines,, les autres pour la tige ou pour la fleur,
ou pour le fruit, &c. C ’eft fous ce point de vue qu’il en fera queftion
dans ce difçours, •
Principes de la végétation-
Les principes de là végétation font les élémens qui influent for elle
& qui entrent, en partie, dans la compofition des plantes. Tels font
la terre, l’eau, l’air & le fetifl dont la chaleur eft l’effet, & peut-être
la lumière & l’électricité.
La terre eft le milieu, dans lequel fe fait,la germination, ou le
premier développement. C ’eft dans fon foin que s’attendrit & s atténué
•la partie de la graine, de la bulbe ou de la racine, qui doit fournir a
la plante les premiers focs ; c’eft elle qui renferme & élabore les molécules
deftinées à lui fuccéder & à palier par des canaux imperceptibles,
pour porter la nutrition , l’accroiffement & la vie ; ç’eft elle
qui fort d’appui & de foutien au végétal, jufqu’à ce qu’il foit parvenu
au terme de là maturité. Quelques plantes, il eft vrai, n’ont pas de
communication direéte avec la terre. Le gui croît fur les branches du
chêne ou du pommier ; la cufcute rampe fur la bruyère ou for le thim.
Mais
Mais ces plantes communiquent avec elle indirectement, par le
moyen des individus qui les nourriffent. On fait germer des graines
en les tenant feulement'dans des vafes humides ; on élève des fleurs
en fofpendant leurs bulbes aü-dèffus de l’eau ; des racines, placées
dans un endroit chaud, fans être dans la terre, poiiffent des tiges
qui acquièrent de la longueur. Les expériences de Vanhelmont, de
MM. Duhamel & Bonnet nous apprennent qu’on parvient même à
foire croître un arbre pendant long-tems, en ne ceffont pas de le
foutenir au-deflus d’un baquet plein d’eau. M. l’abbé Nolin a confervé
fept mois, une plante apportée de la Chine, qui vivoit dans un panier
fofpendu en l’air. Ses tiges & fes racines n’avoient d’autre aliment que
l’humidité de l’air. Pendant la traverfée on l’avoit tenue attachée
au mât du vaiffeau. Ces faits, curieux fons doute , font dignes
de fixer l’attention des phyficiens ; mais ils font exception a la
loi générale de la nature , & n’empêchent pas que les plantes
n’aient befoin de la terre pour exifter , de la manière qui leur
convient. C a r, dans celles que fart'élève autrement pendant quelque
tems, la végétation ne s’y accomplit jamais , puifqu’elles ne portent
pas des graines capables de les reproduire. I l eft prouvé par-là feulement,
que l’eau & là chaleur contribuent beaucoup à la végétation ;
mais il ne s’enfuit pas que la terre ne lui foit point néceflàire. Qu’on
compare deux plantes de même efpèee, dont l’une ait pouffé dans
la terre, & l’autre dans l’eau, ou à l’aide de la chaleur; tout, dans
la première, annonce la vie & la fonté; l’autre paraît languiffante
& d’une conftitution délicate, qui annonce qu’elle ne doit point arriver
à fon degré de perfeétion.
La terre ne fert pas feulement d’appui au végétal & de laboratoire
aux focs qui lui font deftinés, mais elle entre encore dans fa
compofition. On en peut juger par ce qui a lieu dans la deftmction
du végétal. De quelque manière quelle s’opère, après la difperfion
de a plupart des principes, il refte toujours une certaine quantité de
molécules fixes, qui font, ou de la terre pure, ou des fobftances en
partie terreufes. Cet élément paraît fervir de charpente à tous les êtres
organifes. Plus les végétaux ont exifté long-tems f plus ils fourniffenc
de principes terreux dans leur décompofition. U fout, fans doute
que la terre, pour etre propre à paffer dans les vaiffeaux des plantes,’
fobifle une atténuation bien grande. Comment cette merveille peut-
efle avoir lieu? Quei eft 1 atténuant ou le diffolvanc de la terre, qui
paffe dans les végétaux ? Par quel méchanifme fe foit ï afcenfion Ig focs
nutnti s ? Voila fur quoi nos connoiffances font très-bornées &c le
feront long-tems, fans doute. La nature agit en feçret ôi cache, der-
nere un voile épais, une partie de fes opérations,
Agriculture, Tome I, J g