
Tel eft l’abrégé de ce petit poëme, qui n’offre abfolument rien de
piquant. Il nous femble que Palladius aüroit pu fe difpenfer de recourir
aux charmes de la poéfie, & qu’il aurait dû plutôt s’exprimer avec
plus de clarté, en traitant un fujet aufli fimple que celui dont nous
venons de parler.
A U T E U R S M O D E R N E S .
F.Crefcenr. A la renaissance des lettres, lorfque les ténèbres de
l’ignorance & de la barbarie commencèrent enfin à fe difliper, l’Italie
contribua d’une manière particulière à opérer cetce heureufe révolution.
Tés Grecs, que l’invafion des Turcs avoit rendus errans & fugitifs, y
avoient apporté de Conflantinople ce qu’ils avoient pu fauver des
débris de l’antiquité : déjà ils avoient répandu parmi leurs nouveaux
hôtes le goût des fciences & de la littérature. Protégés, chéris &
magnifiquement récompenfés par les Médicis, les beaux arts vinrent
en foule briller dans leur ancienne patrie. Les tréfors que Jules I I .
avoit laiflés _£J\ mourant, favorisèrent encore l’inclination libérale de
Léon X. & lui fournirent les moyens de fignaler fbn amour pour les
fciences & pour les arts, en comblant de largefiès ceux qui les culti-
voient. Des encouragemens aufli puiflans excitèrent bientôt une émulation
univerfelle; le génie prit fon eflor; la poéfie, l'éloquence,
la philofophie, l’hiftoire, l’agriculture; tout reçut une nouvelle vie?
mais, tandis que toutes lés villes de cette fàmeufe contrée fe difputoient
à l’envi la gloire de faire refleurir les fciences & les arts, la ville de
Boulogne l’emporta fur toutes les autres par fbn zèle & par les grands
hommes quelle produifit. C ’eft alors quelle donna naiflànce à Pierre:
Crefcenr, encore plus illuftre par fon fa voir que par fon origine. Il:
exerça d’abord la profefïîon d’avocat ; & après avoir voyagé pendant
trente ans pour fe dérober aux troubles qui seraient élevés dans fa patrie,,
il revint à l’âge de foixante-dix ans dans le fein de fa famille & corn-
pofâ par ordre de Charles I I . roi de Sicile, un ouvrage fur le ménage
des champs, où il réunit la théorie la plus éclairée à une pratique
confommée. Tous les fa vans de l’univerfité de Boulogne concoururent
a la perfection de cet ouvrage,.en communiquant à fauteur leurs con-
noiflances & leurs lumières; il devint en effet le meilleur traité d’agriculture
qui eût paru jufqu’alors. Il fut traduit dans prefque toutes les
langues de l’Europe : Charles V . en ’fit donner une édition fiançoife
en i486.
Observations préliminaires. L ’ouvrage entier eft divifé en douze-
livres. Le premier traite de la néceffité de reconnoître les lieux qu’on
doit habiter. Cps obferyations doivent rouler fur cinq objets principausî
la falubrité de l’air, l’expofition des vents, la bonté de l’eau, la fituation
de la màifon & les matériaux néceffaires pour bâtir.
Des plantes en général. Les labours étant fujets à varier félon la
diverfité des plantes, des lieux & des tems, ces trois articles forment
la matière du fécond livre. Les chapitres qui le compofent fe fuccèdent
dans l’ordre qui fuit. L ’auteur parle d’abord des chofes qui font communes
à toutes les plantes : comme la température du climat, qui doit
être analogue à leur différente nature ; il traite enfuite de la qualité de
la terre où elles doivent être plantées : un' terrain trop froid ou trop
chaud leur ferait également nuifible ; il entre dans quelques détails fur
la génération & la naiflànce des plantes ; fur les parties qui les compofent;
fur leur divifion & fur les altérations auxquelles elles font
îujettes, foit à caufe du froid, foit à caufe du fol qui les produit, foit
enfin à caufe des autres accidens qui peuvent furvenir.
Nombre des labours. Outre les avantages qu’on retire des plantes
tant pour la nourriture de l’homme, que pour le traitement des maladies
ou pour le fourrage des beftiaux, elles fervent encore à engraifler
les champs & à préparer ainfi des moiflons abondantes; mais, pour
tirer de cet engrais un parti avantageux , il faut avoir foin de bien
labourer la terre. Un cultivateur expérimenté fait ordinairement quatre
différens labours. D ’abord il oûvre la terre, afin quelle foit plus fufeep-
tible de recevoir l’influence de l’air & l’humidité : par le fécond labour,
il applanit les champs, afin que la pluie fe répande également partout
& qu’une partie ne foit point fubmergée, tandis que l’autre efl:
aride & deflechée : par le troifîème, il amalgame la terre avec l’engrais
& prépaie ainfi le développement & la nutrition du germe.
Enfin, le quatrième labour divife la terre &t la rend plus duêtile : pat
ce moyen les fucs nutritifs parviennent avec plus de facilité à la
racine; & la racine elle-même étend plus au loin & fans aucune gêne,
fes différentes ramifications.^Ce règles générales fouffrent cependant
certaines modifications. Il y a des terres qu’il fufïit de labourer deux
fois & il y en a d’autres qu’il faut labourer plus de quatre. Le cultivateur
doit confulterfur cet objet la nature du terrain & encore plus
l’expérience.
Les différentes ejpèces de bled doivent être proportionnées à là
différente qualité des terres. Tous les fols ne font point également
propres à produire le bled. La qualité de la terre annonce l’ufage
auquel on peut l’employer. Celle qui eft gradé & forte, eft bonne
pour le bled; celle qui eft sèche & maigre, ne peut convenir ni au
bled ni aux vignes ; il faut y planter des arbres qui ne produifent point
de fruit. U y a deux manières de corriger la mauvaife qualité dun
terrain, quand il eft froid & humide. L ’une, en y mêlant une terre
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