
tels font le châtaignier, le chêne, &c. Certains arbres poufïent des
rejetions à leur racine, comme le laurier, l’orme, le cerifier; ce font
les trois moyens que la nature emploie pour la reproduction des
arbres ; mais il y en a d’autres qui font dûes à l’induftrie des hommes :
tantôt on arrache les rejetions & on les plante, tantôt on déraciné
entièrement les arbres & on les tranfporte ailleurs; ceux-ci fendent
en quatre les branches, les aiguifent par le pied & les enfoncent dans
la terre; ceux-là courbent les feions, ks couvrent de terre pour les
faire provigner dans le lieu même où ils font nés. Quelques arbres
viennent de bouture ; les autres font greffés : par ce dernier moyen,
on donne à une efpèce la qualité qui convenoit à une autre : ainfi,
voyons-nous quelquefois le pommier produire des poires, & le prunier
donner les fruits rouges du cornouiller. Les arbres qui s’élèvent d’eux-
mêmes, quoique plus beaux & plus forts, font ordinairement ftériks;
cependant fi on les tranfplante ou fi on les greffe, ils fe dépouillent
de leur naturel fauvage, & on leur fait produire les fruits que l’on veut.
Ceux qui ont été femés viennent très-lentement, ils ne peuvent donner
de l’ombre qu’aux générations futures : en général, ks arbres qui ne
font pas cultivés dégénèrent & leurs fruits s’aigriffent ;. il faut labourer
la terre qui couvre leurs racines pour prévenir cet inconvénient & les
rendre féconds.
Chaque arbre en particulier, exige une culture différente. Les
oliviers, les myrtes viennent mieux quand on les tranfplante, & la vigne
quand on la fait provigner. A l’égard des coudriers, des frênes, des
peupliers, des palmiers,, des fapins, on les rire de la pépinière pour les
planter. L ’arboifier peut recevoir la greffe du noyer ; le platane, celle
du châtaignier ; le hêtre & le frêne, celle du poirier; enfin iln ’eft pas
rare de voir des chênes greffés fur des ormeaux.
Manière de greffer les arbres. Les cultivateurs expérimentés
eonnoiffent deux manières d’enter ks arbres ; en greffe & en écuffon.
Pour bien greffer, il faut faire une fente profonde au tronc de l’arbre,
dans un endroit où il n’y a point de noeuds r là , on insère le rejetton
d’un arbre fertile. Bientôt des rameaux chargés de fruits s’élèvent de ce
tronc ftérile, qui eft étonné lui-même de fon nouveau feuillage 8t de
fa fécondité.
Pour écufïènner, on choifit un endroit de l’écorçe du tronc d’où
fort un bouton vigoureux;, on y fait une incifion, 8t l’on y tranfporte
adroitement le bouton d’un arbre étranger,, qui s’incorpore à celui auquel
il eft appliqué, & fe nourrit de fa sève.
h a qualité du terrein doit être proportionnée aux différentes
efpèces d’arbres. Les mêmes arbres ne produilènt pas toujours des
fruits femhlables. Les olivkrs, par exemple, portent tantôt des olivgs
rondes j tantôt des olives ovales : les poiriers varient auffi leurs
fruits ; on diftingue les poires du rouffelet, de la bergamote , du
bon-chrétien, &c. Quelle différence ne remarque-t-on pas entre les
raifins d’Italie 8e ceux de Lefbos? On ne peut attribuer cette diverfité
qu’à la qualité différente des terres. Les faules naiffent fur le bords des
eaux ; les aulnes près des marais; ks frênes fur k s montagnes ; les myrtes
le long des rivières ; la vigne fur ks coteaux ; les ifs dans ks lieux expofés
au froid & à la fureur des aquilons. La Médie produit une efpèce de
pommier agréable à la vue, dont les feuilles ne tombent jamais, &
dont les fleurs odorantes relient toujours attachées aux branches. Cet
arbre ne fe trouve point dans l’Italie, quoique le pays foit plus abondant
& plus fertile. Tout cultivateur doit donc avoir foin de planter chaque
efpèce d’arbre dans des terreins qui lui foient propres. Les terres ingrates,
ks collines pierreufes, couvertes d’argile & de buiffons, conviennent aux
oliviers; les endroits gras, fangeux, qui produifent beaucoup d’herbes ,
fur-tout de la fougère ennemie du labourage, font excelkns pour ks
vignobles, s’ils font expofés au midi ; les terres noires, grades & molles
doivent être deftinées au froment; celles qui font sèches, pleines de
gravier, firuées en pente, peuvent à peine fournir affez de lavande &
:de romarin pour ks abeilles; celles où abonde le tuf, la craie, ne font
bonnes que pour nourrir & recéler ks ferpens ; quant aux terreins
fpongieux, d’où l’on voit de légères vapeurs s’exhaler, & qui, toujours
.couverts de gazon, ne dérouillent'jamais le foc de la charrue, on peut
les employer à différens ufages : on peut y marier la vigne avec
: l’ormeau, y planter des oliviers, y labourer, y femer différentes efpèces
de grains , y faire paître ks troupeaux. Tels font ks champs près de
Capoue, & ks plaines voifines du mont Véfuve.
Signes pour reconnaître la nature du terrein. Virgile, qui paroît
avoir mis plus d’art dans ce livre que dans le précédent, donne des
marques pour connoître la qualité de la terre, & difcerner fi elle eft
.forte ou légère. Il eft d’autant plus important d’avoir ces connoiffances>
que le premier de ces deux efpèces de fol doit être enfemencé, &c le
fécond confacré aux vignobles. Faites creufer, dit-il, une fofie dans,
votre champ , & comblez-le enfuite avec la terre qu’on en aura tirée,
pour l’applanir & l’égaler à la fuperficie du champ : faites-la fouler
aux pieds ; fi elle s’enfonce, de manière que la foffe n’en puille
être comblée , c’eft une terre légère, qui n’eft propre que pour la vigne
ou pour ks pâturages : au contraire, fi la terre ne peut rentrer entièrement
:dans la folle doù elle eft fortie, après avoir été bien foulée, c’eft une
terre forte qu’il fout livrer à la charrue.
Les terres folées & amères ne valent rien ni pour ks vignobles, ni
pour ks vergers. Voici le moyen de connoître cette qualité : détachez