
A cette efquifie légère des avantages que la France retire de fbn
agriculture, Rajouterai quelques-uns des moyens propres a les augmenter
en la perfectionnant & en l’encourageant.
Le plus puiffant moyen de donner a 1 agriculture toute 1 aébvitc
dont elle eft fufceptible, feroit de pratiquer des chemins de communication
dans les pays où il n’y en a pas , d ouvrir des canaux navigables
pour le tranfport des marchandifes, de former des digues^ le
long des rivières fujetes à fe déborder, de procurer dam certains
cantons un écoulement aux eaux ftagnantes qui, en meme-tems
quelles nuifent à la fécondité des terres, caüfent des exhalaifons mortelles
pour les cultivateurs des environs; enfin, détablir en plulieurs
endroits' des canaux d’irrigation. Qu on parcoure la carte de la France,
on verra qu’en général les provinces traverfecs par un plus grand
nombre de chemins, font les plus fertiles & les plus riches de toutes;,
quoique dans quelques-unes le fol ne foit pas de la meilleure qualité.
Qu’on aille dans la Hollande , on fe convaincra que c’efi à une multitude
de canaux que ce pays doit une partie de fon opulence, puif-
que les produirions territoriales le mettent en état d entretenir au
dehors un commerce immenfe. Qu on traverfe la Suilfe, on admirera
les foins qu’on fe donne pour économifèr l’eau, pour la diriger ou il
eft befcin qu’elle foit conduite, pour entretenir des prairies humides
dans une faifon où elles feroient defféchées. Qu’on rentre en France
& qu’on examine les bords de la Loire depuis Orléans jufques vers
Angers, efpace de près de foixante lieues, ceft-là où ï agriculture
offre le plus de reflources. Une très-grande partie des taxes que paie
la généralité de Tours eft impofée fur les villages fitués auprès de
cette digue étonnante , connue fous le nom de Levee, qui garantit
des inondations de la Loire tout ce qui l’avoifine, & donne lieu a des
! récoltes inappréciables. Cet ouvrage, un des plus utiles de la ï rance,
puifqu’en rendant navigable une belle rivière, qu il contient dans Ion
lit, il favorife l’agriculture fur fes rives , cet ouvrage doit honorer le
fiècle, le règne fous lequel il a été entrepris, & le genie qui la projeté
& exécuté ; c’eft un modèle à foivre, qui femble iflviter le gouvernement
& • les états provinciaux à l’imiter dans les pays expofos aux
ravages des rivières ( i ). On donnerait à l’agriculture de vaftes cantons
& prefque des provinces, dont le fol retient l’eau des pluies, à
caufe d’une couche d’argile qui fe trouve deflbus, fi l’on y formoit de
(i) Déjà on a fait voir 1a poffibilité de garantir des. inondations de la Saône, les
prairies de la Brelfe, comprifes-entre la rivière de Seille St le bief d Avanon , ceft-à.-
dire, un terrein d’environ trente-cing mille ârpens de Paris.
fréquens foliés, qu’on dirigerait dans des ruiflèanx & de-là dans de
petites rivières, en en creufant les lits pour établir la pente néceflaire :
on pourrait même par des faignées, pratiquées avec intelligence, dé-
. tourner ces eaux pour arrofer les terreins focs & arides qu’elles rencontreraient
dans leurs cours. Les fonds pour tous ces travaux, foit que
ce fût le gouvernement, foit que ce fuflent les provinces qui les entre-
priflent, feroient confidérables, j’en conviens, mais ils produiraient
dans la fuite des-rentrées énormes, & jamais l’état ou les adminif
trations provinciales n’eulfent placé de l’argent à un fi gros intérêt. I l
en coûterait moins au gouvernement, fans douce, parce qu’il a des
reflources infinies. On afl'uré que, ces opérations fe feroient avec une
grande facilité & d’une manière peu dilpendieufe, fi en tems de paix
on y: einployoit une partie des troupes. Une foule de monumens
attellent que les Romains occupoient leurs foldats à des travaux d’utilité
publique. Louis X IV , avec le même fecours, fit préparer, en 1 6 8 6 '
un aqueduc dont il relie des veftiges remarquables , & qui devoir
amener la rivière d’Eure à' VerfailleS. Cet ouvrage, il eft vrai, a caufé
des maladies à un grand nombre de foldats ; mais on pouvoit les prévenir
■en prenant les précautions néceflaires. Des exemples plus récensprouvent
combien ce moyen offre d’avantages , puifqu’on vient d’employer des
■ troupes avecfuccès pour ouvrir des canaux & pratiquer des deffechemens
La multiplication des beftiaux eft îa richefle & le mobile de [’agriculture
; elle eft retardée en France par plulieurs çaufes. On a cru
qu’on ne pouvoit pas en élever un aulfi grand nombre depuis qu’on
avoir défriché des landes confacrées à des pâtures natarelies. C ’eft une
erreur dont on reviendra lorfqu’on réfléchira quelles font remplacées
avantageufement par des prairies artificielles-, utiles même pour le
repos des terres, & par les fourrages & pailles réfultans des récoltés
H y a cette réciprocité entre les beftiaux & lés champs labourables"
que plus ceux-ci rapportent, plus on eft en état d’entretenir de têtes
ae bétail, & vice verfâ.
- On a depuis long-tems reconnu combien les troupeaux font avides
de iel, combien cette denrée leur eft falutaire, combien on en fauve-
roit des maladies qui les tuent fi on pouvoit leur en donner à volonté
combien enfin ceux auxquels on en fait manger de tems en tems
quelques poignées, ou qui paiifent dans les. prés falés, deviennent
vigoureux & ont la chair délicate. Ces obfervations, peut-être déjà
communiquées au prince qui nous gouverne, feront de nouveau poL
tees aux pieds du trône par quelque miniftre fage, avec des moyens
caces e rendre le fol marchand fans nuire aux revenus de l’état
Cpft le voeu des citoyens, amis de la pâme; le monarque en
fera frappe & la mulnpl,cation des troupeaux, d’où d é p e n cL les'