
aujourd’hui, attefte le refpeft que les Chinois confervent pour.fauteur
d’une fi chère inftimtion, & le cas qu’ils font de ï agriculture. et Une
55 des fondions publiques des empereurs de la Chine, dit un hifto-
v rien moderne, eft d’ouvrir la terre au printems avec un- appareil de
'il fête, qui attire des environs de la capitale, tous les cultivateurs. Ils
55 courent en foule pour être témoins de l’honneur folemnel que le
55 prince rend au premier de tous les arts. Ce n eft plus comme dans
55les fables de la Grèce, un dieu qui garde les troupeaux d’un roi,
55 c’efl le père des peuple s qui, la main appefantie fur le foc, montre
55 à fes enfans les véritables tréfors de l’état : bientôt après il revient au
55 champ qu’il a labouré lui-même, y jette les femences que la terre
55 demande. L ’exemple du prince eft fuivi dans toutes les provinces &.
55 dans la même faifon. Les vice-rois y répètent les mêmes, cérémonies
55 en préfe'nce d’une multitude de laboureurs. 55 II ferait à defirer
qu’une communication plus étendue avec la nation chinoife, nous
mît à portée de mieux connoître les progrès quelle a faits dans les
fciences quelle cultive avec tant de confiance , & fur-tout dans
ï agriculture, quelle a portée fi loin. On ne peut douter que .les
Chinois n’aient compofé beaucoup d’écrits fur cet art important. On
allure que 1 0 0 ans avant Jefüs-Chrift, Chingius ouXius, un de leurs
empereurs, ordonna qu on brûlât tous les livres du royaume, excepte
ceux qui traitoient de la médecine, de l’agriculture & de la divination.
Depuis cette époque, fans doute le nombre s’en eft accru. Si
ceux qui ont rapport à l’agriculture étoient connus, ils guideraient
les cultivateurs & répandraient un grand jour fur leur art.
Je pafferai fous filenceles autres peuples anciens, qui ont eu quelques
connoiffances d’agriculture. On eft trop peu inftruit de cette
partie de leur hiftoire, pôur que je puiffe en donner un précis. Les
recherches, que je ferais fur les nations aétuellement exiftantes ne
procureraient pas plus de lumières relativement à fon origine; je me
bornerai à fuivre fes progrès dans le royaume que j’habite.
I l eft certain que les Gaules ont été très-anciennement cultivées.
La population nombreufe de ce pays, qui le forçok d’envoyer des
colonies en Allemagne & dans le midi, la facilité que Céfar y trouva
pour la fubfiflance de fes troupes, tout annonce qu’on y faifoit des
récoltes en grains. Les Romains, habiles à tirer parti de leurs conquêtes
, n’épargnèrent rien pour augmenter les progrès de l’agriculture
dans les Gaules. Les dépenfes confidérables qu’ils y firent la rendirent
la plus fertile & la plus belle de leurs provinces. Cette fource de
richeffes fe tarit quand les barbares, fortis du nord, ravagèrent l’empire,
& elle ne fe rétablit que long-rems après.
Sous la première race des rois de France, l’agriculture y fi® lan-
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guidante; elle reprit de l’aétivité au commencement de la fécondé
race, tems où les moines,fe livrèrent au défrichement des terres avec
un zèle & une intelligence, dont on a depuis reffenti toujours les
effets. Le règne de Charlemagne, pendant lequel tout prit une nouvelle
forme, donna à l’agriculture un plus grand éclat, qui ne fut pas de
longue durée. Car l’invafion des Normands & le régime féodal replongèrent
pour long-tems la l'rance dans le cahos & dans l’ignorance.
Pendant plufieurs fiècles on regarda comme vils & méprifables les
hommes qui faifoient leur occupation de la culture des terres.. Les
premiers qui s’y livrèrent étoient des efclaves, dont la plupart rachetèrent
des feigneurs leur liberté, fouvent à un prix confidérable. Ceux
qui n’eurent pas le moyen de s’affranchir, reftèrent, eux & leurs défi
cendans, dans un état de dépendance & de fervimde, que la fap-effe
du gouvernement vient de détruire - entièrement. Les croifades & le
luxe des cours, deux caufes nuifibles à la France à bien des égards,
ont cependant fervi à l’avancement de l’agriculture. Afin de fe procurer
de l’argent pendant leurs voyages, les feigneurs qui prirent la
croix rendirent libres un grand nombre de ferfs & accenfèrent leurs
terres. Ils firent plus ; ils rapportèrent même de l’Afie des plantes
precieufès qui fè font multipliées dans nos climats. Le luxe des cours
produifit auifi un effet qu’on ne devoit pas attendre, en mettant les
biens-fonds dans la main du peuple ; car ils furent mieux cultivés &
augmentèrent les richeffes de l’état. Peu-à-peu les rois firent, en faveur
des cultivateurs, des réglemens qui rendirent leur condition meilleure.
Ceux de François I." , de Henri I I I , de Charles IX & de
Henri IV tint été confirmés par leurs fucceffeurs. Louis X IV en
ajouta de nouveaux, diétés par les lumières, qui éclairaient fon règne.
Ce fut enfin fous Louis X V que l’amour de l’agriculture, gagnant
pour ainfi dire tous les ordres de l’état, cet art fit des progrès étonnans.
Les fçavans s’empreffèrent de contribuer à fa perfection. Chimiftes,
botanifles, phyficiens, naturalifles, tous dirigèrent une partie de leurs
■ fi^herches vers 1 agriculture. I l y eut fur cette matière beaucoup
d ouvrages publiés, que les cultivateurs de profeffion, à la vérité ,
netoient pas enetat d entendre; mais les obfervations, qui y étoient
répandues, peu-a-peu font parvenues jufqu’à eux & les ont frappé fans
quüs s en apperçuffent; en forte, qu’on en voit un grand nombre
adopter des méthodes que leurs pères ne cbnnoïfloient pas. Il y
en a meme, qui font des effais, qu’on n’aurait jamais ofé efpérer.
a para fous le régné précédent des loix utiles à ï agriculture ; les
unes concernoient la multiplication & la confervation des beftiaux ; les
autres encourageoient les defrichemens ou permettoient l’exportation
des grains.' Le même efprit a fait établir des foejétés d' agriculture 3