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même pied, produit d’un féal grain ifolé , que le 1
hafard avoir ferné dans une bonne terre. Cette
abondance d’épis & de grains ne fauroit jamais avoir
lieu dans une culture en grand. Communément,
dans les années fertiles, on compte trois ou quatre
tiges, & autant d’épis fur un feul pied , & environ
vingt-quatre grains par épi. Parmi les grains qu’on
fème, il y en a un grand nombre qui ne lèvent
pas, foit parce qu’ils le trouvent trop enfoncés, ou
recouverts de mottes ou de pierres, ou attaqués par
la gelée, ou mangés par les oifeaux & les infeéîes;
une autre partis, après avoir levé, eü étouffée
par les mauvaifes herbes, ou par les autres tiges
même *, toutes les tiges d’un pied ne s’élèvent
pas a fiez pour porter des épis, parce que la fève
eft employée pour la nourriture des plus fortes j
dans les épis, plufieurs calices d’en bas & d’en
haut ne portent pas de fleurs j dans les calices du
milieu, qui en portent, il y a prefque toujours
une fleur & fouvent deux qui avortent & qui ne
produifent pas de grains j encore le peu de grains
qui réfultent des calices du milieu, lont-ils petits
& moins remplis de farine que les autres. Les
mauvaifes années font donc celles où les fromens
ont peu de tiges, &voù les épis font peu garnis,
foit qu’ils foient courts", foit qu’ils foient longs *,
les années abondantes font celles où les grains
font multipliés dans des épis nombreux -, dans ce
cas, on dit, après avoir battu des blés nouveaux,
cette année, les blés rendent bien. Il arrive quelquefois
que l’abondance n’eft connue que quand on
a fait moudre du grain -, car, félon les années,
il produit plus ou moins de farine, & cette farine
abforbant plus ou moins d’eau dans le pétriffage ,
elle procure une plus ou moins grande quantité
de pain. Cette dernière forte d’abondance eü la
fuite d’une année lèche, pendant laquelle le corps
farineux du grain, à mefure qu’il s’elt formé, s’éft
condenfé fous une écorfe mince.
Telles font les caufes de l’abondance j il faut
en examiner les effets par rapport au peuple &
aux cultivateurs.
On ne peut douter qu’en France l’abondance
des grains ne foit avantageuse au peuple des villes
& des campagnes, dont le pain eft la principale
nourriture. Dans les villes où une police vigilante
a foin que le prix du pain foit réglé fur celui
du blé, le blé eft d’autant moins cher qu’il eft
plus abondant. Parmi les gens du peuple, qui
vivent dans les campagnes , les uns font valoir
quelques portions de terre qirils enfemencent *, les
autres font de fimpîes journaliers, confacrés la
plupart à fervir les cultivateurs. Ceux-ci profitent
de l’abondance en mangeant du pain qui
leur coûte peu*, ceux-là, lorfque leurs petites
poffeflïons produifent beaucoup, n’ont pas befoin
d’acheter du blé pour fe nourrir, & quelquefois
même ils en vendent pour fe procurer d'autres
objets. Tous participent plus ou moins à une fécondité
extraordinaire. 11 feroit donc à dçfirer pour
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le peuple des campagnes, comme pour celui des
villes, que les récoltes fuffent toujours belles &
le blé au plus bas prix.
Mal heu reuft ment, dans l’état aéluel des chofes,"
les intérêts de la partie la plus indigente du peuple
ne peuvent fe concilier avec ceux des cultivateurs ;
c’eft par ces derniers que font fupportées les plus
fortes impofidons royales, dont le poids eft devenu
confidérable. On fait quelles font la mefure de
tout. Ces impolîrions ayant augmenté, il a fallu
que le prix des denrées hauflât. Par une fuite
néceffaire, les propriétaires ont cherché à accroître
leurs revenus, pour fe mettre de niveau. Ils ne
l’ont pu faire qu’en exigeant de leurs fermiers de
plus grofles fommes. Comment les fermiers pour?
roient-ils fuffire aux impofidons royales, aux
fermages & aux avances, qu’ils font obligés de
faire > fi les grains ne fe foutenoient à un prix
au-deffus de celui qui conviendroit à la fortune
des journaliers? Comment les grains s’y foutien-
droient-ils ,fi les récoltes étoient toutes abondantes ?
Il y a plus : l’abondance elle-même , long-tems
continuée, deviendroit une caufe certaine de
difette. Afin qu’on ne prenne pas ceci pour
un paradoxe, fuppofons-la pendant dix années de
fuite, qu’arrivera-t-il ? D’abord les cultivateurs
rempliront leurs greniers & leurs magafins
de grains , dont une partie fe corrompra &
fe perdra, parce qu’il faudra trop de foins &
trop de frais. Engagés enfuite par le befoin, ils
fe détermineront à en porter dans les marchés,
où le peuple n’en prend' jamais qu’une petite
partie. La plus forte levée fe fait par des marchands
, pour l’approvifionnement des provinces
voifines, ou pour pafler dans le commerce. Bientôt
on cefi'era d’en apporter, parce qu’il s’y vendra
mal, à caufe de l’abondance & de la mauvaife qualité.
Les cultivateurs fe verront forcés de renoncer
à une profeliion ruineufe : les terres refieront en
friche *, c’eft ainfi que la difette feroit une fuite
néceffaire d’une longue abondance.
Pour n’avoir jamais rien à redouter d’un bienfait
de la Nature, la France aune reffource, c’eft
l’exportation. J e n’entends pas ici qu’il faille fe
contenter de la permettre dans les années d’abon-*
dance feulement. Il y auroit à craindre qu’en voulant
éviter un mal, on ne tombât dans un autre.
Au premier bruit dé l’exportation permife, l’avidité
infatiable des gens à fortune confidérable, fe
réveille & prend les moyens les plus fûrs pour
acheter tous les blés. Lorfqu’ils en font devenus
maîtres, ils .les vendent au prix qu’ils, veulent,
n’ayant point de concurrence \ en forte que du
foin de l’abondance naît la cherté. Mais je penfe
qu’il faudroit que l’exportation fût libre fans interruption.
Les grains y circuleroient toujours de
marchés en marchés, par la voie du commerce,
& non par une forte d’explofion, comme lorf-
qu’on commence une exportation qui ne doit
durçr qu’un tepis. Jls fe vendraient à un prix avaria
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tageux au cultivateur, fans être au-deffus des moyens
du peuple, auquel l’agriculture, devenue plus active
, fourniroit un travail qui fe renouvelleroit fans
ceffe. Peut-être feroit - il cependant de la fageffe
des gouvernemens de profiter des années d’abondance,
pour conferver une certaine quantité de
grains deftinés à des befoins imprévus. Mais il me
femble qu’il y auroit des précautions à prendre,
& qu’il ne faudroit pas que ces approvifionnemens
fuffent confidérables, & qu’ils nuififl’ent à une exportation,
qui eft lame & un des plus puifl’ans mobiles
de l’agriculture en France. Voy. G r e n i e r s
d ’a b o n d a n c e . Ce royaume, par la qualité & la
nature de fon fo l, fi l’agriculture y eft encouragée ,
peut être' à l’Europe ce que la Sicile étoit autrefois
à l'Italie. ( M. VAbbé T essiejr. )
P. S. Depuis que cet article a été rédigé & imprimé,
on a publié une Déclaration du Roi, donnée
à Ver fai 11 es, le 17 Juin 1787, régi ftrée au Parie-
• ment, le 25 du même mois, pour la liberté du
commerce des grains, tant en France que chez
l'étranger. Par cette Déclaration, l’exportation fe
trouve permife pour toujours, fous la rélerve de
la fufpendre momentanément, en cas denéceftité,
& fur la demande, reconnue légitime, des états
& âffemhlées provinciales. Nos vues, à cet égard ,
font remplies, & on n a point à craindre déformais,
à ce qu’il nous femble, que l’abondance foit nuilible
à ceux qui l’éprouveront. ( M. VAbbé Te s s I erA
ABONNEMENT, -convention faite entre le
propriétaire & fon fermier , par laquelle celui-ci
s engage à fournir au premier certains objets, foit
en denrées, foit en fervices, foit en autre chofe,
moyennant un prix fixé pour le tems limité. Tantôt
cet abonnement fait partie du bail, rantôt il eft
verbal, ou il forme un aéte féparé. Les fermiers.
% abonnent auftî quelquefois à l’année avec leur
maréchal , leur charron , leur bourrelier, &c.
( M. VAbbé T e s s ie r .)
ABORNER, AEORNEMENT , mettre des
bornes pour féparerdes domaines. Quelquefois des
Seigneurs font placer de diftance en diftance de
groffes pierres pour indiquer ce qui eft de leurs
Seigneuries. Le plus fouvent les bornes font ordonnées
en juftice réglée, dans les cas de contef-
tation, pour fixer l’étendue des champs des particuliers.
Les Romains, pour rendre les bornes,
aicrées, en avoient fait des Dieux, qu’on habilloit,
qu on ornoit de différentes manières dans certaines
fêtes. Parmi nous elles font refpeélées au
point qu’on n’oferoit pas en arracher une j la juftice
vlrojt contre ceux qui auroient cette hardieffe
car les bornes font regardées comme les gardiens des
^ APRnTS* l l $ t B o k n e $ - ( P i VAbbé T e s s ie r .)
ir "H y Ü G R I ou RABOUGRI , ( adj. ) Ce mot
; * V “ un arbre ou arbrifieau qui n’eft point venu
ana în;‘e Srf?d eu r , que, par cette raifon , on
ppelle rachitique. L e rachitiftne eft une maladie
rar!î!,-ffiari3r€S & plantesfom quelquefois attaqués
PMifférentes caufes. % R a c b i t i s , (M. T ito v in .)
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ABOUTIR, agriculture , fe dit d’un champ
labourable, d’un pré, d’un bois, plus long que
large, dont les extrémités ou les bouts touchent
à d autres pièces de terre, ou à des bois ou à des
chemins. Ce mot eft employé dans les déclarations
feigneuriales, dans les contrats de vente ou partages.
On a foin d y marquer les aboutijfans ou
lés noms des perfonnes auxquelles appartiennent
les champs fitués à l’extrémité des pièces de terre
mentionnées, ainfi que les tenans3 c’eft-à-dire, ou
les perfonnes qui ont des propriétés fituées le long ,
ou les bois ou chemins qui les touchent dans leur
longueur. C’eft dans le DièHonnaire de jurifpru-
dence que cet article doit avoir toute l’extenfion
dont il eft fufceptible. ( M. VAbbé T e s s ie r . )
^Ab o u t ir . Médecine des animaux ; c’eft l’état
d’une tumeur qui commence à fuppurer. Il y a
des tumeurs qu’il eft dangereux de faire aboutir;
il y en a dont on doit hâter l’aboufiffcment. Les
tumeurs indolentes qui ne contiennent pas un pus
formé, mais feulement une humeur de mauvaife
qualité, amaffée infenfiblement, font de celles qu'il
nefaut pas chercher à faire aboutir, mais dont la
réfolution feroit préférable. On doit au contraire
empîoyerjes maturatifs pour celles qui dépendent
d une crife, qui font un dépôt falutaire * & qui
peuvent rendre un pus louable en fouiageant ou
la partie affectée feulement, ou tout le corps de
1 animal. Il feroit dangereux de prendre une
hernie pour une tumeur : le Dictionnaire de médecine,
en cite un exemple. Cet excès d’ignorance
des maréchaux ne nous eft que trop connu. Voyez
T u m e u r .{M . VAbbé T e s s ie r .)-
A b o u t ir , ( jardinage ). Ce verbe s’emploie pour
défigner 1 épanouiflèment plus ou moins prochain
des boutons à fleurs d’un arbre fruitier. Les boutons
de ces arbres vent bientôt aboutir, ou font encore
loin d aboutir, c eft-à— dire, vont bientôt s’épanouir^
eu font encore loin de s’épanouir.
11 femble qu’il pourroit fe dire auftî des boutons
à feuilles -, c’eft même à ceux-ci qui paroiffent le
plus ordinairement les . premiers au bout des branches,
qu’on peut rapporter l’introduélion de ce
mot en jardinage, mais il paroît que l’ufage l’a
reftrcinr à déligner les boutons à fleurs des arbres
fruitiers. ( M. T hou in . )
ABRAS1N , arbre du Japon , que M. le Chevalier
de la Marck a rapporté depuis l’impreflion
de la lettre A de fon Diélionnaire de botanique
au genre du Driandra de M. Thunberg, décrit
dans la Flore du Japon de ce célèbre voyageur.
C’eft le Driandra cordata. Thunb. Fl. Jap. Voyez
D r i a n d r e O l e i f e r . (M . T hovin. ) .
ABREUVER, agriculture 3 abreuver des prés
ou des champs y c’eft y introduire & y laiffer fé-
jonrner 1 eau d’une rivière ou d’un ruifllau, pour
lenir frais les pieds des herbes qui y croiflent,
& leur donner une plus belle végétation. On
conçoit, qu’on n’abreuve que les prés ou champs,
dont le terrein, par fa nature ou par fon expofition,