
qui pourvoient s'y rencontrer. Enfin te on remet le
tas en pyramide, comme il étoit auparavant.
Plus la compofition eft formée de matières différentes,
plus il faut de tems pour que fon mélange
foit parfait, & plus il faut avoir l'attention
de la remuer fouvent & de la palier à travers
différentes claies. Il y a telle de ces compofitions
comme celle de la fécondé recette qui n eft propre
à être employée que la fécondé & mime la
troifième année , parce qu avant ce tems-ià les
différentes fubflances qui la cotnpofent ne font
pas affez exactement amalgamées enfemble. En
général, plus ces compofitions font vieilles, mieux
elles valent, c'eft pourquoi un jardinier prudent
a toujoursfoin de compoferchaque année beaucoup
plus de terre qu'il ne lui en faut annuellement,
afin d’en avoir toujours d'ancienne à employer
au befoin. Cependant la compofition de la cinquième
recette eft beaucoup moins de tems à fe
perfeélionner, & peut être employée quelques
mois après avoir été mélangée.
Nous n’entreprendrons point de difcuter icile
mérite'de chacune de ces recettes en particulier,
encore moins’ d'afligner le degré de lupériorité
des unes fur les autres. Interrogez chaque agriculteur
, il vous répondra que celle qu’il emploie
eft la meilleure. Nous nous bornerons
feulement à dire que nous avons de fortes pré-
fomptions pour les croire toutes inutiles, fi même
el les ne font pas nuifibles, à l’exception cependant
de la dernière. Des expériences que nous fuivons
depuis quelques années, fur cet objet, nous mettront
un jour fi portée de réfoudre cette queftion. En
attendant, voici un fait qui peut répondre d’avance
à-beaucoup d’objeétions. Plufieurs agriculteurs
inftruits, perfuadés que la multiplication
d’un infeéle particulier qui fatiguoit leurs Ananas
étoit dùe aux fumiers de diverfes efpéces
qui entroient dans la compofition de leur terre,
ont pris le parti de fupprimer de leur culture
ces fortes de compofitions & de fe fervir tout
Amplement d'une terre naturelle prife à la campagne,
en la choififfant d’une nature qui rînt le
milieu entre la terre à froment, la plus forte, &
le fable gras le plus fluide, ou ce qui revient
à-peu-près au même, d une terrefémblable à celle
indiquée à la troifième recette. Ils paroiffent
s’être bien trouvés de ce moyen ; leurs plafttes
font très - vigoureufes & la propagation de l'infecte
a beaucoup diminué. 1
Si cette dernière compofition eft la meilleure,
comme il y a tout lieu de le préfumer , 1 1 ne
s’agit plus que'de fixer les dotes de terre'-ar-
gilléufe & de fable qui _doivent entrer dans le
mélange , relativement à l’âge & à la force des
Ananas'. Les jeunes plantes d’un an exigent
une terre plus meuble, plus perméable aux
racines qui font tendres & délicates, que celles
qui font plus âgées. On pourroit alors faire
entrer la terre à froment dans la proportion d’un
tiers, & le fable gras dans celle de deux tiers.
Les plants de deux ans feroient placés dans
une terre rendue plus folide, par l'addition d|un
tiers de terre à froment & la fuppreffion d’un
tiers de fable. Enfin les Ananas de trois ans
feroient plantés dans un mélange compofé avec
| de terre franche & de fable gras.,
IV. Des arrofemens. L ’Ananas tient un yen
de la nature des plantes graffes , il crairft 1 humidité
pendant l’hiver, & la redoute même en
tout tems, & à tout âge lorfqu’il n’eft pas en
végétation. Quand on le plante fans racines ,
comme il arrive lorlqu’on le multiplie de couronnes
ou d’oeilletons , & quand on remporte
les vieux pieds, il faut bien fe garder darrofer
la plante immédiatement après cette opération,
on la feroit périr -, on doit attendre qu’elle ait
pouffé de nouvelles racines , & ne l’arrofer
même à cette époque , que très-légèrement, encore
faut-il avoir foin de verfer l’eau au pied
de la plante.
Mais lorfque l’Ananas eft repris depuis long-
tems, & que le pot dans lequel il fe trouve, eft
rempli d’une terre très -légère , compofée de
différentes efpèces de terreau , alors comme
l’évaporation fe fait plus facilement j fur-tout fi
le pot n’eft point placé dans une eouche, & fi
l’on eft obligé de faire beaucoup de feu j)our
entretenir le degré de chaleur convenable » il
eft néceflaire de l’arrofer une fois par femaine,
mais légèrement & feulement pour humecter la
terre. Il faut aufti avoir l’attention de ne ver-
fer l’eau que fur le collet de la racine , &
prendre bien garde qu’il n’en tombe point fur
les feuilles , parce qu’en raifon de leur, difpofi-
tion , elles la conduiroient au coeur de la
plante , qui pourriroit infailliblement. On fe
fert pour cetufage, d’un arrofoir à goulot > dont
le bec eft long d’un pied , & fe termine par
un trou un peu applati de fix lignes de long
fur quatre de iarge. Si la terre eft d'une con-
fiftance plus ferme , & d’une nature plus compacte
, elle retiendra plus long-tems l'humidité,
& , par: cette raifon, il fufiira de l’arrofer tous
les quinze jours, | | plus légèrement encore que
dans le premier cas. Au printems, on peut arro-
fer les Ananas plus fréquemment', fur-tout ceux
qui annoncent leur état de. végétation par la
pou fie de nouvelles feuilles , & particulièrement
ceux qui fe difpofent à pQrter des fruits
dans le courant de l’année. Mais en même-fems
il faut que la chaleur foit plus confidérable »
comme nous l’avons dit précédemment. On choi-,
fit autant qu'il eft poffible pour faite les arrofemens
de. ces d'eux faifons * des jours où le lo-
leil paroît dans toute fa force , afin que les
rayons diffipent l’humidité furabondante, à laide
d’un ou de deux vagiftas qu’on aura établis au
milieu ou aux deux extrémités de la ferre. L eau
qui fert à ces arrofemens > doit avoir féjourne
* dans
A N A
dans la ferre au moins vingt-quatre heures ,
pour que fa température foit plus analogue à
celle de l'atmofphère des plantes : fi l’on fe
fervoit habituellement d’un eau prife extérieurement,
il pourroit en arriver des fuites fâcheufes
pour les plantes , à caufe de fa trop grande
fraîcheur. Pendant l’été, les arrofemens doivent
être plus fréquens, mais toujours très'légers \
on peut fe fervir alors de tems en tems d’un
arrofoir à pomme qui verfe l’eau en manière
de petite pluie fine, & !a répandre également fur
toutes les parties dès plantes. Mais il faut alors
changer l'heure des arrofemens. On doit les
faire dans cette faifon vers les fept à huit
heures du matin, avant que les rayons du foleil
aient : acquis beaucoup de force. Plus tard , il
féroit à craindre que les gouttes d’eau difperfées
fur les feuilles , venant à raffembler plufieurs
rayons folairés , ne fifi’ent l’effet d’une loupe
qui brûleroit l’épiderme, & y occafionnçroît des
taches aufti défagréables à l’oeil , que nuifibles
aux plantes.
A l’automne les arrofemens doivent diminuer
en proportion de la chaleur , & les baflinages
devenir moins fréquens. Il faut même fupprimer
entièrement ces derniers, lorfqu’on a tranf-
porté les Ananas de deffous les haches dans la
ferre chaude. S’il arrivoit , par quelques caufes
particulières, que les feuilles des plantes enflent
befoin d’être lavées, il faudroit fe fervir d’une
éponge douce qui ne contiendroit que très-peu
d’eau, afin qu’en lavanries feuilles,il n’en tombât pas
une trop grande quantité dans le coeur de la plante,
& choifir enfuite pour cette opération un beau
jour dont la chaleur fût en état de dilfipcr l’eau
qui fe trouveroit à la bafe des feuilles. On peut
reconnoitre à-peu-près, en tout tems, qu’un pied
d’Ananas a befoin d’être arrofé, lorfqu’étant bien
verd , la terre dans laquelle il eft placé, devient
friable fous les doigts , & qu’en les enfonçant à un pouce de profondeur on ne s’apperçoit
qu’elle eft humide, que par une couleur un peu
plus brune. Mais les lignes qui indiquent que
les Ananas ne doivent point être arrofés font
plus aifés à faifir. En général, une plante- qui
ne pouffe point ne doit être arrofée que très-
légèrement & feulement pour confolider la terre
autour des racines & empêcher l’air d’y pénétrer
trop abondamment. Si elle eft jaune, il faut fe
garder de l’arrofer, parce que cette maladie vient
prefque toujours d’un excès d’humidité. On doit
alors lui donner pltis de chaleur & attendre
quelle pouffe pour humeéter un peu la terre.
Quelquefois, & fur-tout pendant l’été, il füffit
de la' tenir dans une atmosphère humide, chaude
& aérée pour la rétablir. Toutes les fois que
la terre d’une plante , même dans l’état le
plus vigoureux,, eft humide à fa furface, il ne
faut point l’arrofer & en général, il vaut mieux
pécher par défaut que par excès; les.fuites 1«
•Agriculture, Tome I.*r , BH Partie,
A N A
font moins dangereufes pour la réufiîte des planres.
V . Du renouvellement de'Pair* L ’A n a n a s eft
une des plantes qui tranfpire le plus, quand elle
eft en pleine végétation , & comme fa culture
exige des ferres 'baffes & de peu d’étendue,
l’air fi corrompt bientôt , & il faut le renouveler
fouvent , fi l’on veut avoir des plantes
vigoureufes & de beaux fruits. Les jeunes plants
d’un an fur-tout, ont befoin d’une atmofphère
fouvent renouveliée pour prendre de la force,
fans quoi iis ne pouffent que de foibles racines,
leur corps ne prend point de confiftance , leurs
feuilles s’alongent & s’étiolent, & leur verdure
refte toujours pâle. La meilleure manière de
donner.de l’air à ces plantes, eft de lever perpén-
diculaîrement les chaffis qui les couvrent, toutes
les fois^que le tems le permet, fans trop faire
varier le degré de chaleur qui convient à leur
âge & à la faifon où l’on eft. L ’air qui tombe
verticalement, eft préférable à celui qui vient de
toute autre manière. Enfuite il eft néceflaire de
ne pas trop rapprocher les pieds les uns des
autres, & de laiffer au moins entre chacun d’eux ,
un efpace libre de trois à quatre pouces en tout
feus.Les Ananas, qui font en fruétificaiion, ont
encore plus befoin d’un air pur que les autres,
pour que leurs fruits acquièrent de la faveur *, il
leur faut aufti beaucoup de lumière, afin qu’ils
fe colorent plus agréablement. Enfin le renouvellement
de l’a ir , dans les ferres, empêche la
multiplication des infeéles deftruéleurs, & rend
leur féjour plus falubre, & pour les plantes &
pour le cultivateur.
VJ. De la plantation & de la transplantation
des Ananas. Lorfqu'on veut planter les couronnes
d’Ananas, il ne faut pas les couper,, mais feulement
les détacher des fruits, ce qui fe fait
fort aifément en tenant d’une main le fruit, &
de l’autre .là couronne *, on tourne les deux
mains très - rapprochées l’une de, l’autre , en
fens contraire, comme pour ouvrir un étui, &
on fépare ainfi le fruit de la couronne qui vient
avec une partie de l’axe qui étoit couverte par
le fruit. On arrache quatre ou Cinq rangs de
feuilles de la bafe des couronnes, pour former
une efpèce de pied, enfuite on les place à l’ombre
fur une tablette , dans un lieu fec & chaud, où
elles reftent pendant le tems ùéceffaire pour que
les cicatrices , faites par la fuppreffion des feuilles
la portion de l’axe, qui étoit recouverte par
le fruit, foient defféchées extérieurement. 11 ne
faut, pendant l'été, que huit ou dix jours d’un
tems fec , pour que les couronnes foiçnt en état
d’être plantées. Les oeilletons fe préparent de la
même manière', on les arrache du bas des tiges
des vieux .pieds d’Ananas, on fupprime les feuilles
les plus baffes, & on les laiffe reffuyer comme
les couronnes , enfuite on les plante dans des
pots avec de la terre, préparée , comme nous-
î’avpns dit plus haufc
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