
Année oh on peut couper les Afperges.
Quand on a mis en terre du plant d’un an,
on le laifle à Aùhervilüers, monter fans le couper,
la première & la fécondé année. Mais on
Je coupe la troisième année, pendant les quinze
premier^ jours feulement" de la faifon. S’il y avoit
des tiges foib'les, il ne faudroit pas couper celles-
là. Cette coupe eft néceffaire, pour faire la
tête des griffes 2 c’eft-à-dire, pour des forcer,
çn quelque forte, de taller & de produire un plus
grand nombre de montans ou d’Afperges. La
quatrième année, on ne les-, coupe encore que
jnfqu’au mois de juin. Les années fuivantes;, on
les coup? jufqu’à la Saint-Jean, Si c’eft du plant
de deux ans, on commence à les couper une
année plutôt, en obfervant le même ordre &
les mêmes précautions. 11 ne paroit pas qu'on
ait elfayé d’attendre la fixième année, pour les
couper pendant toute la faifon. Il y a lieu de
croire que les Afperges en feroient plus belles.
Mais il faudroit toujours leur faire la tête la
fécondé où la troifième année, félon que le
plant feroit de deux ans, ou d'un an.
La culture de TAfpergerie eft, pour tout le
teins de fa durée, la même que celle de la fécondé
année ; celle-ci paffée, à Aubervilliers,
on ne fume plus que trois ans après, & enfuite
à volonté. A cet égard, chacun fe réglera fur
fon terrein, & fur la facilité qu’il aura d’avoir
des engrais. Toujours, eft-il vrai qu’il faudra,
chaque année , au mois, d’oélobre ou de novembre,
coupçr les montans à deux pouces de
la fuperficie des folles, ôter une partie de la
terre, afin, que les Àfpefges aient moins d’humidité
en hiver , les découvrir tout-àrfait; au
"pfint.ems, pour'lès recouvrir de fumier & de
trois pouces de terre ?> & enfin les farcler plu-
Tieurs fois, fin été.
Manière de les couper, j
Il y a des précautions à prendre pour couper
les Afperges.. Des jardiniers attentifs fe fervent
d’un inftrument plat, fait exprès. Çet inftrument,,
qui eft de fer,, a huit pouces de longueur, ïu;r
fix à huit lignes de, largeur. Le bas eft courbé,
ppintu, intérieurement tranchant , & garni
dé dents .comme unefcie; il eft dans, un manche
de bois. On le plonge perpendiculairement
le long de l’Afpergç, après en avoir écarté la
terre, pour découvrir les autres pouffes ; à la
profondeur d'environ fix pouce?, on donne un
'tour de main pour embraffcr l’Afperge avec le
bout du crochet ; on la coupe en tirant à foi.
Far ce moyen, on ne froiffe pas les montans,
qui fonj prêts à percer.
Lorfqu on ne confomme pas fur-le- champ toutes
Afpergescoupées,il faut les meure dans un vaiffeau
qui ait, au fond, deux pouces d’eau feu^
lement, de manière que les pointes foient en
haut, oujuen les enfoncer à demi dans le fable
frais. Elles s’y confervent plufieurs jours, mais
ne font jamais fi bonnes que fraîchement
coupées.; ^
Quelquefois on voit des Afperges jumelles ;
& même trijumelles. Elles font le produit de
plufieurs yeux réunis & ferrés les uns contre le*
autres.. Les arbres à fruits nous offrent des exemples
de ces monftrKofité*. Car il y a des cerifes,’
des pommes, des prunes & des pêches, qui de
deux ou de plufieurs n’en forment qu’une* Je ne vois
pas qu’on ait encore penfé à féparer ta graine de ces
fortes.d’Afperges, pour la femer & en examiner le
produit. Une griffe qui donne des Afperges jumelles
ou trijumelles, n’en donne pas d’autres ,
tant que lo plant dure. Ces Afperges font rares,
toujours creufes, & de mauvaife qualité.
Oneftirne qu'à Aubervilliers un bon arpent;
planté en Afperges, 'peut donner, quand il eft
en plein rapport, douze douzaines de bottes
triées', ou groft'es, & vingt-quatre douzaines de
moyennes, pendant huit ans conféçmifs. La
botte de groft'es Afperges a environ fept à huit
pouces de diamètre, & celle de la moyenne,
quatre à cinq pouces. Le cent de bottes des
groft'es , fe vend depuis ico livres jufqu’à
300 livres*
Frais pour la culture d’un arpent en Afperges.
Il en coûte au cultivateur, pour avances, 1.®
35 à 40 iiv. de loyer, i.° 70 liv. pour faire des
fofles & planter. 3.0 30 à 40 liv. pour frais de
fatclages. 4.0 20 liv. pour découvrir & recouvrir
les Afperges. A quoi il faut ajouter-le pris de
14 à 15 milliers de griffes, & celui de huit
fortes charretées de fumier, qui lui revient à 6 1.
la charretée. Il faut donc quil dépenfe plus de
200 liv. avant que l’arpent de terre lui puifle
rapporter. Les frais des années fuivantes font
moindres. Ils confident à faire farcler plufieurs
fois par an, & enlever une fois de la terre de
deflus les pieds, pour mettre ou du fumier &
d’autre terre, ou feulement de la terre à la
place.
L’Afperge fe cultive à Aubervilliers de tetns
immémorial. Ce village peut en fournir à Paris,
année commune, vingt-huit à trente milles bottes.
Cént cinquante perfonnes,.ou environ, font employées
à cette culture, depuis la mi-mars juf-
qu a la Saint-Jean,
Une plantation d’Afperges bien entretenue,
s’y foutien en bon rapport pendant huit. ans.
Après ce tetns elle déchoit, .& il faut la détruire.
La terre alors fans engrais pendant deux
ans, produit les graines ou le,s légumes qu’on
veut y femer. On prétend qu’elle neft plus propre
à porter, dans la fuite, une fécondé fois, des
Afperges. Un particulier d’Aübervilliers dit en
avoir effayé fans fuccês. Mais cette expérience
a-t-elle été répétée ? Je ne puis croire qu’au
bout d’un certain rems, un terrein , dans lequel
on a cultivé des Afperges, s’il eft préparé convenablement
, refufe de fe prêter à la végétation
de ces plantes.
Culture de VAfperge dans les vignes.
Culture d* Orléans.
Par les détails dans lefquels je fuis entré, on
voit que la culture ordinaire de TAfperge' exigé
beaucoup de foins & de frais, & que cette denrée
, d’ailleurs peu nourriftante , ne peut être
allez commune , pour que le peuple en faffe
ufage. Si la culture employée par les vignerons
d’Orléans , fe répandoit & s’introduifoit dans
tous les vignobles , les Afperges devien-
droient très-communes, & feroient une reflource
au moins pour la bourgeoifie & pour.Jesartifans
des villes. Je m’empreffe de faire connoître cette,
culture, ne l’ayant ercore trouvée nulle part. ■
11 n’y a point, aux environs d’Orléans, de
canton, ni de terrein particulier, confacrè à la
culture des Afperges, mais c’eft entre les ceps
de quatre ou cinq mille arpens de vignes» Çe
genre de légume eft fi abondant dans Tes marchés
de cette Ville, que les gens riches qui ont
des potagers, ne prennent pas la peine d’y en
planter. Il part d’Orléans, dans la faifon, des
voitures chargées d'Afperges pour Paris & pour
les villes & bourgs de la Province.
Le terrein des vignes d’Orléans eft une argille
très-divifée par du fable ou de petites pierres.
Les champs ainfi compofés, s’appellent grouettes
dans tout le pays. Les Afperges y réuftiflent bien;
elles y deviennent plus groftes que dans le
fable pur, & font moins hâtives.
On ne trouve point de plant à acheter. Chaque
vigneron fait lui-même fa pépinière à un
bout de fa vigne. Il sème de quoi renouveller
fes plantations. Rarement fon voifin lui vend
ou lui prête des griffes ; rarement il lui en vend
ou lui en prête. La terre né reçoit d’aurres façons
que celles qui conviennent à la vigne. Seulement
on a l’attention de ce femer des Afperges
que dans une vigne qu'on vient de fumer abondamment.
C’eft au mois de mars, oti au commencement
d’avril. Il pa'roît qu’on met la graine
dans des trous , & qu’on la recouvre de terré.
. Les griffes reftent trois où quatre ans en pépinière.
On les met toujours ert place au mo-
«nent où on plante la' vigne, à la profondeur
d un fer de bêche; on lesdifpofeàhuir ou dix pouces
■des-ceps , & à deux ou trois pieds les unes des au-
îres, fui vaut l’idée du vigneron ou la fécondité
du fol. Afin que la vigne ne foudre pas du voi-
«nage des Alperges, on n’en plante qu'aux deux
extrémités des filions ou plate-bandes > & jamais
au milieu.
Pendant,que les Afperges,font en place, on
les façonne toujours en même-tems que la vigne ,
on les fume eh mérâe-tems, tous les. quatre ou
cinq ans. Le vigneron qui fait ou font les pieds,
donne au printems , un coup de marre à Ja
ferre qui les recouvre, pour en faciliter la fortie.
Rien n’eft plus fimple que cette culture.
Les Afperges d’Orléans font en général plus
belles que celles d’Aubervilliers. Elles ont beaucoup
plus de verd ; ce qui dépend du terrein.
Il y en a quelques jaunis qu’on, a foin d’extirper
, parce qu'elles font amères, étant vrai;*
femblablement des griffes malades.
Une 'plantation d'Afperges fubfifte autant que:
la vigne , depuis vingt jufqu'à vingt-cinq
ans. En replantant la vigne, ,on replante des
Afperges!
Culture de M. le Curé de Charmons.
M. le Curé_ de Charment, village Beauce,de
fitué à trois lieues de Pithiviers., cultive auffi,
& avec un grand fuccès ,rde$ Afperges dans des
vignes. Le loi eft u«e terre franche, bonne pour
le froment ; elle n’eft ni argilleufe, ni grouetteufe,
Ayam tiré fon premier plant en 1768 , d'un
Maréchais d'Etampes, il en prend maintenant
dans fes propres plantations. Il élève le plant en
pépinière. Après un an , il,, le place de la manière
fuivante. Il fait fouiller dans les ados jufqu’à
la terre folide; il met au fond de la fouille
environ deux pouces de . terre meuble; on en
forme une petite élévation pour affeoir la griffe
dont on étend les racines d’une main , tandis qu’on
l’affujettit d’une autre. On recouvre les griffes de
quatre pouces de terre au-delfiis de l'oeil ; à la
fin de juin ou au‘ commencement de juillet,
quand les féchereffes .arrivent, on ajoute pardef-
fus quatre autres pouces de terre. Lps griffes fe
placent à deux pieds & demi les unes des autres,
&. entre les ceps, dans toute iâ longueur
des ados.
M. le Curé de Charmont ne croit pas qu'ainft
placées, elles-altèrent la vigne. En cela, il dif^
fère des vignerons d’Orléans, qui ce fe permettent
d’en planter que dans les bouts. Maïs le terrein
de M. le Curé de Charmont étant une terre à
froment , c’eft-à-dire , une terre un peu fubftan-
tielle, il peut, avec moins, d’incpnvéniens qu’à
Orléans , planter des Afperges1' dans toute
fa vigne , il fait cultiver en même - tems
la vigne & les Afperges. 11 ne croit pas que
les Afperges altèrent la vigne. Depuis neuf ans,
il ne l’avoit pas fumée .; il vient de la fumer
avec du fumier de cour de fermier. Ses Afperges
font belles & abondantes! I l. y en a d'un pouce
.& .d'un pouce & demi de diamètre. Je foup