
Règles que doivent obferver ceux qui sèment. Le tems le plus
propre pour enfcmpnccr les champs, n’étant point fixe & détermine, mais
îiibordonné à l’irrégularité des Liions, on ne peut donner que des
principes généraux fur cet objet : ainfi, lorfqu’on sème de bonne heure,
il faut femer épais, parce que le bled eft plus long-rems à germer: &
quand on s’y prend tard, on doit femer clair, de peur que les grains
ne s’étouffent.
Tous les laboureurs n’ont point le talent de bien femer : cet art
confifte en ce que la main du femeur réponde à la vîtelfe de fa marche,
& principalement au mouvement du pied droit.
Ce ferait dénaturer les femences que de mettre dans un lieu froid ,
le bled qui vient d’un climat chaud ; ou de femer dans une terre tardive ,
les graines qui ont été produites dans un terrein hâtif.
Quantité de femence. Pline fixe la quantité de bled qu’on doit
femer, lorfque la terre eft pafl'ablement bonne. Pour un joug, il faut
cinq boiffeaux de froment commun, dix boiffeaux de fer,..fix boilleaüx
d’orge, autant de fèves, douze boilfeaux de vefce, trois boiffeaux de
pois chiches, autant de gelfe, autant de pois communs, dix boilfeaux
de lupins, trois boilfeaux de lentilles, fix boilïeaux d’orobe, autant de fenu
grec, quatre boilfeaux de féveroles, quatre fetiersde millet ou de panis.
Pour déterminer d’une manière plus pofitive, la quantité de bled
qu’on doit femer dans un champ quelconque, il faut avoir égard à la
qualité de la terre; fi elle eft griffe, elle exige une plus grande quantité
de femence que celle que nous venons d’indiquer; fi elle eft maigre, elle
en demande moins. Il y a encore une autre obfervation à faire : lorfque
la terre eft forte ou que la craie y domine, on doit mettre par
joug fix boiffeaux de froment commun ; mais quand la terre eft sèche,
légère, bien à découvert, il n’en faut que quatre : ainfi, la quantité
de bled pour un joug de terre, eft de quatre à fix boiffeaux, félon
la nature du terrein.
Tems des femailles. U eft confiant que l’agriculture dépend principalement
du ciel & de l’influence des aftres; c’eft donc une queftion
bien importante à traiter, que celle où il s’agit d’alfigner le tems le
plus propre pour femer toutes fortes de grains. Pour donner plus de
precifion aux préceptes qu’il donne fur ce fujet, Pline entre dans
de grands détails fur la divifion des jours & des nuits relativement
au cours du foleil & au lever ou coucher des étoiles. Après cette difi-
cuflîon préliminaire, il conclut qu’on doit femer les bleds d’hiver-, lors
du coucher des pléiades,, c’eft - à-dire, quarante - quatre jours après
1 équinoxe dautomne; & la plupart des autres graines, dès le onzième
jour après 1 équinoxe d’automne. Ceux qui fuivront cette pratique,
feront prefque ftirs d’avoir alors de la pluie pendant- plufieurs jours. En
feétiéral, dit-il, la véritable faifon pour femer, c’eft lorfque les feuilles
des arbres ont commencé à tomber, & non pas plutôt : la chute des
feuilles arrive ordinairement au coucher des pléiades, ceft-a-dire,
vers le 11 novembre. Varron ne donne d’autre précepte, que celui qui
eft indiqué par la nature. I l recommande d’attendre que les arbres fe
dépouillent de leurs feuilles, pour confier a la terre la femence des
fèves; d’autres agriculteurs font d’avis de les femer, ainfi que les lentilles
, depuis le vingt-cinq de la .lune jufiqu au trente. Ils croient qu il
faut femer les vefees dans ce meme tems, fi on veut les preferver des
limaçons. , "
* Travaux de l’hiver. Depuis l’équinoxe d’automne jufqu au folftice
d’hiver, il eft à propos, fi la nature du lieu le permet, d’émonder les
arbres, de tailler la vigne, de préparer la terre avec la houe pour les
pépinières, de creufer des rigoles pour 1 écoulement des eaux, de laver
les prefloirs & de les mettre en réferve. Sept jours après le folftice
d’hiver, il faut tirer les vins au clair fuivant le confeil d’Hygin, & les
mettre en tonneaux, pourvu que la lune ait fept jours. Dans cette faifon
où les jours font fi courts, il faut donner un boiffeau de gland par jour
à chaque paire de boeufs: s’ils en mangeoient davantage, ils deviendraient
malades. Les autres ouvrages d’hiver fe font ordinairement à
la veillée, d’autant que les nuits lont fort longues. Alors on fait des
corbeilles, des claies, des paniers, on taille des bois rélineux pour en
faire des torches & on façonne les échalas.
Travaux du printems. Vers le milieu de février, lorfque le vent
fevonien commence à fouffler du couchant équinoxial, le laboureur
doit faifir ce moment favorable pour faire plufieurs ouvrages qu’il ne
fauroit différer plus long-tems, fans fe faire un tort confidérable. Il
doit femer les bleds de trois mois; tailler la vigne; façonner les
oliviers ; planter 81 greffer les pommiers ; houer les vignes ; faire des
pépinières, en rétablir d’autres; planter les ormes, les peupliers, les
platanes, les faules, les rofeaux, les genêts & les tailler. I l convient
aufli alors de farder les bleds, lorfqu’ils commencent à montrer quatre
barbes. Pour les fèves, il ne faut les farder que lorfquelles ont trois
feuilles & fe donner bien de garde d’y toucher, lorfqu’elles ont commencé
à fleurir. La taille des vignes doit être achevée à l’équinoxe de
mars ; de plus, c’eft la faifon la plus favorable pour donner le premier
labour, afin que la chaleur du foleil en recuife l’humidité. C ’eft Virgile
qui le confeille : toutefois il vaut mieux fuivre l’opinion de ceux qui
veulent qu’on ne laboure au milieu du printems que des terres de
moyenne qualité : car fi on laboure alors une terre forte, les herbes
rempliront bientôt les filions; & fi on laboure une terre légère, les
çhaleurs qui furviendront ne manqueront pas de la dellécher : ainfi 2