même:qui, avant de femer-.les pois, les'fèves, les trempent dans l'eau
de nitre & dans la lie d’huile d’olive ;- mais malgré ces préparations
ôn voit dégénérer les plus précieufes- femences, à moins qu’on ne
choififle tous les ans les grains les plus gros. Telle eft la malheureufe
deftinée des chofes créées, le tems amène le dépériffement de tous les
êtres : nous reflèmblons, ajoute Virgile, au nautonnier dont la nacelle
remonte une rivière, s’il celfe un inftant de ramer, foudain il eft
entraîné par la rapidité du courant. _
ConnoiJJance des ajîres. Tel quun pilote qui obferve les aftres,
lorfque pour retourner dans fa patrie, il traverfe lHellefpont ou le
détroit des Abydes : ainfi, le laboureur doit être attentif au lever des
conftellations. Lorfque le figne de la balance (i) aura égalé les heures
de k nuit a celles du jour, & le tems du repos à celui du travail, il
doit exercer fes taureaux dans les champs, femer l’orge, le lin , les
pavots. La terre fût-elle fèche, réimporte. Les nuées fufpendues dans
les airs annoncent une pluie prochaine. ■ • ^
Quand le brillant figne du taureau a ouvert l’année, quand la
çonftellation du chien ( i ) defeend fous l’horizon en même-tems.
que le foleit, il faut femer les fèves, le treffle, le millet. .
Lorfiqu’on ne fè.ptopofe de recueillir qu une recoltede froment, on (jôit
attendre, avant de confier cette femence à la terre, le lever de la cou-,
' ronne d’or : (jjTceux qui ont femé avant cette époque, ont vu périr
leurs moiflons. Veut-on femer de lavefee, des faféoles , des lentilles
d’Egypte, il faut choifir le tems où l’étoile du bouvier (4 ) fe couche
avec le foleil, &C continuer fi le cas Iq requiert jufqua la faifon
des pluies,. , x •
La connoiffance des aftres & de la fphere eft, félon Virgile,
très-néceflaire à un cultivateur pour l’intelligence de la di.verlite .des
faifons, pour régler le tems de la femence & de la feçplte, celui
où il faut abattre les arbres pour la confttuâion des vailleaux &
s’embarquer fur félément perfide. I l donne,en conféquençe une belle
deicrlption de la fphère. _
Occupations du laboureur. Pendant les rigueurs de Liwcr > lor -
/i'ï.Le foleil entroit dans lç-figne-de la balance vers le 10 de feptemtre!-'
(,) L’annéé afironomique commence'lorfque le foleil entre dans ie.ligne du bélier,
c’efi-à-dire, le 21 de mars ; mais, comme la terre ouvre fon fetn au moisd avril V jrgile
a jugé à propos de faire ouvrir l’année rurale par le figne du taureau , ou le ioléil.entre Je
' 1 1 d'avril C’-ell alors que la çonftellation du chien fe côucholt avec le loleil. 1
i O L a couronne d’or eft une çonftellation qui, étant éclipfée par les rayons du .qleil
pondant quelque tems, cotnmençoir à paroître à l'orient,avant le lever dufolen, le 1}. qu
le 14 d’oflebre-, drivant l’interprétation de Golumelle. HHH ISjfR ' .
(4) L’étoile du bouvier, ou t a n t ô t , fuivant ÇoiumeHe, -fe.couchoit de fin tems le
21 oélobre. ‘ - ,, quunc_
qu’une pluie froide retiendra le laboureur dans fa mailbn & qu’il ne
pourra vaquer aux travaux du dehors, il s’occupera de ceux du dedans
qu’il ferait obligé de faire dans un tems fereiu. Il aiguifera le foc
émoufle de la charrue, il creufera des troncs d’arbre pour en former
des bateaux, il mefurera fès grains ou marquera fès troupeaux. Ces
occupations varient fuivant les circonftances : tantôt on en voit qui
taillent des pieux, des fourches ou qui préparent l’ofier pour attacher
la vigne ; tantôt on en trouve qui treffent des corbeilles, des paniers
ou font fécher des grains au feu pour les broyer enfuite. Dans les
foirées de l’hiver, les hommes aiguifènt auprès du feu des branches
par le bout, & les taillent en forme d’épi pour en faire des torches,
tandis que les femmes charment par leurs chanfons l’ennui du travail, &
font courir une navette entre les fils de la toile ou font bouillir du vin
doux quelles remuent avec un rameau. I l eft certains ouvrages qu’on
doit faire pendant la fraîcheur de la nuit ou dans le tems que la
naifïante aurore diftille la rofée. U n laboureur expérimenté met ces
momens à profit pour couper les chaumes & pour faucher fès prés.
L ’humidité de la terre rend alors l’herbe plus tendre. Les jours de
fête, on peut fe livrer à des travaux légitimes. Il n’eft pas défendu de
faire des canaux pour les eaux, d’entourer fon champ d’une haie, de
tendre des pièges aux oifeaux, de brûler des ronces nuifibles aux
moilfons, de baigner les brebis. Le payfan peut conduire à la ville
fon âne chargé d’huile ou de fruits, & en rapporter de la poix ou
une meule, piquée.
A l’exemple d’Héfiode, Virgile fait l’énumérarion de certains
jours heureux ou malheureux, il ne faut pas pour cela conclure qu’il
y ait ajouté foi; il a voulu plutôt fuivre l’exemple des poëtes anciens
qui fe faifojent une loi d’adopter les préjugés populaires, fur - tout
lorfqu’ils tenoient à la religion.
L ’été eft la faifon du travail pour un cultivateur : alors on coupe
les bleds; on les bat dans faire ; on laboure la terre; on feme les
grains. Pendant 1 hiver, dans cette faifon où la nature paraît engourdie,
les laboureurs fe livrent à la joie & au plaifir. Ils s’invitent à des repas
où règne la franchife & la gaieté. Ils imitent les matelots, qui
échappés de la tempête & arrivés heureufement au port, ornent de
feftons & de guirlandes la poupe de leurs vaiiïeaux échappés du
naufrage. Il eft cependant en hiver même des travaux indifpenfables,
comme de recueillir les glands, les graines de laurier & de mirthe,
de faire Ja récolté des olives. Dans le tems des frimats, on tend des
lacets aux oifeaux, & des toiles pour prendre les cerfs. Lorfque les
campagnes font couvertes de neige, & que les fleuves charrient des
Agriculture, Tome I. T