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tout à l’entour, de petites épines, & bordées
d’an liféré rouge-clair très-agréable. D’ailleurs,
comme elles font minces & flexibles y elles le
renverfent fur elles-mômes en décrivant un arc
plus ou moins grand , & donnent à. l’arhre un
port allez pittorefque.
Çet aloès fleurit pour l’ordinaire au commencement
du printems, & quelquefois à l’automne.
Ses fleurs, plus Singulières qu’agréables, fortent
des aiflelles des feuilles, au fommet de l’arbre,
&. font 'difpofées en panicules grêles &T alongés.
Elles font de la grofleur d’un tuyau de plume
ordinaire, longues de deux pouces, & de couleur
de chair. A ces fleurs fuccèdent des capfules
triangulaires, remplies de femences,qui mùrilfent
quelquefois dans nos ferres.
2. A lo è s fuccotrin. Il eft rare que cette efpèce
s’élève à plus de cinq pieds de haut dans notre
climat. Sa tige eft comme tubéreufe à l’ endroit
où elle fort de terre, enfuite elle fe rétrécit un
peu au-deffus, & va toujours en'diminuant jufqu’au
toimnet.qui fe divife. en deux ou trois branches ou
rameaux. Ces rameaux font terminés par des
touffes de feuilles d’un pied 8c demi de long &
d’un pouce environ de- large, dont les bords font
garnis de. petites épines blanches , très - rapprochées
les unes des autres. Les feuilles du
bas de ces touffes, fe recourbent vers la terre &
forment un arc de cercle, celles du haut s’élèvent
verticalement, & celles du milieu font
horizontales} lés autres feuilles qui fe trouvent
entre ces trois divifions, participent plus ou
moins de ces différentes polirions, foivant qu’elles
font plus ou moins éloignées, de chacun de
ces trois points, en forte que. chaque touffe, repréfente
une figure fphérique aidez régulière.
De l’extrémité des tiges ou- des branches*s’élève
un pédicule qui, dans le commencement,
reffemble beaucoup à une afperge ; mais, à mefure
qu’il grandit, il perd cette rèffemblance, & , lorf-
qu’il eft parvenu à la longueur de vingt pouces,
il prend la forme d’un épi. Cet épi s’alonge
encore de cinq à fix pouces , & fe couvre'
enfuite , dans tome cette longueur, de fleurs
d’un rouge, agréable, tachetées de verd, lefquelles
„durent: environ vingt jours.
Cette planté fleurit affez ordinairement à la
fin de l’hiver, lorfqu’elle eft placée dans une
ferre tempérée, & elle produit fouvent des femences
qui. viennent à parfaite maturité.
3. L ’â I oès ordinaire croît abondamment dans
l’Amérique feptenrrionale, dou il a été tranfporté
en Efpagne, en Italie, & dans le levant. Il s’ élève
moins que les deux efpèces précédentes. La
pefanteur de fa tête & la grande quantité de drageons
qu’il pouffe de fes racines paroiffenr s’op-
pofer à l’accroiffement de fa tige , qui parvient
rarement à plus de deux pieds de haut. La
moitié fupérieure de cette tige eft garnie, dans
toute fa circonférence, de feuilles, qui ont environ
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deux pieds de long fur trois à quatre pouces de
largeur à leur bafe , & qui le terminent en
pointe. Leur épaiffeur eft de plus d’un pouce
& demi près de la tige. Elles font d’une couleur
cendrée , tachetées de blanc dans leur jeuneffe. Leur
direction eft plus ou moins verticale, fuivant
qu’elles font plus ou moins éloignées du fommet ;
il y a quelques épines fur les bords.
Les fleurs de cette efpèce font d’un jaune
clair, difpofées en épi lâche. Elles naiftent fur
un pédicule d’environ trois pieds de long, qui
fe divife en deux ou trois rameaux, & qui
fort du fommet de la plante. Ces fleurs paroiffent
au printems & quelquefois à l’automne *, elles
font fort agréables, mais elles donnent rarement
des graines bien aoûtées dans notre climat.
4. A lo è s des. Indes. Cette efpèce a beaucoup
d’aflinité avec la précédente*, mais elle en diffère
cependant par les dimenfions de fes feuilles,
qui font moindres dans toutes leurs parties, par
leur couleur, qui eft légèrement rougeâtre, &
fur-tout par fes fleurs, qui font plus petites &
d’un rouge pâle. D’ailleurs elle eft infiniment
plus délicate, & ne pouffe que très - rarement
des drageons de fa racine, tandis que la précédente
en fournit une très^grande quantité chaque
année j ce qui prouve au moins une différence
marquée dans la nature de ces plantes.-
5. L ’A lo è s d’Abyflinie a les plus grands
rapports avec l’Aloès ordinaire. Il s en diftingue
néanmoins par fes feuilles plus charnues, plus
longues, & plus larges , ainfi que par fes épines,
-qui font rougeâtres. D’ailleurs il n’a point
les taches blanches qu’on remarque fur les jeunes
feuilles de fon. efpèce congénère , & pouffe
beaucoup moins d’oeilletons de fa racine. Ses
fleurs font auffi plus grandes- & d’un jaune
plus foncé i au refte , il fleurit , comme elle,
au printems & quelquefois à. l’automne, &
ne donne que très-rarement de bonnes graines dans
notre climat.
- 6. A lo è s cornes de bélier. C’eft un arbriffeau
rameux, qui s’élève avec quelques précautions,
à la hauteur de huit à dix pieds *, fa tige eft
blanchâtre & couverte des cicanieés que lui ont
imprimées les anciennes feuilles qui font tombées.
Elle -fe divife en plufieurs branches, qui fe
partagent elles - mêmes en plufieurs rameaux ,
terminés par une touffe de feuilles ferrées les
unes auprès des autres , & qui embraffent la
tige où elles croiffenr. Ces - feuilles, qui fe
terminent en pointe, ont quinze à dix-huit pouces
de long , & un pouce & demi de large
environ- à leur bafe. Elles font contourées en
forme de fpirale, comme les cornes d’un bélier,
& garnies affez régulièrement d’épines fur les
côtés y leur couleur eft d’un verd glauque un
peu cendré.
Les fleurs de cet aloès contraflent fingulièrement
avec la plante j autant celle-ci eft difforme &
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pour ainfi dire hideufe, autant les fleurs font
agréables & même élégantes. Elles font portées
par des pédicules d’un pied de long qui fortent
du milieu des touffes de feuilles , & qui forment
avec les fleurs de gros épis d’une figure pyramidale.
Ces fleurs font d un rouge éclatant \ &
ce qui ajoute encore à leur mérite, c’eft quelles
paroiffent au milieu de l’hiver, & durent environ
trois femaines.
- 7 . A lo è s féroce. C’eft de toutes les efpèces
celle qui s’élève davantage. Nous en avons vu
quelques individus qui avoient plus de douze
pieds de haut, & qui promettoient de s’élever
encore. La tige de cet Aloès eft droite, unie,
& feulement garnie à l’extrémité d’une groffe
touffe de feuilles, de laquelle il ne fort jamais
aucunes branches. Ses feuilles, qui ont fouvent
quatre pouces de large à leur bafe, vont toujours
en fe retréciffant proportionnellement jufqu’à la
pointe, qui eft terminée par une épine. Leur
épaiffeur, près de la tige, eft ordinairement de
deux doigts. Elles- font roides & garnies d’épines
fur foute leur furface, tant en-deffus qu’en-deffous
& fur les bords, mais principalement en-deffous.
Leur longueur eft d’environ vingt pouces, &
leur couleur eft d’un verd foncé.
Cet arbriffeau n’a point encore fleuri dans
nos jardins, non plus qu’en Angleterre, où il
eft cultivé depuis long-tems. C’eft à la quantité
d’épines dont les feuilles font chargées , qu’il
doit le furnom de féroce.
La rareté de cette efpèce & le defir de trouver
les moyens de la multiplier,, nous firent tenter,
il y a quelques années, une expérience qu’il ne
fera peut-être pas inutile de rapporter ici. Nous
avions un individu qui commençoit à devenir
embarraffant par fa hauteur*, nous lui coupâmes
la tête dans l’efpérance de lui voir pouffer des
rameaux de fa tige ou des drageons de fa racine.
Nous laiffâmes la tête quelques jours à [’ombré,
fuivant l'ufage, pour donner le tems à la cicatrice
de fe raffermir & de fe confolidery enfuite nous
la plantâmes dans un pot de terre sèche , qui
fut placé dans la tannée d'une ferre chaude.
Elle poufla des racines en très-peu de tems, &
forma un nouveau pied très-vigoureux.
Ea tige refta dans fa eaiffe, fur la tablette
dune ferre chaude\ on fupprima tout arrofement
pendant le premier mois., enfuite on ne lui
donna que de légers haflinages , de tems en
tems., feulement pour humeéter la, furface de la
terre. Malgré ces précautions & malgré la fé-
chereffe qu’il faifoir alors (nous étions au mois
de Juin) l'extrémité de la tige ne s’en pourrit
pas moins dans la longueur de quatre à cinq
pouces. Nous crûmes: d’abord, que cet accident
provenoit de ce que la plaie avoir été mal réparée,
en conféquence nous coupâmes une fécondé
ois la tige jufqu’au v if, avec une ferpette bien
tranchante. Cette nouvelle opération n’eut pas
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un meilleur ’fuccès- que la première *, quelques
teins après nous nous apperçûmes que la tige
fe pourriffoiî encore. Nous la recoupâmes une
troifième foisL, à quelque diftance de l’endroit
où le mal paroilfoit avoir gagné*, mais nous
ne fûmes pas plus heureux -, la cangraine defeendoit
toujours , & la tige diminuoit en proportion.
Enfin , iorfque nous vîmes qu’il n’y avoir plus
qu’une coupe à faire, nous résolûmes d’employer
un autre moyen , ce fut d’appliquer un fer
rouge fur cette dernière taille, afin de cautérifer
la plaie & d’empêcher i’humidrté extérieure de
corrompre la sève. Ce dernier moyen nous réuffit
plus mal encore que tous les autres. L ’arbre,
qui étoit refté toujours verd pendant les deux
années que cette expérience avoit duré, mourut,
peu de tems après, jufque dans fes racines.
Nous ne rapportons ici cette expérience que
pour mettre en garde les cultivateurs contre la
tentation qu’ ils pourroient avoir de faire pouffer
des oeilletons à cette efpèce d’Aloès.
8. Aloès mitré. Celui-ci ne s’élève guères
qu’à fix pieds de haut , encore faut-il que fa
tige foit foutenue par un tuteur. Elle eft garnie,
depuis le milieu jufqu’en haut , de feuilles,
larges de quatre pouces & longues de huit,
qui font terminées par une pointe aiguë. Les bords
en font armés d’épines, & il y a quelques taches
blanches en-deffus & en-deftous. Leur fubftance
eft charnue & leur verdure foncée. Elles çroiffent
très-ferrées les unes contre les autres, & dans
une pofition prefque verticale. Les deux dernières
fur-tout font très-rapprochées, ce qui forme
comme une efpèce de mitre, d’où lui eft venu
le nom d’Aloès mitré. La figure de cette plante, à
partir de l’endroit où commencent fes feuilles ,
approche affez de celle d’une colonne.
Ses fleurs, qui paroiffent dans les mois de
juillet & d’août , font portées fur une tige,
qui fort du milieu des' feuilles , à l’extrémité de
la plante. Elle a quinze à dix-huit pouces
de haut, & fe termine par un ép i, en forme
pyramidale, couvert de fleurs d’un ronge carmin,
très-apparentes & très-agréables. Cet épi s’alonge
& les fleurs fe fuccèdent pendant cinq à f i x
femaines. Elles font remplacées par des capfules
triangulaires, remplies de femences noires &
anguïeufes.
Cette efpèce pouffe des oeilletons de fes racines,
de leur collet, & des différens points de fa tige.
Elle offre une particularité remarquable , en
ce qu’elle pouffe même des racines le long de
fa tige, à trois & quatre pieds de haut, lefquelles
defeendent vers, la terre & s'y enfoncent perpendiculairement.
Ces racines, qui font d’une
iubftance ligneufe, & qui fortent de tous les
points de fa circonférence, font autant de foutiens
& d’appuis, que la nature, toujours occupée du
foin de conferver fes produirions, lui a ménagés
y pour la défendre contre les vents aux