
à fe pourvoir d’un nombre fuffifant d’ouvriers proportionnellement à
la quantité des grains qu’o'n a à récolter. Ces ouvriers font des fr ieu rs,
pour couper le froment ; un broqueteur, qui aide à mettre les gerbes*
en triau ou en diqeau; un ou deux calvaniers, qui arrangent &
entaffent les gerbes dans les granges.
On ne peut pas fixer précifement le tems où l’on doit commencer
la moilTon : elle eft plus ou moins tardive dans les différentes provinces,
fuivant que les années font chaudes ou fraîches, sèches ou humides;
mais, en général, la couleur de la paille & des épis devenus jaunes
ou blancs, fait connoître que les grains font parvenus à leur parfaite
maturité.
D ’après les fatigues qu’éprouvent les fcieurs, les maladies auxquelles
ils font fujets &.qu’ils contractent par leur attitude gênante, M. Duhamel
propofe de fubftituer la faulx à la faucille, en attendant que quelque
méchanicien ait trouvé un infiniment plus commode. On trouve, à la
fuite de ces réflexions, un extrait d’un mémoire de M. de Lille fur le
fauchage des bleds.
La manière de ferrer &c nettoyer les grains, la forme que preforit
notre auteur pour les greniers, où on doit les enfermer, & les moyens
qu’il propofe pour remédier aux inconvéniens des greniers ordinaires,
ne préfentent rien de particulier : nous allons feulement analyfer fa
méthode pour conferver les grains.
Le fond de cette méthode que M. Duhamel a développée, dans
un traité particulier, fu r la confervation des grains, fe réduit :
i.° à deflécher les grains dans des étuves, & à y faire périr les
infeétes & leurs oeufs. Il faut pour cela une chaleur de quatre-vingt
ou quatre-vingt-dix degrés du thermomètre de M. de Réaumur:
A dépofer ces grains dans des endroits exaéfement fermés: ;.°A
conftruire ces greniers dans un lieu frais & fec : 4.0 A les rafraîchir
de tems en tems, par l’air des grands foufflets que différens moteurs
peuvent faire agir. Par ces moyens, on pourra conferver les grains auffi
long-tems que l’on voudra.
Nouvelle culture. Dans les cinq premiers livres de fon ouvrage,1
M. Duhamel expofe toutes les pratiques que doivent fuivre ceux qui
fe propofent de bien cultiver leurs terres, en fuivant les ufages établis
dans les provinces où l’agriculture eft en vigueur. Dans le fixième,
il enfeigne une nouvelle méthode, imaginée par M. Tull, dont les
principes généraux fe réduifent à l’ufage fréquent des labours & à
l’épargne de la femence.
Suivant les règles ordinaires de la culture ancienne, après avoir
donné à la terre des bons labours & lui avoir confié les femences,
on abandonne les plantes à elles-mêmes, à l’exception des légumes;
& on les laide, fans en prendre aucun foin, jufqu’à ce que le tems de
la récolte arrive. M. Duhamel croit qu’il eft avantageux d’abandonner
cette routine, & qu’il faut labourer la terre pendant que le froment
croît, comme on a coutume de le pratiquer à l’égard des plantes vivaces,
& comme on le fait pour le maïs, les navets, les carottes ; il
appuie fon fentiment fur le principe qu’il a établi dans le fécond livre,
où il prouve que les récoltes de froment font d’autant plus abondantes
qu’on a multiplié les labours avant de jetter la femence. En effet,
quelque bien cultivé qu’ait été un champ, lorfqu’on sème le froment,
la terre s’affaiffe pendant l’hiver, les molécules fe rapprochent les unes
des autres, on voit lever de mauvaifes herbes qui dérobent la fubftance
aux plantes utiles : de forte qu’après l’hiver, la terre eft à - peu - près
dans Je même état où elle feroit fi elle n’avoit pas été labourée. C ’eft
cependant dans cette faifon que les plantes doivent taller & croître
avec plus de vigueur ; c’eft donc au ptintems que les plantes ont plus
de befoin du fecours des labours, foit pour détruire les mauvaifes herbes,
foit pour fubftimer auprès des racines une terre neuve à la place de
celle que les plantes ont épuifée, foit pour divifer de nouveau les
molécules terreufes, foit pour mettre les racines en état de s’étendre
avec facilité, & de fournir beaucoup de nourriture aux plantes, qui en
ont alors un grand befoin. Il confirme fon opinion par quelques
expériences.
Le focond objet de la culture, confifte à ne point femer trop épais,
afin que les racines de chaque plante aient la liberté de s’étendre
autant qu’il eft néceffaire, pour quelles puiffent pomper une
quantité fuffifante de focs nutritifs. Ainfi, les plantes devenant
plus vigoureufes, par le fréquent ufage des labours, il s’enfuit qu’on
doit femer beaucoup moins épais; & qu’il faut répandre moins de
femence qu’on ne fait ordinairement. C ’eft le point qui a fouffert le
plus de difficulté: en effet, on ne peut s’accoutumer à voir beaucoup
de terre qu’on regarde comme perdue, occupée par un petit nombre
de plantes. On reviendra de cette prévention, fi l’on confidère que,
dans un champ cultivé fuivant l’ancienne méthode, & femé fort
dru , chaque grain ne produit qu’un ou deux épis ; tandis qu’un
grain qui fe trouve ifolé produit fouve-nt dix-huit, vingt épis &c
même plus.
Notre auteur détaille ainfi la manière de pratiquer la nouvelle
culture à bras d’homme. Quand on fe trouve dans un pays peuplé ,
où les journées des ouvriers font à bon compte, rien n’eft fi facile que
de mettre en ufage la nouvelle méthode : en fuppofant un champ
bien labouré , il y a trois moyens principaux de fe procurer une bonne
récolte. U faut, 1 épargner la femence, de manière que chaque