
de la tige , que naiffent les fleurs. Elles font
grandes & couleur de rofe. Leur difpofîtion en
épis pyramidaux , jointe au cercle de feuilles
d’un beau rouge qui les accompagnent, produit
un très-bel effet , & rend cette plante très-in-
téreffante. Ses fruits font des capfules jaunâtres,
à trois loges, qui renferment les femences. Elle
pouffe fouvent des drageons de fa racine, 'qui
fervent à la multiplier.
5. L 'A n a n a s à tige nue, a beaucoup de rapport.
avec le précédent, par la figure & la dif-
pofition de fes feuilles, mais elles font beaucoup
plus rapprochées pelles font même fi ferrées vers
leur bafe, au collet de la racine, qu’elles retiennent,
comme dans un vafe , l’eau des pluies, & la con-
fervent long-tems ; d’ailleurs elles font toute:* de
la même couleur. La tige qui porte lafrUéHfication,
offre àiïffi quelque différence , elle n’eft garnie
d’écailles, que dans la partie inférieure. Quelques
unes de ces écailles font blanches_, & les
autres d’un affez beau rouge. L ’extrémité de la
lige eft couverte d’un grand nombre de fleurs
couleur de rofe , lefquelles forment , par- leur
rapprochement, un épi qui a beaucoup d’éclat ;
à ces fleurs , fuccèdent. des bayes ovales qui, en
mûriffant, deviennent d’un rouge vif.
La variété B ne fe diftirigue de fon efpèce,que
par fa grandeur ; fes feuilles ont fouvent jufqu’à
cinq pieds de long , & les épines qui les bordent,
font plus petites & moins nombreufes.
6- A n a n a s à épi. Le port de cette efpèce efi
le même que celui du n.6 1 ; mais fa fruélification
e f t fort différente. S ci fleurs viennent.en épis ferrés
à l’extrémité d’iine où de plufieurs tiges , qui
forcent du milieu des feuilles. Au bas de ces
tiges , font plufieurs feuilles longues fans épines,
& pendantes. L ’épi eft compofé de longues fleurs
d’un très-beau rouge, qui font remplacées par
des fruits. Cette plante croît à la Martinique
parmi les rochers, à peu de diftance dé la
mer.
7. A n a n a s à feuilles obtùfes. Cette efpèce a
un port affez fingulier -, une partie des; feuilles
de la circonférence font pendantes & prefque
couchées contre terretandis que celle du centre
/ont droites & évafées dans le milieu , en forme
de vafe conique , très-pbintu par le bas. Elles
font minces , d’un verd pâle, roulées fur leur
largeur, & longues id^environ deux pieds. Les
bords font garnis de courtes épines très-rapprochées
lès unes dès autres & fort aigues. Du
milieu de la plante , fort une tige droite, qui
s’élève à la hauteur d'environ quatre pieds ; elle
donne naiffance à de petites fleurs difpofées. eu
épis, longs de fix pouces , qui font placés dans
les aiffelles des folioles fupérieures. A ces fleurs,
fuccèdent des fruits a r r o n d i s & difpofés en
grappes 5 ils font d’abord blàucs; & deviennent
çnfmte d’un rouge de corail très-éclatant.
Culture ;
Dans tous les climats favorables au développement
de l’Ananas, cette plante fe reproduit 8c
fe multiplie avec une extrême facilité. Les premiers
voyageurs européens , qui ont paffé le
détroit de Gibraltar, l’ont trouvée croiffant naturellement
& fans culture y dans les lieux incul
tes des parties les plus chaudes de l’Afrique.
Tranfportée en" Amérique, elle s’y eft naturalifée
au point qu’on la diftingue à peine dés plantes
indigènes ; on la rencontre par-tout, mais principalement
fur les mornes & les tertres fablpnneux*
Les Colons, qui Pont introduite dans leurs jardins,
en ont obtenu , par la culture, de nouvelles
variétés, dont les fruits font plus beaux & plus
forts , d’un fuc plus épuré & d’un igoût plus
agréable. Cette culture eft très-fimple ; e^e
réduit à prendre la couronne des plus beaux &
dés meilleurs fruits qui ont .été fervis fur les
tables , & à la planter , n’importe dans quelle
efpèce • de terrein , à l’arrofer enfuite dans les
teiins de féchereffe , &. à la garantir des màuvaifes
herbes qui pourroient lui nuire. Elle reprend
très-aiféroent, & forme une nouvelle plante qui »
au bout de quinze ou dix-huit mois, eft en état
de donner des fruits.
En Europe, la culture des Ananas exige plus on
moins, de foins & de dépenfes, en raifon de la
nature du climat. Dans la partie du midi, en
Sicile, dans le Royaume de Valence, Sl à Malte,
par exemple, il n’eft pas douteux qu’on pourroit
cultiver cette plante eu pleine-terre dans des vallons
abrités par des montagnes ou dans d’autres po-
fitîons, en la garantiffant des gelées par des abris
artificiels , tels que des paillaftbns & des chaffis*
Les froids de ces climats- n’étant que paffagér's,
comme les vents qui les portent, la terre auroit
toujours le degré eje chaleur néceffaire à la con-
fervâtion de cette plante.
Qn fer oit étonné que les habîtans de cès heureux
climkfe'négligent une culture qui leur coûter oit
fi peu, fi L’an ne favoit que par-tout où la nature
eft prodigue ■ de fes dons, les hommes ne font
rien pour la féconder, & qu’au- contraire ils travaillent
fans rélâche à lui arracher fes bienfaits
dans les pays qui paroiftent le plus difgraciés
de fès faveurs. Aufti la culture dés Ananas n eft-
ëlle g-üere en ufage que dans lés provinces fepten-
triomales de l’Europe.' r ; !,
Les Hollafrdois font les premiers qui s en fbieijt
occupés . vers le commencement de ce fiécle. Ce
fut à Leydé, que des Ananas j tirés des Antilles,
furent cultivés par ie Court, agriculteur zélé,
qui n’épargna ni foins ni dépenfes pour les con-
ferver & perfectionner leur Culture. C> eft à lui
que ' nous en devons les premières notions, &
è’êft à lui que nous avons ^obligation des premiers
individus que nous ayons cultivés.Il répandit
fes productions en Angleterre * en France, en
Allemagne, & dans tout le refte du nord de
l’Europe.
En Angleterre,cette culture a,pris la plus grande
faveur'; il n'eft guère de jardins un peu confidé-
rables où l’on ne s’en occupe; elle eft même fi familière
aux jardiniers de cette nation, que plufieurs
en font un objet de fpéculation, & trouvent
dans la vente de leurs fruits, un ample dédommagement
de leurs peines 8c de leurs dépenfes.
C’eft peut-être à cette culture que la botanique
angloife doit fa fupérioriré en plantes de ferres
chaudes fur celle des autres nations de l’Europe.
Les gens riches, non moins jaloux de fe procurer
de nouvelles jouiffances que flattés de
polféder des chofes rares, ont conftruit des bâches
& des ferres chaudes, uniquement deftinées, dans
le principe, à la culture dés Ananas, mais bientôt
familiarités avec une culture dont les dépenfes
étoient moins considérables qu’ils ne fe l’imagi-
noient d abord, à caufe de la facilité qu'ils
trouvoient à chauffer leurs ferres avec le charbon,
de terre, qui eft à très-bas prix , & Tentant
d’ailleurs la néceffité de jetter plus de variété
dans des lieux qu'ils fe plaifent à fréquenter , ils
les ont infenfiblement meublés de plantes des
pays chauds , qui, fans avoir un mérite auffii
diltingué que l’Ananas , contribuent cependant à
les embellir, les unes par l’élégance de leur port
& de leur feuillage, les autres par l’éclat de’leurs
fleurs & la douceur de leur parfum. Enfin ils ont
fait des jardins d’hiver, qui raffemblent des plantes
de toutes les parties les plus chaudes de la terre.
En France, la culture de l’Ananas a fait des
progrès moins rapides. Ce n’a été qu’en 1729 qu’on
s’en eft occupé en grand, dans les potagers de
Verfaillès, & le Normand, alors jardinier, en
préfenta un fruit au R o i, quatre ans après. Il fut
trouvé délicieux, quoiqu’inférieur , à ce qu’on
prétend , à ceux qu’on mange en Amérique, & dès-
lors bn les cultiva dans plufieurs jardins de Sa Ma-
jefié. Quelques riches particuliers entreprirent aufti
de les faire cultiver dans leurs jardins, mais le
nombre en fut peu considérable, & n’a pas beaucoup
augmenté depuis , foit à caufe de la dépenfe du
chauffage de la ferre, foit par la difficulté de
trouver des jardiniers qui fuflènt cultiver cette
plante/
En Allemagne, & dans tout le refte de l'Europe
, jufqu’à Mofcew , on cultive les Ananas.
La rigueur des, hivers n’empêclie pas les in-
d u ftrieu x& fur-tout les patiens jardiniers Allemands,
de garnir les tables de leurs fouverains
des fruits de cette plante de la zône torride ; des
particuliers même jouiffent de cet avantage ; feu
M. Demifdorff, à Mofcow, a vu fervir fur fa
table, pendant l’année 2785, plus de cinquante
fruits d’Ananas, dont plufieurs étoient du plus
gros volume & du parfum le plus fuave.
La culture de l’Ananas fe trouve décrite dans
un grand nombre d’ouvrages d’agriculture, entre
autres dans le diâionnaire des jardiniers , par
P. Miller ; dans les agrcmens de la campagnè
dans le manuel du jardinier; dans le bon jardinier,
par M. de Grâce ; dans les journaux d” agriculture &
d’économie ; dans l’ouvrage anglois, intitulé :
A-Treatife off the ananas , &c. , par M. Adam
Toylon, 1769; dans celui de François Brochieri,
jardinier â Turin, imprimé en 17 7 7 , fous le titre
de nuovo metod'o adattato, al Clïma del P remonte ;
per coltivare gli ananas fen^a fuoco ; & enfin tout
nouvellement, & avec beaucoup de méthode &
de clarté, dans le cours complet (T agriculture,
dont M. l’abbé Roz-içr eft le rédaèleur ; c’eft
d'après ces ouvrages, dont nous avons une partie
fous les yeux, & d’après quelques mémoires,
manuferits qui nous ont été communiqués par
MM. Vilmorin & Belleville, jardinier du Roi, au
grand Trianon, & enfin-d’après quelques expériences
particulières que nous allons préfenter le
plus fuccinèlement poflible la culture de l’Ananas
& de fes variétés.
i.° Confervation de l'Ananas. L ’Ananas fe con-
ferve dans un lieu fec, éclairé par le foleil,
à la température de cinq degrés pendant la plus
grande partie de l’hiver. Il peut éprouver quarante
& quarante-cinq degrés de chaleur pendant
l ’été, fans en fouffrir, pourvu qu’il foit arrofé
régulièrement. Quant à la terre dans laquelle
il peut exifter nous en avons vu Croître dans
de la terre à froment pure, dans le fable le
plus ftérjle, dans des plâtras pulvérifés & dans
des terres plus ou moins fubftantielles, com-
pofées de différentes natures de terre & de terreau.
Une expérience qu’a faite mon jeune Frere
prouve même que cette plante peut fe paffer du
lecours de la terre pour fournir fa_végécation.
Une couronne mile dans un vafe de verre entretenu
toujours plein d’eau, & placé fur la tablette d’une
ferre chaude, a pouffé des racines en même-
tems que des feuilles, & a produit un fruit
furmonté de fa couronne, trois ans après. Ce
fruit , il eft vrai, n’étoit pas plus gros qu’une •
pomme de reinette grife > & la plante qui l’a
produit n’avoit guère qu’un huitième des dimen-
fions d’un individu cultivé à la manière ordinaire.
Ces obfervations prouvent au moins que
cette plante eft une des moins délicates de
celles qui nous font venues de la zône torride.
Comme il eft très-différent de conferver Amplement
une plante ou de la pofféder dans toute fa
vigueur & pourvue de toutes fes qualités, cela
n’empêche pas que fa cultufe n’exige des foins
pour graduer la chaleur qui lui eft la plus favorable,
pour compofer la terre qui convient
le mieux à fa nature, & pour modifier les ar-
rofemens fuivant fes befoins. Ce font ces différentes
connoiffances qui peuvent rendre cette
culture aufti utile qu’agréable.
II. Du degré de chaleur convenable h l Ananas.
Le degré de chaleur qui convient à l’Ananas