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très-grands avantages. Elle, fume une plus grande
quantité de terrein, elle épargne du fourrage, &
conferve les beftiaux en bonne famé.
Les Suiffes n’en font pas de cas, foit parce qu’ils
ne la connoiflent pas, foit parce qu’ayant de nombreux
troupeaux de vaches y qui font toute leur
richeffe, & qui conviennent à la bonté de leurs pâturages
, ils négligent les moutons, qu’ils relèguent
avec les chèvresdans les fommets des hautes montagnes
où les vaches ne peuvent pâturer.
J ’ai toujours entendu dire que le crotin de cochon
étoit trop brûlant. Mais c’eft peut-être un
préjugé dont on reviendra, quand des agriculteurs
inrelligens auront fait des expériences comparées
pour s’en aflùrer.
. Il pourroitbien en être de même de la fiente d’oie j
dé canards & autres oifeaux aquatiques, regardée
comme nuifible aux herbes fur lefquelles elle tombe.
M. le Comte d- Beaurepaire fe propofe del’effayer.
Il efl bien prouvé que la fiente de poules, dindons
& pigeons, eft un engrais chaud , qu’on ne
doit répandre fur les terres qu’avec économie*, c’eft
vraisemblablement à caufe de l’alkali volatil que
ces excrémens contiennent en très-grande quantité.
Quelqu’un a dit, mais fans preuves encore, que la
fiente de poules & dindons donnoit naiffance à des
infeèles qui, s’attachant aux bleds quand ils commencent
à pouffer , leur faifoit beaucoup de tort.
Cela ne s’accorde guère avec la belle végétation des
bleds dans les terreins fumés de fientes de volailles.
Pour tempérer la chaleur de cet engrais, on le
laide un peu expofé à l’air , on le mêle avec du fumier
froid, ou on le répand fur les terres immédiatement
avant des pluies.
Quelques fermiers répandent, fur les bleds, la
fiente de poules, dindons & pigeons après les gelées ;
mais cette méthode ne réufiit que quand le prim-
t-ms eft humide, & dans les terres froides. Car fi
le printems eft fec & le terrein chaud , cet engrais
brûle. Il eft mieux de le répandre en Automne,
avant le dernier labour. Les pluies d’hiver modèrent
la chaleur de cet engrais, qui convient fans
doute fur les blés, mais plus d'ans les çhënnevières
&'dans les prés où il détruit la moufle, le jonc &
autres plantes nuifibles, tandis qu’il fait pouffer
la, bonne h jrbe abondamment. On a remarqué qu’il
avoit un inconvénient pour les prés > c’eft que les
plumes, fe mêlant avec Je foin, dégoûtoient les
chevaux, & leur occafionnoient des toux importunes.
Il feroit peut-être poftible de diminuer cet
inconvénient, en répandant, à la main, la fiente
de pigeons, un jour où il feroit du• venrquai? gm-
porteroit une partie des = plumes au-delà de la
prairie.
L ’engrais, tiré des voieries, varie félon les matières
qu’on y porte. Ce font, ou des vuidang.es de
latrines, ou des corps d’animaux morts on- des
boues des rues, & quelquefois on y réunit toutes;
ces fubftances. Quan 1 il n’y a que des vuidanges
d e latrines, l’engrais a les qualités dont j ’ai parlé
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à l’occafion des excrémens de l’homme. Les débrfe
des corps d’animaux morts font capables de procurer
une grande fertilité, car dans les campagnes
où, au lieu de les enterrer, on les traîne en pleins
champs, on diftingue,à la beauté de la végétation ,
quelquefois trop forte, la place où a pourri le
corps d’une vache, ou celui d’un cheval, ou d’un
mouton. Ce qui fort des boucheries & des tanneries
doit être rangé dans la même clafle. A l’égard
des boues des rues, c’eft un mélange de toutes fortes
de matières , dont l’effet dépend de celles qui
dominent. Une voierie, qui réunit ces trois chofes -,
peut fournir de bons amendemens chauds & très-
précieux pour certains pays.
On pourroit, dans les communautés & dans
les manufaèlures qui contiennent beaucoup de
perfonnes, ramaffer les urines qu’on laiffe perdre.
J e ne fais s’il y a quelques pays où on ais
cette attention. En Angleterre & dans les Pays-
Bas. , pour avoir les urines des animaux , on
pratique des citernes derrière les écuries & les
étables. On a même imaginé des pompes pour
les puifer promptement & fans incommodité ;
deux hommes, dit-on , peuvent, par ce moyen,
tranfporter, fur une voiture , attelée de deux
chevaux, de quoi fumer quatre arpens en un
jour. Il eût été bien utile d’indique-r la quantité
qu’il en faut pour un arpent d’une étendue &
d’une qualité connues. M. Dufrenoy, Médecin
à Valenciennes , a fait l’effai de cet engrais
fur des terres à lin, qui ont produit autant
que celles qu’il avoit fumées avec des boues des
rues. C’eft fans doute aufli un engrais,chaud.
Aux environs de Paris, & plus encore aux
environs de Rouen, on porte dans les terres les
débris des cornes & des ongles des animaux ;
on les réduit en bandes minces, & on les répand
avant le dernier labour. Les fermiers des environs
de Paris font en général peu de cas dé ces matières,
foit parce qu’ils en ont abondamment de
meilleures , foit parce que leur effet eft Jent.
On croit qu’elles vallent mieux pour la vigne
que pour les grains. Ce qu’il y a de certain c’eft
qu’à Saint-Claude, où il y a beaucoup de tourneurs
en ouvrages de cornes, on en ramaffe
foigneufement les raclures , qu’on envoie à Lyon,
pour fumer les vignes , où elles fe vendent
; dix à onze livres le quintal, année commune ; j cette marchandife eft plus chere les années qui
ifuivent les mauvaifes- récoltes ; ce qui prouve
i qu’ elle eft-regardée ou comme un bon engrais,
ou comme donnant à la vigne une qualité différente
de celle du fumier.-On dit auffi qu’il
' y a des jardiniers qui mettent de la corne dans
le terrein où ils plantent des afperges. Cette
pratique, regardée comme une fantaifie, fe
! trouve cependant confirmée par celle des vignerons
de. Lyon , & mériteroit d’être examinée.
Il eft certain que les chiffons de laine & de
foie, les morceaux de cuir, les reftes d’o sa
d’ivoire, de baleine, &c. provenans des manufactures
& atteliers,doivent former une forte d’engrais,
quand les pluies les ont réduits en mucilage.
Mais c’eft une bien foible reffource, qu’il ne
faut cependant pas négliger. Il eft rare qu’on
ne puiffe pas fe procurer des engrais plus
avantageux.
Quelques riverains de la mer répandent des
coquillages fur leurs terres; mais ce doit être
avec précaution car les coquillages produifent
deux effets. Les animaux qui y font renfermés,
quand ils fe putrifient, & les '.Tels dont ils font
imprégnés, ont une adlion échauffante, analogue
à celle des fubftances qui proviennent de certaines
voieries & des boucheries* Leurs enveloppes,
formées de craie , fe divifent & font la fonâion
d’une marrie calcaire. La putréfeélion des animaux
né tarde pas à fe faire ; mais la def-
tru&ion des enveloppes eft trop lente au gré
des cultivateurs.'
Des poiffons pourris ferviroient à amender
les terres aufli bien que les corps des autres
animaux. Il y a des loix de police qui empêchent
d’en faire cet ufage en France, parce ;
qu’il auroit épuifé bientôt nos côtes d’une partie
des poiflons qu’on doit ménager pour la pêche,
c’eft-à-dire, pour la nourriture de l’homme. On
m’a affuré que, dans quelques cantons de l’Europe,
on avoit recours à cet engrais.
Le règne végétal n’eft pas aufli abondant en
engrais que le règne animal; ceux qu’ il procure
ne donnent pas la même fécondité.
Dans les provinces du midi de la France on
cultive des lupins, pour les enterrer quand ils
ont toutes leurs feuilles & leurs fleurs. J e fais
qu’à Valence en Dauphiné,, c’eft vers la mi-juin,
qu’on les sème à cette intention , & particulièrement
dans les terres légères & caillputeufes. Au
commencement d’oétobre on les enterre dans les *
champs qui doivent produire du feigle ou du
froment. Dans l’Ifle-de-France & dans la Beaùce
j’ai vu retourner des vefees & des pois en
fleurs pourfervir de fumier. M. Gaudry , fermier
d’Antully., près Autun, très-bon cultivateur,
sème quelquefois des fèves de marais à la fin
d’avril ou au commencement de mai, pour lès
enterrer prefque à l’époque de leur maturité.
Les fanes des légumineufes, telles que les lupins,
les vefees, les pois , les fèves , fe détruifent
promptement. A Brignole en Provence, à Barjac
en Languedoc, à Marueje en Gevaudan, on
ramaffe des feuilles de buis, qui fans doute y eft
commun ; on en coupe même en été des
branches, qu’on met dans la terre* La première
année les feuilles pourriftem; la fécondé année
ce font les plus petites branches ; les plus groffes
ne font confommées qu’à la troifième; mais cet
engrais a befoin d’être aidé d’un peu de fumier.
Enfin, le farafin , le trefle, le lainfoin , la luzerne,
retpurnés, deviennent aufli un engrais;
Les gros navets fe cultivent comme amendement.
Il y a trois manières de -les employer à cet ufage. Suivant la première, quand les
racines ont atteint à peu - près leur grotfeur,
on laboure le champ où ils font, à la bêche
& à lames minces j leur fubftance fe trouve hachée
& fe mêle avec là terre/
Une attire méthod'é confifte ;à ‘faire1 paître par
les moutons les feuilles des navets, à l’époque
où elles n’ont plus à! grandir, Les moutons
mangent une partie des racines, qui ne tardent
pas; à pourrir enfuite. -
La troifième eft de ne pas laitier profiter lés
navets*, mais de les - retourner à 1 la chartiie
quand ils font en pleine hetibei Voyt{ Navet,
Le chaume de froment, 'de feigle i d’orge Ce.
d’avoine améliore les Verres à menus grains. 1
Il ÿ a en Bretagne des cantons éloignés de
la mer où l’on eft dans l’ufage de lever des
gazons, de les mettre par lits avec des herbes
vertes , & particulièrement du jo - marin ulet
Européens , & de les laitier ainfi mûrir & fe pourrir
pendant plufieurs années,
Uncultivateur ingénieux a fait peler des gazons,'
qu’il a amoncelés en cône tronqué, dont le
fommet formoit unbaffin, deftinéà recevoir l’eau
des pluies & des neiges. Quand ces gazons furent
bien confommés il en fit couvrir des terres ù
froment.* , (
La dreche moulue eft regardée en Angleterre
comme un bon engrais.' Voyc{ Dr'EC-h e . Quelques
écrivains accordent la même propriété à la fciure
de bois. ' ’ . 1
Les écorces d’arbrés, les tiges & les racines
des arbriffeaux , réduites en poudre, & leurs
feuilles pourries font un terreau naturel * &
excellent.
On fait fécher & on réduit èn poudre, ou
au m'oulin où avec le fléàu dans 1 aire dè la
grange,'le marc dé’s’ graines hùiteufeSj telles
j que le chénevi :, le lin , le colfar,. la navette &
même celui des olives ; que lés Laiins nommoient
Âmurca -, il produit de très-bons effets fur les
I terres. On le répand dix à douze jours avant
de femer ; on a remarqué que fi l’on femoit en
même teins, le grain s’envelôppoit dans cette
matière & né germoit que difficilement; quelquefois
On a fait macérer ces marcs dans l eau,
& on a porté l’eau aux champs; cette pratique
a réuffi. Dans les pays de vignoble on emploie
le marc de raifin bien fec , lur?tout aux pieds
des vignes. Ceux qui ont beaucoup de cidre
fe fervent pour amendement de marc de pommes ;
les uns le mêlent aux fumiers ordinaires, lès
„autres le répandent frais fur leurs ferres , le di-
vifant le mieux poftible & 1 enterrent à la charrue
au bout de vingt-quatre heufes.
C’eft une pratique ordinaire chez les cultivateurs
de nos côtes de tamaflèr avec foin les plantes
matines, appellées fa n •, vu.ee ou goÿ'mon-, pour
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