
de dix-huit pieds de long. Les ours en font très-
friands-, comme ils ont la vue & l’odorat d’une
finefle fingulière ,ils ont beaucoup de taie ns pour les
découvrir ; ils font cependant quelquefois plufieurs
jours à taire des tentatives inutiles pour parvenir
à l'endroit où le miel eft caché. Les gens du pays
le favent bien, & en font leur profit. Quand ils
ont vu roder l’ours autour de l’arbre , ils font
certains qu’il y a du miel., & l’homme a encore plus
de talent que l’ours pour dépouiller les mouchés,
pourvu que l’ours l’ait averti, comme le chien
avertit fon maître du gibier. Les fouris caufent
aux ruches de grands dégâts ; elles fe logent quelquefois
fous le chaperon; & s’introduifent par
1 intérieur dans la ruche. Le mülot ne les attaque
qii co hiver, teins où elles né font pas. en état
de fe défendre. La plupart des oïfeaux, parficur-
fièrement les méfanges, les guêpiers, les moineaux,
les poules, les canards, les oies guettent les abeilles
pour les prendre ou à la volée, ou lorfqu’elles boisent,
ou lorfqu’elles font fur les fleurs-, ils s’en
nourrilfent, & en nourrilfent leurs petits. On aftùre
que le piverd perce le côté d’une ruche, y fait
ëntrer fa langue ,& la retire chargée d’abeilles.
Quand les araignées ne feroient que caufer dans
une ruche de la mal-propreté , leur préfence y
déplairoit aux abeilles. M. de Réaumur croit que
les fourmis, quoiqu’elles aiment le miel, n’ofent
pas entrer dans une ruche habitée , tant qu’elle
eft vigoureufe. Les abeilles font fujettes à une
efpèce de poux luifant ,• rougeâtre, gros comme
une tête d’épingle -, il s’attache plutôt aux vieilles
qu’au jeunes -, c’eft une preuve de dépériffemenr,
La fauffe-teigne, appeilce teigne de cire., ravage
des niches entières. Dix ou douze infeéfes de cet re
efpèce fuffifent pour mettre en pièces des gâteaux,
& pour forcer les abeilles à leur céder la place. Ce
n eft pas une teigne, puifqu’elle fe fait de's galeries
, qui lui tiennent lieu des vêteméns ambulans
que les vraies teignes fe fabriquent. Sa chenille a
feize jambes; elle eft rafe,blanchâtre,de médiocre
groffeur ; fa tête eft brune & écailleufe ; elle
conduit fon logement dans l’épai fleur des gâteaux
en perdant le fond qui communique aux alvéoles
oppofés , & l’étend en différentes direélions tpr-
nïeufes. Enfin on allure que les guêpes & les
frêlons font auffi très-nuifibles aux ruches qu’ils
viennent piller.
Les putois & les renards peuvent fe prendre
au piège -, on ôtera aux fouris & aux mulots l’açpès
auprès des ruches, en les exhauflanr fur des piliers,
en tendant des fouricières autour, & en découvrant
de tems en tems les chapiteaux, pour empêcher
qu’il ne s’y fafle des nids de ces animaux, & mieux
encore en rétréci (Tant l’entrée des ruches par de petits
grillages. On confeille encore .d’ifoler les ruches,
pn les éloignant des murs & des haies, & en ne
laiflant point de grandes herbes aux environs. Le
tablier doit être allez élevé, pour qu’un mulot ne
1 atteigne pas en fautant : pour çela il faut qu’il
foit porté fur deux piquets, auxquels on l’aflujettit
par de forts clous, ce qui eft obfervé fur-tout dans
la ruche de M. l’abbé Eloi, comme on le verra
plus loin. 11 eft facile d’écarter lés’oifeaux de bafl’e-
cour des ruchers, qu’on plate toujours dans des
enclos. Le tort que les moineaux font aux abeilles,
eft le moindrë'de. ceux pour lefqûels on devrait
lés détruire -, une loi qui mettrpit leur tête “à prix,
feroir une loi très-fage. Les autres oifeaux font
moins à craindre pour les abeilles, parce qu’ils
approchent plus difficilement des habitations des
hommes, auprès defqùelles font ordinairement les
ruchers. On préviendra les araignées, les faufles-
teignes & lés poux, li, avant de fe fervir d’une
ruche pour y mettre un eflaiin, on la nettoye bien,
& ôn la palfe fur la flamme d’un feu clair, & fi
on a l’attention de ne point laiffer les ruches vides
expofées aux volailles qui font fujettes à avoir
des poux. Quand on apperçôit qu’il y a dans les
gâteaux des galeries formées par les faufles-teignes,
ou que des ruches on voit fortir des papillons,
il faut, dit-on, y introduire la fumée de grenadier
ou de figuier fauvâge, ou de frêne, attirer
le foir les papillons avec une chandelle allumée
placée dans un bocal de verre , & couper les
portions de gâteaux attaquées. Le plus sûr eft
de faire pafler les abeilles dans une autre ruche,
11 eft rare que les frêlons & les guêpes fe réunife*
fent en aftez grand nombre pour ofer attaquer les^
abeilles dans leur domicile. Le plus fouvent ces
infeétes fe jettent fur les abeilles lorfqu’elles viennent
des champs chargées de miel, qu’ils leur
arrachent, en les maflacranr. Rien n’eft plus aifé
à détruire que les guêpes ; on tâche de découvrir
leur retraite; le foir, on allume à l’entrée du trou
de la filalfe imbibée d eflence de thérébentine ;
l’odeur fuffoque toutes les guêpes, en quelque
partie du guêpier qu’elles fe retirent; celles qui
cherchent à fortir, fe brûlent ; il n’eri échappe
pas une feule. Ce moyen m’a paru préférable â
leau bouillante, qu’on confeille de jeter dans les
trous des guêpiers -, il y en a toujours un certain
nombre qui fe fauvent dans ce dernier cas.
Maladies des Abeitles,
La principale maladie, à laquelle les abeilles
foient fujettes , c’eft le flux de ventre ou dévoiement,
qui, fur-tout au printems, attaque les plus
foibles & les plus mal conftituées ; cette maladie
perd une ruche entière , lorfqu’il y a dedans
quelques abeilles qui en font atteintes. N’ayant pas
la force de fe déranger pour rendre à l’écart leurs
déjections, les autres en font couvertes & périmant,
faute de pouvoir refpirer, parce que les
organes de leur reîpirarion fe trouvent bouchés. Le
flux de ventre des abeilles a été attribué à diveife»
caufes -, par les uns au miel nouveau qu’elles
mangent après l’hiver-, par les autres au défaut de
cire brute dont elles manquent, & qu’on regai de
copime une partie eflçntiçlle de lçur nourriture \
paf d’autfes aux fleurs de tithymale \ ou d’orme,
ou de tilleul, fur lefquelles elles vont chercher le
miel. Aucune de toutes ces aflertions n’eft prouvée.
Le feul fait qui mérite attention, eft une expérience
de M. de Réaumur. Ce favant obferyateur a nourri
de miel feulement, pendant un certain tems, des
abeilles qu’il tenoit renfermées ; elles ont toutes été
attaquées de dévoiement. Mais ce dévoiement eft-il
dû à la privation de cire brute, ou au principe de
cette maladie qui s’eft,développé pendant l’expé-
rience, ou à l’air altéré que les abeilles ont ref-
piré étant ainfi renfermées ? Voilà ce qui n’eft
pas éclaira par l’expérience de M. de Réaumur.
Quoi qu’il en foit, il y a des moyens de prévenir
le mal & d’en arrêter les progrès. Pour cet effet
ïl eft bon, à la fin de l’hiver, de renouveller l’air
des ruches, & d’ajouter au miel, qu’on donne à
celles qui en font dépourvues, un fyrop fait avec
du fucre & du bon vin qu’on fait réduire à petit
feu. M. Palteau a imaginé un remède analogue à
celui-ci. On prend quatre pots de vin vieux, deux
pots de miel & deux livres & demi de fucre ; on
rait bouillir le tour jufqu’à confiftance de fyrop,
on le çdpfçrve à la cave dans des bouteilles ; ori
s en fert pour en donner aux abeilles. Ce remède
guérit les unes, & préferve les autres de la maladie
en les fortifiant. La farine de fèves, mêlée
avec du miel & du vin, eft auffi regardée comme
utile dans le flux de ventre des abeilles. On con-
feiile même l’urine que ces infeéles paroiflent rechercher
, vraifemblablement à caufe des Tels qu’elle
contient. M. l’abbé Eloi, vicaire-général de Troyes,
qui a élevé beaucoup d’abeille & avec bien de
l'intelligence & du foin, trouvant au retour d’un
voyage une de fes ruches dans un état de dépé-
riflement, qui lui faifoit craindre d<s la perdre ,
fit un mélange de deux tiers dé miel & d’un tiers
de kervafer; il en afpergea l’intérieur avec un
oalai de plume. Une heure après , tout fe ranima
& la ruche fut fauvée.
Plufieurs auteurs parlent de la roùgeôlevdes
abeilles. A ce mot on croirait que c’eft une maladie,
tandis que ce uen eft que la caufe ; encore
M. de Réaumur eft-il perfuadé que e’eft une opinion
faune. Dans le cas dont il s-agit, la moitié des
alvéoles eft remplie d’une matière rouge plus,amère !
que douce.'Selon les uns, c’eft une ciré recueillie
fur les fleurs de buis,, de tilleul ou d’if; félon les
autres, c’eft une efpèce de miel qui fe corrompt,
& rend les abeilles malades ; ce que nie M. de
Reaumnr, aftiirant que cette matière eft une cire
brute, néceflàire à la nourriture & aux ouvrages
des abeilles , & qu’elle eft ainfi colorée à caufe de
fa nature des étamines fur lefquelles elle eft recueillie.
. _------ - a J I.'.VIUJU uClua IG3 cUJClUCS U1JC
maladie qu’il appelle maladie des antennes'parce
que ces partiès font plus jaunes & plus groffes
qua 1 ordinaire. Il croit qu’elle eft occafionnée
par la foibleffe. S’il en eft ainfi, les remèdes indiqués
dans le flux de ventre conviennent auffi dans
la maladie des antennés.
Quand, par quelque circonftance , le couvai»
meurt dans fes alvéoles, il caufe dans la ruche
une infeéfion qui rend les abeilles malades ; il
faut alors l’enlever, & quelquefois changer les
abeilles de ruche, ayant foin de parfurper celle
ou étoit le couvain mort, fi l’on veut s en fervir
une autrefois. On donne , 4 ans ce cas, aux abeilles
du fyrop de M. Palteau. Il faut, pour éviter le
même inconvénient1, retrancher les parties des
gâteaux qui feroient moifies par l’humiditéi
Le froid- eft une des caufes de dépériflemenr
des ruches ; on doit les en garantir en les abritant
'& en les couvrant. Les combats que fe donnent
les abeilles, foit à l’occafion de la pluralité des
reines, ainfi qu’on l’afture, foit par des inimitiés
particulières, foit pour piller ou pour repoufîer
le pillage, en font périr un grand nombre. On
prétend qu’on peut reconnoîrre quand une ruche
a plufieurs reines. Il ferait donc utile d’en Ôter une ,
ce qui ne me paraît pas facile. Il eft encore moins
aifé de prévoir les combats occasionnés par des
inimitiés de ruches contre ruches. Lorfque deux
eftairns fe battent en l’air, tout ce qu’on peut faire ,
c’eft de jetter deflus de la pouffière ou de l’eau,
pour féparer les combattans. On a vu comment
on empêchoit le pillage.
Maniéré de nourrir & de faigner les Abeilles.
Si on I-aifloit aux abeilles tout le miel qu’elles
ramaflent,. elles auraient prefque toujours de quoi
vivre abondamment. Il n’y auroit que les effaim*
nouyelleirient établis & les tardifs, qui en manquer
oient quelquefois ; mais fouvent, à force de
dépouiller les anciennes ruches, nous les appau-
vrilfons au point qu’elles périroienf de befoin, fi
nous ne venions à leur fecours.
Quand un elfaim, qui n’a pas encore pu fe procurer
des provisions , eft furpris par un tems froid
ou par des pluies, n eft néceflàire de lui donner
de la nourriture. On lui préfente fur des affiettes
garnies de paille hachée, ou du miel feul, ou un
mélange de miel, de fucre & d’eau-de-vie, ou de
la bonne avoine concaffée avec du miel & du
fucre, ou de l’avoine feule, ou epfin du miel
avec de la purée, foir de fèves de marais, foit de
lentilles & du vin blanc. Au lieu de fe fervir de
pailié hachée, on peut recouvrir les affiettes d’une
toile claire, ou d’une feuille de papier piquée de
trous, à travers lefqûels les abeilles puifent le
miel fans s’empâter. M. du Carne, d’après M. Pec-
quer, propofe nn moyen qui réunit tous lès avantages.
Il confifte à remplir de fyrop deftiné aux
mouches, une bouteille dont on couvre le goulot
avec une grofle toile,, qu’on lie fortement avec
une ficelle ; on palfe le goulot de cette bouteille
dans un trou fait à la partie fupérieure de la:
ruche. Les abeilles viennent au goulot fucer le-
fyrop. Quand la bouteille eft vide, s’il en eft