
A V A N T - P R O P O S
P O U R L A P A R T I E D ’A G R I C U L T U R E .
Par M. l'Abbé T e s s i e r »
Q ü e l q u ’a t t e n t i o n que j’aie de me renfermer dans les
bornes qui me font prefcrites, les articles que je ferai entrer dans la
partie d’agriculture proprement dite, feront très-nombreux. Indépendamment
des mots qui doivent s’y trouver, & qui tiennent, pour ainfi
dire, à l’eftènce de la choie, ii y en a beaucoup d’autres que je ne
puis me difpenfér d’y placer, quoiqu’au premier coup-doeil, on nen
voie pas la néceflké. Je les range fous trois claffes. Les uns expriment
des objets ifolés, qu’on pourrait traiter féparément, s’ils étoient dune
aflez grande étendue pour former des dictionnaires particuliers ; les
autres fe trouvent déjà dans des dictionnaires de l’Encyclopédie méthodique;
mais ils peuvent être confidérés fous différens rapports ; celui
qui traite de l’agriculture doit en parler 8c les examiner à fa maniéré ;
d’autres enfin conviennent à l’agriculture, comme à d’autres parties;,
on ferait fâché de les chercher envain dans ce dictionnaire. En
voulant détacher les fciences les unes des autres par des dictionnaires-
féparés, on a bien fond que, comme elles fe tiennent, il étoit
impolïible de trancher net & d’éviter entièrement les doubles emplois..
Si les redites font rares & ne le trouvent que dans les circonftances
où elles paraîtront nécefTaires, on n’aura point à s’en plaindre,- & on
les préférera à des omiffions qui auraient eu beaucoup d’inconveniens.
Au refte, l’Encyclopédie méthodique en fera plus commode, puifque,,
quand on voudra s’occuper d’une matièreon né fera que rarement
forcé d’avoir recours à deux ou à plufieurs dictionnaires, à-la-fois.
Je citerai des exemples des objets de chacune des trois clafïes.
L ’éducation des abeilles, celle de la cochenille &c des vers-à-foie,
font de la première. XI me femble que le foin des ruches:, la vigilance
fur la fortie des elfaims, l’art' de recueillir le miel & la cire,
font partie des opérations rurales, & que, dans beaucoup de pays,.ce
font les cultivateurs qui s’en chargent.
Jufqu’iei les Efpagnols ont concentré la cochenille dans les environs
de Guatimala, en Amérique. Ce n’eft que depuis peu qu’on élève
cet infeCte dans les pofîefïïons françoifes de Saint-Domingue. Des
tentatives heureufes nous ont appris la manière de le multiplier &
d’en tirer parti pour la teinture. Quel art pourrait en traiter, fi 1 agriA
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culture n’en faifoit pas un article? Le nopal, fur lequel fie nourrit la
cochenille, a befoin de culture pendant quelques années, fur-tout à
Saint-Domingue, ou lefpece inerme, ou fans piquans, qui eft la plus
favorable, neft pas naturelle; la cochenille doit être garantie de
différens animaux & infeétes qui la dévoreraient; elle exige beaucoup
dattentions, dont les cultivateurs, ou ceux qui aiment l’agriculture,
font plus capables que d autres. C eft donc au dictionnaire d’agriculture
quelle appartient.
Il en eft a-peu-pres de même des vers-à-foie; il fout le? foire
eclorre, les nourrir de feuilles de mûriers, empêcher que rien ne les
incommode, & leur faciliter les moyens de foire ces riches cocons
dont les fils précieux occupent nos plus belles manufactures. Tous les
details de 1 éducation des vers-a-foie indiquent qu’elle n’eft bien confiée
qu a des mains aCiives & laborieufès, & qu elle foit partie des produits
de la- campagne, & par confequent que c’eft au dictionnaire d’agriculture
à en traiter.
. n u u v v ta aum t ç ici ccaions, x^c»
mulets, &c. puifque le premier but de la multiplication des beftiaux,
eft 1 agriculture,^ puifque c’eft elle qui en fournit les moyens, puifque
les beftiaux & 1 agriculture font dépendans les uns des 'autres.
Dans la fécondé clalfe, qui eft celle des objets, dont je ne puis
rnempecher de foire mention d’une manière particulière, quoique les
autres en aient parlé dans leurs dictionnaires, je place la prife de
certains oifèaux, tels que les alouettes, les cailles, les canards fauvages,
&c. & les détails fur beaucoup d’animaux nuifibles ou utiles à l’agriculture
; ils feront çonfidéres relativement aux avantages ou aux
défavantages qu ils procurent aux habitans des campagnes. Ces articles
fè trouvant dans tous les ouvrages de maifons ruftiques, on ferait
étonné quils ne fuflent pas dans le dictionnaire d’agriculture.
_ L a medecine vétérinaire foit partie du dictionnaire de médecine.
Mais neft-il pas convenable que celui dans lequel on développe
1 éducation des beftiaux, expofe aufli les maladies auxquels ils font
fujets? Ne fé plaindroit-on pas de moi, fi je n’en difois rien? Sans
approfondir cette matière, je mettrai au moins les leCteurs à portée
de diftinguer les diverfes maladies des beftiaux, & d’arrêter les progrès,
for-tout de celles qui font contagieufes. Tantôt je fondrai mes deforip-
ttons & les moyens que" j’indiquerai, fur mes propres obfervations,
tantôt j aurai recours aux articles même du dictionnaire de médecine.
Cet objet eft un de ceux de la troifième claflé.
Autant qu il me fera poffible, je donnerai l’étymologie des mots
lorfque j en connoîtrai de fimples & naturelles. Rien n’eft plus propre
a les faire connoîcre & à fixer les idées fur ce qu’ils expriment.
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