
dernier moyen que pour voir fi le foleil pouvoir encoÆ agir fur uns
capfule féparée de fa fige.
Ces faits rappellent ce que des cultivateurs ont fans doute obferve
comme moi. Lorfqu’on greffe un arbre en fente, apres 1 infertion de la
greffe on l’afïùjettit avec de la terre molle qu’on pétrit & qu on recouvre
d’un linge ou de filafle , ayant foin de bien ferrer 1 appareil ; fouvent il
arrive que des boutons s’élèvent du fond de l’appareil en perçant la
terre & le linge, tant la nature a de force pour franchir les obftacles
qu’on lui oppofe.
M. le Marquis Turgot voulant remédier à cet inconvénient & empêcher
que la greffe ne fût noyée par ces pouffes internes, a imagine
d’employer, au lieu de terre glaife, un mortier qui bouche toutes les
ifîùes de la sève & la force d’enfiler la greffe.' Cette méthode eft
excellente, & on en doit de la reconnoiffance à M. le Marquis Turgot.
Elle confifte à mêler, à l’aide de la chaleur, une livre de poix, une
demi-livre de poix réfine, & un quarteron de cire ; lorfque le mélangé
n’a plus qu’une légère chaleur on l’applique fur 1 union de la greffe a
l’arbre. M. le Marquis Turgot s’en fert auffi avec fuccès pour recouvrir
les plaies des arbres.
J’ai vu dans un caveau où on amoncelle tous les ans des pommes
de terre pour les préferver de la gelée pendant l’hiver, quelques filets
de racines s’infinuer entre les pierres de la muraille. I l s y fbrmoit des
pommes de terre qui gtoffiffoient aux dépens de la place du mortier y
par lequel les pierres étoient liées entr’elles, en forte que quand on avoir
arraché les pommes de terre, on voyoit le mortier extrêmement comprimé,
& comme fi on l’avcât battu exprès, mais fortement.
Enfin, au mois de juin '1785 , j’ai reçu de Rome une caille que
je n’ai ouvert qu’au mois d’octobre fuivant. Elle contenoit des paquets-
enveloppés d’un double papier & bien ficeles. J ignore combien elle
avoir été de tems en route. Parmi ces paquets il y en aVoit un rempli
de pommes de terre, qui avoient pouffe des tiges & des racines; les
pommes de terre & les racines etoient deflechees, mais les tiges
n’étoient que flétries. On voyoit aux racines de petits tubercules, c eft-
à-dire, des nouvelles pommes de terregroffes comme un oeuf de
ferin. J’en ai conferve plufieurs pendant l’hiver pour les planter au
mois d’avril 1786. Elles m’ont produit des tubercules ou pommes de
t ;-rre de la plus belle grofleur en allez grande quantité ; ce qui prouve
que les tubercules formés dans les papiers & dans la caifïe etoient doues
de la vertu végétative.
Ces expériences, qu’on pourrait multiplier encore, & ces obferva-
tions , prouvent de quels efforts eft capable la vertu végétative ,
puifque des bourgeons d’arbres qu’on recouvre d’un enduit affez épais
de cire, fe font jour à travers cet enduit, puifque les pleurs de la vigne
pénètrent des bandes de peau mifes furde la cire & liées fortement, puifque
des fleurs gênées par des liens plus ou moins ferrés, les tardent, les
écartent ou fe gliflent deffous ou deffus pour fe développer, puifque
malgré de puiflans obftacles, des capfulcs lancent leurs graines, des
racines compriment un mortier endurci, ou pouffent enfermées dans
des papiers ficelés, & laiffées plus de cinq mois dans une easffe
clouée. Que la nature eft admirable ! Que fes phénomènes font
intéreflans !
Le premier difeours, comme on a vu , a pour objet I’hiftoire abrégée,
les progrès de l’agriculture chez différens peuples, & les moyens de
l’améliorer en France. J’ai cru devoir, dans le fécond, traiter des
principes de la végétation & des parties des plantes, en les confidérant
fous leurs rapports avec l’agriculmre. Il m’a paru‘utile encore de faire
connoîcre les meilleurs ouvrages qu’on conferve fur cet art important.
Ne pouvant me livrer au genre de travail que ce projet exigeoit pour
être rempli, j’ai engagé M. l’Abbé Bonnaterre, dont le zèle & les
lumières me font connus, à vouloir bien s’en charger & à s’en occuper.
Le public;en jugeant la manière dont il s’en eft acquitté, faura lui
rendre toute la juftice qui lui eft due, C ’eft donc fous fon nom que
paraîtra le difeours fuivant.