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Çepeptûipj Çhnflopke engageait de nouveau? domaines
à Tes alliés , pour payer leurs fervices &
conlerver leur amitié. Gérard fe vit abandonné de
tous fes partifans ; il ne lui reftoit, dans fa mau-
vaife fortune, que la reffourcq de perfusder au
peuple, que n’ayant combattu que pour le bien
piil))ic, le malheur ayant rendu Chriflophe plus
oigne du trône, & la nation paroiffant l’y voir
remonter avec plaifir , ilfe retiroit fatisfait lui-même
davoir lacrifié fon repos pendant tant d’années à
celui du Danemarck. La paix fe conclut à Rypen
le 25 février 1330 : Chriflophe reçut de nouveau
les fermens & les hommages de la nation. Comme
Yaldemar n’étoit qu’un fantôme de roi, on'ledé-
p.ofa aufîi facilement qu’on l’ayoit proclamé : on
lui laiffa le dqché de Slelwigh , & Gérard erapor a
tputes les richeffes qu’il avoit a piaffé es pendant fon
adminiftration, Te l fut le terme de tant de révolutions
: le bien public en fut le prétexte , les grands
en recueillirent le fruit, & le peuple en fut la
yjâioie.
Chriflophe devoit demeurer enfin, tranquille fur
ce trône, dont la conquête lui avoit coûté tant
de travaux : mais l'amour de la vengeance l’égara ;
il époufa la querelle de Jean , comte de Holftein ,
contre Gérard; il marcha contre ce dernier ; les
deux armées fe rencontrèrent, les Danois furent
taillés en pièces, & Chriflophe perdit dans, ce- jour,
fon fils Eric , une partie de fon-, royaujme , & la
deur de la nobleffe. Les Sçaniens fe révoltèrent
auffi-tôt, & offrirent, leurs hommages à Magnus,
roi de Suède. Celui-ci écrivit au pape pour le prier
de lui confirmer la p.offeflion de la Scanie & de
tout ce qu’il pourvoit conquérir. Benoît fut affez
mpdefte pour répondre qu’il ne pouvoit difpofer
des états de Çkriflophe avant de l’avoir cité à fon
tribunal. Celui-ci, abandonné, trahi, méprifé par
tous fes fujets, fe vit traîné par eux de cachots en
cachots , livré à Jean fon frère , qui lui rendit la
liberté. U n’en, jouit pas, longrtemps, la mort l’enleva
le 15 juillet 13-33 : mpins injufte-, mpins cruel-,
«7 oins faux fur la fin de fa vie , il femblo.it que
Ion. coeur fe fut épijré à-ï-éçoie du malheur ; mais
les leçons qu’il, avoit reçues de, la fortune, avoient
coûté plus cher à fes fujets. qu’à lui-même. Sa mort •
fi.it. fuivie d-un interrègne de fept. ans. ( Mi d e j
Ba c y . )
C hristophe l i t , dit </<--Mppière, ( H j.fidc-Da- !
nemarck duçdeBatfière , çomte Palatin du Rhin ,
puis, roi de Danemarck, enfin- roi de Suède & ;dq
Norvège. Il étpit fils, de Jean, duc de, Bavière , :
& de Catherine, fcqur d’Eric X , roi deDanqmarck-
Çç. dernier.éroit,un prinçè.foible,, imprudent, joue-t ,
de.fes, cpurfifans , de fes fujets, de fes ennemis.; j
i) voulut, ppffédqr trois royaumes,, &- n’en put con- ;
ferver. up. Aux premiers revers, qu’il emiya. en
Suède, en Norvège., en Dane.marçk;, il s enfuit :
de fes, états, avec autant dp fecret .§£, de. précipita- ;
tipn«^ qu’un crijnipel s’échappe d’un cachot : il fe
retira dans Pile de Gotland, ou,, gepçiant dijç
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il obferva beaucoup & n’entreprit rien, pleura lâchement
fes malheurs, 8c n’ofa tenterJe moindre
effort pour les réparer. Les Danois lui mandèrent,
en 1440 , que fa foibleffe le rendoit indigne du
trône ; qu’il leur falloît un roi qui n’abandonnât
point le timon de l’état au milieu des fççouffes
dont il étpit agité ; qu’ils avoient jetté les yeux
fur Chriflophe ; que lui feul paroiffoit digne ,* d’après,
l’union de Calmar , de régner fur trois vafies empires
, & que la Norwège, la. Suède & le Dane-,
marck , d’un confentement unanime, lui offroient.
la triple couronne. Chriflophe avoit les talens d’un-
général , ceux d’un négociateur , ceux d’un mi-
niffre, & par-deffus tout, celui de cacher, fous,
une modération apparente, l’exceffive ambition,
dont il étoit dévoré. Il fe rendit aux inftanceS'des
états, d’un air fi bien çomppfé-, qu’il leur perfuadat
qu’il faifoit à leur bonheur le façrifice de fa tranquillité.
J1 ne prit d’abord que lè titre roodefte de pro-
teéleur- de- la patrie, 8c fe garda bien de donner
fes premiers foins à rétabliffement de cette monarchie
univerfelle qu'il s’é.toit- promife dans le
Nord. Il commença par rétablir en Danemarck les
loix prefqu’oulpliées, appaifer les querelles dès fei-
gneurs, diminuer les. impôts * & rendre enfin à
fes états le calme, dont les troubles leur faifoient
encore mieux fentir le prix. Il eut foin de n.e pas
laiffer ignorer aux Suédois la révolution heureufe
qu’il venoit d’opérer en Danemarck. C e u x - c i,
comme il l’avoit prévu, vinrent d un mouvement
libre lui offrir la couronne. Chriflophe ne rencontra
en Danemarck qu’un l'eul concurrent ;. c’étoit le
maréchal Canutfon , qui; depuis fut ro i, fous le
nom de Charles VU ! ( voy. ce mot j : mais le prince
qui avoit étudié le caraâère "dé ce miniffre, crut
qu’il préféreroit la poffeffion tranquille de quelques
domaines affurés, à la perfpeélive éloignée d’une
couronne incertaine. Racheta , par le don de quelques
terres le confentement du maréchal, & parut
généreux; en lui ôtant le gouvernement & le rang
dont il jouiffpit. Chriflophe craignoit plus la haine
de Canutfon., qu’il ne defiroit fon amitié : il chercha
donc à careffer fes paillons favorites a flatta fou
orgueil,. fatisfit fon avarice , & le roi devint le
courtifan du miniffre. Le caraélère de Chriflophe ,
fufceptible de mille formes différentes, fe plioit
fans peine à ce rôle humiliant;: il s’en dédomma-
geoit par le mépris fouverain qu’il confervoit.dans
fon coeur pour le maréchal., Ces foins, minutieux
en apparence, mais très-importa ns à fa fortune #
ne lui faffbien.t pas perdre de vue ie dernier objet
de fon ambition, la couronne de Norvège. Les-
états dp cette contrée confervpient pour Eric X
un.attachement qu’il méritoit peu.: ils avoient réfol
u de s’oppofçr à, l’éleâion de Chriflophe ; mais
celui-ci avioit au milieu d’eux des agens feçrets ,
d7autant plus fûrs.di? fuccès de leursmenées , qu’ils
paroiffoient être, fes• ennemis les plus décidés. A
fgrrog. düutrigues, ils. firent .députer, un é.Y.êq.uei,
partifai)
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îpartifan de Chriflophe, à l’affemblée des trois états :
ceux de Norwège le chargèrent de réclamer contre'
l ’éleélionde Chriflophe ; il fit tout le contraire, &
déclara qu ’il apportoit le fuffrage de la nation qu’il
repréfentoit.
M ais tandis qu’on couronnoit Chriflophe en Suède,
le Jutland fe foulevoit en faveur de l’indolent
Eric. Henri Tagond, fénateur danois * partifan du
yrince détrôné , raffembla vingt - cinq mille pay-
fans, donna bataille, aux royaliftes, les mit en
fu ite , préfenta le combat au roi lui - même , qui
étoit accouru , fut vaincu, tomba entre les mains
•des vainqueurs, & expira fur la roue, ainfi que
fes principaux complices ; quelques rebelles implorèrent
la clémence du roi, qui leur donna la vie,
le refte, retranché fur une colline, fut enveloppé
•& taillé en pièces. Stockolm reçut Chriflophe avec
des acclamations de joie ; il y fit l’entrée la plus
'pompeufe. Canutfon étoit à côté de lu i, efpèce de
diftin&ion qui reffembloit un peu à la coutume
des Romains, de traîner les enclaves attachés au
•char du triomphateur. Chriflophe ne démentit point
le caractère héroïque qu’il avoit montré jufqu’à ce
jour. Eric, caché dans l’île de Gotland , fe ven-
geoit par des moyens peu glorieux ; il envoyoit
des pirates croifer entre le Danemarck & la Suède,
8c fâchoit du moins de ruiner des peuples qu’il
n’ofoit combattre. On excita Chriflophe à s’emparer
de l’île de Gotland : « Mon Oncle , dit-il, eft affez
malheureux, laiffons-le du moins en paix dans
» fon afyle ». Enfin , preffé par les inftances de fes
fujets, il defcend dans cette île ; & fatisfait d’avoir
fait trembler Eric , repaffe la mer , fon vaiffeau fe
brife contre des écueils : à peine échappé du naufrage
, il court à An fl© en Norwège , où il fe fait
couronner. C’eff ainfi que le protecteur delà patrie
devint fucceflivement roi de Danemarck, de Suède
& de Norwège.
Ce qu’il y a fans doute de plus beau & peut-
être de plus étonnant dans une révolution fi générale
, c’eft qu’elle coûta peu de fang , & que
Chriflophe refferra fon ambition dans les bornes
que la nature avoit mifes à fes états : il ne fongea
plus à conquérir. Des foins pacifiques occupèrent
le refte de fon règne. Il groflit fes tréfors par la
vente des fiefs que l’acheteur ne pouvoit pofféder .
que jufqu’à ce qu’un gentilhomme plus riche en
offrît un. prix plus confidérable. Il valoit mieux
fans doute mettre fur l’ambition des nobles cet
impôt déguifé , que d’appauvrir réellement l’état,
en cherchant à l’enrichir de la fubftancedu peuple.
Chriflophe établit dans les villes & dans les cam--
pagnes une police jufqu’alors inconnue, fit payer
les dîmes aux eccléfiaftiques. D ’après fon réglement,
un tiers de ce tribut appartenoit à l’évêque,
un tiers au curé, un tiers à-l’églife paroifliale.Le
roi favorifoit ainfi le clergé, parce qu’il le craignoit,
!& le clergé ne troubla point l’état, parce qu’il
craignoit Chriflophe. Cette inquiétude réciproque
sfiïiîra le bonheur des Danois. Ils payoient un
fîifloire? Tome II, Première parti
CHR jy3;
dixième à l ’églife, un dixième au roi, Si fe trou»
voient heureux, en achetant à ce prix leur tranquillité.
Il confirma les privilèges accordés aux
différentes villes du royaume, & combla des
mêmes faveurs plufieurs villes Anféatiques : leur
puiffance lui donnoit de l’ombrage, il eût voulu
les opprimer ; mais il fentoit toutes les difficultés
d’une pareille entreprife. Tous les princes voifins
étoient intéreffés à protéger des villes qui fervoient
defrein à.l’ambition des rois de Danemarck. Ainfi
Chriflophk,d éfefpérant d’affervir ces petits peuples
libres, aima mieux s’eniaire des alliés, & il y réuffit.
Tant de bonté pour les étrangers avoit attiré dans
le Danemarck une foule de ces hommes’ indiffé-
rens fur le choix de leur patrie , qui n’en connoif-
fent d’autre que .le pays où la fortune les appelle,
Il leur avoit donné des fiefs, & les àdmettoit
même aux charges publiques; Les Danois murmurèrent,
& Chriflophe congédia les étrangers. Il con-
tinuoit à réprimer les abus, à établir de fages lois
pour le commerce & l’agriculture, lorfquela mort
l’enleva en 1448. -
On prétend qu’en mourant il exhorta les feigneurs
de fa cour à lui choifir un fucceffeur qui achevât
ce qu’il n’avoit pu lui-même entreprendre, la ruine
delà ville de Lubec. Il ajouta même que là guerre
qu’il méditoit contre cette république étoit l’objet
des foins économiques qu’il n’avoit point fufpen-
dus pendant tout fon règne, & que les tréfors
qu’il laiffoit dévoient fervir à envahir ceux des Lu-
békois.
Chriflophe avoit époufé Dorothée , fille du margrave
Jean de Brandebourg. Pontânus affnre intrépidement
que ce roi du nord avoit cherché une
femme au fond de l’Egypte , que le Soudan avoit
confenti à lui donner fa fille ; il cite même la lettre
du prince Mufulman, qu’il nomme Balthasar. Mais
c’étoit Am tirât qui règnoit alors , & dans un fiècle
de barbarie , Amurat, plus barbare que fon fiècle
même, ignoroit peut-être qu’il éxiftoit un Chriflophe
à plus de mille lieues de fes états.
Tout le nord regretta ce prince. Jufqu’alors on
n’avoit vu que des rois belliqueux armés ou contre,
leurs voifins ou contre leurs fujets même. Celui-ci
n’avoit fait la guerre qu’aux vices de fon temps &
aux abus anciens. Ceux qui connoiffent les hommes
conviendront que tant de viâoires remportées
fur les préjugés nationaux n’étoient pas moins
difficiles que celles que fes prédéceffeurs avoient
remportées fur les Vandales & les autres nations
voifines. Si le-nom de héros eft lé partage des
princes qui détruifent le genre humain, quel nom
réferve-t-on à celui qui l’éclaire & le rend heureux
? ( M. d e Sà c y . )
CHRYSIPPE ( Hifl; anc. ) fut le difciple & le
fucceffeur de Cléanthe, qui l’avoit été de Zénon ;
il paffoit pour un dialeéïicien fubtil ; c’étoit auffi
un écrivain fécond ; Diogène Laërce lui attribue
jufqu’à trois cens onze traités de dialé&ique. Cicéron
compte Chryfippe parmi les philofophes qui