
E U R
mais pour vous injîruire. Q u’on fe repréfente
Corneille ou Voltaire tenant ce langage à notre parterre,
peut-être moins inftruit que celui d’Athènes,
quel fcandale ! & cependant quel droit de tels
hommes n’auroient-ils pas eu de parler ainfi !
Tandis que Chapelain ofoit juger Corneille *
fa dit M. de Voltaire avec toute l’indignation du
génie, qui fent qu’il ne devroit être jugé que par
les pairs. Encore fi Corneille n’avoit jamais été jugé
que par Chapelain ; mais ,
Un c le r c , pour quinze fols , fans craindre le holà,
Peut aller au parterre attaquer Attila ;
Et lî le roi des Huns ne lui charme l'o reille,
Traiter de vifigots tous les- vers de Corneille.
Or maintenant veillez, pauvres auteurs,
Mordez vos doigts , ramez comme corfaires,
Pour mériter de pareils protefteurs,
Ou pour avoir de pareils adverfaires.
Une autre fois , le même parterre athénien ,
dont la pénétration auroit bien dû aller jufqu’à
comprendre qu’on doit faire parler chaque per-
fonnage fuivant le cara&ère qu’on ,-lui donne ,
trouva mauvais qu’un des perfonnages d'Euripide
fît l’éloge des richeffes , & jugea l’auteur comme
s’il eût parlé de fon chef: Attendez'jufqu’à la fin ,
dit Euripide au parterre, vous'verrez quel fera le
fort du panégyrifie des richeffes. Cette faculté de
haranguer le parterre pouvoir redreffer quelquefois
les jugemens du public. A la première repré-
fentation d*Adélaïde du Guefclin , le moment ou
Coucy fe rend aux follicitations & aux reproches
de Vendôme, & fe charge de faire périr Nemours,
de peur qu’un autre n’en foit chargé à fon refus,
ce moment fut fifflé, parce que le parterre, qui
ne fait jamais rien, ignorant Thiftoire de Bavaîan
& de Cliffon, ne vit dans le contentement de
Coucy qu’un perfonnage vertueux qui fe dé-
mentoit lâchement; M. de Voltaire fut fort aite
de l’erreur, & dit : «Voilà le fuccès de ma pièce
» alluré; ils ne prévoient pas le dénouement, & puif-
sr qu’ils trouvent fi mauvais que Coucy affaiïine Ne-
» mours, ils lui fauront donc gré de l’avoir fauvé : »
en effet, ce dénouement fit d’autant plus de plaîlir
qu’il n’avoit pas été deviné, & tout alloit bien jufqu’à
ce mot : Es-tu content, Coucy ? mot dont on fent
aujourd’hui avec tant de refpeét tout le fublime ,
& qui met en effet à li haut prix le fuffrage de
Coucy ^ on fait l’ignoble parodie qu’en fit iur-le-
champ un homme d’efprit dans le parterre , & qui
pour lors fit tomber la pièce.
Euripide fe découragea comme notre Racine ;
& c’eft-là le mal irréparable que* produit l’injufiiee
du public envers les grands hommes. Euripide
quitta le théâtre & Athènes , & fe retira mécontent
à la cour d’Archélaüs, roi de Macédoine.
De foixante-quinze pièces qu’il avoit compofées,
ilae nous en refie que dix-neuf; on efi étonné de
E U R
la fécondité de ces anciens poètes ; il paroît cependant
qu'Euripide travailloit avec quelque lenteur,
talent dont on devroit fe vanter plutôt que delà
pernicieufe facilité de 1'dn-promptu. Euripide, en
trois jours, n’avoit fait que trois vers ; un poète ,
nommé Alceftis , fe vantoit d’en avoir fait cent
dans le même efpace de temps. Oui, dit Euripide,
mais vos cent vers vivront trois fours, & mes trois
vers ne mourront pas. Ce n’eft point par la modeftie
que les anciens font recommandables.
Legrand mérite d’un poète dramatique efi dé
produire de grands effets. On dit qu’une repfé-
fentation de Y Andromaque d’Euripide rendit fous
les Abdéritains par Timprefticn profonde qu’elle
leur fit. Il s’agit fans -doute d’une folie fftéta-
phorique, & il y a dans l’hifioire ancienne pins
d’un fait qu’on a pris ainfi trop à la lettre fur la
foi d’un mot mal entendu.
On trouve qu 'Euripide décîamoit beaucoup
contre les femmes dans fes tragédies ; c’eft une
marque qu’il les aimoit beaucoup.
EURYDICE. ( Hifi. anc. j Ce nom, confacrè
par la fable , appartient aufli à Thiftoire. Eurydice,
femme d’Amyntas, roi de Macédoine , en eut trois
fils : Alexandre , Perdiccas , & Philippe, père
d’Alexandre-le-Grand ; elle en eut aufli une fille
Euryone;elle devint amoureufede fon gendre,mari
d’Euryone, &pourl’époufer & le mettre fur le trône*
elle voulut faire périr fon mari & apparemment
fa fille. Euryone, inftruite du complot, en avertit
fon père , qui voulut bien pardonner à Eurydice*
Il mourut, foit de fa mort naturelle , foit qu'Eurydice
eût profité de la clémence d’Amyntas peur
confommerfon crime. Eurydice fit périr Alexandre
& Perdiccas fes fils , & Philippe ne put échapper
à fes fureurs qu’à force de précautions. L’hifioire
ne dit pas ce que devint Eurydice.
Une autre Eurydice étoit femme d’Aridée, fiîs-
naturel de Philippe.& frère d’Alexandre. Elle engagea
fon mari à monter fur le trône de Macédoine
après la mort de ce conquérant. CependantPolyper-
chon (ouPolyfperchon) ramenoitd’Epire Olympias*.
mère d’Aléxandre, Roxane fa femme & le jeune
Alexandre fon fils, Eurydice & Aridée engagèrent
Caffandre à fè joindre à eux pour empêcher ce
retour. Les armées étant en préfence, Ses Macédoniens
abandonnèrent Eurydice St Aridée, & fé
rangèrent du .parti du jeune Aridée, qu’ils regar-
doient comme leur roi légitime. Olympias fit percer
de flèches Aridée. Eurydice s’étrangla-
EUSÈBE. ( Hijl. eccléf ) Plufieurs évêques de
ce nom font connus par la part qu’ils,eurent aux
troubles de Tarianifme, foit comme défenfeurs de
la fo i, foit comme fauteurs de l’héréfie. i^. Le
premier & le plus célèbre efi Eusèbe, évêque de
Céfarée , nommé Eusèbe Pamphile , parce que
Pamphile, prêtre de Céfarée, fon ami* ayanf
E U S
ïbuffert le martyre, l’an 309 , il voulut porter
fon nom, foit.pour honorer fa mémoire, foit
pour s’animer au martyre par fon exemple. Cet
Eusèbe efi l’auteur d’une hiftoire eccléfiaftique,
<jui l’a fait appeller le père de Vhifioire eccléfiaftique.
l e préfident Coufin en a donné une traduélion
françoife. On a encore dû Eusèbe une vie de Conf-
tantin, qui en efi proprement le panégyrique, une
chronique depuis le commencement du monde
jufqu’à la vingtième année du règne de Confiantin,
chronique dont la tradu&ion , faite par S. Jerome,
nous a fait perdre une partie, que Jofeph Scaliger
a tâché de retrouver , en raffemblant les fragmens
de cette chronique cpars dans divers écrivains; le
traité de la préparation & de la démonftration
évangélique , compofé originairement de vingt
livres , dont il ne nous refte que dix; des commentaires
fur les pfeaumes & fur Jfaïe , publiés par
D. Montfaucon; des opi jenies publiés par le P.
Sirmond; un catalogue des'noms des villes & des
lieux mentionnés dans l’écriture fainte. Eusèbe
mourut vers l’an 338.
Dans fon hiftoire eccléfiaftique , il ne parle
point de Tarianifme, & ce filence efi fufpeft, joint
fur -tout à divers paffages de fes ouvrages, ou fes
éditeurs même le jugent favorable,à cette fe&e. Il
paroît que fa conduite, ainfi que fes écrits, fut
équivoque à cet égard, & qu’il favorifa tôur-à-
tour les deux partis, fuivant les variations de la
cour : on- croit voir cependant que fon coeur étoit
pour l’arianifme, & il defférvit faint Athânafe
auprès de Confiantin.
s.9. Eusèbe de Nicomédie, contemporain dfEusèbe
ide CeTarée , fut hautement & à découvert ce que
l ’autre étoit fecrétement ; il défendit Anus , perfé-
cuta S. Athanafe Eusèbe de Céfarée , fon complice
fecret, l*â beaucoup loué. Eusèbe de Nicomédie
fut chef de feifie parmi les ariens; c’eft
de lui que les eufébiens ont pris leur nom.
' 3°. & 4q. A ces deux Eusèbes ariens, on peut
ioppofer deux autres Eusèbes à peu près du même
temps, qui fe diftinguèrent par leur zèle pour
l’onhodoxie. L’un efi faint Eusèbe, évêque de
Ver ceil, banni pour avoir refufé de foufçrire à
la condamnation de faint-Athanafe ; l’autre faint
'Eusèbe , évêque de Samofate, qui, dépofitaire du
décret d’éteehon de faint Melèce, élevé au fiége
d’Antioche, perfécuté’ par les ariens pour leur
remettre ce décret qu’ils vouloient anéantir , ‘ menacé
par un officier de l’empereur Valens d’avoir
la main droite coupée s’il ne lui remettoit à l’inftant
ce décret, lui dit : voila mes deux mains, coupez ;
mais ne vous attendez pas qidun dépôt dont je me fuis
chargé, foit jamais remis à d'autres qu à ceux qui me
Vont confié. Après une longue fuite de perfécutions,
il mourut de la blèffure qu’il reçut d’une tuile
qu’une femme arienne lui jeta fur la tête. Avant
d’expirer, il demanda la grâce de cette femme.
5 ? , E u s è b e , évêque de Dorilée | combattit & ,
E U S y©£
Théréfie de Neftorius & l’héréfie contraire d’Eu-
tychès. Les Eutychiens le firent dépofer dans
l ’affemblée comme fous le nom de brigandage
d’Ephèfe. Il mourut vers le milieu du cinquième
fiécle.
EUSEBIE. ( F l à VIE. ) ( Hifi. rom. ) Elle engagea
Confiance, fon mari, à donner le titre do
Céfar à Julien. Ce prince fit le panégyrique de
fa bienfaitrice, & nous l’avons parmi fes oeuvres.
EUSTAÇHE de Saint - Pierre. Voyez Sainte
Picfre.
EÜSTATHE ; ( Hifi. eccléf. litt. ) c’eft le nom
de deux évêques, l’un de Bérée , puis d’Antioche ;
l’autre de Theffalonique. Le premier, mort vers
■ l’an 3 3 7 , efi au nombre des faintS, St fouffrit
l’exil, pour la défenfe de la foi contre l’arianifme.
Le fécond, plus connu comme littérateur que
comme évêque, efi fur-tout fameux par fes commentaires
fur Homère & fur Denys le géographe.
On lui .a aufli attribué, mais il paroît que c’eft
fans fondement, le roman dflfmène & Ifmènias. Il
vivoit dans le douzième fiècle.
EUSTOCHIÊ, ( Sa in t e ) ( Hifi. ecdèf. )
dame romaine , de la famille des Scipions Sc
des Emiles , fut difciple de faint Jérôme, ainfi
que fainte Paule, avec qui elle fe renferma dans
un monaftère cle Bethléem , dont elle fut fupé-
rieùre après fainte Paule. Elle favoit l’hébreu &
le grec , & s’appliquoit fort à l’étude , & fur-tout
à la méditation de l’écriture fainte. Morte en
-419 , & fainte Paule', en 404.
EUTICHIUS , [Hifi. litt.j patriarche d’Alexandrie,
depuis 933 jufqu’en 94P , a laiffé en arabe
des annales , publiées par Pocock, à Oxford,
en 1619 , avec une verfion latine.
EUTROPE , ( Hifi. litt. ) auteiir qui n’eft connu
que par fon Abrégé de l ’hiftoire romaine , quoiqu’il
eût compote d’autres écrits. Il dit lui-même
qu’il porta les armes fous Julien dans fon expédition
contre les Perfes , cui expeditionï ego quoque
interfui ; c’eft tout ce qu’on en fait.
EUTROPE , ( Hifi. rom. j eunuque , favori
d’Arcadius, puis difgracié. ( Voye3; l’article de la
première Eudoxie. )
EUTYCHÈS. ( Hifi. eccléf. ') Neftorius, évêque
de Conftantinople au cinquième fiècle, prélat fi
zélé contre Théréfie , qu’il difoit à l’empereur
Théodofe le jeune, dans un de fes fermons :
Donnez-moi la terre purgée d*hérétiques , 6* je vous
donnerai le ciel, Seconde^- moi pour exterminer les
ennemis de Dieu , & je vous promets un fecours efficace
contre ceux de votre empire ; ce Neftorius s’égara