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la même ancienneté que celle qu’on trouve dans
H ygin , M. Fréret foutient qu’il n’eft fondé que
fur une tradition peu ancienne: Pindare, dit-il,
n’en a pas fait ufage lorfqu’il a célébré des victoires
remportées dans les courfes de chevaux.
« Dans ces occafions, ajoute-t-il, l’hiftoiréancienne
» ne lui fourniflant aucun exemple de ces courfes ,
* il a recours aux aventures des héros qui fe font
v diftingués dans les courfes de chars, ( i ) » Mais
qui ne voit que le pcëte a voulu varier fes defcrip-
îions-, en faifantde ces deux forn s de courfes un
objet de comparaifon , capable de jeter plus de
feu, plus de brillant, plus d’énergie dans fes odes?
Si ces courfes à cheval, dit M. Fréret, avoient
été en ufage dès le temps de l’olympiade d’H ercule,
pourquoi n’en trouve-t-on aucun exemple jufqu'à
la trente-troifième olympiade dèCoroebus, célébrée
T^n 648 (2) avant J. C . , 70o ans après les jeux
funèbres de Pélops, 8c,240 ans après le renouvellement
des jeux olympiques par Iphitus ? Ce
raifonnement ne prouve rien du tout ; car on
pourroit avec autant de raifon dire à M. Fréret :
vous aflurez qu’au temps d’Homère l’art de M équitation
étoit porté à un tel degré de perfeâion , qu’un
feul écuyer conduifoit à toute bride quatre chevaux
à la fois, s’élançant avec adre.fle de l’un à l’autre
pendant la rapidité de leurs courfes; 8c moi je dis
que fi cela étoit vrai , on n’âuroit pas attendu près
de trois cents ans depuis H om è r e p o u r mettre
les courfes de chevaux au nombre des fpe&acles
publics.
Il y a quelque apparence que la. nouveauté des
courfes de chars fut la caufe qu’on.abandonna les
autres pendant long-temps , oc qu’on n’y revint
qu’a près plufieurs fièeles r il falloir en effet bien
plus d’art 8c de dextérité pour conduire' dans la
carrière un char attelé de plufieurs chevaux, que
pour manier un feul cheval. Qu’on en juge par
le difcours de Neftor à Antiloque fon fils. TIliad.
I X X II.)
La fable, 8c Homère après elle, ont parlé du cheval
d’Adrafle ; ce poète le nomme le divin Arion : il
avoit eu pour maître Hereule; ce fut étant monté
fur Arion ( Pauf. II. vol. pag. 181.) que ce héros
(1) M Fréret cite en preuve la première olympique de
Eind are , où , à propos de la viftoire remportée par Hiéron
à la courte des chevaux , ce poëte rapporte l’hiftoire de
P é lo p s , vainqueur à la courfe des chars. Mais du temps
d’Hiéron, à celui où l’on introduifit aux jeux olympiques
les courfes des chevaux , il y a cent foixante ans d’intervalle
: les exemples anciens ne pouvoient donc pas manquer
à Pindare, s’il avoir eu defiein d’en rapporter.
(2.) Ce calcul de M.. Fréret n’ëft ni le plus e x a f t , ni le
plus fuivi. Les plus favans chronologiftes rapportent l’oîym-
piade de Coroebus à l’an 776 avant J. C. L ’ époque de la
fondation de Rome,, lié e avec cette olympiade, femble
donner à ce dernier fenciment toute la-force d’une démonf—
tration. I l fuit de-là que les courfes de chevaux furent ad-
rnifes au nombre des fpeôacles des jeux olympiques cent
vingt-huit an? plutôt que M. Frétée ne l’a-cru,
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gagna des batailles, 8c qu’il évita la mort. Après
avoir pris Augias, roi d’E lis, & après la guerre de
Thèbes, antérieure à celle de Troye., il donna ce
cheval à Adrafte. Comme on voit dans prefque
tous les auteurs qui en ont parlé ce rapide courfier
toujours feul, on en a conclu avec a fiez de vraifem-
blance que c’étoit un cheval de monture ; mais
M. Fréret lui trouve un fécond qu’on nommoit
Cayros. Voilà un fait. Antimaque (3) l’aflure ; il
faut*l’en croire : mais il doit aufli fervir d’autorité à
ceux qui ne penfent pas comme M. Fréret. Or
Antimaque dit pofitivemeat qu’Adrafte fuit en
deuil monté fur fon Arion. On a donc eu raifon
de regarder Arion comme un cheval accoutumé à
être monté , fans,nier toutefois qu’il n’ait pu être
quelquefois employé à conduire un char. Antimaque
ajoute qu’Âdrafle fut le troifième qui eut.
l’honneur de domptêr Arion : c’eft qu’il avoit appartenu
d’abord à Onéus, qui le donna à Hercule.«
Tout.cela ne prouve-t-il pas,en faveur de \! équitation^
dans des temps antérieurs à la guerre.de Troye?.
Monumens anciens. M. Fréret fuit la même-
marche dans l’examen des jnonumens anciens^
Ceux où il n’a point vu de chevaux de monture
méritent feuls quelque croyance; ils font autant:
de preuves pofitives : les autres font ou faâices,.
ou modernes; on ne doit point y ajouter foi.
( Paufan.l. V. ) Le coffre des Cypfélides, dont if?
a déjà été parlé, eft, félon cet académicien , un
monument du huitième fiècle avant J. C. On y
voyoit repréfentés les éÿ^hemeris les plus célèbres*
de l’hifioire des temps héroïques, la célébration desjeux
funèbres de Pélias,. plufieurs expéditions militaires
, des combats, & même en un endroit deux
armées en préfence : dans toutes ces occafions, les
principaux héros étoient montés fur des chars à-
deux ou à quatre chevaux, mais on n’y voyoit
point de cavaliers; doit-on conclure qu’il n’y en
avoit point, de ce que Paufanias n’en parle pas?:
mais fon filence ne prouve rien ic i; au contraire,
l’expreflion qu’il emploie donneroit lieu de croire
qu’il y en avoir. En décrivant déux armées repré-
fentées fur ce coffre, il dit que l’on y voyoit des
cavaliers montés fur des chars. U?auf. liy. V.) C e
n’eft point là affirmer qu’il n’y en avoit point de-
montés fur des chevaux, car il ne dit pas-qu’ils
fuiTent tous fur des chars; d’ailleurs les chefs, dans>
les temps héroïques, combattant pour l’ordinaire
fur des chars, il fe pourroit fort bien que lefculpteur,.
qui ne s’attachoit qu’à faire eonnoître ces chefs, &■
par leur portrait 8c par leur nom , n’ait repréfenté'
qu’eux, pour ne pas jeter trop de confufion dans
fes bas-reliefs , en y ajoutant un grand nombre de:
figures d’hommes à cheval. Cette raifon eft d’au-
(3) Auteur d’un poëme de la Thébaïde ; il vivoit du,-
temps de Socrate. Quintilien dit qu’on liii donnoit le fécond
rang après Homère ; Adrien le- met toit- au- deifii».-
d’Homère même,
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n n t plus plaufible, que dans le temps où ce coffre-a
été fait, il y avoit, de l’aveu.de M. Fréret, au moins
aço ans que Y équitation.étoit connue des Grecs.
.Sur le maflif qui foutenoit la ftatue d’Apollon
dans le temple d’Araycle, Caftor 8c Pollux etoient
repréfentés à cheval, ( Paufan. l,. I I I .) de même
que leurs fils Anaxias 8c Mnafinoüs. Paufanias rapporte
encore qu’on voyoit à Argos f lïb .IL ) , dans
|e temple des Diofcures, les ftatues de Caftor 8c
Pollux, celles de Phoebé 8c Haïra leurs femmes 8ç
celles de leurs fils Anaxias 8c Mnafinoüs, 8c que ces
fiatues étoient d’ébène, à l’exception de quelques
parties des chevaux. Il y ayoif à Olympie ( Pàiifan.
I. V.) un'grouppe de deux figures représentant le
combat d’Hercule contre une amazone à cheval;
les mêmes Caftor 8c Pollux etoient repréfentés. à
Athènes debout, 8c leurs fils à cheval. [fl'puf. L II.)
' ■; M. Fréret, qui rapporte tous ces monumens, 8c -•
'quelques autrès, d’après Paufanias, étale une érudition
immenfe pour montrer que les plus anciens
font poftérieurs à l’établiffement de la courfe des
chevaux aux jeux olympiques. Quand on.en con-
viendroit avec lui, on n’en feroit pas moins autorifé
à croire que la plupart de ces mo pu mens n’ont été
faits que,pour en.remplacer d’autres que la longueur
du temps ou les 'fureurs de la guerre avoient détruits;
8c que les fculpteurs fe font exa&ement
.conformés à la manière diftindive dont les héros
avoient été repréfentés dans les anciens monumens,
de même qu’à ce que la tradition en rapportoit. La
pratique confiante de toutes les nations 8c de tous
les temps donne à cette conjecture beaucoup de
yraifemblance.
Quoique tous les monumens de la Grèce fe foient
accordés à repréfenter les Tyndarides (1) à cheval
quoiqu’un fait remarquable, arrivé pendant la troifième
guerre de Mefiène, (2) prouve manifefte-
ment l’accord de la-tradition avec les fculpteurs ;
quoique cette tradition ait pénétré jufqu’en Italie ,
8c quoi qu’Homère-hii-même en ait dit, M. Fréref
(1) Les Romains repréfentoiènr les Tyndàridés à cheval.
-JDenys d’Halycarnafie, liv. V T , dit que le jour de la bataille
du lac Rhégille , l’an de Rome 258 & 494 avant J. G . , on
.avoir vu deux jeunes hommes à cheval d’une taille- plus
qu’humaine , qui chargèrent à la tête des Romains ]a cavalerie
latine ,-&* la mirent en déroute. Le même-jour ils
furent vus à Rome dans la place publique , annoncèrent la
nouvelle de la v iâ o ir e , & difparuré-nt auffi-tôt.
(2) Pendant que les Lacédémoniens célébroient la fête ,
des Diofcures, deux jeunes méfiéniens revêtus de cafaquçs
de pourpre, la tête couverte d,e toques.femhlables à celtes
que l’on donnoit à ces dieux', & montés fur les plus beaux
chevaux qu’ils purent trouver, fe rèndirènt au lieu-où les
Lacédémoniens étoient afiémblés pour le facrifice. On les
prit d’abord pour les dieux mêmes dont on célébroit la fe te ,
& l’on fe proftefna devant eux : mais les deux mqfléniens ,
profitant de l’e rreur, fe jetèrent .au milieu des Lacédémoniens
en blefsèrent' plufieurs à coups de lances. Cette
aftion fut regardée comme un véritable facrilége » parce
■ que les Mefléniens adoroient aufli les piofeures. Faufanias,
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ne peut fe réfoudre à croire que Caftor Sc Pollux
aient jamais fu monter à cheval : il veut abfolu-
ment que ces deux héros, 8c même Bellérophon ,
ne fuffent que d’habiles pilotes, 8c leurs chevaux v
comme celui qui aceompagnoit les ftatues de Nep*
tune, un emblème de la navigation.
M. Fréret reyient au récit de Paufanias fur l’ar-
cadien Iaflius, vainqueur dans une courfe de chevaux
, 8c cela à l’occafion d’un monument qui
autorifoit cette tradition : c’étoit ( Paufan. l . V III.)
une ftatue pofée fur l’une des deux colonnes qu’on
voyoit dans la place publique de Tégée , vis-à-vis^
le temple de Vénus. Les paroles (3) du texte de
Paufanias l’ont fait regarder comme une ftatue
équeftre ; mais le favant académicien veut qu’elles^
lignifient feulement que cette ftatue a un cheval
auprès d’elle, 8c tient de la main droite une branche
de palmier : d’où il conclut qu’elle ne proùve point
en' faveur de Véquitation , 8c qu’on l’érigea en Thon-
neur d’Iaffms, parce qu’il avoit peut-être trouvé’
le fecret d’élever des chevaux en Arcadie, pays-
froid, montagneux, où les races des chevaux tranf-
portés' par,, mer des cotes 'd’Afrique avoient peine-
à fubfifter. Quand'uné telle fuppofition auroit lieu,-
pbürroit-on s’imaginer que cet Iaflius, qui auroit tiré
des chevaux d’Afrique, où Yéquitation étoit connue
de-tout temps,' eût ignoré lui-même l’art de lés-
monter, 8c ne s’en fût fervi qu’à traîner des chars ?
Fable deF centaures'. Là fable des centaures, ‘que
Tes poètes.8c les mythologiftes ont tous repréfentés
comme des monftres à quatre pieds, moitié hommes,;
moitié* chevaux, avoit toujours été alléguée en
preuve de l’ancienneté de l'équitation. Toutes les-
manières dont oh raconte leur origine , malgré la
variété des circonftances-, concôuroient néanmoins-
à ce but. « Selon quelques-uns, (Diod. liv. IV. y
* Ixion ayant embraffé une nuée qui avoit la ref-
» femblance de Junon, engendra les centaures qui
» étoient de nature humaine ; mais ceux - ci s’étant
w mêlés avec des cavales, ils engendrèrent les hip-
» pocentaures , monftres qui tenoient en mêm©1 2
» temps de là nature de l’homme 8c de celle du
! : » cheval. D ’autres ont dit qu’on donna aux centaures
; le nom hippocentaures, parce qu’ils ont été les«
» premiers qui aient fu monter à cheval ; 8c que
» c’eft de-là que provient l’erreur de ceux qui ont
n cru qu’ils étoient moitié hommes, moitié che-*
» vaux, v -
Il eft dit ( Diodore, ib. ) dans le récif du combat
qu’Hercule foutint contre eux, que la mère des
•diêux les avoit doués de la force 8c de la vîteffe dës-
chevaux, aüiffi-bien que de l’efprit 8c de l’expérience-
des hommes. Ce centaure Neffus, qui moyennant:
un certain falàire, tranfportoit d’un côté à l’autre du
- fleuve Evénus ctûx qui- vouloient le traverfer., &
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