
$0 C H A
les ennemis de cette religion meme. On fit la
paix à Longjumeau en 1568, & dans la meme
année , on reprit les armes. La reine avoit voulu
attenter à la liberté du prince de Conde & de
l’amiral de C oligny ,q ui commençoit à jouer un
grand rôle parmi les Proteftans. Cette troifieme
guerre ouvrit l’entrée du royaume a ces reitres,
la terreur des deux partis; on fe battit près de
Jarnac le 13 mars 1369 • les royaliftes, fous la
conduite du duc d’Anjou, remportèrent la viâôire ;
Condé fut affafliné après la bataille, par Montef-
quiou. Condé étoit bleffé au bras avant le combat :
« Nobleffe françoife, dit-il, apprenez que Conde
» avec un bras en étharpe peut encore donner
» bataille ». Dans le même inftant un cheval lui
caffe la jambe; on veut l’emporter, il refifte , &
pour toute réponle il montre la devife qu il por-
toit fur fa cornette : pro Chriflo & patria dülce pe-
riculum. Ce fut alors que le jeune Henri (depuis
Henri IV ) parut à la tête des Huguenots, fous la
conduite de l’amiral. Ce grand homme, qui prè-
voyoit la chute de fon parti, vouloit lui affurer
un afyle qui fût à l’abri de la fureur des Catholi- !
ques. Ce fut dans cette Vue qu’il envoya une !
colonie dans la Floride; c’eft la première que
nous ayons eue en Amérique. Il triompha à la
journée de la Roche-la-Belle ; mais il fut vaincu
à celle de Moncontour, le 3 oélobre 1509. j
Le duc d’Anjou ne fut pas profiter de fon avantage
, & l’amiral fut réparer fes pertes. La paix
de Saint-Germain, qu’on appella la paix mal ajjife-,
étoit fi favorable aux Huguenots, qu’ils auroient
dû s’en défier. On attira les principaux chefs à
Paris, & on les maffacra : on prétend que le roi
tira lui-même fur les malheureux qui paffoient la
rivière à la nage. On ajoute que depuis cet inftant
il devint fombre, mélancolique, & que le fouvenir
de cette affreufe journée répandit fur le refte de fa
vie une amertume infupportable, Cette perfécution
eut le fort de toutes les autres; elle multiplia les
profélytes de l’erreur : ils avoient eu des Héros,
ils ne croyoient point avoir eu encore affez de -
martyrs. Quiconque croit mourir pour fon dieu, '
meurt toujours avec joie. On fit une quatrième.
paix aufli infruâueufe que les autres. Un nouveau
parti fe forma en 1574, c’étoit celui des politiques:
le duc d’Alençon ,'le roi de~ Navarre & les autres
chefs furent arrêtés. On ne fit plus ufage de poignards,
on fe contenta déchaînés dans cette occa-
fion. Enfin Charles IX mourut. Ce prince ne fut
méchant que par foiblefte. Sa jeuneffe avoit donné
d’affez belles efpérances ; on s’empara de fon efprit,
de fon coeur, de toutes fes facultés; on lui
infpira toute la rage du fanatifme,on le conduifit
de crime en crime;on le baigna dans le fang de
fes fujets. Il fut coupable fans doute, mais ceux
oui lui frayèrent-le chemin du.crime, le furent
plus que lui. ( M. d e S a c y . j
C harles I , roi d’Efpagne. Voye^ ci-devant
C harges-Q u in t , empereur.
C H A
C h a r l e s II ( Hijl. d'Efpagne. ) , roi d’Efpagne,
n’avoit guère plus de quatre ans lorfqû’il monta
fur le trône de fon père Philippe I V , en 1665.
Sa minorité fut tout-à-la-fois malheureufe au-
dehors & orageufe au-dedans. Marie-Anne d’Autriche,
régente du royaume, jaloufe d’une autorité
dont elle ne favoit pas faire ufage, indifpofa les
grands contre fon adminiftration, & invita, par
1 fon inexpérience, les ennemis de l’Efpagne à la
dépouiller d’une partie de fes provinces. Elle figna
la paix avec le Portugal, qui, jadis: province efpa-
gnole, fut reconnu pour un royaume libre &
' dépendant. Par le traité d’Aix-la-Chapelle, Louis
X IV conferva toutes les conquêtes qu’il avoit
faites dans les Pays-Bas efpagnols, & ne rendit
que la Franche-Comté, qu’il eût peut-être encore
gardée, s’il eût voulu tirer tout l’avantage pofîibie
de la foiblefte de l’Efpagne.
Charles, devenu majeur, n’eut prefque pas de
part au gouvernement. Ce prince, d’une com-
plexion débile, d’un efprit foible, & dont l’éducation
avoit encore été négligée à deftein, laifla
toute l’autorité à fa mère & à fon favori Valenzuela :
cependant ils ne la gardèrent pas long-temps. Don
Juan d’Autriche, fils naturel de Philippe I V , fit
fentir à Charles l’efpèce de fervitude où on le re-
tenoit, le défordre où étoient les affaires , l’Efpagne
épuiféepar des guerres malheureufes, & déshonorée
par des paix honteufes. Le monarque fecoua le
joug. La reine fut reléguée dans un couvent de
Tolède, & Don Juan déclaré premier miniftre ;
mais il répondit mal aux efpérances que l’on avoit
conçues de fes taleris. La guerre avec' la France
ne ceffa pas d’être une fource de revers , & l’Efpagne
perdit encore à la paix de Nimègue la Franche
Comté & feize villes confidérables des Pays-
1 Bas.
En 1679 , Charles époufa la princeffe Marie -
Louife d’Orléans , fille de Mdnfieur & d’Henriette
d’Angleterre. L’Efpagne continua de languir. Une
guerre de deux ans, terminée par une trêve ^dè
vingt ans, fignée à Ratisbônne en 1684, lui coûta
Luxembourg & toutes les villes dont les François
s’étoient emparés, excepté Courtrai & Dixmudè,
que Louis -XIV confentit de rendre. La reine
d’Efpagne étant morte, le roi époufa en fécondés
noces Marie-Anne de Neubourg, fille de l’éleâeur
Palatin. Le feu de la guerre s’alluma.de nouveau
entre la France & l’Efpagne; celle-ci eut prefque
toujours du défavantage. Le roi n’avoit point d’en-
fûns : il tombe malade & fait un teftament en
faveur de fon petit neveu le prince de Bavière,
comme fon plus proche héritier, attendu la renonciation
de Marie-Thérefe d’Autriche. Cette difpo-
fition n’eut pas lieu, le jeune prince étant mort
à 1 âge de fept ans. La paix fe négocioit depuis
trois ans à Rifwick. Elle fut avantageufe à l’Efpagne
par les facrifices que fit Louis X IV , qui
annonçoient allez que la mort prochaine de Charles
H en étoù le motif. Ce monarque fit un fécond
V - , ’ teftament
«Äämentefl 1700, par lequel il déclarait Philippe
■ de France, duc d’Anjou, héritier de toute la monarchie
efpagnole. Charles mourut la meme année,
âaé de 49 ans. Louis XIV accepta fon teftament,
qui caufk un embrâfement general en Europe.
I CHARLES X Hiß. de Danemark ) , feigneur
Danois, d’une maifon illuftre, qui trama avec
Canut &Bénédia fes frères, & Magnus, tous feieneurs
comblés des bienfaits de Valdemar I , une
ïoufpiratiou contre ce prince Le complot fut longtemps,
caché dans l’ombre du filence. Mais'en 117»,
les conjurés s’étant arrêtés dans un monaftere du
Hslftein pour y paffer la nuit, y tinrent confeil
fur les moyens les plus surs d’accelerer le lucres
de leurs deffeins; un moine les entendit , révéla
■ tout à Valdemar. Charlts, perfuade que le complot
étoit ignoré, ofa faire demander au roi une
-préfeaure “afin de fe faciliter les moyens d attenter ï fa viel Le roi différa de lui faire un don it
dangereux. Cependant il careffa les con,xires, les
admit dans fes confeils, les reçut a fa tabie. Un
jour que Béné<fift mangeoit avec Valdemar, le
trouble de fon àme fe peignit dans fes y eux; fes mots
étoient entrecoupés ,Ves regards égarés, fes mou-
vemens convulfifs ; il fembloit partage entre le
remords & le crime; il mamoit fon couteau, &
fembloit craindre de le toucher, le cachoit dans
fon fein, le reprenoit avec furie, le rejeton avec-
horreur. Valdemar, après avoir joui quelque temps
du défordre de fes efprits , appella fes gardes :
« Je fais, dit-il, qu’en faifant des heureux, je n ai
w fait que des ingrats. Des hommes que pai com-
» blés d’honneurs & de biens confirent contre
Il mes jours. Je ne veux pas les nommer. Je laifle
i> à leur confcience le foin de les punir. Il me
» fuffit qu’ils rougifferit à leurs propres yeux ».
Bénédia vit quetout étoit découvert, il te retira,
alla rendre compte à fes complices de ce qui s etoit
paffé, & la confpiration fut. diffipée.
Mais en 1 1 7 9 , Charta & Canut fortirent de
leur retraite, entrèrent à main.armee dans la
Hallandie, efpérant foule ver cette province. Mais
les habitans, fidèles à leur devoir, prirent les armes
& arrêtèrent leurs progrès. Il fe livra, un combat
fanglant, Canut fut fait prisonnier & livre a Val-
deraar ; Charles, après avoir fait dçs prodiges d
valeur, percé d’un coup mortel, fe trama juiqu à
1 forêt voifine. Les Hallandois le fuivirent a la
trace de fon fang; mais ils le trouvèrent mort.
^ ^ haI u s T , ’ roi d’Angleterre , d’Écoffe & d’Irlande
(Hiß. d-Angleterre). Un rot condamne a mort
au nom de la nation qu’il gouverna, & expirant
fur un échafaud, eft un terrible fpeSacle pour le
monde, & même une grande leçon pour les fou-
verains. Si les honneurs qu on rend aujourcl nui a
hTmémoire de l’infortuné Charles I le vengent
aux veux de la poftérité de 1 exécrable attentat
commis contre lui ; fi la nation rougit des exces aux-
Hijloire. Tome II, Première Partie•
quels ellê fe porta contre fon r o i, il n’en eft pas
moins vrài qu’un prince rifque tout, fa couronne
& fa Vit , lorfque, foit par l’ambition indifcre;te
d’un pouvoir abfoln, foit par les confeils pernicieux
des courtifans auxquels il s’eft livré , il indifpoie
contre lui une nation fenftblè à l’exces fur 1 article
de fes droits & de fes privilèges, facile à prendre
l’alarme fur les moindres entrèprifes de la cour,
extrême dans fes 'foupçons comme dans fon amour
pour la liberté, & par-là même felâiffant aifement
féduire & gouverner par des enthoufiaftes qui, dans
d’autres temps, n’auroient été que l’objet de fon
mépris & de fon indignation.
La première faute de Charles I fut de donner
fa confiance au duc de Buckingham, homme vain,
i fier, emporté, dont il avoit des raifons perfonnelles
d’être mécontent, & qui d’ailleurs étoit fi odieux
à la nation , qu’un gentilhomme anglois l’aflalhna
prefque publiquement & ofa s’en glorifier. Cependant
cet indigne favori avoit pris un tel afcendalît
fur l’efprit de fon. maître, que Charles eut la fôi-
bléffe de dire, en apprenant fa mort : Le duc a perdu
la vie & moi un oeil. Ce grand attachement du ro i,
pour un homme qui avoit mérité l’indignation publique,
aliéna de lui tous les efprits.
Une fécondé faute, qui fer vit à entretenir les
Anglois dans leurs mauvaifes difpofitions pour leur
monarque, fut fon mariage avec Henriette de-
France, qui ne pouvoit plaire à fes fujets, étant
catholique & Françoife. Cette démarche, jointe
à la faveur que Charles accorda vifiblement aux
Catholiques, fit murmurer hautement. On accufoit
le roi de vouloir ruiner le proteftantifme & rétablir
la religion de Rome.
Charles demanda au parlement des fublides qui
lui furent refufés en partie, parce que fa demande,
toute juftequ’elle étoit, ne parut point telle à des
efprits aigris, inquiets, foupçonneux. Le roi cafta
le parlement, eut recours à des emprunts forcés,
les fit fervir à une expédition contre l’Efpagne,
qui ne réuflit pas, &'la nation fut foulevée. Charles
. convoqua un fécond parlement, qu’il caffa comme
le premier, parce que ce parlement n entra pa»
davantage dans fes vues. Un troifieme parlement
eut le même fort, avec cette différence qu apres
la diffolution de celui-ci, plufieurs membres des
communes, qui s’étoient oppofés aux intérêts de la
cour, furent emprifonnés. Ce n’étoit pas là le
moyen de ramener des efprits obftinés.
Si Charles avoit eu de plus heureux fuccès au
i dehors, il auroit pu les faire valoir ; mais il etoit
aufli malheureux dans fes démêlés avec lès puif-
fances étrangères, que dans fes différends avec fes
fujets. Il avoit déclaré la guerre à la France; fon
expédition malheureufe à la Rochelle le força à une
paix onéreufe. . .
Après la mort tragique de Buckingham, le roi
Crut complaire à la nation, en choififfant pour minii-
I tre le comte de Strafford, l’un des cheis les p us
I ardens de la faélioR oppofée à la cour. Il fe flattoifi