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de raifons.Les Hongrois proteftansperfécuf és ,lespri-
viléges des peuples foulés aux pieds , quelques infra
fiions aux derniers traités, formèrent le ma-
nifefte de Ragotski, qui avec l’argent delà France ,
mit une armée en campagne. Dans le même temps,
le Danemarck s’unit à la Suède, & le roi s’engagea
par le traité à ne prêter aucun fecours aux
ennemis de la France. Ferdinand n’a plus de digues
à oppofer aux torrens qui inondent fes états de toutes
parts. Condé bat les Impériaux Sc leurs alliés à Ro-
croy . à Fribourg 8c à Nordiingue. Torftanfon & K o -
nigsmark chaflent devant eux le générai Galas ,
entrent vi&orieux dans la Bohême, en banniftent
Léopold 8c Ferdinand , qu’ils pourfuivent jufqu’à
Briun , malgré les efforts de Gceutz & de
Vert. Vienne, qui voit battre en breche les-murs
de Briun, tremble pour les Tiens. Ferdinandt pour
conjurer l’o rage, fait des démarches ouvertes pour
la paix. Il rend la liberté à l’éleéleur de T rêv es ,
dont la captivité avoit fervi de prétexte aux hof-
tilités des François ; il fatisfait Ragotski, qui fe
fortifioit des fecours de la Porte , & le reconnoît
fouverain de la Tranfilvanie & prince de l'Empire
; il lui rend toutes les terres 8c touts les
privilèges dont avoit joui Bethlem - Gabor. Tels
furent de Ton côté les préliminaires de la paix de
Veftphalie ; mais il n’en fut pas de même du
côté de la France & de la Suède , qui preffoient
Vienne pour en obtenir de plus grands avantages
par le traité. Turenne , par une marche favante
& hardie , s’avance jufqu’à Munick , taille en
pièces les Autrichiens , près de Summerhaufen 8c
de Lavengen , dans le voifinage du Danube , &
fe rend maître de la Bavière , d’où il chaffe l’é-
leéleur , tandis que Konigsmark furprend Prague,
& que Varengel, fucceffeur deTorflanfon»s’empare
d’Egra. Tels furent les derniers feux d’une
guerre de trente-trois ans* Tout confpiroit à rétablir
le calme. L’Allemagne épuifée d’hommes
ik d’argent , déchirée par les étrangers & par
Jes liens, defiroit le terme de fes longs malheurs.
La Suède étoit affoiblie par fes propres viâoires.
La reine Chriftine faifoit des voeux pour le retour
de la paix, dont elle vouloit confacrer les douceurs
aux fciences qui faifoient fes délices. La reine ,
régente de France, à qui la minorité de fon fils
préfageoit des troubles , fe prêtoit avec joie à tm
accommodement qui lui permettroit d’oppofer
toutes les forces du royaume à ceux qui s’ap-
prètoient à y femer la difeorde. Ainfi toutes les
puiffances qui défoloient l’Empire , formèrent le
même voeu. Rome 8c Venife furent choifies pour
médiatrices, Oxenfliern 8c Davaux , regardés
comme les plus fages plénipotentiaires , s’aflem-
blèrent à Munflçr 8c à Ofnabruk, & y lignèrent
ce traité li fameux fous le nom de traité de
Weflphalie. Ils fixèrent d’abord les droits de l’Empire
, & alignèrent des limites sûres au pouvoir
defon chef. Il fut défendu à l’empereur de changer
Jtes anciennes Iqîx , & d’en porter de nouvelles.
F E K
Ce droit fut réf. rvé aux affemblées générales, qui
en avoient toujours jo u i, même fous le gouvernement
des Carlovingiens , ©ù les privilèges du
trône furent les plus étendus. Ces alfemblées feules
purent déclarer une guerre d’Empire , régler lts
impôts , mettre au ban , ou prolcrire un prince
rebelle; on palfa en fécond lieu au pouvoir des
co-états. On accorda à chaque ville libre, à chaque
prince , le pouvoir de faire à fon gré des alliances ,
la paix ou la guerre : mais dans ces aéles de fou-
veraineté , il falloit toujours donner des témoignages
de fon refpeél pour les loix de l’alTociation
générale. On permit le libre exercice des religions
catholique , luthérienne 8c calvinilte , &
chaque état put choifir à fon gré celle qu’il pré-
féroir. L’empereur 8c les éleéleurs ecclénaftiques
furent cependant alfervis au culte romain. Les
princes qui avoient été dépouillés par Ferdinand II,
furent rétablis, & le fils de Frédéric V obtint
fon éleélorat; & pour dédommager Maximilien,
on en créa un huitième en fa faveur. Les biens
des églifes fervirent à contenter les autres princes,
Plufieurs évêchés furent fécularifés malgré la réclamation
du pape, & furent donnés aux pro-
tellans. La France conferva la plus grande partie
de l’Alface avec les trois évêchés, & la Suède
la Poméranie conquife par fes armes avec le
duché de Brême 8c de Ferden. Les rois de Suède
prirent le titre de princes de l’Empire , par rapport
à ces provinces. Tels font les prinçipaux article#
de ce fameux traité qui fert de bafe à la conftitu-
tion germanique, 8c que l’on regarde comme le
fondement du droit’public d’une partie de l’Europe,
Il fut reçu comme ane loi fondamentale 8c perpétuelle.
L’Allemagne ne le refpeéle pas moins que
la bulle d’o r , & il eft bien fupérieur à cette bulle
par la direrfité 8c l’importance dès objets qu’il
embrafie. On remarque que les rois de France
& de Suède -y" furent traités de majefté par le
chancelier de l’Empire, & ce fut pour la. première
fois. Ce traité fut l’ouvrage de fix ans. Le pape ,
Taché d’en avoir été moins le médiateur que le
témoin , lorfqu’il vouloit en être l’arbitre , & le
roi d’Efpagne, qui étoit en guerre avec la France ,
firent d’inutiles efforts pour le rompre. Innocent X
publia même une bulle qui tendoit à le cafter ;
mais le célèbre Coringius fut chargé de lui ré-*
pondre, & s’en acquitta avec un fuccès qui déconcerta
le faint père. L’empereur employa conftam-
ment tous fes foins à fermer toutes les plaies que
cette longue guerre avoit ouvertes, & y réuflir.
Il fe trouvait paifible poftèfteHr de la Bohême ,
devenue fon patrimoine , de la Hongrie ? qu’il
regardoit aufii comme fon héritage , mais qui prétendait
encore au privilège de fe choifir des maîtres,
ainfi que de toutes fes provinces, jufqu’à l’extrémité
du Tirol. Il mourut l’an 1657, laiftant un
nom cher à fes peuples , dont il n’avoit pu faire
le bonheur. Ferdinand I I I eut trois femmes ,
Marie-Anne d’Autriche, fille de Philippe III, roi
d’Efpagne *
F E R F E R S4f
d’Efpagne ; Marie-Léopoldine, fille de Léopold V ,
archiduc d’Autriche ; & Eléonore , fille de Charles
I I , duc de Mantoue. Les enfans qui lui fur--
vécurent, furent Marie-Anne , reine d’Efpagne;
Léopold, qui fut empereur ; Charles Jofeph, évêque
de Paftau & grand-maître de l’ordre Teutonique ;-
Eléonore-Marie, qui futfuccefîivement femme de
Michel, roi de Pologne, 8c de Léopold, duc de,
Lorraine; 8c Marie, femme de Jean-Guillaume
de Neubourg, éleéleur Palatin. Parmi fes enfans,
dont la mort précéda la Tienne, on diftingue
Ferdinand IV > qui fut couronné roi de Hongrie ,
de Bohême 8c des Romains. ( M -----Y )
F e r d in a n d , roi de Portugal. {Hiß. de Portugal.')
L ’inconféquence 8c la légèreté pouflees jufqu’à la
folie, la libéralité portée jufqu’aux derniers excès
de: la profufion, la bonté jufqu’a la baflefle, la
gaieté jufqu’à l’extravagance , diflinguèrent ce
prince , qui d’ailleurs eut des talens dont il abufa,
des connoiftances qu’il rendit inutiles par le mauvais
«fage qu’il en f i t , de bonnes qualités qu’il effaça
par de plus grands- défauts. Il avoit reçu de la
nature les avantages de l’efprit, 8ë il ne fut qu’un
roi tfès-médiocre; il avoit beaucoup de valeur,
8c il ne fut pourtant qu’un homme foible. Fils
unique de-dom Pèdre & de dona Confiance-Emmanuel,
Ferdinand, à la mort de fon père , monta
fur le trône en 13 67, aux acclamations du peuple ,
qui- ne voyoiten lui qu’un prince aimable, jeune,
affable 8c prévenant dans fes-manières, généreux
dans fes aâions, accefîible à tous les citoyens,
d’un caraâère modéré, facile 8c agréable. C ’étoit
fous ces dehors heureux que la nation en général
voyoit fon nouveau fouverain; mais les grands
8c les miniftres qui le-connoiffoient mieux, 8c qui
l’approchoient de plus près , étoient bien éloignés
de fuivre le torrent de cette prévention publique ;
ils n’avoient au contraire apperçu en lui qu’une
imagination forte, v iv e , fougueufe, à laquelle il
s’abandonnoit ; ils fa voient qu’il n’avoit auciine
forte de régularité dans les moeurs, 8c qu’il n’étoit
rien moins qu’attentif à obferver les bienféances,
même les plus indifpenfables : impétueufement
entraîné par le goût du plaifir, il ne condamnoit
point dans les autres le même goût ; mais il ne J
prétendoit pas non plus qu’on gênât fes penchans. J
Dom Pèdre étoit. fobre* économe; fon fils étoit
exceflif en tout , 8c prodigue. Les leçons, les
remontrances , les exemples, rien n’avoit pu corriger
fa légèreté naturelle 8c outrée; 8c malheu- 1
reufement fa légèreté 8c fes inconséquences influèrent
puiflammënt fur les affaires , comme fes
défauts influèrent fur toutes fes aélions. Pendant j
les dernières années de fon père, il avoit montré-
le plus grand éloignement pour Pierre-le-Cruel,
roi de Caftille, & la haine qu’il avoit pour ce
prince lui avoit fait refufer l’infante dona Beatrix
de Caftille, fille de ce fouverain. A peine Ferdinand J
. fut monté fur le trône, qu’enchanté de la chute, de [
Hißoire, Tome ƒ/» Seconde partt
Pierre-le-Cruel, il offrit fon fecours au comte de
Tranftamare, devenu roi de Caftille , fous le nom
de Henri. Mais bientôt après renonçant à cette
alliance, 8c plaignant le fort très-mérité de Pierre ,
il fe déchaîna vivement contre le roi Henri qu’il
traita hautement de tyran, de traître 8c d’aftaflin.
Il fit plus , 8c prit lui-même le titre de roi de
Caftille,en qualité d’arrière-petit-fils de dom Sanchç*
le-Brave ; il fit battre monnoie aux armes de Portugal
8c de Caftille, accueillit 8c proétgea tous les Caftil-
lans qui vinrent à fa cou r, fe ligua avec le roi
d’Aragon , dont il demanda en mariage la fille
Léonore, promife au prince de Caftille, promit
de fournir à la fubfiftance des troupes que l’Aragon
lui fourniroit, 8c fit un traite d’alliance avec le roi
de Grenade , qui ne tarda poinî.à tromper fon allié.
Après de grands préparatifs, il entra en Galice,
prit quelques places, 8c ravagea la campagne, tandis
que .le roi Henri fe jeta avec toutes fes forces
furie Portugal, pénétra jufqu’à Brague, qu’il prit
d’aftaut, 8c caufa mille foisj>lus de dommage à ce
royaume que n’en avoit fouffert la Galice. Ferdinand
raffembla toutes fes troupes ; 8c pour donner à
l’Europe la plus haute idée de fa bravoure , il
envoya un cartel de défi au roi de Caftille, qui,
s’embarraffant peu de. ces folles menaces , rentra
v-iâorieux dans fes états. Cependant, Ferdinand
envoya plufieurs feigneurs en Aragon pour terminer
la négociation qu’il avoit entamée ; il envoya
aufii 1800 livres pefant d’or , pour çn faire des
efpèces deftinées aux frais de la guerre; il fit.partir
en même'temps fix- galères a la fuite de celle fur
laquelle l’infante d’Aragon devoit s’embarquer, 8c
dont les cordages étoient de foie, la proue 8c la
pouppe dorées. A . peine cependant ces galères
furent parties, qu’à la follicitation de Grégoire X I ,
le roi de Portugal, qui avoit époufè par procureur
l’infante d’Aragon , 8c qui avoit juré la perte de
Henri de Tranftamare, s’engagea, par un traité,
d’abandonner fes alliés , de foutenir le roi de Caftille
contre tous fes ennemis, 8c d’époufer dona Léonore,
infante de Caftille. Cet étrange traité offenfa
vivement le roi d’Aragon , qui fe vengea en.
faififîant les 1800 livres d’or deftinées aux frais de S guerre. La perte de cette fomme 8c les prodigalités
du roi avoient prefque totalément épuifé
l’état; 8c~Ferdinand, croyant remédier à l’embarras
de cette fituation, haufta la valeur du peu d’efpèces
qui reffoient dans la circulation. Cette mauvaife
opération eut les fàcheufes fuites qu’elle devoit
nécefiairement avoir; 8t fans fonger aux circonf-
tances, ni aux précautions qu’il y.avoit à prendre ,
le roi remit tout-à-coup 8c fi fubkement la monnoie
à. fon ancienne valeur , que la nation fouftrit
encore plus de cette fécondé opération qu’elle
n’avoit fouffert de la première. Il ne falloit pas
moins qu’une inconféquence nouvelle 8c très-frappante
, pour faire oublier aux Portugais çes deux
fautes qui leur avoient été ft préjudiciables. On
attendait, en Portugal, l’infante de Caftille, 8ç
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