
C$o F R E
FRESNY, ( C h a r l e s r iv iè r e d u W H i f l .
litt. mod ) . j \ j
Et dti Frtfny , plus fage & moins dif&pateur ,
Ke fui pas mort de faim, digne mort d’un auteur.
M. de Voltaire, Toit qu*il eût jugé avec raifon j
cette plaifanterie un peu trop commune, foit qu^il
eût reconnu que c^étoit trop faire le gentilhomme
ignorant & ennemi de la fcience, trop faire les
honneurs d’un état qui, après tout, étoit le fien,
a depuis changé ainü ces deux vers:
Dn Frefny, moins prodigue , & docile au bon fens,
N’eût point dans la misère avili fes talens.
L’une & l’autre leçon conftate la prodigalité de
du Fresny, 8c fa pauvreté qui en fut la fuite ; il
Cit vrai que toutes lès libéralités de Louis XIV qui
Fatmort, 8ç dont il éroit un des valets-de-chambre,
ne purent jamais l’en tirer, 8c que ce prince difoit
lui-même : il y a deux hommes que je ne pourrai
jamais enrichir^ du Frefny & Bomemps. D u Frefny
avoit un goût 8c un talent fingulier pour les arts,
pour la mufique, pour le defiein , fur-tout pour
la rt de conftruire des jardins; ceux de Mignaux
près de PoifTy, & plufieurs autres jardins célèbres
du temps , étoient foa ouvrage ; il avoit fourni des
plans pour ceux de Verlailles, ils furent rejettés
comme tropchers dans l’exécution, mais ils valurent
à eu Frefny un brevet de contrôleur des jardins
du roi : ce prince, lui accorda encore le privilège
d’une nouvelle oeamifaâure de grandes glaces, qui
sétabliffoit alors 8c dont le fuccès a été prodigieux.
Du Frefny> toujours preffé de jouir, céda ce privilège
pour une fomme modique. Quand le privilège fut
expiré, le roi en le renouvellant, fe fou vint de
f u. ^rej ny-> & obligea les nouveaux entrepreneurs de
lui faire trois mille livres de rente viagère ; il fe
flatta pour lors de lui avoir a (Tu ré la fubfiftance, ilfe
trompoit, du Frefny traita de cette rente, & en reçut
le rembourfement. Du Frefny vendit fa charge &
quitta la cour ; c’étoit tarir entièrement la fource
des grâces. Cependant le privilège du Mercure
étant venu à vaquer en 17 10 , par la mort de
M. De vizé , le ro i, qui fe fouvenoit d’avoir aimé
ï)u Frefny, leIui donna : Du Frefny le garda jufqu’au
raois de décembre 1713 , qu’il le céda au fieur le
Feyre , en fe réfervant une penfion, qu’il eut enfin
fe bon efprit de ne point aliéner. Du Frefny fe maria
deux fois ; c’eft d’un de fes mariages que parle le
Sage dans le diable boiteux : « Je veux envoyer aux
petites - maifons un vieux garçon de bonne
» famille, lequel n’a pas plutôt un ducat qu’il
%» le dépenfe, 8c qui, ne pouvant fe paffer d’ef-
* pèces, eft capable de tout faire pour en avoir.
» Il y a quinze jours que fa blanchifTeufe, à qui
» il devoit trente piftoles , vint les lui demander,
» en difant qu’elle en avoit befoin pour fe marier
g a un yalet-de-chambre qui la rechereboif. Tu
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» as donc d!*autre argent, lui dit-il, car oh efl le valet-
” de-chambre qui voudra devenir ton mari pour trente
M pi fioles ? — Hé mais., répondit - e lle, f a i encore
» outre cela deux cent ducats : — deux cent ducats,
» réplique-t-il avec émotion ? Malepejle, tu n’as
» qu’à me les donner à moi, je t’époufe, & nous voilà
» quitte à quitte ; & il époufa la blanchifTeufe. »
j Soit que M. le régent voulût, comme Louis X IY ,
tenter de l’enrichir , foit que Du Frefny voulût lui
I en faire naître l’idée, il lui prêfenta ce placet.
» Pour votre gloire, Monfeigneur, il faut laifTer
» Du Frefny dans fon extrême pauvreté, afin qu’il
» refte au moins un feul homme dans une fituation
» qui faffe fou venir que tout le royaume étoit
» aufli pauvre que du Frefny, avant que vous y euf-
» fiez mis la main.»
Le prince mit néant au bas du placet, & donna
ordre àL aw , de remettre à du Frefny deux cents
mille francs, avec lefquels du Frefny fit bâtir une
belle maifon qu’il appella la mai fon de Pline.
Du Frefny s’étoit mis en fociété de plaifirs & de
talens avec Regnard ; cette liaifon finit par une
accufation d’infidélité. Du Frefny, difent les auteurs
de l’hiftoire du théâtre françois, prétendit avoir
communiqué à Regnard plufieurs fujets de comédies
prefque achevées , entr’autres ceux du Joueur
8c de la pièce intitulée: attende^-moi fous l’orme %
» Regnard, qui fentit la valeur de la première
» pièce, amufa fon ami ; fit quelques changemens à
» l’ouvrage , le mit en vers , 8c le donna fous fon
» nom aux comédiens. Du Frefny, indigné, donna
aufli fon chevalier joueur tel qu’il l’avoit fait, moins
bon que celui de Regnard, mais non pas fans
mérite, 8c dans un prologue affez plaifant, il fit
fon accufation de plagiat en forme, à la face du
public : « •'A le bien prendre, dit-il, les deux pièces
» 11’ont rien de femblable que le fond du fuiet,
» 8c deux ou trois idées de fcènes qui fe font
» trouvées dans des mémoires, que l’un des deux
» auteurs à dérobées à l’autre. »
Regnard repouffa cette injure avec beaucoup
( d’emportement; mais fa juftification n’a point paru
j complette. Au refie, le public, auquel il importe
| peu de qui foient les pièces, pourvu qu’elles foient
bonnes, a été plus content du plagiat que de l’original
volé, & a dit: ô felix culpa!
Les hifioriens du théâtre françois, reftituèrent
encore a du Frefny, attende^ moi fous l’orme, qui
eft imprimé parmi les pièces de Regnard. On joue
fou vent 8c avec fuccès de du Frefnyefprit de con~-
tradition , le double veuvage , la coquette de village,
la réconciliation normande , le mariage fait 8c rompu ;
un parallèle bien fait de du Frefny avec Regnard
feroit fort intéreflant ; M. d’Alem1ert en a fait
un de ce même du Frefny avec Deftouches.
« Tous deux fe cïiftinguoîent par des qualités
v différentes ,8c prefque oppofées. Deftouches *
» naturel & v ra i, fans jamais être ignoble ou
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» négligé ; du Frefny, original & neuf, fans cef- >
» fer d’être vrai 8c naturel ; l’un s’attachant à
» des ridicules plus apparens, l’autre fatfiffant des
» ridicules plus détournés; lepinceau de Deftouches
n plus égal 6c plus févère, la touche de du
v Frefny, plus fpirituelle, & plus libre ; le premier
v deflinant avec plus de régularité la figure entière;
» le fécond donnant plus de traits oc de jeu à la
»> phyfionomie ; Deftouches plus réfléchi dans fes
» plans, plus intelligent dans l’enfemble; du Frefny
» animant par dçs fcènes. piquantes, fa marche
» irrégulière 8c découfue; l’auteur du Glorieux
» fachant plaire également à la multitude & aux
» connoifïeurs ; fon rival ne faifant rire la mul-
w titude, qu’après que les connoiffeurs l’ont avertie ;
» tous, deux enfin occupant au théâtre une place
» qui leur eft propre 8c perfonnelle ; du Frefny,
v par un mélange heureux de verve 8c de finefle,
» par un genre de gaieté qui nseft qu’à lu i, 8c
» qu’il trouva néanmoins fans la chercher ; par un
» ftyle qui réveille toujours, fans qu’on ofe le
» prendre pour modèle , 8c qu’on ne doit ni blâmer
» ni imiter; Defto.uches , par une fagefîe de com-
v pofition 8c de pinceau qui n’ôte rien à la com-
»> pofition 8c à la vie de-fes perfonnages , par un
♦> fenriment d’honnêteté 8c de vertu , qu’il fait
* répandre au milieu du comique même, par le talent
» de lier 8c d’oppofer les fcènes entr’elles, enfin
» par l’art plus grand encore , d’exciter à la fois
» le rire 8c les larmes, fans qu’on fe repente d’avoir
w r i , ni qu’on s’étonne d’avoir pleuré.»
Du Frefny refufoit jufqu’à l’efprit à Deftouches,
q u i, par repréfailles d’injuftice, lui refufoitle bon
fens ; mais ce qui eft bien à confidérer ici pour ceux
qui aiment à ne s’étonner de rien , c’eft que du
Frefny refufoit l’efprit, même à Molière , 8c ce n’eft
pas la feule fois, obferve M. d’A lembert, que ce
blafphême a été proféré par des gens de beaucoup
d’efprit : Marivaux n’aimoit pas Molière ; ces
grandes erreurs de l’efprit humain font réellement
curieufes à obferver.
On a de du Frefny, outre ion théâtre, des cantates,
des Chanfôns parmi lefquelles on diftingue celle
qui a pour titre : les lendemains, & qui commence
par ce vers:
Philis plus avare que tendre , &e»
On a de plus, les amufemems férieux & comiques,
le puits de là vérité, diverfes nouvelles hiftoriques,
8c d’autres fruits d’une imagination toujours enjouée,
toujours fingulière.
Du Fréfny étoit né en 1648. On le croyoit petit-
fils d fleuri I V , 8c on trouvoit qu’il lui reflembloit.
Il mourut le 6 oâobre 1714. Il condamna au feu
en mounint quelques écrits innocéns, à l’inftiga-
tion d’un faux zèle. Parmi les fingularités de fon
cara&ère , on a remarqué qu’il avoit jufqu’à quatre
appartemens dans Paris, pour échapper >ux importuns.
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F R E Y . Voyc^ ( n e u v il l e . ) ‘
FREYER, ( Hifl. du Nord.') roi du Nord, que
fes fujets placèrent après fa mort au rang des dieux;
ils donnèrent au cinquième jour de la femaine un
nom formé de celui de ce prince. ( M. d e S a c y J)
FREZIER , ( A medée - F r a n ç o is ) ingénieur
habile 8c voyageur utile, direéleur-général des fortifications
de la province de Bretagne, auteur de
plufieurs bons ouvrages, tels qu’un traité des feux
J artifice , un voyage de la mer du fud ; théorie &
pratique de la coupe des pierres & des bois; élément
de fléréotomie. Né à Chambéry en 1682.; il vivoit
en 1765 , n’ayant quitté fes emplois qu’à quatre-
vingt-trois ans.
FRIART ou.FREAR. ( Voye^ C h am b r â t .)
FRIBURGER. ( M ic h e l ) ( Voye% F isg h e t ou
F ic h e t . )
FRIDLEF I , ( Hifl. de Danemarck. ) roi de
Danemarck, régnoit à peu près foixanfe ans avant
J. C . Il fut le premier qui entretint des foldats
à fa folde, même au fein de la paix. Il vouloit
par cet appareil en impofer à fes peuples , 8c contenir
l’ambition de fes voifins. Malgré Fafpe&
d’une armée toujours prête à fe mettre en marche,
Huirwil fouleva une partie de la Norwege ; Fridlef
s’avança avec une flotte nombreufe pour fou-
mettre les rebelles ; ceux-ci marchèrent fièrement
à fa rencontre ; l’aîlion s’engagea, elle fut opiniâtre
, 8c la nuit fépara les combattans, fans
qu’aucun des deux partis pût crier vi&oire: mais
Huirwil fut abandonné pendant la nuit d’une
partie de fon armée; le combat recommença,
les Danois furent vainqueurs. Fridlef fit dans cette
journée des prodiges de bravoure : bien tôt il
tourna fes armes vers l’Angleterre qu’il conquit
prefque toute entière ; il pafla en Irlande , ou
rien n’ofa lui réfifter. Quelques écrivains ont prétendu
que Jules-Céfar, fur le récit des fes exploits,
charmé de trouver au fond du nord une
ame femblable à la fienne , avoit fait alliance
avec ce prince. ( M. d e S a c t . )
F r id l e f I I , étoit fils de Frothon I I I , roi de
Danemarck. Son père l’avoit envoyé en Ruflie ;;
depuis fon départ le bruit de fa mort s’étoit répandu,
8c Frothon lui-même ayant péri malheufe-
ment, la nation propofa la couronne à celui qui
célébreroit avec plus d’enthoufiafme les vertus de
Frothon. Un tel prix étoit bien capable d’é< haufter
la verve des poètes. Hiarn l’emporta fur fes con-
cuvrens , & fui couronné. Mais bientôt Fridlef
reparut d’abord en Suède, oit il remit Hahlm
fur fon trône ; puis en Danemarck, où il vainquit
dans trois combats fon concurrent , qui aporie
qu’on ne gagne pas des batailles aufli aîfément que
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