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pour cette place, & qu’il lui apprit, avec quelque
confufion de fa foiblefle . qu’après avoir rêfifté
aux larmes de Gabrielle, il avoit cédé à fes me*
nacts. Sully ajoute que d'EJlrées étoit en toute
manière incapable d’exercer cette charge, & que
le roi, en la lui donnant, exigea de lui qu'il la quit-
teroit pour la première charge de la couronne qui
viendroit à vaquer, & abfolument s’il forvenoit
une guerre confidérable ; de forte qu’on né le
faifoit grand-maître de l’artillerie qu’à condition qu’il
ne feroit jamais ufàge de l’artillerie. En. effet,
d'EJlrées donna fa démillion au bout de deux ans,
en 1599, lorfque la mort de Gabrielle d'EJlrées,
trop promptement fuivie de la faveur de made-
moifelle d’Entragues , l’eût privé de fon plus
puiffant appui, ©n peut dire, au refte, qu’il avoit
eu droit à cette charge de grand-maître de l’artillerie
, 8c de fon chef par Ion père, & du chef
de fa femme, dont le père Jean Baboude la Bour-
daifière avoit aufli été grand-maître de l’artillerie.
30. François-Louis, marquis de Coeuvres , fils
d’Antoine, tué au liège de Laon, en 1594. g
4°. François-Annibal, duc d'EJlrées, maréchal
de France,frère du précédent, & qui mourut le
5 mai 1670, foixante & feize ans après la mort
de fon frère. Sa carrière , dont la durée fuffiroit
feule pour le diftinguer avantageufement , fut de
quatre-vingt - dix - huit ans, quelques - uns même
difent de cent deux ans. Henri IV lui avoit
donné l’évêché de Noyon ; mais la mort de fon
frère lui ayant fait quitter l’état eccléfiaftique, il
fer vit & dans les armées & dans les ainbaffades avec
une diftinflion Qui lui valut, en 1626, le bâton
de maréchal de France. On a de lui des mémoires
delà régence de Marie de Médicis, une relation du
fi ge de Mantoue, en 1630, & une autre du conclave
où Grégoire X V fut é lu , e a 162 t. Ce fut
pour lui que la terre de Cceuvres fut érigée en duché
pairie, fous le-nom d’EJlrées , en 1648.
50 Louis, marquis d’EJlrées, un des fils du précédent,
fut tué à la levée du fiége de Valenciennes,
en 1656.
6?. Jean, frère aîné du précédent & fécond
fils du premier maréchal de France, fut aufli
maréchal de France , ( 24 mars 1681, ) & fut le
premier qu’ait eu la marine. Il fervit avec gloire
6 fur terre 8c fur mer; il ayoit été fait prifon-
nier à cefiége de Valenciennes, où fon frère avoit
été tué. Créé Vice - amiral en 1670, toutes fes
campagnes fur mer ne font plus qu’une longue
fuite d’exploits & de fùccès. En 1 67a , au «om-
bat de Soultsbaie, il conjraandoit, avec le duc
d’Y orck , la flotte combinée de France $c d’A ngleterre
, contre Ruyter ; 8c ce fut la plus furieufe
bataille qu’eût vue ce général hollandois, qui en
avoit tant vu 6c de fi terribles. L’année fuivante,
il y eut trois autres batailles navales non- moins
terribles entre la même flotte combinée de
France & d’Angleterre, commandée pour la France
par j.e même çomtff âEJlrégs, pour l’Angleterre
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par le prince palatin Robert ; & la flotte hollan-
doife, commandée par les amiraux de Ruyter &
Tromp. En 16 76, le comte diEJlrées enlève aux
Hollandois l’île de Cayenne en Amérique. En 1767
il bat , le 3 février, l’amiral Binck à Tabago ,
& prend Tabago le 12 décembre. En 1683 , il fut
fait vice-roi de l’Amérique. En 1685 , il bombarde
Tripoli; le 22 juin, il forçeTunis à faire fa paix
avec le roi. En 1686, il paroît devant Cadix, &
forçe l’Efpagne à fatisfaire la France fur des intérêts
de commerce. En 1688, il bombarde Alger,
le premier juillet. Dans cette guerre de 1688, la
France combattant, fur la mer, l’Angleterre &
la Hollande réunies, triompha de ces deux grandes
puiffances maritimes, dont elle étoit l’élève. Ce
fut alors qu’elle eut véritablement l’empire de la
mer : elle régnoit feule dans tous les parages de
l’Amérique, & jufques dans la Manche; les vaif-
feaux anglois & hollandois fe cachoient devant
e lle , & c’étoit, en grande partie , au maréchal
d'EJlrées que la France devoit cette gloire 6c cette
puifiance nouvelles.
70. Ce fut aufli à fon fils Vi&or-Marie, qui avoit
dès le 12 décembre 1684, la furvivance de la charge
de vice-amiral, 6c qui, en cette qualité, continua les
fuccès de fon père dans cette guerre de 1688. Il
fit une defcente en Angleterre le 3 août 1690,
8c y brûla quatre vaiffeaux de guerre 8c cent vaif-
feaux marchands. En 16 91, il bombarda Barcelone,
le 10 août, 8c Alicante le 22. En 1692,, époque
fatale à notre marine, ce finifire combat de la
Hougue eût peut-être été aufli heureux pour la
France qu’il lui fut glorieux dans Ton défaftre
même, fi on avoit feulement permis à M. de Tour-
ville d’attendre l’efcadre du comte d'EJlrées. Telle
a été du moins l’opinion de l’Europe. Dans cette
même année 6c dans la fuivante, il f it , du côté
de la m e r l e s fiéges de Villefranche , de Nice,
. de Rofes 6c de Palamos.
Au fiége de Barcelone, en 16 97, il partagea
la gloire du duc de Vendôme , qui commandoit
du côté de la terre , comme le comte d'EJlrées
du côté de la mer. a Chef de l'armée navale, le
» comte diEJlrées fut la fécondé perfonne de l’arr
n mée de terre, 8c on le vit également dans
»> toutes les deux, » dit l’h ftorien de l’académie des
belles-lettres. Il propoft , dans le confeil, de faire
attaquer les derniers ouvrages de la’ place en plein
jour par les grenadiers : il ne donna , dit le même
auteur, pour garant du fuccès, que l’offre de
conduire lui-même l’attaque ; on le crut, 6c elle
réuflit. Le comte d’EJlrées rempliffoit toujours
ainfi, à l’exemple de fon père, par le fervice de
terre, les intervalles du fervice de mer. Ç ’eft
ainfi qu’il avoit combattu en 1688 , au fiége de
Fhilisbourg, où il avoit été renverfé dè deux .coups
de moufquet, ayant la même année, par une expédition
très-brillante où il accompagnoit Tour-
ville, obligé Papachin, commandant des flottes
d’Efpagng, un des plus grands hommes de mer du
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temps, 8c qui fe Tentant de beaucoup le plus fort ,
leur avoit demandé le falut, à faluer lui-même
l’efcadre françoife. « Le fait, dit l’hiftorien de Pa-
» cadémie, pafleroit tome croyance fans le procès
n verbal que Papachin, pour fedifculper de ce falut,
»> dreffa 6c publia lui-même, de l’état où il avoit
n été mis. »
Dans la guerre de la fuccefïion d Efpagne, Philippe
V fit le comte d'EJlrées lieutenant-général
de la mer, grand d’Efpagne, chevalier de la Toifon
d’or. Le maréchal d’EJlrées Jean, qui ne mourut
que le 19 mai 1707, âgé de 83 ans, vit toute
cette gloire 6c tous ces honneurs de fon fils, 8c
il eut la fatisfa&ion d’y voir mettre le comble
lorfqu’en 1703 Louis XIV fit le comte d’EJlrées
chevalier de lès ordres 8c maréchal de France.
Ainfi le père, maréchal de France, vit pendant
quatre ans ce fils parvenu comme lui', '6c fur
Tes traces , à ce dernier degré des honneurs militaires
; chofe fans exemple jufqu’alors pendant
tout le règne de Louis X IV , 6c dont les règnes
précédens n’offroient d’exemples que dans la feule
maifon de Montmorenci. Le comte d'EJlrées prit
le titre de maréchal de Coeuvres, 6c pour juftifier
fil promotion , fit triompher, le 24 août 1704 , le
Comte de Touloufe, amiral de France, à ce fameux
combat de Malag3 , qui dura depuis le point du
jour jufqu’à l’entrée de là nuit.
A la mort de fon père, le maréchal de Coeuvres,
qui prit alors le nom de maréchal d’EJlrées, lui fuc-
céda dans toutes fes places , les méritant toutes 8c
n’en ayant demandé aucune. Il fut un des objets
de la çuriofité du czar Pierre, dans le voyage que
ce princeifit en France pendant la régence: Pierre ;
alla s’enfermer une journée entière avec lui à I f ly ,
le quitta en l’embraffant, lui donna fon portrait, lui
envoya enfuite de Pétersbourg les meilleurs livres
Mofcovites imprimés fous fon règne, 6c les plans de
fes vaftes projets pour l’extenfion du commerce de
la Rufiie 6c la civilifation de fes vaftes états. Il
reconnut aifément dans le maréchal d'EJlrées, non
feulement l’homme de guerre confommé , mais encore
l’homme d’état formé par des leçons 6c des
exemples domeftiques. En effet le duc d'EJlrées,
fon oncle, ambafladeur àRome ; le cardinal d’EJlrées,
aufil fon oncle, 6c l’abbé d’EJlrées fon frère, nommé
archevêque de Cambrai en 17 16 , 6c mort en 1718 ,
fans avoir étéfacré, fervirent aufli bien l’état par
leurs négociations que les guerriers de leur nom
parles armes, & le maréchal d’EJlrées lui-même
fut employé avec fuccès dans plufieurs affaires
délicates tant au dedans du royaume qu’au dehors.
Il mourut le 28 décembre 1737. Il étoit des trois
académies de Paris ; il avoit été reçu à l’académie
françoife en 17 1 | , honoraire de l'académie des
feiences en 1707, 8c de l’académie des inferiptions
§ belles-lettres en 1726- Le cardinal d’EJlrées fon
onde , mort le 18 décembre 17 14 , dans fa quatre-
vingt-feptième année , étoit doyen de l’académie
françoife. M. de Boze, dans l'éloge du jnaréchal
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diEJlrées, obferve que « 1a maifon avoit cela de
it fingulier, ou plutôt d’unique , que fes cinq der-
» nières générations font compofées de deux
» grands-mattres' de l’artillerie 6c de trois inaré-
» chaux de France de père en fils, tous fans in-
» terruption , chevaliers de l’ordre du Saint-Efprit
n depuis fon inftitution , tous inviolablemenr atta-
» chés au parti du roi dans le temps de la ligue , des
11 guerres civiles 6c des troubles de la religion ;
» tous avides de gloire 6c comblés d’honneurs
» toujours plus grands que leur fortune. » ^
Le maréchal d’EJlrées étant mort fans enfans,
le titre de duché-pairie attaché à la terre de
Coeuvres fous le nom d'EJlrées , eft éteint; Ce
nom de d'EJlrées a été porté dans la famille le Teilier,
par le mariage de Marie-Anne-Catherine fa foeur;
6c le dernier maréchal à'Eflrées , le vainqueur
d’Haftembecke étoit le Teilier.
ETHELBALD, (H iß d'Angleterre.) Guidé par
les confeils d’un miniftre infidèle , Ethelbald, fils
ingrat,. perfide citoyen 6c prince inceftueux, ne
refta fur le trône , où la foiblefle 6c la timidité de
fon père Ethelwolph l’avoient laifle monter, qu’au-
tant de temps qu’il en falloit pour fe déshonorer
6c prouver à la nation jufqu’à quel degré de home
Sc d’aviliflement un fouverain indigne de régner
peut porter la puifiance royale. Le premier ufage
qu’Ethelbald fit de fon pouvoir, fut, du moins
s’il faut s’en rapporter à la plupart des hiftoriens
anglois, de commettre impudemment un crime
qui fouleva contre lui tous les citoyens. On afliire
qu’il époufa-Judith, fille dè Chatles-le-Chauve*
roi de France, 6c veuve d’Erhelwolph. Ce fut
vraifemblablement à cette indécente union que fe
borna tout ce qu 'Ethelbald fit de mémorable *
car l’hiftoire fe tait fur le refte de fa vie. Un feuî
annalifte, intéreffé fans doute à juftifier la mémoire
de ce méprifable prince, a prétendu que, dévoré de
remords, Ethelbald, vivement touché par les exhortations
de^ l’évêque de Winchefter, fe livra aux
rigueurs d’une pénitence auftère; pénitence qui
fuivant l’ufage de ces temps, confiftoit à bâtir 8c
doter deségtifes , à protéger 8c enrichir des moines r
aufli eft-ce un moine qui a donné de grands éloges ait
tardif repentir d'Ethelbald, qui mourut for le trône
aufli obfcurément qu’il y avoit vécu, en 860, après
deux ans de régne 8c qui laifla le feeptre à Ethelbert
fon frère, roi de Kent, conformément aux difpo-
fitions du teftament de fon père Ethelwolph. (X. Ç.J
ËTHELBEJIT, f Hijl. d’Angleterre^) fils d’Ethel—
wolph, 6c frère d’Ethelbald auquel il foccédà: les
premiers jours de Ton adminiftration furent troublés
par l’arrivée imprévue d’une flotte de Danois qui,,
depuis plufieurs années, avoient laiffé l’Angleterre
fe remettre des ravages qu’ils y avoient commis*.
Comme on ne s’attendok à rien moins qu’à cette
invafion , les Danois ne trouvant aucun obftacle
"àleur defcente, pénétrèrent jufqu’à Wmchefter,