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ennemis à lever le fiège. Cmielniski, pour fermer
a la nobleffe- le chemin de la Ruffie, alla y cantonner
fes troupes. L ’hiver vint fufpendre les opérations
de la guerre. La république demanda la
paix d’un ton fuppliant. Le Cofaque la refufaavec
hauteur.
Enfin, après bien des débats , la diète proclama
Jean Cafimir , roi de Pologne. Ce prince, après
avoir inutilement tenté auprès du Cofaque les
voies de douceur & d’accommodement , envoya
contre eux André Firlei. Celui-ci attaqua les Co-
faques dans leurs quartiers, s’empara de quelques
places, & par ces fuccès, rétablit la réputation
des armes Polonoifes. Le khan des Tartares venoit
de fe joindre à Cmielniski ; ce ne fut pas fans dépit
que ce général vit un allié fi puiffant marcher
de front avec lu i, & s’affocier à fon expédition. Il
affeda cependant la plus parfaite intelligence avec
le khan. Depuis plufieurs fiècles on n’avoit pas
vu d’armée fi nombreufe; elle étoit de plus de
trois cens mille hommes; fa marche couvroitune
province entière : elle invefiit le camp Polonois.
Firlei ne fut point effrayé par l’appareil menaçant
des troupes ennemies ; il n’avoit que neuf mille
hommesjLoppofèr à cette multitude: il s’étoit retire
fous les murs de Sbaras, & y avoit fait un
amas prodigieux de munirions de guerre & de bouche
: « Mes amis, dit-il à fes foldats, ne foyez point
» étonnés du nombre de nos ennemis, ils font
» plus faciles à vaincre qu j compter , ils ne com-
» battent que par l’efpoir du pillage, ils ne troiiveront
parmi nous que l’indigence, l’amour de
v la gloire & de la liberté. Leur multitude même
» doit nous raflurer. Notre camp occupe fi peu
de place, que les trois quarts de leurs forces
j> leur deviennent inutiles. Voyez comme leurs
» rangs font mal gardés , nulle, harmonie dans
” leurs mouvemens, nulle difcipline dans leur
i> camp. Enfin quand tous ces motifs ne devroient
« pas ranimer votre courage, vous êtes Polonois,
« & il s’agit du falut de votre patrie«. On l’interrompit
par des cris, & chacun jura de mourir les
armes à la main, plutôt que de fuir ou de fe rendre.
Le 13 juillet 1649, les aflïégeans parurent fous
les armes au point du joiir. Le khan lui-même
étoit à la tête des Tartares, Cmielniski s’étoit placé
au premier rang des Cofaques : Firlei rangea fes
Polonois le long des retranchemens , & choifit
pour lui le pofte le plus périlleux: ce fut de fon
côté que l’attaque commença, il la foutint avec
vigueur; mais à l’avantage du nombre, les ennemis
joignoient celui du terrein. Malgré l’inébranlable
fermeté du général Polonois, le rètranche-
ment fut forcé, abandonné, repris plufieurs fois ;
les affaillans avoient à chaque moment des troupes
fraîches pour remplacer celles qui avoient
combattu. Ils ne laifloient point refpirer les Polo-
nois; ceux-ci épuifés de fatigues, la plupart percés
de coups, ne dormoient, ne mangeoient que
Içs armes à la main ; mais leur courage s’açcroif-
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foit avec le péril, & les alliés les trouvèrent
plus fermes dans les dernières attaques que dans
les premières. Cmielniski vit bien qu’il falloit un
fiege dans les formes, & fit ouvrir la tranchée ;
les travaux furent bientôt pouffés jufqu’aux pieds
des retranchemens. Le nombre des Polonois , diminue
par tant d’attaques, ne pouvoit plus fufiire
a garder un efpace fi vafte ; il fallut élever des
retranchemens plus étroits derrière les premiers,
oc détruire ceux-ci pourrne pas laiffer aux ennemis
davantage de s’y loger. La famine faifoit des ravages
affreux dans Sbaras & dans l’armée , le fol-
dat difputoit au bourgeois les plus vils alimens.Le
partage d’une proie dégoûtantè divifoit des hommes
raffemblés par l’héroïfme le plus p u r '
Telle étoit l’affreufe fituation des Polonois, lorf-
qu’on apprit l’arrivée du roi. Il s’avançoit à la tête
de vingt mille hommes raffemblés à la hâte, mal
armés, mal payés , mais à qui l’exemple des aflié-
gés âpprenoit à ne rien craindre. Cafimir, après;,
avoir fait faire à fon armée une marche forcée,
campa près de Sborow. Le khan & Cmielniski ne
l’attendirent pas dans leurs lignes, mais ils coururent
à fa rencontre avec foixante mille Tartares
& quatre-vingts mille Cofaques. L’armée de la
république n’étoit pas encore rangée en bataille,
lorfqu’une partie des Tartares & des Cofaques
vint fondre fur les Polonois, tandis que le refie
les prenoit en queue : après une vigoureufe réfif-,
tance , l’avant-garde fut enfoncée, les Tartares
pénétrèrent dans les vuides , tout fut pris ou maf-
facré. La vidoire penchoit en faveur des alliés ,
lorfque le caffeUan dé Sandomir fe jetta fur. les,
Tartares & les prit en flanc. Cette diverfion donna
Je temps à l’avant-garde de fe rétablir, & au refie
de l’armée de fe déployer.
Cmielniski marcha de front contre le corps de
bataille. Cafimir étoit au centre, & donnoit à fes
foldats l’exemple du courage. Le choc fut terrible;
les Polonois termes à leurs poftes, encouragés par
la vue de leur ro i, ne laiffèrent prendre fur eux
aucun avantageai n’en étoit pas de même aux
aîles, la gauche écrafée., culbutée par la cavalerie^
Tartare, menaçoit d’entraîner dans fa défaite la
ruine de toute l’armée , Cafimir y vola: fa pré'-»
fence rétablit le combat. Telle étoit la fituation
des deux armées lorfque la nuit furvint ; chacun
la paffa à fon pofte couvert de fes armes. Cafimir
exhortoit fes foldats, les combloit d’éloges, &
leur promettoit de nouyèaux triomphes : cependant
malgré la fiêre contenance qu’il- affedoit, il
n’étoit pas tranquille. Le khan lui donnoit peu
d’inquiétudes, mais il craignoit Cmielniski & fes
Cofaques. Il effayâ de le détacher dé l’alliance des
Tartares, Il lui fit tenir une lettre, dans laquelle
il lui rappelloit les bienfaits dTJladiflas & les anciens
traités qui uniffoiént les Polonois & les Co*
faques ; il- lui dévoiloit enfuite les projets ambitieux
du khan, que Cmielniski connoiffoit mieux
que lui ; enfin il l’exhortoit à quitter ce ramas de
* ' • " I Tartares
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Tartares qui laifloient aux Cofaques tous les périls
de la guerre, & en recueilloient tout le fruit.
Le roi attendoit avec impatience la réponfe de
Cmielniski. Mais lorfque le jour parut, il vit les
Cofaques &. les Tartares rangés en bataille. Il fe
prépara à les recevoir. L’événement de cette journée
fut le même que celui de la veille. Les Polonois
en eurent tout l’honneur, puifqu’ils ne furent
pas vaincus. Les Tartares & les Cofaques rentrèrent
dans leur camp. La divifion étoit prête à naître
entre les généraux. Cmielniski foupçonnoit la fidélité
du Khan. Celui-ci, au lieu.des conquêtes ai-'
fées qu’il s’étoit promifes, ne trouvoit par-tout
qu’une réfiftance opiniâtre. Il écrivit au roi de
Pologne pour lui offrir la paix. Cmielniski, craignant
d’être abandonné feul à la fureur des Polonois ,
demanda un accommodement. Il l’obtint à des
conditions très - dures : il fut obligé de venir fe
jetter aux genoux de Cafimir, le prier d’oublier fa
révolte & de lui pardonner. Il eft vrai que le roi,
fenfible à fon repentir, le déclara chef de la milice
Cofaque. Les députés de la république lui
préfentèrent la queue de cheval' & l’étendard,
marque de l ’autorité dans laquelle il étoit confirmé.
Tandis qu’on négociolt dans le camp de Sborow,
on combattôit fous les murs de Sbaras. La nouvelle
de la paix n’y avoit point encore été portée.
Le Khan & . Cmielniski avoient retardé le départ
des couriers pour donner à leurs troupes le temps
d’exterminer les Polonois. Ceux-ci fe défendo'ient
avec une confiance' inébranlable ; ils étoient réduits
aux plus cruelles extrémités, & ne parloient
pas encore de fe rendre. Enfin ils reçurent une
lettre de Cmielniski. Ce général profitant de leur
ignorance, leur mandoit que s’ils vouloient lui
payer une fomme confidérable, il donneroit à fes
troupes le fignal de la retraite. Les habitans demandèrent
quelques jours pour contribuer. Pendant
ce délai, le traité fut publié ; on reconnut
1 artifice de Cmielniski, & il fut obligé de fe retirer.
Ce général n’avoit point oublié l’affront qu’il
avoit reçu à Sborow, ni la démarche humiliante
que la perfidie de fon allié l’avoit forcé de faire ;
il négocia fecrétement avec la Porte ; il obtint la
protedion de l’empereur ennemi né de la république.
Bientôt la guerre fut rallumée,’ L’armée
Polonoife s’avança vers le Boriftêne. Cmielniski,
par des diverfions faites à propos, fut la divifer,
& remporta quelques avantages ; mais enfin il fut
vaincu, & s’enfuit. On croyojt les Cofaques domptés
par cette vidoire, mais Cmielniski reparut à
leur tête; il fut plus malheureux encore que dans
la campagne précédente. Cependant la république,
laffée d’une guerre qui minoit lourdement fes forces,
donna la paix aux Cofaques , pardonna à leur chef
qu’elle devoir punir , & rétablit les anciens traités. J
Cniielnishi trouva une mort digne de lui dans I
un combat qu’il livra aux Polonois, & où il dit- I
Hijloire. Tome II. Première pan,
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puta la vidoire jufqu’audernier fouplr. Tels font
les principaux traits de la vi.e de cet homme célèbre
, qui eut la gloire de mettre la Pologne à
deux doigts de fa perte. Il charmoit les loifirs que
lui laifloient les intervalles de fes expéditions par
des feftins , où il s’abandonnoit à la débauche la
plus crapuleufe. Baziie, prince de Moldavie , dont
la.fille avoit époufé un des fils de Cmielniski, ayant
été chaffé de fes états, vint un jour implorer le.
fecours de fon allié. Le chef des Cofaques étoit
alors au milieu des plaifirs & de la bonne chère.
Il fallut que le prince de Moldavie attendît une fe- »
maine entière pour trouver le moment favorable
de l’entretenir. Enfin il obtint une audience, &
fit au Cofaque une peinture touchante & pathétique
de fes malheurs. Pour toute réponfe Cmielniski
fe faifit d’une large coupe pleine de vin , &
s’adreffant à Baziie, il l’invite à la vuider , en l’af-
furant qu’elle contient un sûr remède contre tous
fes chagrins. Le prince de Moldavie fe retira indigné
, en difant : Pavois cru jufqu’ ici que les Cofaques
étoient des hommes, mais je ne vois que trop
maintenant, quon a rai fon de dire que ce font, ou
des hommes changés en ours, ou des ours changés en
' hommes. (Àf. d e Sj c y . )
COCCAIE (Merlin) (Hifi. litt.moà.j. Inventeur
de ce qu’on appelle le fiy le , Macaronique, étoit un
: bénédidin Italien , nommé Théophile Folengo. Sa
Macaronnée ou opus Macaronicum , mêlée de mots
Italiens & Latins eut un fi prodigieux fuccès qu’elle
devint le nom du genre. On dit que ce nom de Macaronique
vient du mot Macaroni , fans autre
rapport, finon que, comme dans le Macaroni, il
y a un mélange de farine, d’oeufs & de fromage ,
de même dans le fiyle macaronique, il y a du
mélange de plufieurs langues. C ’eft donner un nom
& créer un genre à bon marché. Quant au nom
de Merlin Coccaie que prenoit ce bénédidin , on
n’en voit pas d’autre raifon, finon qu’il avoit étudié
fous une perfonne nommée Coccaïo.On fait encore
moins pourquoi en publiant fon poëme d'orlandino
il a pris le nom de Lïmèrno Pitoceo. Il mourut à 51
ans en 1544.
COCCEIUS étoit le nom d’une famille romaine,
dont étoit l’empereur Nerva,
COCCEIUS ( Jean) (ZZï/?. moâ. ) 9 chef de la
fede Cocceïenne, oppofée à la fede Voëtienne ,
toutes deux nées dans les pays-bas au dix-feptième
fiècle. Lçs Goçceïens ne voyent pas un mot dans
la bible qui ne foit myftique & allégorique.
«Un jour , dit M. de Voltaire , en dînant chez
»une dame Hollandoife , je fus charitablement
» averti par un des convives de prendre bien garde
» à moi, &de ne me pas avifer de louer Voëtius.
» Je n’ai nulle envie lui dis-je ,’ de dire ni bien ni
»malde Voëtius. Mais pourquoi me donnez-vous
»cet avis ? C’eft que madame eft Cocceïenne,me
» dit mon voifin. Hélas l très-volontiers, lui dis-je;
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