
tantôt avec les églifes proteftantes , tantôt avec
l ’égHfe grecque ; on la même calomnié fur ce
point ; on a voulu rendre fa foi fufpeéle ; on a prétendu
que dans un projet de réunion de réglife
Anglicane à l’églife Romaine, il facrifioit cette
dernière à la première, fur les points principaux &
fondamentaux; en général, ces projets de réunion
ne réufliffent guère & ne peuvent guère réuffir ;
ils ne peuvent réuffir fi on n’accorde rien, & on
ne peut guère accorder, parce que des décifions de
foi & des engagemens folemnels s’y oppofent. Le
projet de M. Dupin avoit, dit-on , 1 approbation du
cardinal de Noailles & du procureur général du
parlement de Paris , c’étoit réunir l’autorité des
deux puiffances ; mais le nom feul du cardinal de
Noailles fuffifoit alors pour décréditer le projet, au
moins dans l’èfprit de la cour. Le io février 1719 ,
on faifit les papiers de l’abbé Dupin , on les apporta
tau palais roy al,, où naturellement on auroit dû-
avoir d’autres affaires ; l’évêque de Sifteron ( Laf-
fitau ) y é toit, dit-il, lorfqu’on les apporta, & il
prétend qu’on y trouva des chofes bien étranges..
Api-ès avoir décrié la dodrine de l’abbé Dupin, on
décria fa conduite , ©n prétendit qu’il étoit marié,
& que fa femme, après fa mort, réclama fes droits*
matrimoniaux comme avoit fait ia veuve du cardinal
de Châtillon , frère de l’amiral de Coligny ; on a
dit auffi que M. Boffuet étoit marié. {J^oye^ l’ar-
ticle Bossuet.)
Si Dupin fut perfécuté . même fous la régence,-
on peut croire qu’il n’avoit pas été plus ménagé du
.temps de Louis X IV , il étoit du nombre des docteurs
qui avoient ligné ce qu’on appelle dans l’hif-
toire du Janfénifme, le cas de confcience pour la
diftin&ion du fait & du droit dans l’acceptation du
.formulaire & dans la condamnation des cinq proportions.
Il fut exilé en 1703, à Châtelleraut j les
exils & les lettres de cachet pour janfénifme ,
étoient la maladie du temps ; de plus, on trouvoit
entre la religion & la fortune , un rapport, qui
-faifoit qu’on ôtoit toujours à ceux qu’on croyoit
dans l’erreur, les moyens de fubfifter , il fembloit
qu’on voulût les prendre par famine; on ota au
do&eur Dupin une chaire qu’il avoit au collège
ro y a l, & elle ne lui fut jamais rendue- Le pape.
Clément XI remercia par un bref, Louis X IV , de
cette injuftice; il appelle dans ce bref, le dodeur
Dupin , . un homme de très-mauvaife doctrine, <S* coupable
de placeurs excès envers Le Jiége apojiolique. A
l ’explication, ces excès fe feroient peut-être réduits
à des proportions asti-ultramontaines, car
c ’étoit là ce qui choquoit le plus les papes ; & Dupin
avoit fait un traité de la puiflance eccléfiaftique
& temporelle, où on lui reprochoit sûrement à
R om e , d’ayoir été trop françois -T e’étoient donc
fes défenfeurs & fes fujets les plus zélés que le roi
facrifioit à une puiffance q u i, fur cet article , étoit
fon ennemie. C ’é toit, difoit-on , renouvelle! fans
raifon des débats fâcheux. Pourquoi,, fâcheux ?
Rome les avoit - elle abandonnés ? on ne lui faifoifc
aucun tort de les décider contre elle. Perfiftcit-elle
dans fes anciennes maximes ?. il étoit néceflaire de
les combattre.
Les ouvrages de Dupin, plus encore que ceux
de M. du Guet ( voyez cet article), formeroient.
à eux feuls une bibliothèque. Les principaux, outre
ceux dont nous avons parlé, font une bibliothèque
univerfdle des historiens , conforme au plan de fa-
bibliothèque eccléfiaftique , mais qui n’a point été
achevée ; un abrégé de f hijloire de. l ’églije , une-
hijloire profane, une hijloire des ju ifs, d’après Badinage
; un traité de antiquâ ecclefice difciplinâ, uiî;
traité hiflorique des excommunications, & plu-
fieurs autres ouvrages de critique eccléfiaftique. Il
a auffi donné des éditions d’Optat de Milève & de-
Gerfon. Il mourut en 1719. Il avoit- travaillé;
quelque temps au journal des fa vans.
DU PLEIX (S cifion) {Hifi. litt. m o d . j hifto-r
riographe de France , avoit, avant Mezeray, à peu
près la même réputation qu’a aujourd’hui Mezeray
& que le P. Daniel ne lui a pas enlevée comme
Mezeray l’avoit enlevée à. du Pieix. On lui a reproché
d’avoir trop flatté le cardinal de Richelieu,.,
parce qu’il étoit vivant, 8c. d’avoir trop peu mér
nagé la reine Marguerite, première femme de
Henri IV , parce qu’elle étok morte ; ce n’eft pasiv
qaM l’ait calomniée, mais-elle avoit été fa bienfaitrice
, elle l’a voit fait maître des requêtes de fon
hôtel, & il 11’a diffimulé aucune de fes foibleffes >v
qui, comme on fait, ont été nombreufes. Quôl
eff donc en pareil cas le devoir d’un hiftorien h
c’eft apparemment, de ne pas écrire l’Mftoire de-
certains bienfaiteurs; en effet, on ne rencontre
que des écueils de tous côtés , infidélité dans le:
filence, ingratitude dans-un récit exaéh Tacite ne:
nomme point les nobles que Néron fit monter fur.
le théâtre pour de l’argent ; il croit, dit- i l , devoir
à leurs ancêtres cette réticence ; quos fato perjunêlos
ne nominatim iradam majoribus eorum tribuendum puto*
\ du Pieix avoit une raifon de plus pour fe taire furies
défauts de Marguerite, la reconnoiffance, & il
pouvoir l’alléguer. Aujourd’hui on ne fait plus de
reproches à du Pieix , on ne le lit point. Le maréchal
de Baffempierre lui avoit fait l’honneur de le-
critiquer..
Outre Y hijloire de France & les mémoires des Gauler
qui la; précèdent, du Pieix avoit fait une hijloire
Romaine , un cours de philojophie ,.,un traité fie la.
liberté de la langue françoife , contre Vaugejas. Il
avoit fait dans l’extrême vieilleffe une compilation-
des libertés de l’églife gallicane , & il defiroit fort
de la faire imprimer. Le chancelier Seguier, auquel
il demandoit un privilège pour cet ouvrage, ne-
l’approuvant pas , fit brûler le manuferit en fa pré-
fence, ce qui caufa tant de chagrin à ce vieillard y
qu’il en mourut ; il eft vrai qu’il avoit quatre-vingt-
©uatorzs ans. Il nous femble que dans i’aftion du
chancelier Seguier, l’autorité excédoit fes droits;
elle n’a que celui de permettre ou d’empêcher la
publication ; le manuferit appartient à l’auteur ,
on n’a nul droit de l’en priver ; cet abus du pouvoir
feroit même en pure perte, 8c ne feroit qu’avertir
l ’auteur d’avoir deux copies.
Du Pieix étoit né à Condom en 1566, il y mou-
l’fct en 1661.
Nous né poiïvons paffer ici fous filence-un autre
du Pieix beaucoup plus célèbre ; c’eft le rival de
M. de la Bourdonnaye, dans l’Inde. C ’eft fur fes
mémoires que M. de la Bourdonnaye fut arrêté à
fon retour en France, & mis à la baffille ; la eom-
miflion établie pour le juger, le déclara innocent ;
la France, dit l’auteur du fiècle de Louis X V , lui
donnoit un autre titre , elle le nommoit fon vengeur
: « la commifîion ne lui rendoit que fa liherté,
77 la nation, par fes tranfports, lui donnoit fa ré-
compenfe. Il faut avouer que dans cette affaire, la
faveur populaire ne fut pas pour M. du Pieix. Mais
par combien de fervices importans , d’établiffemens
avantageux, de progrès glorieux & utiles procurés
au commerce de la France, ne répara-t-il pas cette
faute! Le gouvernement feul eut to r t,• & il eut
tort deux fois ; i ° . en faifant le procès à M. de la
Bourdonnaye fur les mémoires de M, du Pieix.
i Q. En rappeilant M. du Pieix lui-même en 1753 ,
fur des mémoires qui furent auffi envoyés contre lui.
Il devoit n’avoir aucun égard à des mémoire s venus
de fi loin, fi difficiles à vérifier & qui pouvoient
m’être que l’ouvrage de la haine & de l’envie; il
devoit confidérer feulement ce qu’avoient fait ces
deux hommes. L’un avoit conquis Madrafs, l’autre
avoit fauvé Pondichéri, tous deux avoir nt fait
refpe&er le nom françois dans l’Inde. On ne pou-
voit trop les honorer & les récompenfer tous
de ux , il falloit voir leurs travaux & dédaigner
leurs paffio,ns. Il eft v ra f qu’on ne peut reprocher
ni aux François ni aux Indiens de n’avoir pas affez
honoré M. du Pieix ; l’empereur du Mogol le
nomma vice-roi, & il étoit devenu , par fes armes
& fon commerce, le protetteur des vice-rois de la
côte de Coromandel» Le roi, fon. maître, lui envoya
le cordon rouge, honneur qu’on n’avoit ja^-
mais fait en France , dit l’auteur déjà cité, à un
homme placé hors du fervice militairemais honneur
encore au-deffous de fes fervices. Il eft feulement
fâcheux que M. de la Bourdonnaye ait perdu
pour toujours fa fanté à la baftille, & que M. du
Pieix foit mort, à ce qu’on c r o i td u chagrin qu’il
conçut de fa difgrace. Au refte, ces événemens
font trop voifins pour le temps & bien éloignés
pour les lieux ; le moment n’eft peut-être pas encore
venu de les bien juger & de prononcer fur
le mérite de ces deux hdmmes comparés l’un à
l’autre. Ceux que leur état & leurs lumièfes met-
toient à portée de les comparer, accordoient à
M. de la Bourdonnaye les qualités qui dif inguent
kmarin-& le guerrier, & à M. du Pieix celles d’unprince
entreprenant 8c politique. C ’eft le jugemen11
qü’en porte un auteur Anglois qui a décrit les
guerres des compagnies angïoife & françoife dans
l’Inde, & il paroît que c’eft l’opinion établie. Voyeç
l’article B o u r d o n n a y e . ( Bernard - François
Mahé de la. )
DUPLESSIS. Voyez Plessis.
DUPRAT. ( A ntoine ) {Hiß. de Fr.) , né à'
Iflbire en Auvergne, exerça la profeffion d’avocat
à Paris fut fucceffiveinent lieutenant général du
bailliage de Montferrand, avocat général au parlement
de Touloufe , maître des requêtes, premier
préfident au parlement de Paris, chancelier . puis
cardinal, & il fut fucceffivement ou en même-
temps,-archevêque de Sens, évêque de Meaux,
d’A lby , de Valence, de Die, de Gap, & abbé de;
Fleury ou Saint Benoît-fur-Lcire. Il dut ceite fortune
en partie à fon mérite, en partie à la faveur
delà ducheffe d’Angoulême, dont il avoit fait les
affaires à Cognac & dont il fervoit les pallions à la
cour. Ce fut à la confidération de cette princeffe ,
que François I , en montant fur le trône, fit Duprat
chancelier. La formule du ferment fait entre les;
mains du roi par Duprat, eft remarquable, en ce-
qu’elle femble fixer le degré de réfiftance que 1&
juftice peut & doit quelquefois apporter à l’autorité.
u Vous jurez q u e .. . . . quand on vous appörterap
n quelque lettre à fceller, fignée par le comman-
»> dement du ro i, fi elle n’eft de juftice, ne la fcel-
» ferez point, encore que ledit feigneur le com-
» mandât par une ou deux fois, mais viendrez par-
» devers icelui feigneur, & lui remontrerez tous
v les points par lefquels ladite lettre n’eft raifon-
» nable , & après que aura entendu lefdits points ,
» s’il' vous commande la fceller , la fcellerez, 8c.
» lors le péché en fera fur ledit feigneur , & non furr
» vous.-
Le roi donna quelque temps après à Duprat l’hôtel
de Vienne près des auguftjns, que Charles VIII
avoit acquis.
Le génie de ce Duprat juftQinznt décrié à b eaucoup
d’égards par la foule des Hiftoriens , ne fe ren--
fermoit point dans les bornes de la légiflation & de
la magiftrature, il embraffoit toutes les parties de
l’adminiftration, la guerre même étoit de fon reffort
; il traça plus d’une fois avec intelligence le plan-
I d’une campagne , . & dirigea de fen cabinet les opérations
des généraux.
François I voulant aller conquérir lTtalîe, & ne
voulant point rendre odîeufe l’époque de fon avènement,
en rétabliffant les impôts dont la fupprefi
fion avoit fait bénir l’avènement de Louis X I I , il
: -fallut y fuppléer par des reffources extraordinaires,
auffi promptes qu’efficaces, Duprat fut chargé d’en
trouver; celle qu’il trouva, fut d’introduire la v é nalité
des charges dans les pariemens même«-