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tique'de ce fu je t, le t’rtit'erOif en Smi de l’innocence
& de l’infortjme '] en ennemi des tyrans 8c
des opprefleuirs ajoutons, 8c en bon poète , fe-
roit le premier & le plus lu- des poètes épiques.
Pour l’hiftorique, Voye^ l’article A rc (Jeanne d’ )
dans ce Dictionnaire.
• .ü^ifcflierj'n'efeler^woixiue dut*
Peur s’offrir diras la pucellêv
Boileau a raison il y a plufieurs de ces vers
dans la Pucelle-j- 8c en général on peut remarquer
que Chapelain 8c les autres poètes de ce temps,;
reflèmblenr prefque. tous à Corneille, quand il n’eft
pas bon ; ils ont fa fierté quelquefois familière , on
lent qu’ils font de fon école , & qu’ils l’ont pris :
pour modèle ; ils. n’en imitent gu ères que les dé>
iauts, c’eft afiez lnfagè dès imitateurs.'
Que n’éeriE-il eîi profe?
Boileau a encore raifon puifque Chapelain a ete
le rédaéteur des fentimens de l’académie fur le Gid ;
ce n’efi pas que cet ouvrage cité avec raifon comme
un modèle de critique littéraire, foitabfolnment
irréprochable pour le :,goût.; La critique en efi fou-
vent trop févère & -meme injuft© ; ce n’eft pas
non plus que le ftyle- çn foit excellent La proie
avoit encore alors ce caraâère trop périodique,
trop nombreux, trop Cicéronien , que les premiers
bons écrivains, Balzac & les folitaires de Port-
Koyal lui av-oient imprimé. Des parenthèfes trop
fréquentes, des phrafes trop long-temps fufpendues
embarralfoient 8c ralentiflbient la marche d’une
langue dont la précifion & la clarté'dévoient faire
le principal mérite. Mais enfin cet ouvrage efi
raifon nablement écrit, raifonnablement penfé ; il
contient des vues fines, des principes excellens,
de juftes critiques , de juftes louanges ; il témoigne
& infpire par-tout un grand refpeâ pour ce Corneille
que le cardinal dé Richelieu vouloit rabaiftèr
6c humilier ; jamais déférence pour la tyrannie d’un
bienfaiteur nç fut moins;aveugle 8c moins lérvile ;
fc’eft beaucoup fans doute d’avoir tourné ainfi au
profit des moeurs, du goût & de la liberté académique
un ouvrage commandé par la pafîion &
par l’injuftice.
Tandis qne Chapelain cfoit juger Corneille,. ;
A dit M. de Voltaire ; il a ofé du moins-rédiger
le jugement de fa compagnie qui l’en avoit
chargé 8c dont il fut en cette occafion un digne.
6c heureux interprète.
Il avoit du goût ; cet ouvrage en fait fo i, &
c’eft par-là que fe réfout le problème de fon ancienne
réputation ; il avoit da goût ; ôii eh a fou-;
vent d’eux ,~ l’un pratique pour fes propres ouvrag
e s , l’autre théorique pour ceux des autres ; le
premier efi toujours néceffairement-rempli d^dul-
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genre ,- & fe tflefure afiez exactement fur l’étendue
du talent ; le fécond efi plus févère 6c par.con-
féquerrt plus pur ; Chapelain avôit vraifernblable-
ment ces deux goûts ; avec l ’un il s’eft permis la
Piicelle ; avec l’autre il a critiqué le Cid;
Il y a des beautés dans une ode de Chapelain au
cardinal de Richelieu. - <
Quant au perfonnel de Chapelain il étoit aùm
ridicule que fon talent poétique étoit borné ; il étoit
d’une avarice fordide 8c ce qtii en étoit la fuite, d une
négligence indécente dans fon extérieur. Il portoit
dans le s jours les plus chauds de l’été ,-un grand
manteau bien1 épais, pour cacher un habit plein
de pièces 8c de coutures. Il prenoit pour pretexte
qu’il étoit indifpofé. Bon, lui dit un jour Conrart,
cefl votre habit qui T efi. On trouve dans les oeuvres de
Boileau la parodie de quelques fcènes du C id , intitulée
:• Chapelain décoiffé, 8c la Métamorphofe de
la perruque de Chapelain eh cometè, fur quoi Fure-
‘ tière ©bferva qu’elle y gagnoit une chevelure. Chapelain
,• avec dé Fefprit oc même des vertus , fe
rendoit ainfi l’objet de la rifée publique. On lui
trouva cinquante mille écus à fa mort arrivée en
^CHAPELET DES TU R C S , {Hiß mod. ) Il ne
faut pas croire que lés Catholiques foient les feuls
qui fe fervent du Chapelet dans quelques-unes de
leurs prières particulières : les Turcs en ont pareillement
, mais ils fönt differens de^ ceux des
Chrétiens. Le chevalier de la Magdelaine, qui a
été long-temps leur efclave, marque que ce Chapelet
, qu’ils ont toujours ou le plus fouvent fur
eux , efi eompofé de’ quatre-vingt-dix-neuf gr-ains ,
fur lequel ils difent : Allabifmïlla, ethemdaïl ilia :
Alla hecher ; ce qui veut dire, le nom de Dieu foit
loué à jamais ; Dieu efi tout-puijfant. ( Miroir de
C empire ottoman, imprimé a Bâle eir 1677 ). Le pere
Dandini jéfuite , dans fon voyage du Levant,- jap?
i porte les paroles un peu différemment ; mais le
\ fefls en efi le même que de celles qui viennent
d’être marquées. Ce pere dit meméqü àux quatre-
vingt-dix-neuf grains les Turcs en ont ajoute un
centième ; mais un grain de plus ou de moins
dans un Chapelet turc-, ne doit point être un fujet
de d'ifputé. Je ne puis m’empêcher, au fujet de ce
Chapelet, de marquer deux fingularités : le Titien,
dans fon admirable tableau dès pèlerins d Emmaiis,
s’efi avifé de mettre un Chapelet à la ceinture de
l’Un d’eux ; 8c Raphaël, dans un tableau de S. Jean
qui prêche àii defert', donné un Chapelet au faint
rfrécurfeür : je 'ne crois' pas néanmoins que ^ ç ait
été ni que. ce foit l’ulage des Juifs de fe fervir de
Chapèleï pour fê foiivènir de prier Dieu. (a ){A . R .)
CFIAPELLE ( C l a u d e -Em m a n u e l L u il l ie r ,
d it. Chapelle) (M jl/ ilù . mod.), fils naturel de
FrançoisLuillïer, maître des comptes ; hommelibre,
philofophe heureux ,refpgit a im a b le ivrogne , qu on
trouvoit alors de bonne compagnie, 8c que ce feul.titre,
en excluroit aujourd’hui. Invité à dîner chez le grand
Condé, il préférait de s’enivrer aved des incom
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nus qu’il trouvoit, au cabaret, 6c -il s’exeufoit en j
difant, qu’en vérité c’étoiem les meilleures gens du \
monde, 8c que la préférence étoit due à ceux qui ■
étoient le plus fans façon. _
Un ennuyeux, contre qui on .avoit fait des couplets,
8c qui en foupçonnoit Chapelle, affeétoitde
dire 8c de redire en fa préfence, qu’il voudront en
ço-nnoître l’auteur pour avoir la fatisfaêlmn do lui
donner cent coups de bâton ; ce propos rebattu fati-
euoit tout le monde; ..Chapelle moins bleue de la
menace, qu’ennuyé de là répétition, s’approche de
lui, tend les épaules 8c dit : donne donc vite & va-t-en. ...
On fent qu’un pareil homme devoir être d’une finr
eularité tort piquante. Il étoit, dans la converfation;,
d’une éloquence irrégulière 8c abandonnée^commefa
conduite, qui produiloit louvent un grand effet. On
en conte! un trait qui nous paroît un peu fufpevt:
il étoit feul àfbuper avec uiie demoMeilé Chocca*s,
fille d’efprit, à laquelle il étoit attaché. Sa, femme de
chambre entend tout d’un coup des pleurs ,8c des
gémiffemens qui lui font craindre qu’il ne foitarrivé
quelque grand malheur ; elle entre toute effrayée,
6c. ce n’eft qu’à travers, mille fangiots qu’ils .parviennent
à lui faire qntendr.e, que. Chapelle s’étant
échauffé 8c attendri fur le fort do Pindare, le fameux
poète lyrique, mort, difoit-il, yiétime de l’ignorance
des médecins, c’étoit cette affligeante nouvelle
qui leur faifoit verfer tant de larmes. Il faut
avouer que cettte hiftoire efi affez infipide ; on ne rit
point de voir pleurer la mort de Pindare, au dix-
feptième fiécle de l’ère chrétienne. Nous foupçorir
nons, quoique nous ne trouvions cette conj-eéture
nulle part, que cette demoifelle Chocçars étoit la
maîtreffe de Chapelle ; qu’il s’étoit élevé entre eux
un de ces orages fi fréquens entre les amans, 8c j
qu’il finiffoit comme iis finifiént, par l’attendriffe- ;
ment, ( ut adfolet in atnore & ira jurgia,preces, expro-* ■
patio, jatisfaÜio. Tac.
Amantium ira amons redintegratio. T erence ).
que la femme de.chambre étant entrée alors, ils s’é- j
toient contentés de la défaite la plus groflière, feule- j
ment, pour lui faire fentir que fon zèle étoit in diferet ;
8c qù’il ne falloir point de tiers entre des amans qui j
pleurent. Mais enfin en prenant cette hiftoire à la j
lettre , 8c comme elle efi rapportée par-tout, elle j
auroit cependant un côté intéreffant, celui de mon- |
trer le pou voirde l’éloquence fur l’imagination. L’jiif- ]
toire connue du foupet; d’Àuteuil, chez Molière ; efi
encore un grand effet de l’éloquence1 de Chapdle,
aidée des vapeurs du vin ; mais é’eft la raifon fu'pé-
rieure de Molière, c’eft'fa profonde eonnoiffance des
hommes, qui jouent le beau rôle dans cette hiftoire.
Boileau Racine, la Fontaine, les plus beaux génies du
temps étoient de ce fouper, Molière, qui ne folipoit
point, 8ç que fa famé- qbligeoit à des ménagemens
étoit allé fe coucher. Chapelle s’enivre, s’anime, fait
un difeonrs éloquent fur les chagrins 8c les contra- «
diétions de la v ie, furie malheur de naître, le mal- (
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« -heur plié»'grand de vivre , & rhoniïeifr demoulir à
■ fon gré par-un choixiibre 8c f-éffechi ; on leïe.eohdë,
[ .on rappelle les pàfffagès des ^hilofophes anciens qui
-ont le plus médit de la vie ; on prend en 'èenfé-
queticeTe parti d’aller fe noyer, la Seine étoit
fous la main 8c -y invitoit, Le jeune Baron, élève de
Molière, feul dé fang-froid alors, s’effraye de cette
fermentation 8c-'court éveiller Molière. Molière
arrive : Eh mes amis que vous ai- jè'donc fait poür
être ainfi traité ; pour être oublié dé-vous dans ma
propre maifon?; Vous allez faire une aétion- fublime ,
qui vous affure l’immortalité, 8c vous ne daignez pas
m’affbcier à votre gloire, vous me jugez indigne
de mourir avec mes amis (1) 111 a raifon , dirent les
amis, c’ét-oit lui manquer. Viens, Molière, marche
à notre tête comme le maître de la maifon 8c le
plus fage d’çptre nous. — Doucement, mes amis.,
eh quoi! cette aéfion glorieulè, qui va vous égaler
aux Catons 8c aux Brutus , c’eft en fècret, c’eft dans
: les' ténèbres que vous allez la Faire T vous en voulez
perdre 8c la gloire 8c le fruit ! vous voulez
que cet exemple ne ferve à perfonne , qu’on
l’attribue au hafard, à un accident, à un naufrage.
Non, non e’eft demain , c’eft à la clarté descieux,
c’eft à la face de l’univers 8c d’un peuple d?ddixii-
rateurs qu’il faut confommer cette grande oeuvre,
— Il a toujours raifon 1 s’écrièrent les amis, il entre
mieux que nous dans l’efprit de la chofe. On s’alla
coucher ; le lendemain on ne put que rendre
grâce à la fageffe de Molière, ce fut le triomphe
de la raifon fur l’éloquence, 8c du fang-froid fur
Tivreffe.
Les amis de Chapelle lui faifoiént continuellement
la guerre fur ce malheureux penchant à t'ivrognerie ;
il feignit un jour de faire une attention férieufe à
leurs difeours, ils efpérèrentde le convertir. Chapelle
les mène au cabaret pour fe pénétrer, difoit-il,
plus à loifir de leurs raifons 8c s’abreuver de . leurs
reproches; il ne ceffe de'les écouter qu’après les
avoir enivrés.
Boileau le confultoit volontiers fur fes ouvrages.
Un jour, fatigué dès objections de Chapelle,.il ne s’en
tira qu’en lui difant '. tu es ivre. Moins ivre de vin ,
lui dit Chapelle, que toi fie tes vers. C ’étoit au plus
fage 8c au plus froid des bons poètes qu’il parloit.
Q u’on juge des autres.
La critique que Cïïâpelle faifoit de la Bérénice de
Racinf 1» en y appliqiiant un refrein d’une chanfon
du pont-neuf, eft plaifante, 8c montre le défaut
du fujet. Ce refrein étoit :
Marion pleure, Marion crie,
Marion veut qu’on la marie.
( i ) Co mitepine-ßprorem.
Sprevißi moriens ? eadem me adfata. yocajfes. . ...
E cidera hora tidißet. . . . .
■ Eft hic. efi animus lucis contemptor, & i/lum
Qui vit à bene eredat ci,ni } qub tendis , honorem.