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& ne pouvant jamais fe faire entendre. Que peut, 1
difoit-il, la raijon avec un filet de voix, contre une
gueule comme celle-là?
FOURMONT. ( Hifl. litt. mod.) Etienne &
Michel, frères, tous deux prodigieulèment favans
dans les langues, fur-tout dans les langues orientales
, & même dans la langue chïnotfe, particuliérement
l’aîné; tous deux membres diftingués de
l’académie des belles-lettres, ne vivant que pour
l’étude, & n’ayant aucun ufage du monde. On
connoît de l’aîné la Grammaire chinoife & les Medi-
tationes Sinicoe. On connoît aufli de lui, des Réfie-
xtons critiques fur les hïfoires des anciens peuples,
]ufqu'au temps de Cyrus, Le cadet, non moins étonnant
que fbn frère , a voit été jufqu’à vingt-cinq
ans fan.s la moindre éducation, & n avoit pas encore
à cet âge les premiers élémens de la langue latine.
Son frère, qui pofledoit toutes les langues favantes,
crut que ce feroit allez pour Michel d’apprendre le
latin & le grec , & ne voulut jamais l’initier dans
les langues orientales. Michel les apprit furtivement,
& en fe cachant de lui; & un jour que
chez fon frère., dès favans étoient embarrafles Ifur
l ’interprétation d’un paiTsge hébreu , il lui échappa
de dire qu’il n’y trouyoit aucune difficulté ; fon
frère voulut le faire taire, comme un mauvais plaidant,
qui troubloit une difeufiion férieùfe par une
facétie inffpide : Michel alors l’accabla des preuves
inattendues de fes connoiffances en hébreu; bientôt
elles s’étendirent jnfqu’au chinois , après avoir
embraffe l’arabe & l’éthiopien. En 1 728, Michel
Fourmont fut envoyé dans le Levant ayec M. l’abbé
Sévin, & en rapporta une immenfe colleéfion
d’infçriptions de tout genre, recueillies dans toute
la Grèce.
Mais quel fut pour ces deux frères ffudieux, le
fruit de tant de travaux forcés ? La leéhire afîidue
de livres & de manuferits de toutes fortes de
ça ratières , affoiblit de bonne heure la vue à l’aîné,
le rendit fujetà des fluxions, dans l’une defquelies
il fut totalement aveugle. Ce malheur triompha de
fa confiance, il verfa pendant huit jours des torrens
de larmes; & ce fut peut-être , dit M. Fréret, ce
qui liâta fa guérifon. Mais , en 17 34 , à cinquante
& un aps, il eut une première attaque d’apoplexie;
en 1741 il en eut une fécondé, qui lui ôta pour un
temps l’ufage de la parole , & lui laîffa pour toujours
une difficulté d’articuler, plus ou moins
grande, fuivant les temps.; enfin , en 1745 il en
ç.u> une troisième , à laquelle il fuccomba, le
19 décembre , dans fa foixante-troifiême année :
il étoit né le 23 juin 1683 , à Herbelay, village
peu éloigné de Paris.
La carrière de Michel fut efleore plus courte,
îî mourut un mois & demi après fon frère , le
4 février 1746 ; n’étant né que le .28 feptembre
1650 au même lien d’Herbelay. Ï1 mourut aufli j
d’une attaque d’appplcxie après avoir beaucoup
F O U
& long - temps fouffert de la gravelle, dans le
cours de fa vie.
FOURNI ou FO U R N Y ', (H o n o r é C a ille
d u ) ( Hiß. litt, mod. ) auditeur des comptes à Paris,
eft connu pour avoir donné au P. Anfelme ,
-dès corrections nombreufes & utiles pour fon
Hifioire des grands officiers de la' couronne , qu’il a
d’ailleurs continuée , & qui l’a été encore après
lui, par les PP. Ange & SimpÜcien , auguftins
dé chauffes,, confrères du P. Anfelme. Du Fourni
eft mort en 173 t .
FOURNIER, ( P ier re-Sim o n ) {Hifl. litt.mod.)
graveur & fondeur de cara&ères célèbres, a très-
bien écrit fur l’art qu’il a perfectionné. On voit qu’il
poffédoitparfaitement fa matière, & comme artifte
& comme {avant. Sa table des proportions., qu’il
faut obferver entre les caractères, où il détermine
leurs hauteurs & fixe leurs rapports, fut une
découverte effentielle aux progresse l’art; elle
parut en 1737.' Mais fon ouvrage le plus importai.t
eft fon Manuel typographique, utile aux gens de
lettres, & à ceux qui exercent les, différentes parties
de l'art de l'imprimerie. 2 vol. in-8°,très-belle édition.
Né à Paris en 17 12 , mort en 1768.
FOURRIER, f. m. ( Hifl. mod. ) C’eft ainfi
qu’on appelle des officiers de la mai fon du roi,
quilorfque la cour voy ag e, ont foin fle retenir
des charriors pour tranfporter les équipages &
bagages du roi : c’eft ce qu’on nomme fourrier
de là cour.
Dans l’infanterie françoife il y a aufli des fol-
cats nommés fourriers, chargés de diftribuer à
leurs camarades les billets de logement, lorfqu’ils
arrivent dans une ville. Ces fourriers marchent
toujours en avant du corps. Dans la cavalerie on
les nomme maréchaux-cfes'-logïs. { G . )
FO X , {Hiß. <£Angl.) nom célèbre dans l’hiftoire
des fectes de l’Angleterre.
1°. Jean Fo x , calvinifte fameux dans un temps
où il ne faifoit pas encore sûr de l’être, fut obligé
de quitter l’Angleterre, fous Henri VIII ; il y rentra
fous la reine Elifabeth 3 il eft principalement connu
par l’ouvrage intitulé: AÜa & monumenta ecclefiot,
3 vol. în-fol.
On a de lui aufli des ouvrages d’un genre bien
différent, des comédies.
2P. Mais l’homme de ce nom, le plus célèbre, eft
George Fox, le patriarche des [Quakers. « C’étoit,
» dit M. de Voltaire , un jeune homme de'vingt-
» cinq ans , de moeurs irréprochables & fainte-
» ment fou. Il étoit vêtu de cuir, depuis les
» pieds jufqu’à la tête ; il alloit de village en
» village, criant contre la guerre & contre le
» clergé........ Il fu t.. . mis en prifon. On le
» iy>ena à Darby devant le juge de paix. Fox
f
F R A p
» fe préfenta au juge avec fon bonnet de cuir
n fur la tête. Un fergent lui donna un grand fouf-
» flet, en lui difant : gueux, ne fais-tu pas qu il
n faut paroître 'tête nue devant monfieur le juge ? Fox
» tendit l’autre joue, 8c pria le fergent de vouloir
» bien lui donner un autre foufffet pour l’amour de
» Dieu. Le juge de Darby voulut lui faire prêter
» ferment avant de l’interroger. Mon ami, fâche ,
» dit-il au juge, que je ne prends jamais le nom de
» Dieu en vain. Le juge voyant que cet homme le
» tutoyoit, l’envoya aux petites-maifons de Darby
7) pour y être fouetté. George Fox alla en louant
» Dieu à l’hôpital des foux, où l’on ne manqua
». pas d’exécuter à la rigueur la fentence du juge.
» .Ceux qui lui infligèrent la pénitence du fouet,
» furent bien furpris, quand il les pria de lui appliquer
7) encore quelques coups de verges pour le bien
77 de fon ame. Ces meflieurs ne fe firent pas prier:
77 Fox eut fa double dofe, dont il les remercia très-
» cordialement ; puis il fe mit à les prêcher. D’abord
77 on rit, enfuite on l’écouta ; & comme l’ehthou-
77 ftafme eft une maladie qui fe gagne, plufieurs
» furent perfuadés, & ceux qui l’avoient fouetté
» devinrent fes premiers difciples........Un jour,
77 étant mis au pilori, il harangua tout le peuple
». avec tant de .force, qu’il convertit une cinquan-
» taine d’auditeurs, & mit le refte tellement dans j
3* fes intérêts , qu’on le tira en tumulte du trou ou j
» il étoit: on alla chercher le curé anglican, dont
» le crédit avoit fait condamner Fox à ce fupplice, *
» 8c on le piloria à fa place............
» Fox fe croyôit infpiré ; il crut par conféquent
>> devoir parler d’une manière différente des autres
9) hommes. Il fe mit à trembler, à faire des contor-
77 fions & des grimaces, à retenir fon haleine, & à
97 la pouffer avec violence : la prêtreffe de Delphes
» n’eût pas mieux fait. En peu de temps il acquit
» une grande habitude d’infpiration, & bientôt
» après, il ne fut plus guère en fon pouvoir de
77 parler autrement. Ce fut le premier don qu’il
» communiqua à fes difciples. Ils firent de bonne
» foi toutes les grimaces de leur maître ; ils trem-
77 bloient de toutes leurs forces au moment de l’inf-
» piratiôn. De-là.,. le nom de Quakers, qui fignifie
» Trembleurs.77 Fox, en 1662, porta fa feéte en
Amérique ; il écrivit à tous les fouverains de
l'ancien & du nouveau monde , pour la leur faire
embraffer. Il revint en Angleterre où il mourut
en 1681.
FRACASTOR, (Jérom e) {Hifl. litt,mod.) poète
& médecin, 8c célèbre à ces deux titres ; c’eft l’auteur
du poème intitulé : Sip/iilis, five de morbo gallico.
Comme médecin, il fervit la politique. Le pnpe
JPaul III, voulant transférer le concile de Trente,
d’Allemagne en Italie, pour en être plus lemaître,
.employa Fracaflor, qui infpira aux pères la crainte
.d’une maladie contagieufe ce fut alors que le
concile fut transfère pour un temps à Bologne.
Qn conte des çîiofes affez meryeilleufes de l’en-.
Hifioire. Tome ƒƒ. Seconde part.
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fance de Fracaflor ; on dit qu’il naquit avec les
lèvres adhérentes', & qu’il fallut qu’un chirurgien
les féparât avec un rafoir. On conte qu’étant dans
les bras de fa mère , elle fut écrafée par la foudre
fans qu’il en reffentît aucune atteinte. Il étoit né
à Vérone vers l’an 1483 , il mourut près de cette
ville en 1553: Vérone lui érigea une ftatue fix
ans après fa mort. Son poème de Siphilis a été
traduit en françois en 1753.
FRAGUIER, ( C l a u d e - F r a n ç o is ) {Hifl. litt;
mod.) fils de Florimond Fragüier, comte deDenne-
marie, capitaine aux gardes, & petit—fils de Denne-
marie, officier au même régiment, dont Sarrazin
fait une mention honorable dans fon hifioire du
liège de Dunkerque en 1658. Il fut onze ans
jéfuite, & ayant quitté cet ordre, il travailla au
journal des favans avec beaucoup de diftinâion,
& fit preuve d’une grande & belle littérature. Il
fut de l’académie des inferiptions & belles-lettres:
il connoiffoit ,-aimoit, & favoit imiter les anciens*
C’eft à lui qu’il arriva de fouligner Homère d’un
bout à Tautre, en voulant ne fouligner que les
beaux endroits, c’e ft-à-dire, les endroits remarquables
par leur beauté.
Il prit parti dans la querelle des anciens & des
modernes, & fit beaucoup d’épigrammes latines
contre les détraâeurs des anciens.
Quoiqu’il fût principalement & prefque uni-
quemènt eélèbre par des poéfies latines, il fut de
l ’académie françoife. Il y fut élu deux fois, parce
qu’il y eut une irrégularité dans la preifîîère élection
; les académiciens n’étoient qu’au nombre
de dix-fept , & l’article V I des réglemens exige
qu’on foie au moins vingt pour une éleélion. M. le
comte de Pontchartrain, fecrétaire d’é ta t, écrivit
à ce fujet, le 12 décembre 1707, à l’académie, une
lettre qui fut inférée dans fes' regiftres, & par laquelle
il déclare, au nom du roi, l’éleéfion nulle,
comme contraire aux réglemens, & il ajoute:
& fa màjeflé m’a commandé de déclarer en même
temps que ce feroit mal expliquer cet ordre, que de
croire que (e roi donne aucune exclufion à M. l’abbé
Fragüier dont le mérite efl connu , rien n’étant plus
contraire à l’intention de fa majeflé.
Cependant M. l’abbé Fragüier n’eut pas la place
de M. l’abbé Gallois, à laquelle il avoir d’abord
été nommé ; cette place fut donnée à M. Mongin,
évêque de Bazas: mais celle de M. Colbert, archevêque
de Rouen, ayant vaqué peu de temps
après, M. l’abbé Fragüier fut élu plus régulièrement.
M. l’abbé d’O liv e t, qui fut l’éditeur des
poéfies de M. l’abbé Fragüier, comme de celles de
M. Huet, dit qu’en cette occafion : « l’académie
77 françoife avoit choifi pour un de fes membres,
» un favant quel’académie d’Athènes eût volontiers
77 choifi pour fon £hef après la mort de Platon. »
L ’éloge eft. peutrêtre un peu fort; mais ce qui
I femble le juftifier, e’eft que lç plus eftimé des