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» dans un grand nombre de villages, n’avoient
» point été fuffifamment appelles par une {impie
» affignation, 8c qu’elle devoit leur être lignifiée
»* au prône de chaque paroiffe ; çe qui lui ht pb-
» tenir un délai allez conficlérable. Lprfqu’il fut
» expiré fans que les parties euffent comparu, il
» entreprit de les excufer far la longueur du
» voy ag e , fur le danger évident de mort auquel
» ils étoient expofés de la part des chats leurs
ennemis jurés qui les guettoient à tous les paf-
j» fages ; enfin il remontra les inconvéniens &
” l’injuftice de ces proferiptions générales qui en^
v veloppent les enfans avec les pères, les inno-
» cens avec les coupables, & fit fi bien valoir
v toutes les raifons , foit d’équité naturelle, fo‘ t
» de droit pofitif, qui étoient favorables à fa caufe ,
» qu’il acquit dès-lors de la célébrité, §ç jeta les
n fondemens de fon élévation. Dans le temps
» qu’il pourfuivoit avec chaleur l’exécution de§
» arrêts du parlement d’A ix contre les Vaudois,
!> d’Allens , gentilhomme provençal, alla le trou«
i> v e r , 8c lui remettant fous les yeux cet endroit
» de fon ouvrage : penfez-vous, lui dit-il, qu’un
» premier préfident doive moins qu’un avoçat ref-'
» peéter l’ordre judiciaire,8c en obfèrver les formes,
s» ou croyez-vous qu’une focié.té d’hommes mé-
a» rite moins d’égards qu’un vil amas d’infeétes ?
» Le préfident rougit, 8c sMl ne désavoua pas
jy publiquement fes premiers arrêts, il en fùfpen-
3> dit, tant qu’il v é cu t, l’exécution ». ( Nouv. hifl.
de Fr. t&m. z6 .)
Et tout cela, non pas par des principes d’humanité
ni de juftice, mais parce qu’il avoit été
férieufement l’avocat des rats, dans l’ofHcialité
d’Autun , comme l’intimé l’eft du chien Citron
dans les Plaideurs , 8c comme la. Fontaine l’eft
tour-à-tour de dame Belette 8c de Janot Lapin,
dans la fable intitulée : le Chat, la belette & le petit
Lapin. Il eft heureux du moins que d’une pareille
folie, dune parodie fi dérifoire de la juftice, qui
fe faifoit pourtant par refpeâ pour la juftice, il
ait réfiilté une moralité utile pour un moment
au genre humain.
Les autres ouvrages de Chajfanée font un commentaire
latin fur diverfes coutumes de la France,
notamment fur celles de Bourgogne ; des eonful-
tations fur différentes matières de droit, auffi en
latin , intitulées : Confilia ; des Epitaphes des rois
de France , depuis Pharamond jufqu à François I ,
en vers, avec leurs effigies. Le préfident Bpuhfer a
placé l’éloge de Chaffianée au-devant des commentaires
fur les coutumes , édition de 1717. Çhajfa-
née étoit né près d’Autun en 1480 ; il mourut en
1541.
CHASTELET (G abrielle - Emilie de Breteuil
, marquife du) {Hiß. litt.mod.). Les femmes
beaux-efprits ne font plus rares, 8c peut-être recommencent
elles à ne l’être plus affez ; mais une femme
mathématicienne 8c géomètre, traductrice & commentatrice
de Leibnitz 8c de Newton, en état de les
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entendre 8c de les faire entendre aux autres, une
femme qui pourroit divifer jufqu’à neuf chiffres par
neuf chiffres, de tête 8c fans fecours, avec une
rapidité prefque imppffible à fujyre aux calculateurs
les plus exercés, une telle femme feroit encore
aujourd’hui un phénomène. C ’en étoit un bien plus
étonnant il y a cinquante ans, 8c l’étonnement
redouble, quand on fonge qu’il s’agit d’une femme
vivant beaucoup dans le monde, 8c à Paris, 8c à
la cour, y paroiffant comme les autres, profondément
remplie de bagatelles, n’y laiffant pas foupçonner les
profondes études qui l’oçcupoient. C ’eft à elle que
M. de Voltaire adreffe fes élémens de la philofophie
de Newton.
Tu m’appelles à toi, vafte & puiflant génie ,
Minerve de la France , hnroQrtelle Emilie , &c.
c’eft à elle qu’il adreffe fon Effiai fur l'hifloire générale
; c’eft à elle qu’il adreffe l’êpitre fur la calomnie.
Vous êtes belle ; ainfi donc la moitié
Du genre humain fera votre ennemie ;
Vous pofTédez un lu Mime génie,
On vous craindra ; votre tendre amitié
Sera fidèle , & vous ferez trahie , &c.
C ’eft: elle enfin qu’il a tant célébrée, 8c pendant fi*
vie 8c après fa mort. Une femme qui vivoit dans
fa fociété, qui paffoit pour être fon amie, en a fait
un portrait qui n’étoit pas d’une amie, 8c qui ne
reffembloit pas à ceux qu’en ont fait M. de Voltaire
8c M. Clairault ; cette femme étoit bien reconnue
auffi pour avoir beaucoup d’efprit, mais d’un efprit
fait pour être le fléau des prétentions 8c des ridi«*
cules, non pour atteindre à ces hautes connoiffances, N
incapable de pardonner le plus légér défaut de grâces-,
le plus léger tort de manières , en faveur des fpécu-
lations les plus fublimes 8cdes talens les plus rares,
capable même de regarder ces fpéculations & ces
talens, fur-tout dans une femme, comme des travers
8c des ridicules. Ces fortes d’efprits n’étoient pas
les juges uaturels d’un génie tel que celui de madame
du Châtelet ; il vaut mieux nous en rapporter aux
éloges de M. de Voltaire 8c deM. Clairaut, 8c remarquer
même en fa faveur cette réunion : quand l’amitié
leur auroit fait illufion, cette illufion même,
8c le principe qui la faifoit naître lui fornieroient
encore un affez beau titre de gloire. Elle étoit fille
du baron deBreteuil, introducteur des ambaffadeurs,
confine germaine du Miniftre de la guerre, foeur
de M. l’abbé de Breteuil, mort chancelier de M.
le duc d’Orléans, tante de M. le baron de Breteuil,
aujourd’hui fecrétaire d’état au département de Paris.
Elle avoit époufe le marquis du Châtelet-Lomont,
lieutenant-général des armées du roi, d’une maifon
illuftre. M. ifo Châtelet d’aujourd’hui eft fon fils. Elfe
étoit née en 1706. Elle eft morte en 1749 à Lunéville,
d’une fuite découches.
Il refte d’elle les Infiitutions dephyflque adreffees
à fon fils, 8c la traduction des principes de Newton,
qui a paru après fa mort, revue & corrigée par
M. Clsiraut.
CHASTRE ou CHATRE (de la) {Hifl. de Fr. ) ,
nom d’une grande maifon duBerry,quiaproduitdeux
maréchaux de France, père 8c fils, Claude, mort
le 18 décembre 1614, 8c Louis,, mort en 1630,
tous deux gouverneurs du Berry ; un archevêque
de Bourges, célèbre dans le douzième fièele ,
nommé Pierre, qui eut part à toutes les affaires
de fon temps, 8c dont il < ft parlé avec éloge dans
les épîtres des papes Eugène III, Adrien IV 8c
Alexandre I I I ; dans celles de faint Bernard, de
Pierre-le-Vénérable 8c dans toutes les chroniques
du temps. On voit dans la, cathédrale de Bourges,
l’un des plus beaux temples d’architeéhire gothique
, les tombeaux de ces trois perfonnages, 8c
en tout le nom de la Châtre eft le plus grand nom
du Berry. Plufieurs d’entre eux en ont été gouverneurs
; ils y ont poffédé, pendant plufieurs
fiècles, la terre de Nancey, à quatre lieues de
Vierzon.
L’archevêqùe de Bourges , Pierre , avoit un
oncle ou coufin, cardinal & chancelier de l’églife'
romaine, fous le pape Innocent II. Il fe nommoit
Aimeric , 8c il eft .célèbre auffi dans les commen-
eemens du douzième fièele par fon mérite 8c fon
crédit à la cour de Rome.
On voit plufieurs la Châtre capitaines des gardes-
du -corps, 8c chevaliers des ordres du ro i, auffi-
tôt qu'il y a des gardes-du-corps 8c des ordres du
roi.
On en voit un , grand fauconnier de France en
1445 8c 1450.
Gafpard de la Châtre , feigneur de Nancey , chevalier
de l’ordre du roi 8c capitaine des gardes-
du-corps fous Charles I X , fe fignala au fiège de
Rouen en 1562, aux batailles de Dreux, de Saint-
Denis, de Jarnac . de Moncontotir ; une bleffure
qu’il avoit reçue à la bataille de Dreux, s’étant
rouverte en 1576, il en mourut.
Edme, marquis de la Châtre, colonel général
des Suiffes, mourut en 1645, des blefiwres qu’il
reçut à la bataille de Norlingue. Son fils, Louis,
gouverneur de Bapaume , fut tué à l’expédition de
Gigeri em Afrique, en 1664.
Précédemment encore , Jacques , feigneur de
Sillac , capitaine des gardes du duc d’Anjou
(Henri III), d’une autre branche de la maifon de I
la Châtre, avoit été tué à la rencontre de Meffi-
gnae, le 25 oétebre 1568.
CHATEAU BRIANT ( Voye^ F o ix ) . v
CHATEAU-BRUN (Jean-Baptiste-V ivien
de) ( Hifl. lut. mod.), auteur d’une tragédie de I
Mahomet I I , jouée en 1*744 ; des Troyennes , de
Philottète. Il eut la patience, remarquable dans un
poète, de garder ces dernières pièces quarante ans
dans fon porte-feuille pour ne pas déplaire à feu
M. le chic d’Orléans, dont les principes n’étoient
pas favorables au théâtre, 8c auquel il étoit attaché |
en qualité de maître- d’hôtel ordinaire. Il eut part
à l’éducarioh de M. le duc de Chartres. Il étoit né
à Argoniême en 1686. Il mourut en 1775. C ’étoit
un des hommes les plus doux 8c les plus fages qui
aient cultivé les lettres. Là modeftie étoit chez
lui dans un degré inconnu à tous les poètes, il eft
vrai qii’il rt’étoit pas affez poète ; il avoit été reçii
à l’académie frànçoife en 175 3. Une douceur aimable
, une piété fincère le rendoient cher 8c refpee-
table à tous fes confrères. Des dévots , tels que M.
de Château-Brun, M. Bonamy ( Voyeç l’article
Bo n aMy ) , M. de Foncemagne ( Voye^ l’article
Foncemagne ) , font bien fürs de tous lés fùffrages;
les dévots qui perfécutent 8c qui calomnient,
cherchent en vain à faire caufe commune avec
ceux-là* Ils ont le même Dieu, mais ils l'outragent.
CHATEAU-NEUF ( Voye^ à l’article A ubes-
p in e ) , le garde-des-fceaux de Çhâteau-Neuf La
terre de Château-Neuf fur-Loire, appartenant à là
famille de Phelypeaux, fi abondante en miniftres,
a donné fon nom à quelques-uns d’entre eux , particuliérement
au marquis de Château-Neuf, miniftre,
aïeul de madame de Maurepas 8c de feu M. le duc
de la Vrillière.
CHATEAU - RENAUD (F rançois - L ouis
Rousselet, comte de) , vice-amiral en 1701,
maréchal de France en 1703 , chevalier des ordres
du roi en 1705 , mort en 1716, à 80 ans, homme
de mer diftingué: il avoit été blefte en 1664, à
l’expédition de Gigeri 5 il avoit purgé la Méditerranée
de Corfaires barbarefques; il avoit conduit,
en 1689 , un convoi en Irlandé, 8c en avoit ramené
l’année fuivante,après la capitulation de Limmerick,
les troupes françoifes, 8c dix-huit mille Irlandois.
CHATEAU-ROUX [Voye^ Ma il l y ).
CHATEIGNERAYE (François de V ivonne,
feigneur d e l à ) {Voye^ Ja r n a c , à l’article C h a bot).
CHATEL (Jean) ( Voye{ l’article G uignard ).
' CHATEL (du) {Hifl. de Fr.). 11 faut diftinguer
avec foin les deux Tanneguy du Chatel, oncle 8c
neveu, que plufieurs auteurs ont confondus. Dans
cette nuit effroyable du 28 mai 1418, où rifle-
Adam , chef de la fàéîion de Bourgogne, furprit
Paris 8c fit un fi horrible maffacre des Armagnacs,
Tanneguy du Chatel, alors prévôt de Paris, n’eut
que le temps d’aller prendre le dauphin (depuis
Charles V i l) dans fon lit, & de fe fauver avec
lui à la BaftilJe, puis à Melun. Charles VII lui
devoit donc la liberté, peut-être la vie ; car qui fait à
quels excès pouvoient fe porter les affaffins Bourguignons,
ou plutôt qui ne le fait pas, envoyant
ceux où ils fe portèrent? La voix publique accufale
même du Chatel d’avoir paffé toutes les bornes du
zèle en fervant fon maître par un crime. C’eft à lui
principalement qu’on impute le meurtre du duc de
Bourgogne, Jean, a Raffiné en 1419 dans une entrevue
fur le pont de Montereau-Faut-Yonne; on difoit
même qu’il çonfervoit, comme un monument précieux,
la hache dont il s’ètoit fervi dans cette occa