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EPICURE. {Hijî. anc.') Les opinions,.les fy fie m'es
ne nous regardent pas; nous ne parlerons que des
faits, nous n’examinerons donc point ici cette
queftion tant rebattue , fi Epicure fait éonfifler le
fouverain bien dans la volupté de l’ame , ou dans
celle des feus 3 & s’il faut dire les jardinsK)u l’étable
tËEpicurç,
£p icari de grege porcüm,
Epicure naquit l’an 342 avant J. Ci- à Garge-
tkim dans TAttiqne ; c’efi pour cela que Stace, dans
fes livres, l’appelle Gargettius auêlor & fenior
[Gargettius,
Délia a quas ipfe fuis digreffus Athcnis
Mallet deferto fenior Gargettius horto.
On raconte* que d'ans fes premières études, le
’grammairien qui Pinftrui:foiî~, récitant un vers*
«PHéfiodè, dont le fens efl que le chaos fut produit
le premier de tous les êtres, il demanda : 6* qui
le produisit? le grammairien répondit : j e j i ’en fais
rien , 6* ce rCefl pas mon affaire de* le favoir. ——» A
qui donc faut-il s*adreffer pour l’apprendre ?-----
Aux- philofophes.— Je vais donc chez les philofo-
phes ; & il fe livra des-lorsjà l’étude de laphilofophîe.
Ce fut dans- l’ifle de Samos qu’il paffa les années
xfè fon enfance ; Néoclès, fon père, & Cheref-
tratï^fa mère, ayant été de la colonie que les
Athéniens envoyèrent dans cette ifle , ce ne- fut
qu’à l’âge d’environ- trente-fix ans , & qu’après
«voir erré en divers climats, apparemment pour
g’inflruire r qu’il vint fe fixer pour toujours à
Athènes. Là il acheta ces jardins célèbres où il
fonda voluptueufement l’école de la volupté ,
quelle que fût cette volupté; il n’y a d’exemple
qans aucunê feéle, dans aucune fociété, ni d’un
jjareil refpeéï pour le maître, ni d’une pareille union
entre les difciplës ; ce qui paroît être favorable à
l ’opinion de ceux qui croient qu’il s’agifloit d’une
volilpté fpirituelle & céleffe ; lés voluptés du fiècle
excitent plus d’orages. Son école ne fe divifâ
jamais; fa. doélrine tut toujours un oracle auquel
on ne fe permit de rien changer. Cétoient des
rroupèV nombreufes d’amis qu’Epicure rafTembloit
dans fa ntaifon, & ilen'éroitle père le plus tendre,
lé plus chériv & le plus révéré; fa mémoite fut
long-temps dans une vénération particulière ; on
«élébrcit encore le jour de fa naiffance, du temps
de Pline le naturalise , c’efl-à*-dire plus de quatre
cents ans après fa mort , on fêtoit même le mois-
entier où* il étoirné.-Sonportrait fe trou voit par- j
tour»
Quelle que fûr fa doélrine*, iP paroît* que fa* j
«enduite éreir très-vertueufe ; Baylé a* dit dè'lur
ce5 que quelques peifonnes difent de Bayle lui-
mêirre: » Gn ne fauroit dite allez dé Bien dé l’Honnê-'
» teré dé fes moeurs, ni allez de mal dé fes
31 opinions fur la religion. Une infinité de gens
» fonnorthodoxesSc vivent mal r* lui au contraire*,.
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• & plufieurs de fes feélateurs, avoîentune mauvaiff
w doélriiîe, & vivoient bien »,
Un autre favant a dit A'Epicure à p'eiî près lat
1 même chofe, en retournant pour lui un vers do
Ju vénal : Epicurum opinione fardanapnlum , re floicif-
■ ftmurh , Bacchanalia SIMULASSE , E t CU RIO s'
vntissE. Un autre a dit encore que c’ètoit un
- floïcien prêchant la volnpté r
. Dam licet t liée clubs hominem yelit rffe beatitm y
Stolcus interca monlms ipfe fuit.
Il étoit même pieux, & il donnoitl’exem ple de l’afi
fiflanceaux temples, {voye^ f article d io c l e s ).
lui qu’on accufe généralement d’avoir admis des-
dieux fans providence, lui- que Lucrèce loue &
même en très-beaux v e rs , d’avoir eu le courage-
d’affranchir le genre humain du joug de 1%.
religion»
Humana ante oculos fende cùm vita jaceret
In terris opprejfa gravi füb Relligionc ! . . .
Primàm Graius Homo mortales tôlière contra.'
Eft oculos aafus primufqae cbfiftere contra :
i Quem nee fama Deïim , nec fulmina ,-nec minitantt
Murmure,c'omprejjit calum.
Epicure avoit beaucoup écrit, mais H ne nou?
refie aucun dé fes ouvrages ; comme il admet-«
toit des femmes au nombre de fes difciplës, la
fameufe Léontium*, courtifane d-Âtliènes , eutr
avec- lui Iss mêmes liaifonsque Ninon de Lenclos*
eut depuis avec les philofophes,- & les beaux-
efprits du règne de Louis XIV. On obferve que*
Léontium ne cefïà pas fon métier de courtifane
pour avoir adopté la doélrine d'Epicure ,-8u on en
tire des-eonféquences fâcheufescontre cette doélrine;,
mais tous les amis de Ninon dé Lenclos n’approu-
voientpasfes foibleffes & fes continuelles infidélités^
ils aimoient fon efprit & eflimoient fon caraélère*-
Léontium étoit vraisemblablement dans le même
cas ; elle efl refiée célèbre autant parles charmes*
de l’efprit, que par ceux de la figure & que par*
la licence de fes moeurs elle fbutint avec chaleur*
les dogmes de fon maître, elle écrivit contre
Théophrafle ; Cicéron vante fon flyle & fon efprit^
on a dit qu’elle avoit trouvé beaucoup d’amans parmi-
les difciplës $ Epicure ; mais on remarque qu’elle
diflingua parmi-eux Métrodore, & une courtifane,
telle qu’on la peint, ne diflingue guère- ; on a-
dit qu’elle avoit été la maîtreffe &Epicure mê me;:
mais la prétendue lettre de Léontium à Lamia, ©ù*
elle peint les malheurs de fa condition, & où elle
fe repréfente comme la garde-malade & la trifîe
efclave d’Epicure, qu’elle re préfer te comme un-
vieillard de quatre-vingts ans-, couvert de poux,,
tombé en enfance, &-grondam toujours, cette lettre,-
difons-nous, efl bien reconnue pour fauffe ; Epicure
furvécut Léontium ,& mourut à y r ans*; on voit
dans Gaffendi que Métrodortj & Léontium avoientr
laifléun f ilsd o n t £^ic«^ parlQ, dans, fon tefiament
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dommê d’un ôrphelin qu’il recommande à ce
titfe#
Epicure mourut l’an 270 avant J. C. d’ntte rétention
d’urine, après avoir fouffert avec beaucoup de
patience des douleurs bien violentes. Sans trop examiner
quelle étoit au „fon fl la véritable doélrine d\£V
pieure, nous avons donné lenom d’Epicuriens à tous
ceux qui dans leur conduite fe font montrés partifans
du plaifir, ou qui dans leurs écrits s’en font rendus
les apologifles, foie que ce plaifir fût dans l’efprit
ou dans les fens. Nous avons regardé comme
autant de fubdivifions & de modifications de l’école
d'Epiçure parmi nous, la fociété de Chapelle & de
fes amis, celle de Saint-Evremont.& de Ninon de
Lenclos, la nouvelle Léontium ;• celle du temple y
Celle de-Sceaux , celle même du Caveau,-en un
mot toutes les fociérés que le goût, l’efprit, la
liberté, le plaifir raffemblent.
Sur ce qui concerne Epicure, on peut choifir
& décider entré GafTendi fon apologifte dans fon
recueil fur la vie & les écrits de ce philofbphe,
& M. l’abbé Batteux, qui lui efl moins favorable
dans fa morale d’Epicure , tirée de fes propres écrits,
écrits qu’a la vérité nous n’avons pas / mais que
nous connoifTons jufqu’à un certain point par
ceux des anciens qui* -les ont loués ou blâmés.
EPIMENIDE, {H if. Anc. ) poëte & philofophe
de l’Ifle de C rè te , que quelques-uns mettent au
nombre des fept fages ; il vivoit du temps de
Solon , environ fix fiècles avant J. C. On fait de
loi peu de chofes, & fon hifloire reflemble beaucoup
à la fable. C ’efi de lui qu’on raconte qu’il s’endormit
dans une caverne, que fon fommeil dura
vingt-fépt ans, félon quelques-uns même beaucoup
davantage, ce qu’on explique par dés voyages
qu’il avoit faits dans un temps où des infulaires
fur-tout ne voyageoïent guères. Quoi qu’il en foit,
lé fommeil & le réveil Epiménide font pafies en
proverbe, & ont fervi de fujets à diverfes comédies ;
ce n’efl même que par-là cpfEpiménide efl connu.
Ôn croit que c’efi lui qui efl cité dans l’épître de
S^Pànl à Tire, chap. I , verf. 12 , comme dépofant
contre les Crétois fes compatriotes.
» Un d’entre ceux de cette I fle , dont ils fe font
» un prophète, a dit d’eux : les Crétois font
» toujours menteurs : ce font de méchante^ bêtes y
n qui n’aiment qu’à manger & à ne rien faire.
EPINETTE , ( fête de 1’ ) , {Hiß. de Flandre ) la
plus célèbre des fêtes des Pays-Bas, dont la
mémoire efl prefque effacée, quoique cette fête
fut encore dans toute fa fplendeur au milieu du-
X Ve fiècle. On a une lifie des rois de cette fête
dans l’efpace de 200 ans, depuis 1283. jufqu’à
1483. Le P. Jean Buzelin l’a donnée dans fa Gallo-
Flandria.
Les peuples de Flandre & des Pays-Bas- ont
toujours aimé les jeux & les fpeélacles ; ce goût-
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s’Jr conferve même encore dans ce qü’îlf Appellent’
triomphes ,dans leurs procédions & dans leurs autre»
cérémonies publiques : c’efi une fuite de l’oifivet#
& du manque de commerce.
Dans les treizième & quatorzième fiècles, chaque
ville de ces pays avoit des fêtes, des combats-,
des tour n ors ; Bruges âvort fa fête du Foreflier,-
Vanlenciennes celles du prince dePlaifance, Cam-*
bray celle du roi des Ribauds, Bouchain celle-
du prévôt des étourdis : dans beaucoup de lieux?*
on célébroit celle de Behourî.- A ces différente»
fêtes accotiroient non-feulement les habitant de»
villes voifines, mais plufieurs grands feigneurs de»
pays éloignés Lille en particulier attiroit par la*
magnificence de la fête de Vépinette & par le»
divertiffemens qui s’y donnoient, un concours
extraordinaire de monde.
La fête de Vépinette avoit fon roi, que l’ôn éli-'
foit tous les ans le jour du mardi-gras : on éli—*
foit en même temps deux joûteurs pour l’accompagner.
Les jours précédens & le refie de la femaino’
fe paffoient en feflins & en bals.
Le dimanche des brandons, ouprémier dirtiarichë'
de carême, le roi fe rendôit en grande pompe au*
lieu defliné polir lé combat, lés combattanS y
joûtoiefit à la lancé : le prix du viâorîeux étoif
un épervier d’or. Les quatre jours fuivans, le roi,
avec fes deux joûteurs & le chevalier viâorieux f
étoient obligés de fe trouver au lieu du combat,
pour rompre des lances contre tous ceux qui fe-
préfentoient. Jean, duc de Bourgogne,-honora cette*
fête de fa préfence en 1416 ; le duc Philippe-le-
bon s’y trouva avec le roi Louis X l , en 1464.
L ’excefîive dépenfe à laquelle cette qualité def
roi engageoit, la ruine de plufieurs familles qu’elle'
avoit occafionnée, le refus que firent quelques*
habitans de Lille d’accepter cet honneur prétendu y
& l’obligation où la ville s’étoit trouvée de faire
elle-même ces dépenfe» ; enfin l’indécence que
quelques perfonnes trouvoient à voir toutes ces ré-;
jouiffances, ces divertiffemens & e e s bals, dans les
deux premières femaines de carême, obligèrent
Charles duc de Bourgogne à fufpendre cette fête
depuis 1470 jufqu’en 1475.. Ehe fe rétablit eii
partie,, mais aux dépens des fonds publics, jufqu’en
15.16 : Charles V en interrompit l’exercice
pendant prefque tout le cours de fon règne, pat
des lettres données en iya8 & en 15,38. Enfin
Philippe II la fupprima entièrement en 1556 : il
ne s’en efl confervé pour mémoire que le nom
de Vépinette, que l’on donne à un des bas-ofiieiers
du magiflrat ou de la maifon de ville de L ille ,
qui repréfente en quelque façon le hérault pa^
qui les rois de- l’épinttte avoient dfoit dé fe faire
précéder
Plufieurs bifloriens ont parlé de cette fête, en-
tr’autres- Pauteur d’une petite hifloire de Lille f
imprimée en 1730. On ignore fon ioflittiteur, de
même que l’origine de Ion nom, qui vient peut