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qni ne manquent pas de fe rendre au jour marqué.
La marche du convoi commence par ceux
qui portent différentes fiâmes de carton, lefquelles
repréfentent des efclaves, des tigres , des lions,
des chevaux , & c. diverfes troupes fuivent &
marchent deux à deux ; les uns portent des étendards,
des banderolles, ou des caffolettes remplies
de parfums : plufieurs jouent des airs lugubres
fur divers inftrumens de mufique.
Il y a des endroits où le tableau du défunt
teft élevé au-deflus de tout le refle ; on y voit écrits
en gros caraftères d’or fon nom & fa dignité. Le
cercueil paroît enfuite couvert d’un dais en forme
de dôme , qui eft entièrement d’étoffe de foie
Violette , avec des houpes de foie blanche aux
quatre coins, qui font brodées & très-proprement
entrelacées de cordons. La machine dont nous
parlons, & fur laquelle on a porté le cercueil,
eft portée par foixan te -quatre perfonnes ; ceux
qui ne font point en état d’en faire la dépenfe ,
fe fervent d’une machine qui n’exige pas un fi
grand nombre de porteurs. Le fils aîné, à la tête
des autres enfans & des petits-fils, fuit à pied ,
couvert d’un fac de chanvre, appuyé fur un bâton,
le corps tout courbé, & comme accablé fous le
poids de fa douleur.
On voit enfuite les parens & les amis tous vêtus
de deuil, & un grand nombre de chaifes couvertes
d’étoffe blanche, où font les filles, les femmes, &
les efclaves du défunt, qui font retentir Pair de
leurs cris.
Quand on eft arrivé au lieu de la fépulture, on
voit à quelque difiance de la tombe des tables rangées
dans des falles qu’on a fait élever exprès; &
tandis que lescérémonies accoutumées fe pratiquent,
le s domeftiques y préparent un repas, qui fert en-
fuite à régaler toute la compagnie.
Quelquefois, après le repas, les parens & les amis
fe profternent de nouveau , en frappant la terre du
front devant le tombeau. Le fils aîné & les autres
enfans répondent à leurs honnêtetés par quelques
lignes extérieurs , mais dans un profond filence.
S ’il s’agit d’un grand feigneur , il y a plufieurs appartenons
à fa fépulture & après qu’on y a porté
3e cercueilun grand nombre de parens y demeurent
un & même deux mois , pour y renouveller tous
les jours avec les enfans du défunt les marques
lie leur douleur. ( D . /. )
F U N E R A IL L E S des fauvages d*Amérique, u Parmi
» les peuples d’Amérique, dit le P. de Charle-
» v o ix , lîtôt qu’un malade a rendu les derniers
« foupirs , tour retentit de gémiffemens; & cela
» dure autant que la famille eft en état de fournir
» à la dépenfe ; car il faut tenir table ouverte
v pendant tout ce temps - là. Le cadavre , paré
n de fa plus bellé robe, le vifage peint, fes
» armes & tout ce qu’il poffédoit à coté de lui,
a eft expofé à la porte de la cabane, dans la
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» poffure qu’il doit avoir dans le tombeau ; St
» cette pofture, en plufieurs endroits, eft celle
» où l’enfant eft dans le fein de fa mère L’ufagô
» de quelques nations eft que les parens du défunt
n jeûnent jufqû’à la fin des funérailles ; & tout
» cet intervalle fe paffe en pleurs, en émulations,
» à régaler tous ceux dont on reçoit la vifite j
» à faire l’éloge du m or t, & en complimens réci-
» proques. Chez d’autres, on loue des pleureufes*
» qui s’acquittent parfaitement de leur devoir f
» elles chantent, elles danfent., elles pleurent
» fans ceffe, & toujours en cadence : mais ces
» démonftrations d’une douleur empruntée ne pré-
» judicient point à ce que la nature exige des
»> parens du défunt.
» On porte , fans aucune cérémonie, le corps
» au lieu de fa fépultute : mais quand il eft dans
jj la foffe , on a foin de le couvrir de manière que
» la terre ne le touche point : il eft dans une
» cellule toute tapiffée de peaux ; on dreffe en-
n fuite un poteau où l’on attache tout ce qui peut
» marquer l’eftime qu’on faifoit du mort, comme
» fon portrait, & c . . . . On y porte tous le9
n matins de nouvelles provifions ; & comme les'
» chiens & d’autres bêtes ne manquent point d’en
» faire leur profit, on veut bien fe perfuader que
» c’eft lame du défunt qui y eft venue prendre
» fa refeélion,
n Quand quelqu’un meurt dans le temps de
n la chaffe , on expofe fon corps fur un échafaud
» fort élevé, & il y demeure jufqu’an départ de
» la troupe qui l’emporte avec elle au village«.
n Les corps de ceux qui meurent à la guerre font
» brûlés, & leurs cendres rapportées pour être
» mifes dans la fépulture de leurs pères. Ces
n fépultures , parmi les nations les plus féden-
» taires, font des efpècés de cimetières près du
» village : d’autres enterrent leurs morts dans les
» bois au pied des arbres , ou les font fécher
» & les gardent dans des caiffes jufqu’à la fête
» des morts.
» On obferve en quelques endroits, pour cens
» qui fe font noyés ou qui font morts de froid 5
» un cérémonial affez bizarre. Les préliminaires
n des pleurs , des danfes , des chants & des
» feftins, étant achevés , on porte le corps au lieu
n de la fépulture ; ou , fi l’on eft trop éloigné
j> de l’endroit où il doit demeurer en dépôt jufqu’à
» la fête des morts, on y creufe une foffe très-
jj large, & on yeallurae du feu ; de- jeunes gens
» s’approchent enfuite du cadavre , coupent les
jj chairs aux parties qui ont été crayonnées paf
jj un maître des cérémonies , & les jettent dans
jj le feu avec les vifcèies,; puis ils placent le ca-
» davre ainfi déchiqueté dans le lieu qui lui eft
jj deftiné. Durant cette opération , les femmes ,
jj. & fur-tout les parentes du, défunt, tournent.
j> fans ceffe autour de ceux qui, travaillent ; les,
» exhortent à bien s’acquitter de leur emploi; &
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H leur mettent des grains de porcelaine dans la
» bouche, comme, on y mettroit des dragées à
n des enfans pour les engager à quelque chofe
v qu’on fouhaiteroit d’eux, j*
L ’enterrement eft fuivi de préfens qu’on fait
à la famille affligée ; & cela s’appelle couvrir le
mort : on fait enfuite des feftins accompagnés de
jeux & de combats, où l’on propofe des prix ;
& là , comme dans l’antiquité payenne , une
aftion toute lugubre eft terminée par ,des chants
& des cris de viftoire.
Le même auteur rapporte que chez les Natchez,
une des nation fauvages de la Louifiane > quand
une femme chef, c’eft-à-dire noble, ou de la race
du foleil, meurt, on étrangle douze petits enfans
,& quatorze grandes perfonnes, pour être enterrés
avec elle, Jçurn, £un voyag. d'Amériq-. (G )
‘ FUNERAILLES des Mifilimàkinaks. Il y a d’autres
fauvages de l’Amériqqe qui n’enterrent point leurs
morts, mais qui les brûlent : il y en a même de
divifés en ce qu’ils nomment familles, parmi lesquelles
eft la prérogative attachée à telle famille
uniquement, de pouvoir brûler fes morts, tandis
que les autres familles font obligées de les enterrer:
,c’eft ce qu’on voit chez les Mifilimakinaks, peuple
fauvage de l’Amérique feptentrionale de la Nouvelle
France , où la feule famille du grand Lièvre
jouit du privilège de brûler fes cadavres ; dans
les deux autres familles qui forment cette nation,
quand quelqu’un de fes capitaines eft décédé , ©n
prépare un vafte cercueil, où après avoir couché
Ce corps vêtu de fes plus beaux habits , on y
renferme avec lui fa couverture , fon fu fil, la
provifion de poudre & de plomb, fon arc, fes
«flèches , fa chaudière , fon plat , fon caffe-tête ,
fon calumet, fa boîte de vermillon , fon miroir
& tous les préfens qui lui ont été donnés à fa
mort ; ils s’imaginent qu’avec ce cortège , il fera
plus aifément le voyage dans l’autre monde, &
qu’il fera mieux reçu des plus grands capitaines
de la nation, qui le conduiront avec eux dans un
lieu de délices. Pendant que tout cet attirail s’ajufte
dans le cercueil , les parens du mort affilient à
«çette cérémenie en chantant d’un ton lugubre , &
en remuant en cadence un bâton où ils ont
attaché plufieurs petites fonnettes. (£ > ./ .)
F unérailles des Ethiopiens. Lorfque quelqu’un
vd’eux vient à mourir, on entend de tous côtés
des cris épouvantables; tous les voifinss’affemblent
,dans la mai fon du défunt , & pleurent avec les
parens qui s’y trouvent. On lave le corps mort ;
après l’avoir enveloppé d’un linceul de cotou,
on le met dans un cercueil, au milieu d’une
falle éclairée par des flambeaux de cire: on redouble
alors les cris & les pleurs au fon des
tambours de bafque ; les uns prient Dieu pour
pâme du défunt, les autres difent des yers à W
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f louange ; d’autres s’arrachent les cheveux , &
d’autres fe déchirent le vifage, pour marquer leur
douleur : cette folie touchante & ridicule dure
jufqu’à ce que les religieux viennent lever le
corps. Après avoir chanté quelques pfeaumes ,
& fait les encenfemens, ils fe mettent en marche »
tenant à la main droite une croix de fer, un
livré de prières à la gauche , Sc pfalmodient en
chemin : les parens & amis du défunt fuivent »
& continuent leurs cris avec des tambours de
bafque. Ils ont tous la tête rafée, ce qui eft la
marque du deuil. Quand on paffe devant quelque
églife, le convoi s’y arrête ; on fait quelques
prières , & enfuite on continue fa route jufqu’an
lieu de la fépulture. Là on recommence les encenfemens
; on chante encore pendant quelque temps
des pfeaumes d’un ton lugubre, & on met le corps
en terre. Les affiftans retournent à la maifon du
défunt, où on leur fait un feftin : on s’y trouve
matin & foir pendant trois jours, & on ne mange
point ailleurs. Au bout de trois jours, on fe fépare
jufqu’au huitième; & de huit en huit jours, on
fe raflèmble pendant un certain efpace de temps,
pour pleurer le défunt, & manger chez lui.
Au furplus, les gens curieux de parcourir les
folies des hommes en fait de funérailles, les trouveront
femées dans le grand ouvrage des cérèy
montes religieufes , & raffembléës dans le petit
traité de Muret, père de l’oratoire , des cérémonies
funèbres de toutes les nations. Paris 1675, in-(Z.
(D . J . )
F u n é r a il l e s des Chrétiens , ( Hiß. mod. eccl. )
jj Les Chrétiens de la primitive églife, dit M. l’abbé
Fleury , pour mieux témoigner la foi de la
jj réfurre&ion, a voient grand foin des fépultures
» & y faifoient grande dépenfe, à proportion de
jj leur manière de vivre : ils ne brûioient point
jj les corps, comme les. Grecs & les Romains ;
» ils n’approuvoient pas non plus la curiofité
» fuperftirieufe des Egyptiens , qui les gardoie'nt
jj embaumés & expofés à la vue , fur des lits dans
jj leurs maifons ; mais ils les enterroient félon la
jj coutume des Juifs. Après les avoir la v és , ils
» les embaumoient & y employoient plus de
n parfums , dit Tertullien, que les Payens à leurs
jj facrifices ; ils les enveloppoient de linges très-
jj fins ou d’étoffes de foie; quelquefois ils les
jj revêtoient d’habits précieux: ils les expofoient
jj pendant trois jours , ayant grand foin de les
jj garder cependant & de veiller auprès en prières :
jj enfuite ils les portoient au tombeau, accom-
jj pagnant le corps avec quantité de cierges & de
j> flambeaux, chantant des pfeaumes & des hymnes
jj pour louer Dieu , & marqùer l’efpérance de
jj la réfurreétion. On prioit auffi pour, eux ; on
jj effroit le facrifice , & l’on donnoit aux pauvres
j> le feftin nommé agapes Si d’autres aumônes,
jj On en renouvelloit la mémoire au bout de
» P91J ; & on continuoit d’année en année , outre
O o o b z