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point contagieufe ; c’étoit aufîi le fentîment de Chirac
, 8c Chicoyneau s’étoit conduit en homme bien
perfuadé fur'ce point, lorfqu’il avoit été envoyé à
Marfeille par le gouvernement dans le temps de
la pefte, U y porta une audace & une confiance
qui rendirent l’efpérance & firent renaître le courage.
*
Il mourut à Verfailles en 1752. Il étoit né à
Montpellier en 1672.
Il eut un fils nommé François, comme lu i, &
digne de fes pères. Il fut le cinquième chancelier
de l’univerfité de Montpellier. Il contribua beaucoup
à renouveller &. à enrichir le jardin royal des
plantes de Montpellier, le plus ancien du royaume,
& qui a fervi de modèle à celui de Paris. Celui
de Montpellier eft une des heureufes inftitutions
du règne de Henri IV. M. Chicoyneau le fils étoit
de l’académie des fciences de Montpellier. Né en
1702 , il mourut en 1740, avant fon père.
CHIÈVRES. Voye^ C r o y ou C r o u y ,
CHIFFLET ( Hift. Litt . mod. ). Quelques favans
ont illuftré ce nom dans le dernier fiècle. Tous
étoient de Befançon.
Le plus célèbre eft Jean-Jacques, connu comme
favant & comme médecin. A ce dernier titre, on
a de lni une déclamation aiTez déraifonnable contre
le quinquina. Comme favant, il eft plus eftimé,
quoique fes opinions n’aient pas fait fortune. Il
avoit de l’érudition, 8c auroit pu avoir de la critique
; mais la plupart de fes ouvrages favans font
des écrits polémiques & des livres de parti. Employé
par le roi d’Efpagne, Phillippe I V , dont il
étoit médecin ordinaire, il fe montre par-tout
contraire à la France, jufques dans la généalogie
de fes rois. Mort en 1660.
Son fils Jules, grand - vicaire de Befançon, &
chancelier de la toifon d’o r , a fait aulli quelques
ouvrages de critique & d’hiftoire, mais peu connus.
Il y a eu aufii un jéfuite de ce nom & de cette
famille, nommé Pierre-François , appellé à Paris
en 1675, par M. Colbert, pour mettre en ordre les
médailles du roi. On a de lu i, entre autres ouvrages,
une Lettre fur Beatrix, comte{fe de Champagne, 8c une
Hifioïre de F abbaye 6» de la ville de Tournus. Mort
le 5 oâobre 1682.
CHILDEBERT, V Ie roi de France, T h ie r r i I ,
C l q d om ir I , C l o t a ir e I. Aufli-tôt après la
mort de Clovis, leur père, ces princes partagèrent
fes états, ils en firent quatre lots, qu’ils tirèrent
au fort, fuivant l’ufage: le lot le plus fort échut
à Thierri, qui le conferva fans contradiction-,
quoiqu’il fût né d’une femme à laquelle les hiftoriens
ne donnent d’autre titre que celui de concubine.
Outre le pays au-delà de la Meufe, que l’on
nomma Aufrie ou Auflrafie, par oppofition à celui
d’en-deçà, qui prit le nom de Neu fr ie , il eut quatre
villes considérables, Cambrai, Laon, Reims &
Châlons-fur-Marne. Clodomir eut le Sénonois ,
l’Auxerrois , #Orléanois, la Touraine, le Mans &
l ’Anjou : le fiège de fa domination fut fixé à Orléans,
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& fon royaume prit le nom de cette ville. Clotaire
eut le Soiflonnois, l’Amiénois, 8c tout ce qui eft
au-delà de Somme, entre la Meufe & l’Océan ,
fon fiège fut fixé à Soiffons. Chïldebert eut le refte
de la monarchie, c’eft-à-dire, Meaux, Paris, Senlis,
Beauvais, & tout ce qui eft depuis ce pays, entre
la Somme & la Seine, jufqu’à l’Océan, avec les
villes & le territoire de Rouen, de Bayeux, d’A -
vranches, d’Evretix, deSéez, de Lifieux, de Cou-
tances, de Rennes, de Vannes & de Nantes : il tint
fon fiège à Paris. Comme cette ville eft devenue dans
la fuite la capitale de la monarchie, les hiftoriens ont
donné à ce prince le titre de roi de France, exclu-
fivement à fes frères, quoiqu’ils y euffent au moins
autant de droit que lui. On fit un partage particulier
de l’Aquitaine;l’égalité n’y fut point obfervée :
Thierri eut encore la portion la plus forte ; on lui
donna l’Auvergne, le Rouergue , le Querci, le
pays des Albigeois 8c d’Uzès : ce pays étoit dû à
fa valeur, il l’avoit conquis fous le règne de fon
père. Ses frères partagèrent le refte de cette province
en portions à-peu-près égales.
Les quatre premières années de ce règne ne furent
agitées par aucune tempête. Les hiftoriens de ce
temps, qui n’eftimoient que les exploits militaires,
n’ont pas daigné nous entretenir des exercices auxquels
ils fe livrèrent. Un prince Danois, nommé
Cochiliac, vint troubler leur repos : cet aventurier fit
une defcente fur les terres de France, dont il récla-
moit l’empire, comme étant defcendu de Clodion :
fes premiers pas furent marqués par la flamme & par
le pillage. Théodebert, fils de Thierri, marcha contre
lui, le défit & le tua lorfqu’il remontoit fur fa
flotte : une guerre plus mémorable réunit le royaume
de Bourgogne à la monarchie, elle dura depuis l’an
523 jufqu’en 531. Tous les princes delà maifon de
Bourgogne y périrent, non pas tous les armes à
la main. Les premiers fiècles de notre hiftoire font
remplis d’atrocités à peine concevables dans le
nôtre. Clodomir, devenu maître de la perfonne de
Sigifmond 8c de la famille de ce prince, les fit tous
précipiter dans un puits : le barbare ne recueillit
point lefruit de cette cruauté, il périt lui-même, dit-
on , par ia perfidie de Thierri, lorfqu’il pourfuivoit
Gondemar, frère de Sigifmond. Sa famille fut traitée
à-peu-près comme il avoit traité celle du roi de
Bourgogne; de trois fils qu’il avoit, deux furent
égorgés; le troifième échappé au couteau de Clotaire
, chercha fon falut dans l’obfcurité : ce prince
fe confacra au culte des autels; c’eft lui que l’on
invoque fous le nom de Saint-Cloud. Qui croiroit
que ce même Clotaire époufa Gondiuque, veuve
de Clodomir, dont il maffacra les enfans? Jamais
prince ne fut moins réglé dans fes pallions : il porta
l’abus du mariage au point, qu’ayant déjà pour
femmes Gondiuque 8c Indegonde, il époufa Are-*
gonde, foeur de cette dernière, dont il eut des
enfans ; ces traits font allez connoître la licence de
fes moeurs. Le roi d’Auftrafie faifoit des prépara-,
tifs pour porter la guerre au-delà du Rhin, contre
. Hermenfroij
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Herftienfroî, foi de Thuringe’; il réclamoit le prix
des fecours qu’il lui avoit fournis contre Baldëric
fon frère : Hermenfroi fut vaincu 8c précipité du
haut des murs de Tolbiac, où il étoit venu trouver,
Thierri pour conférer fur les moyens de rétablir
la paix. La Thuringe réduite en province, fut le
fruit de cette perfidie : Clotaire avoit puiffam-
ment fécondé Thierri dans cette guerre, il eut pour
récompenfe tous les tréfors qui le trouvèrent dans
le palais d’Hermenfroi ; il n’avoitpris les armes qu’à
cette condition. Thierri eût bien voulu ne pas l’accomplir
, on dit même qu’il forma le projet de l’affaf-
finer pour s’en difpenfer : jamais l’ambition ne fit
commettre plus de crimes. Tandis que le roi d’Auftrafie
précipitoit du haut des murs de Tolbiac un
ennemi défarmé , 8c qu’il prenoit des mefures pour
faire aflafliner le roi de Soiffons, le roi de Paris cher-
choit un prétexte pour les dépouiller l’un. 8c l’autre;
8c fur une-.pséüendue nouvelle que Thierri étoit
mort, il avoit fait une irruption dans l’Auvergne,
qui s’étoit foumife à fa domination ; cette hoftilité ne
reftapas impunie, plufieurs feigneurs reffentirent
les effets de la colère du prince que leur défeétion
avoit offenfé. Un aventurier marchant fur les traces
de Cochiliac,réclama le royaume d’ A uftrafie,comme
prince du fang royal : cet aventurier s’appelloit
deric : fes prétentions furent appuyées,, il foutint
même une guerre régulière. Le rpi ne le vit pas
de fang-froid, il le pourfuivit avec chaleur 8c le
refferra dans Vitri en Pertois; mais les longueurs
d’un fiège étoient incompatibles avec fon impatience,
il le fit aflafliner. Ce fut après cet affafli-'
nat que fut confommé le maffacre des fils de Clodomir
par Clotaire 8c Childebert. 11 eft probable que
Thierri fut admis au partage de leurs dépouilles;
le Maine, que poffédèrentfes defcendans, 8c fon
inaélion après le meurtre de fes neveux, juftifient
cette conjedure; il mourut peu de temps après.
Théodebert, fon fils, lui fuccéda. Il étoit âgé de
55 ans, dont il avoit régné'23. Ce prince, dit un
moderne, n’eut rien de. médiocre, ni.vices, ni
vertus : grand roi, méchant homme, jamais, ajotite-
•t-il., monarquepe.gouverna avec plus d’autorité,
jamais politique ne refpeCta moins les droits de l’humanité.
Je ne vois pas quelle grande vertu cet
écrivain lui fuppofe. Thierri fut un grand général ;
du courage 8c des talens fuffifent pour l’être, mais
il faut des vertus pour mériter le titre de grand
ro i, 8c c’eft déshonorer la politique que de la confondre
avec la plus infigne perfidie. Théodebert,
fon fils, fe mit aufti-tôt en poffeflion de fes états,
malgré les efforts de Clotaire 8c de Childebert, qui
fe réunirent à deffein de l’en dépouiller ; ils s?é-
toient déjà préfentés aux peuples pour en recevoir
le ferment de fidélité, ce qui fumfoit alors pour
avoir l’empire. Les François, fous la première 8c
fous la fécondé race, étoient libres de leur fuffrage,
pourvu qu’ils fe donnaffent à un prince du fang
roy al, 8c celui qui fe préfentoit le premier étoit
toujours _sûr de l’obtenir, s’il étoit affez puiffant
Uifoire, Tom,, ƒƒ. Première Partie,
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pour fe faire craindre. Jufqu’ici les François ne s’é-
toient encore fignalés que dans les Gaules: ils fai-
firent avec empreffement l’occafion de fe faire connoître
au-delà des Pyrénées. Les orthodoxes d’Efpagne
faifoient des plaintes Continuelles contre les
Vifigoths Ariens. Ce fut fur ce prétexte que Childebert
8c Clotaire leur déclarèrent la guerre. Ici les
hiftoriens de France 8c d’Efpagne font partagés;
ceux-ci prétendent que les François furent battus
8c . contraints de marchander à prix d’argent le pafi»
fage des Pyrénées ; les autrres prétendent que leur
entrée en Efpagne fut fignalée par d’éclatantes victoires,
qu’ils fournirent l’Arragon 8c mirent le fiège
devant Sarragoffe ; mais certaines particularités,
dont nos hiftoriens accompagnent leur récit, nous
le rendent fort fufpeét. Suivant eux, Clotaire 8c
Childebert ailoient entrer dans Sarragoffe , lorfque
les Vifigoths parurent en proceflion fur les remparts
: les deux rois, ajoutent-ils * furent tellement
touchés de cette pompe religieufe , qu’ils ordonnèrent
de ceffer l’affaut, 8c fé contentèrent de la
tunique de Saint-Vincent, que leur donnèrent les
afîiégés. Cette particularité eft-elle croyable dans
Clotaire? ce monarque, qui avoit maffacré fes propres
neveux , qui s’étoit fouillé de plufieurs inceftes,
portoit - il fi loin fon refpeâpour les chofes faintes?
( Rien de plus ordinaire que’ ce mélange de crimes
8c de dévotion , fur-tout dans ces temps-là).
Cependant Théodebert8c Théodebalde, l’un fils,
l’autre pétit-fils de Thierri, l’avoient fucceflivement.
remplacé dans le royaume d’Auftrafie, 8c avoient .
montré des qualités dignes du trône,où ils n’avoient
fait que paroître ; une mort prématurée les avoit enlevés
l’un & l’autre, Clotaire , dont nous avons fait
connoître le peu de fcrupule dans fes alliances, qui
avoit époufé la veuve de fon frère 8c la foeur de
fa femme, époufa encore fans remords la femme
de Théodebalde, fon petit-neveu : l’ambition 8c non
pas l’amour préfida à ce nouveau mariage, ou plutôt
à cénouvel incefte : Clotaire le confomma pour
s’affurer la poffeflion de l’Auftrafie, dont il s’étoit
emparé, & dont il ne vouloir faire aucune part à
Childebert : celui-ci n’ofant reclamer les loix du partager
fe vengea de l’injuftice de fon frère en femant
le trouble dans fon royaume; il excita fes fujets
& fes enfans à la révolte. Les Saxons déployèrent
le premier étendard de la guerre civile, ils la fou-
tinrent avec courage 8c non fans quelques fuccès :
ils furent tantôt vainqueurs 8c tantôt vaincus ; Clotaire
fut même contraint de leur accorder la paix à
des conditions modérées. Childebert mourut au milieu
de cette guerre que fa vengeance fecrète avoit allumée
, il ne laiffoit point d’enfans mâles ; Ultrogote,
fa femme, fut exilée aufli-tôt après fa mort, ainfi
que fes deux filles Chrodeberge & Clodezinde. Ce
prince étoit aufli méchant que fes frères ; 8c s’il
commit moins de crimes, ce fut en lui impuiffance
du vice 8c non pas amour de la vertu : ce fut lui
quiconfeilla le meurtre des enfans de Clodomir,
les neveux: fes cendres repofent dans l’églife de