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que l'on n’avoit point encore vu , & ce qu’il n!éft
point à defirer que l’on vpie jamais : les annales du
monde ne présentent point d’exemple d’un fem-
îffable événement. Neuf armées considérables parurent
à la fois en Allemagne ( 1757 ) , ,& dans
une feule campagne il s’y livra neuf batailles rangées.
Nous n’entrons point dans les détails de ces
diffère ns combats,, ni dans les autres qui fe donnèrent
pendant cette guerre , l’une des plus vives
qui fe forent jamais faites dans notre kéiriifphère.
Les généraux de Marie-Thérêfe redonnèrent à
l'es armes cette fupêriorité que le roi de Pruffe
avoir prife dans les guerres précédentes. Daim
& Loudon montrèrent à Frédéric qu’il n’étoit
point invincible, & que l’on pouvoir l’égaler. Une
paix, durable fut enfin conclue ( 1.5 février 1763 )
entre le roi de, Prüffe , la reine & le roi de Pologne.
Marie-Thérêfe rendit à Frédéric la ville
& le comté de Glatz, que les Autrichiens avoient
conquis : 5c Frédéric, en reconnoiflance , promit,
par un article fecret , de faciliter à Jofeph II
la route du trône impérial. Ce jeune prince , qui
remplit aujourd’hui fes glorieufes defti nées ati gré
unanime de fes fujets , reçut le litre de roi des
Romains („avril 1764) qui le donne à l’empereur
défigné. La reine voÿoit fa jufte ambition fatis-
laite : elle venoit défaire une guerre & une paix
egalement glorieufes : elle fe livroît au plaifir, fi
doux pour une mère , de contempler fon fils fur
les degrés tî’u.n trône que fes aïeux .avoient occupé
, & que pendant un temps on avoit cru
perdu pour fa maifon. Tant de fujets de joie s’évanouirent
par le coup le plus amer pour une
époufe vertueufe & fenfible : l’empereur , fon
mari , fut frappé d’apoplexie , & mourut (août
1764 ) à Infpruk , au milieu des fêtes qui fe don-
noient au mariage de l’archiduc Léopold fon fils.
Ce prince , que le ciel récompenfa par une nombreuse
poftéritè, reffembla prefqu’en tout à Ma-
rie-Thèrèfe. François fut époux tendre, père fenfible
, fouverain populaire; il eut la folidité des
talens , avec cette qualité rare &/vraiment inefli-
mable de n’en point ambitionner l’éclat ; économe
fans être avare , il remplit le tréfor public , même
en foulageant fes peuples épuifés.Le courage étoit
en lui une vertu héréditaire , mais il fut régler
cette vertu trop commune & trop vantée ; il
reg^rdoit les conquérans comme des brigands
que l’idée d’une faufile gloire encenfe ; il n’étoit
touché que du bonheur d’exercer cette bienfaisance
qui s’entretient parmi les princes de Lor- i raine comme un héroïfme domeftique. François !
ne parcouroit qu’avec horreur Thiftoire de ces prin- !
ces fanguinaires * injufiement qualifiés du titre de j
héros, q u i, pour fatisfaire leur ambition, n’ont !
pas craint de traveftir en bêtes féroces des milliers 1
d’hommes qu’ils ont lancés fur des millions d’autres ;
qui , tranquilles auprès de leurs foyers , culti-
voient des vertus pacifiques. Une douleur univer-
ielle honora fa pompe funèbre , & ne fut adoucie ;
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que par le fpeétacle de fes enfans héritiers de fés
vertus. Quelle eût été fa joie , s’il eût pu voir
une poftérité fi Belle occuper, c’eft peu dire ,
remplir les plus beaux trônes de l’E u r o p e o ù
elle femble n’êrre montée que pour donner
aux autres rois le fignal de ces mêmes vertus.
( M - r . )
FRANCS-MAÇONS. ( Hiß. moi. ) Aimennâ
fociëté ou corps qu’on nomme de la forte . foit
parce qu’ils avoient autrefois quelque connoiflance
de la maçonnerie ôc des bâtimens , foit que
leur fociété ait été d’abord fondée par des
maçons.
Elle eft aéluellement très-nombreufe, & com-
pofée de perfonnes de tout état. On trouve des
francs-maçons en tous pays. Quant à leur ancienneté,
ils .prétendent la faire remonter à la corifi
tru&ion du temple de Salomon. Tout ce qu’on
peut pénétrer de leurs myffères ne paroît que
louable , & tendant* principalement à fortifier
l’amitié , la fociété, l’aflïftance mutuelle , & à
faire obferver ce que les hommes fe doivent les
uns aux autres. Chambers. ( A . Ä. )
( Voilà tout ce que contenoit l’ancienne encyclopédie
fur les francs-maçdhs ; anais^ M. de la
Lande a réparé ce défaut d’inftruâion , par un
article curieux qu’il a inféré dans le fupplément,
& que voici. )
F r a n c s -m a çô n s , f. m. ( Hiß. mod. ) La fo-
ciété ou l’ordre des francs-maçons eft la réunion
de perfonnes choifies qui fe lient entr’elles par
line obligation de s’aimer comme.frères, de s’aider
dans le befoin, & de garder un filénee inviolable
fur tout ce qui caraâérife leur ordre.
La manière dont les francs-maçons fe recon-
noiflent, de quelque pays qu’ils foient, en quelque
lieu de la terre qu’ils fe rencontrent, fait
une partie du fecret ; c’eft un moyen de fe rallier
, même au milieu de ceux qui leur font
étrangers , & qu’ils appellent profanes.
Il y avoit chez les Grecs des ufages fembla-
bles : les initiés aux myftères de Céres & de la
bonne déefle, avoient des paroles & des figne s
pour fe reconnoître , comme on le voit dans
Aruobe & dans Clément d’Alexandrie. On a/)-,
pelloit fymboLe ou collation ces paroles facrées 8c
eftentielles pour la reconnoiflance des initiés . &
c’eft de là qu’eft venu le nom de fymbole qu’o n
donne à la profeflion de foi qui caraâérife leg
Chrétiens.
Tout ce qui tend à unir les hommes par des
liens plus forts, eft utile à l’humanité : fous ce
point de vue la maçonnerie eft refpeâable ; le
fecret qu’on y obferve eft un moyen de plus
pour cimenter l'union intime des francs-maçons.
Plus nous fommes ifolés 5c réparés du grand
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nombre , plus nous tenons à ce qui nous environne.
L’union des membres d’un royaume,* d’une
même province, d’une même ville, d’une même
famille, augmente par gradation ; auffi l’union
snaçonique a-t-elle été plus d’une fois utile à
ceux qui l’ont invoquée çAuhznxs francs-maçbns
lui durent & la fortune & la vie.
Les obligations que l’on contraâe parmi lés
maçons ont pour objet la vertu, 'la patrie 6c
l’ordre maçonique. Les informations que l’on
prend au fujer de celui qui fe préfente pour être
reçu maçon , afturent ordinairement la bonté du
choix ; les épreuves qui précèdent la réception,
fervent à conftater la fermeté & le courage qui
font néceflaîres pour garder «n fecret, çomme
pour pratiquer efficacement la vertu ; d’où réfulte
néceftairemenr une aflociation choifie, préparée
& cimentée avec foin.
I Nos leâeurs penfent bien qu’une inftitution fondée
fur le feeret le plus profond, ne peut être
développée dans cet ouvrage ; mais nous pouvons
en dire aflez pour afliirer au moins ceux qui
n’auroient point été initiés à ces myftères, &
pour inrérener même encore la curiofité de s francs-
maçons.
On a imprimé divers ouvrages au fùjet de la
maçonnerie. IL y en a même où l’on annonce
formellement l’explication des fecrets; mais ces
livres font défavoués par tous les frères, à qui
il eft défendu de rien écrire fur la maçonnerie;
& quand même ils cohtiendroieat quelque chofe
de leurs myftères > ils ne pourroient fervir à des
profanes. La manière de fe faire reconnoître eft
accompagnée de cîrconftances qu’on ne fauroit
apprendre dans un livre ; celui qui n’auroit pas
été reçu dans une lo g e . ignoreroit la principale
artie des pratiques de la maçonnerie, il feroit
jentôt reconnu ôc chaffé, au lieu d’être traité
en frère.
L’origine de la maçonnerie fe perd, comme
tant d’autres, dans l’oblciirité des temps. Le ca-
raÛère de cette inftitution étant d’ailleurs un
fecret inviolable,, il n’eft pas étonnant qu’on ignore
fon origine plus que celle de toute autre établif-
fement. On la fait communément remonter aux
croifades , ainfi que l’ordre de faint Jean de Jéru-
falem ou de Malte, & d’autres ordres qui ne
fubfiftent plus. On croit que les chrétiens difper-
fés parmi les infidèles & obligés d’avoir des
moyens de ralliement, convinrent entr’eux de
figne s & de paroles que l’on communiquoit aux
chevaliers chrétiens fous le fceau du fecret, 6c
qui fe perpétuere z entr’eux à leur retour en Europe;
la religion étoit le principal motif de ce myftère*
La réédificatîon des temples détruits par les
infidèles, pou voit être riuffi un des objets de la
réunion de no$ pieux chevaliers, 8c■ c’eft peut-être
de là que vient la -dénomination de maçons ; &
peut-être que les fÿmboles d’archkeâüre, dont cto
F R A tfap
fe fert encore parmi les francs - maçons , durent
leur origine à cet objet d’aflociation.
Il paroît que les François ou les Francs, plus
ardens que toutes les autres nations pour la conquête
de la Terre-fainte j entrèrent auffi plus particulièrement
dans l’union maçonique ; ce qui a
pu donner lieu à l’épithète dès francs-maçons.
Dans un ouvrage anglois', imprimé en 1767,
par ordre de ia grande loge d’Angleterre, & qui
a pour titre , the conflitutïons o f the antient and
hor.ourable fraie rniiy o f free and accepted mafon:,
on fait remonter bien plus haut le roman de la
..maçonnerie ; mais écartons tout ce qui a l’air
fabuleux. Il eft parlé d’un établiflement plus ancien
que les croifades, fait fous Arhelftan , petit-fils
d Alfred, vers l’an 924. Ce prince fit venir des
maçons de France & d’ailleurs ; il mit fon frère
Edwin à leur tête; il leur accorda des franchi-
fes , une jur|fdiâion 6c le droit d’avoir des aftem-
blées générales. Le prince Edvrin raflembla les
francs 6c véritables maçons à Yorck, où fe forma
la grande loge , l’an 926. On rédigea des conf-
titutions & des loix pour les faire obîerver. Depuis
ce temps-là on cite plufieurs évêques ou lords
comme grands-maîtres des maçons; mais on peut
douter que cette fociété de maçons eût du rapport
avec l’objet dont il s’agit ici.
Edouard III, qui parvint au trône en <32.7,
donna aux conftitutions des maçons une meilleure
forme ; un ancien mémoire porte que les loges
étant devenues nombreuses, le grand-maître, à
la tête de la grande lo ge, 6c du confentement
des lords*du royaume, qui étoient alors prefque
tous francs - maçons, divers articles de réglemens.
Mais le fait le plus authentique 8c le plus ancien
qu’on puifîe citer dans l’hiftoire de la maçonnerie,
eft de l’année 1425. Le roi d’Angleterre,
Henri V I „étoit mineur ; un parlement ignorant
entreprit de détruire les loges , 8c défendit aux
maçons y fous peine d’amende 8c de prifon, de
s’aflembler en chapitres ou congrégations, comme
on le voit' dans le recueil des aEles du parlement
d Angleterre , fous la troifième année du règne
^ > chap. j , ou- je^l’ai vérifié. Cependant
cet aâe de pa iement fut fans- exécution ; il paroît
meme que ce prince fut admis dans la luire parmi
les maçons, d’après un examen par demandes & par
réponfès, publié 6c commenté par M. Locke, 8t
qli’oh a jugé avoir été écrit dé la propre main
cl Henri VI , Judge Coke’s 'inflitutts. par. 3, /o/. /p.
L’auteur prétend , à cette ôccafion , que les maçons
n ont point du tout de fecret y ou que leurs fecrets
font tels, qu’ils fe rçndrpient ridicules en les publiant:
c’eft ainfi qu’on aime à fe venger de ce
qu’on- ignore.
La reine Elifabeth ayant oui dire que lès maçons
avoient certains fecrets qu’ils ae pouvoient pas lui
confier , 6c qu’elle ne pouvoir .être à la tere dé
leur ordre, en conçut un mouvement de jàloüfiê