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bre dans le vifiriat, & qui préfente lin phénomène
hiflorique , trois grands hommes dans trois
V ifirs , le père & les deux fils ; trois Vifirs,
morts en place, après avoir gouverné un empire
defpotique comme un état libre.
Le premier , nommé Mahomet, albanois , fils
d’un piètre g re c , neveu d’un renégat,-renégat
lui-même, étoit prêt à périr par la jaloufie d'un
Grand-Vifir , lorfqu’une révolution, où périt ce
miniftre, le tira des fers pour le mettre en fa
place. Il mourut en 1663 , regretté à la .fois de
lfen maître ( Mahomet IV ) & du peuple , ce
qui tient encore du phénomène. Il avoit fait la
guerre avec éclat en Tranfylvanie, contre Mon-
tecuculli j qui le mettoit au nombre des trois
grands hommes qu’il avoit eus à combattre
Coprogli, Condé &Turenne.
Achmet fon fils , à vingt-deux ans lui fuccéda ;
ce fut lui qui prit Candie le -16 feptembre 1669 :
témoin de la valeur qui çliftingua les François
auxiliaires à ce fiège, le confeil que donna ce
vainqueur à fon maître , fut de refferrer les noeuds
de l’ancienne alliance des Turcs avec les François.
Il eut la gloire d’ôter une partie des impôts
& de conclure en 1676 , avec le fameux
Sobieski, roi de Pologne, une paix qui fut avan-
tageufe à l’empire, puifqu’enfin il garda Kami-
niek. Coprogli mourut cette même année à trente-
cinq ans.
Mahomet,fils du premier, frère du fécond, fut
fait grand-vifir en 1689, fous Soliman I I I , prit
Belgrade d’aflaut, rétablit les affaires des Turcs
en Hongrie, 8c commençoit à fe flatter de vaincre
à Salankemen, le 19 août, lorfqu’il fut tué
d’un coup de canon. ( Voye% L'article B a d e . )
COQUIL LART ( G u il l a um e ) , official de
Rheims , réputé bon poète françois dans un temps
où il n’y avoit point de poéfie françoife. Il vi-
voit vers la fin du 15e fiècle, fes oeuvres ont
eu affez de réputation, pour que Couflelier les
réimprimât en .1723.
COQUILLE ( G u y ) ( Hifl. litt. mod. ) , né
dans le Nivernois en 1523 , ne voulut jamais ,
dit-on, quitter fon pays, quoique Henri IV lui
offrît une place de confeiller d’état ; il eft vrai
qu’il étoit alors affez avancé en âge. Il fut poète
latin & hiflorien, car il y a de lui une hifloire
du Niycrnois, 8c des mémoires fur divers événe-
mens du temps de la ligue ; mais c’eft comme jurif-
• confulte qu’il ©fl célèbre: il a écrit fur la coutume
du Nivernois , & il efl fort confulté fur
ce qui regarde cette province : on a aufli de lui
une inftitution du droit françois. Il a encore écrit
fur les libertés de l’églife gallicane , & fur divers
autres fujets de jurifprudence tant civile
qu’ecclefiaftique. Il mourut en 1603.
C G R ik S ( J a c q u e s d e ) {Hifl. litt, mod.).
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C’efl l’auteuh du poème de Jonas, ou Ninive pim*
tente.
Le Jonas inconnu sèche dans la pouflière ,
a dit Boileau. Voyez aufli à l’article L e C l e r c l’é-
pigramme de Racine. Un Jean Coras, de la même
famille, laquelle étoit originaire du Languedoc,
fut chancelier, de Navarre après avoir profeffé le
droit avec éclat 8c en France & en Italie : il
étoit proteflant, & fut compris dans le maffacre
de la Saint-Barthelemi. Ses oeuvres ont été recueillies
en 2 vol. in-fol. Elles roulent fur le
droit tant civil que canonique.
CORBIÈRE (P ierre de ) ( Hifl. mod. ) , corde-
liër, puis antipape , nommé en 1328 par la faétion
de Louis de Bavière. Le pape Jean X X I I , pour
s’amufer de ce compétiteur 8c le rendre ridicule ,
produifit une femme de foizante ans, que Pierre
de Corbière avoit époufée avant d’être cordelier,
& qui réclainoit au bout de quarante ans fon
mari devenu pape. Il produifoit la fentence do
l’évêque de Riéti,quicondamnoit Pierrede Corbière
à reprendre fa femme, 8c il envoya cette fentence
à tous les fouverains. Tout cela n’étoit qu’un
jeu; l’antipape fut obligé de demander pardon la
corde au cou au pape Jean XXII.
CORBIN (J a cqu e s ) {Hifl. litt, mod.') , natif
du Berry , bon avocat, mauvais poète. Boileau,
qui. ne l ’a confidéré que fous cette dernière qualité
, l’a mis dans fon art poétique :
On ne lit guères plus jRampale &Ménardiere»
Que Magnon , du Souhait, Corbin ni la Morlière ;
c’eft tout ce qu’il en dit :
Il te met dans la foule ainfi qu’un miférable ,
Il croit que c’eft affez d’un coup pour t’accabler y
Et ne t’a jamais fait l’honneur de redoubler.
Comme avocat, on a de lut un recueil de
plaidoyers & quelques livres de jurifprudence. I l
eut un fils, aufli avocat, qui plaida fa première
caufe à quatorze ans , & qui, dit-on, la plaida bien j
. ce qui petit faire penfer que des talens précoces &
diftinguês lui avoient fait accorder des difpenies
plus fortes qu’on n’en accorde ordinairement à
ceux qu’on veut le plus favorifer.
CORBINELLI ( Hifl. mod. ). Il y a deux hommes
de ce nom ; mais le fécond , petit-fils du
premier, eft de beaucoup le plus célèbre.
Jacques , c’eft le premier , étoit un Florentin ,
allié de Catherine de Médicis, & qui vint eu
France à fa fuite : elle le plaça depuis auprès du
duc d’Anjou fon fils , à titre d’homme de lettres
8c d’homme fage , dont les confeils en tout genre
ne pouvoient qu’être miles à ce Prince. Il profita
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de fa faveur 8c de fa fortune pour fervir les lettres
; il faifoit fou vent imprimer à fes dépens les
bons ouvrages dont les auteurs n’étoient pas riches.
Dans le temps de la ligue, il embrafla les intérêts
de Henri IV , & lui donna des avis importans.
Raphaël, fon petit fils, eft celui dont il eft tant
parlé dans madame de Sévigné. Il étoit homme de
lettres , & il y a de lui que ques ouvrages nïédî'o*
• cremen eftimés , tels qu’une hifloire généalogique
de la mai J on de Gondy ; les anciens hiflor ent latins
réduits en maximes , un extrait & un choix des
plus beaux endroits d.s ouvrages des meilleurs
écrivains de fon temps. Mais ce qu’il étoit eflèn-
tiellcment , c’eft homme de bonne compagnie ,
ami fidèle 8c sur : jufqu’à plus de cent ans il aima
la fociété , & y fût agréable. Il n’étoit pas
frondeur, mais il vivoit quelquefois da «. la fociété
de ge s qui Pétoienr ; les princes de Comi l’ac-
cueilloi .nt ; on crut favoir qu’il sic toit trouvé avec
ou chez ces princes à un fouper où on avoit fait
des ch an fon s cp t e madame de Maint, non & fes
amis ; M. d’Argenfon , alors lieu te- ant de police,
vint chez lui l’interroger. On rapporte diverfe-
ment leu converfation : les uns difent que *Cor-
binelli s’obftinant à tout nie • , ou alléguant fur
toutes les queftions qu’o i lui faifoit, le défaut de
mémoire fi > aturel à fon âge , le lieutenant de
police, comme pour l’aider, lui dit : quoi! Mon- j
fleur, „ vous ne vous fouvent^ pas qu'au fécond fer- j
vice il fut tenu de certains propos & fait de certains j
couplets?—- Au fécond fervïce, monfieur, mais arten- j
de% donc cela fe peut fort bien , & en effet...... Le j
lieutenant de police fl flatta qu’il ail où- tout avouer, |
lorfque Corbinelli. ajouta : comme mon ujage efl de j
m enivrer dès le premier fervice, je ne fais jamais bien j
ce qui Je pafft.aufecond. Y olciccne conve fation fe- |
Ion d’autre s : Où avez - vous foupé un tel jour ? j
— Mais tout bien confidéré il me fera Me que je ne j
m’en Conviens pas.— N’avez-vous pas foupé avec i
tels. & , tels princes r — Oh ! pa exemple , je !
ne m’en fouviens pas du tout. — Cependant, dit j
M. d’A rgenfon , imparienré de tous ces défauts de |
' mémoire , il me femble qu'un■ homme comme, yous *
devrait fe fouvenv de ces chojes-là : foit qu’il voulût
lui rappeller un peu magiftralem'ent la diftance 1
qu’il y avoit de lui à ces princes, 8c qui 1 encloit j
leurs bontés pour lui plus remarquables , foit J
qu’il n penfâr qu’à le féliciter fur la mémoire {
sûre & fidèle que tout le monde lui co noifïoit, ‘
pour l’e- gager à en faire ufage da- s cetre occasion
, quoi qu’il en foit , ce mot, un homme
comme vous, & tous ces interrogatoires, déplurent
à Corbinelli oui répliqua: vous ave% raifon, mou-
fleur, mais devant u n homme comme vous, je fie fuis
pas un homme comme moi
C ’efl ce même Corbinelli â qui quel u’un difoit
ur> jour qu’il ne lui trôuvoit pas bo ~ vifagé , Corbinelli
avoit alors p;ès de cent ans. Il s’agit bien
de !'on vifage , dit i l , à mon âge, n’eft-ce pas
beaucoup d’en avoir un? Il mourut en 1716.
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COREUEIL. Voye% V il l o n .
CORBULON ( D o m it iu s ) ( Hiß. Rom. ) , fameux
général romain , vertueux dans un temps
de crimes, & févère au milieu de tous les vices.
Il avoit fait la guerre avec fuccès en Germanie,
fous l’empire de Claude ; & donnant pour conti
epoids aux ravages de la guerre des étabbfle-
mens utiles qui occupoient pareillement le foldat ,
il avoit fait un canal de communication e trela M eufe
& le Rhin. Au commencement du règne de
Néron, il fut envoyé en Arménie , ce qui fut mis
au nombre des préfages heureu de ce règne , 8c
fit croire que la route des honneu s 1 oit être
ouverte à la vertu , preeterfuetam adulationem lcnù>
quod Domitium Corbulonem retinendæ Armenien proepo- ,
fuerat, videbaturque locus vir.tutibus patefattus. ( ’eft
à ce trait de Tacite que Burrhus fait allufioa
dans Britannicus, lorfqu’il dit :
Thrafeas au fénat, Corbulon dans l’armée,
Sont encore innocens, malgré leur renommée.
Ils ne le furent pas long-temps; le prix de
leurs vertus 8c de leurs (erviçes fut la haine
du tyran, 8c par confé, ue : la mort. Corbulon
ayant fournis l’A rménie, chaflé Tiridate , rétabli
Tigrane, forcé les Parthes à demander la paix,
ayant fur-tout rendu aux armées rom aines le fer-
vice <are 3c difficile alors, de les difeipliner 8c de
les éxercer à des travaux publics, apprit qu’il n’avoit
fait qu’exciter la haine du tyran, 8c que fa perte
étoit' réfolue , il fe perça lui même de fon épée,
l’a • 66 de Jéfus Chrift, en difa"t : je l'ai bien mérité•
Mot quiriendoit témoignage . & à la vertu 8c à
la tyrannie : il eft des temps où il faut que l’homme
de bien s’attende â la mort 8c aux fupplices.
CORDEMOI (G érard d e ) {Hifl litt. mod. ) ,
fut placé par M. Bofîùet auprès- du dauphin en
qualité de leéfeùr. Ce fut pour S’ufage de fon élève
qu’il entreprit l’hifiojre de Cha lemagne, pendant
queVléchier fe çhargeoit de celle de Théodofè , 8c
que Bofîùet, comme u.. aigle , planoir fur l’h.f-
toireuniverfelledes temps antérieurs à Cha lema-
gne ; celui-ci traçoit l’hifîoire eu g and , il préfen-
toit des idées générales que les autres étoient
chargés de particularifer 8c de développer, il écri-
VGit en philofophi 8c en orateur fublime, F ’échler
on écrivain délicat, Cordemo'- en favanr.Son hifloire
de Charlemagne entraîna l’hifloire des deux pre-
mièies races, 8c devoit néceiiairement i’entr îner.
Pour prendre une idée jufie de Ch.ulemagne ,/8c
de fou règne, il faut voir tout le mal que Char-s
le ma g e avoit à corriger , 8c qu’il a corrigé en
partie ; il faut voir tout le bien que fes fuccelTeu s
avoier.t à détruire, 8c qu’ils ont détmit entière-»
ment. Il importe d'ailleurs de co noître comment
les hommes font ou deviennent des barbares,
comment les barbares peuvent quelquefois deve-
Hh a