
Autant qu’il aima Cinq-Mars. Richelieu qui s’en ap-
perçut, voulut le perdre » Cinq-Mars voulut le prévenir
& crut pouvoifcy réuffir, parce que le roi qui
haïffoit, craignoit & refpecloit Richelieu , fe plai-
gnoit toujours de lui & lelivroit auxplaifanteries de
fes favoris ; malheureufement Cinq-Mars prit une
voie criminelle pour nuire au miniffre, il ligna
un traité .avec l’Efpagne, mais tout le monde
favoit bien qu'il-n’en voutoit ni au roi ni à l’état,
& qu’il ne cherchoit qu’à embarraflèr le minière.
Louis XIII qui avoit été beaucoup plus mécontent
de Cinq-Mars, toutes les fois que ce jeune homme
le quittoit pour aller à Paris voir fes maîtreffes ;
Louis X I I I , qui avoit toujours beaucoup plus craint
fes infidélités que fes complots, lui laifla tranquillement
couper la tête, en difant au moment
de Féxécution : l’ami (c ’eft ainfi qu’il le nommoit
toujours) fait en ce moment une vilaine grimace. Les
grands biens des Ruzé & des d’Effiat pafsèrentau
jnaréchal de la Mailleraye par fon mariage avec
Marie Coiffier, dite Ruzé, foeur du grand-écuyer
Cinq-Mars, & pardà à la nraifon de Mazarin qui
defcendoit de ce maréchal, fon fils ayant époufé
portenfe Mancini • Mazarini,
EGALEURS, f. m. (Hifl. modJ) nom qu’on
donna en Angleterre pendant les troubles qui
agitèrent ce royaume fous Charles I , à un parti
de fa&ieux qui vouloit égaler toutes les conditions
,des habitans de la Grande-Bretagne; de forte que
les loix puffent obliger également toute forte de
perfonnes, & que ni la naiffance, ni la dignité,
qe puflènt difpenfer qui que ce fût des pourfuites
de la juftice. Us furent .défaits & diffipés par Fairfax
fen 1.640, dans le comté d’Oxfort. Çhambers. (G,
EGBERT. (Hifir Angleterre.^) Pour ces hommes
cruels , pour ces âmes atroces qui dans la
royauté ne connoiffent d’autre avantage que le
pouvoir fun.efte d’opprimer impunément les peuples,
d’effrayer, d’écrafer les nations, de porter
le fer & la flamme, le ravage & la mort de
contrée en contrée, Egbert fut, fans contredit,
un héros magnanime, & l’un des rois les plus
illuftres .de fon fiècle. Mais pour les coeurs fen-
fibles ? généreux, bienfaifahs-, qui n’eftiment du
rang fuprême que la prérogative qui y efi attachée,
de rendre les hommes heureux, de protéger les
arts, de faire régner la juflice, la concorde,
paix ; pour ceux qui n’apprécjent les fouverains
que d’après les vertus qu’ils ont exercées & les
bienfaits qu’ils ont verfés; Egbert ne fut qu’un
brigand couronné , tyran de fes fpjets, ufurpateur
infatiable des états des princes voifins ; ennemi
redoutable, ami fiifpeâ & allié fans fo i, il ne
vécut, il ne régna que pour le malheur de fes
peuples, forcés de concourir à l’exécution de fes
projets ambitieux, pour le défaftre des fouye-
rains de l’heptarchie, dont il brifa les fceptres, &
dpnt il ufurpa les différens royaumes, Egbert eut
cependant de grandes qualités ; mais il eut de plus
grands vices , & fa gloire fut ternie par l’indignité
des moyens qu’il employa pour aïïouvir fon
ambition. Outré dans fes defirs, injufte dans fes
vues, il fut d’autant plus condamnable, d’autant
plus criminel, qu’il avoit lui-même éprouvé les
vexations de l’in juflice les horreurs de l’op-.
preffion. Car Bithrigk, roi de Weflex, craignant,
peut-être avecraifon, la préfence & Egbert, prince
du faiig roy al, & voyant avec inquiétude les
marques d’eftime, de confiance & de refped que
les Wefl-Saxons ne ceffoient de lui donner, crut
que le feul moyen de déconcerter les vues d’un
tel rival, étoit de l ’éloigner de fa cour & de fes
états. Egbert fe retira auprès d’Offa roi de Mercie ;
mais n’y trouvant ni afyle, niprote&ion, il pafla
à la cour de Charlemagne, qui l’accueillit avec
diftin&ion, lui acçprda fon eflime, & lui donna
fa confiance.
Egbert vécut douze ans à la cour de Charlemagne;
& , ambitieux comme i l l ’étoit, il eut plus
de temps qu’il ne lui en falloit pour fe former,
foit dans l’art des combats, foit dans la politique ,
fcience affreufe alors, & qui ne confiftoit qu’à
couvrir adroitement des voiles de la perfidie, ou
des ombres trompeufes de la diflîmulation, des
projets de conquêtes ou des vues d’ufurpation. .
Bithrigk empoilbnné par Edburge fa femmes
étoit à peine expiré, que les Wefl-Saxons dont
le temps n’avoit point affoibli les fçntimens, le
hâtèrent d’envoyer une ambaffade folemnelle à
Egbert, qui pour lors étoit à Rome avec Charlemagne.
Les ambaffadeurs Wefl-Saxons offrirent lé
fceptre du Weflex à Egbert ; il prit congé de
Charlemagne , & fe rendit dans fes nouveaux
états. Ses qualités brillantes ne démentirent pas
les flatteufes efpérances des Wefl-Saxons ; à fâ
valeur naturelle qui l’élevoit au rang des guerriers
les plus célèbres de fon fiècle, il joignoit les plus
rares talens , une politique profonde , & une
expérience éclairée par les leçons 8c les exemples
de Charlemagne, qui pendant près de douze années
avoit daigné lui fervir de modèle, de guide 8f
d’inflr ucleur.
Egbert connut combien les rois de l ’heptarchio
lui étoient inférieurs ; & formant le projet de
s’élever fur leurs ruines, il réfoiut de profiter,
aufli-tôt qu’il lui feroit poflible, de fa fupériorité ;
mais ne jugeant point les circonflances favorables
à l’exécution de fes defleins , il employa les fe.pt
premières années de fon règne au foin de fon
royaume , à gagner, par fon amour pour la
juflice , par la fageffe de fe$ loix, & fur-tout par
fa bienfaifancê, j’affe&ion de fes fpjers : ilyouluf
être aimé 8c le fut. Ses états étant bornés au micLi
par la mer, au nord parla Tamife,*à l’orient par
le royaume de Kent , où régnoit le valeureux
Cenülphe, roi de Mercie 8c fouverain des Anglor
Saxons, prince aufli célèbre p«ir 1 éclat de ' les
victoires , qu’il étoit redoutable par les nombreufes
armées qu’il avoit fous fes ordres, il ne reftoit
à l’ambitieux Egbert, que le.s Bretons de Cornouailles
, contre lefquels , en attendant de plus
heureufes conjon&ures, il lui fut permis alors de
commencer à remplir le vafte plan d’ufurpation
qu’il avoit médité. Il avoit fur les Bretons de Cornouailles,
qui ne s’attendoient point à des a&es
d’hoftilité, trop d’avantages pour qu’il y eût
aucune incertitude fur l’événement. En une feule
campagne, les Bretons vaincus, fubjugués, furent
contrains de reconnoître leur vainqueur pour
fouverain. Les Gallois ayant tenté de fecourir les
Bretons, fournirent un prétexte à Egbert qui,
portant la guerre 8c la terreur dans le pays de
Galles, s’empara, prefque fans combattre, de la
plus étendue des trois principautés qui compo-
loient la contrée de Galles. Les tentatives que les
Gallois osèrent faire dans la fuite, pour fecouer
le joug qu’ils avoient été forcés de fubir^ne
fervirent qu’à les rendre plus malheureux encore.
Egbert, les traitant en rebelles, entra chez eux
en defpote irrité, ravagea leurs poffeflions, mit
tout à feu & à fan g ; 8c exerçant fur eux la plus
rigourêufe vengeance, les mit pour jamais hors
d’état de l’irriter encore.
Cette rapide expédition fut fuivie du plus heureux
événement qurEgbert pût défirer, de la mort
d& Cenülphe, roi de Mercie, 8c fuprême monarque
des Anglo-Saxons , dignité qui fut conférée à
Egbert (ans qu’il eût à lutter contre aucun concurrent.
Ce rang, quelqu’élevé qu’il fût, 11e pou-
voit fatisfaire fon ambition. La mort de Cenülphe,
l’eftime générale de la nation, le défordre 8c les
divifions qui agitoientles royaumes faxons, étoient
. des circonflances trop favorables au roi de Weflex,
pour qu’il les négligeât. Son royaume étendu par
fes nouvelles conquêtes, étoit dans l’état le plus
floriffant, tandis que les royaumes voifins, affoiblis,
épuifés par des diffentions habituelles, n’avoient ni
éclat ni puiffance , & chaque jour paroiffoient
s’approcher de leur entière décadence. Egbert pof-
fédoit doncleplüspuiffant royaume de l’heptarchie,
réduite depuis quelque temps à quatre fouverainetés ;
dans les trois autres , la race des fouverains étoit
éteinte :fdes fa&ions diviioient les feigneurs qui,
tous également ambitieux, quoique tous également
incapables de régner, afpiroient à la couronne. Le
Nortfrumberland déchiré par deux fa&ions, étoit
p op occupé de fes propres malheurs pour fonger
à fe précautionner -contre les ennemis étrangers.
La Mercie étoit plus agitée que leNortbumberland,
& Bernulphe, qui y régnoit, ne fe foutenoit fur
le trône qu’à la faveur de la fadion q u i, lui ayant
donné le fceptre contre les voeux de la nation,
pouvoit le maintenir à peine contre la jaloufie 8c
la haine des grands. Ainfi quoiqu’augmentée par
î’acquifition de l’Eftanglie , 8c par la foumifîion
du roi de Ken t, devenu tributaire, la Mercie
étoit infiniment moins puiffante que le Weflex..
A l’égard du royaume d ’Effex, foit qu’il n’exiflât
plus fous l;a même forme de gouvernement, ou
qu’il fût encore gouverné par fes propres rois, ce
que l’on ignore ; foit qu’il eût été réuni à la Mercie,
comme la plupart des hiftoriens le préfument, il
ne jouiflbit plus d’aucune forte de puiffance ni de
confidération.
Animé par ces circonflances, Egbertr prefque
afluré du fuccès de fes entreprifes, fit des préparatifs
qui, donnant des foupçons au roi de Mercie,
le firent penfer à fe précautionner contre les
mefures que le roi de Weflex paroiffoit prendre
pour s’aggrandir aux dépens de fes voifins. Bernulphe,
dans la crainte que ce ne fût contre lui
principalement que ces préparatifs fuflent dirigés,
crut que le’ feul moyen de rompre ces projets de
conquête, étoit de prévenir le roi de W effex, &
de l’attaquer lui-même fans lui laifler le temps
d’achever fes difpofitions. D’après ce plan , Bernulphe,
à la tête d’une armée confidérable, s’avança
jufqu’auprès de Salisbnry, où, contre fon attente,
il rencontra fon ennemi. Les deux armées ne
tardèrent point à combattre , les Merciens furent
entièrement défaits, & la perte fut telle qu’il n’étoit
pas poflible de la réparer. Cette victoire fut un
coup décififpour le roi de Weflex, non-feulement
à caufe de l’affoibliffement du roi de Mercie, qui
déformais ne pouvoit plus arrêter fes progrès ,
mais par la facilité qu 'Egbert avoit à s’emparer dit
royaume de Kent, dont la conquête lui foumet-
troit tout le pays entre la Tamife & la mer. Aufli
à peine eut-il remporté la victoire, qu’il envoya
Ethelwolph fon fils, fuivi d’une forte armée, dans
le royaume de Kent. Baldred, qui y régnoit, hors
d’état de fou tenir par lui feul cette attaque, implora;
vainement le fecoùrs du roi de Mercie : Bernulphe
entièrement épuifé par fa propre défaite, défef-
péroit lui-même de pouvoir fauver fes états ; &
Baldred, forcé, de combattre, & trop'fier pour
fe foumettre, foutint feul le faix de la guerre
mais trop foibie pour lutter contre Egbert, il fut
vaincu, fe retira dans la Mercie, & abandonna fon
royaume au vainqueur qui le réunit à ceux de Wef*
feX & de Suflex.
On ne fait ni dans quel temps, ni à quelle
qecafion le royaume d’Effex tomba fous la domination
à’Egbert j & tout ce que l’on trouve à ce
fujet dans les Annales faxonnes , efi que le roi
de Weflex pafla de la conquête de Kent à celle diz
royaume d’Effex, & qu’il ne lui refla plus à fou*
mettre que le Northumberland, la Mercie &
l’Eftanglie. Il efi très-vraifemblable que malgré la
terreur que fes armes 8c fes vidoires infpiroient
aux Saxons, jamais il ne fût parvenu à étendre
aufli loin fa puiffance, fi ces trois royaumes fe
fuffent réunis pour leur commune défenfe : mais
les divifions qui y règnoient, ne leur permet-
toient point de fonger à une cçnfédération ü
! néceffaire. Les Efiangles indignés d’avoir fuht le