
Ten tinrent ; elle jouo.it aufli dans, la comédie, mais
c’eft par la tragédie qu’elle eft ilhiftre. On dit que
la nature ne lui avoit pas prodigué les avantages
extérieurs, mais qu’elle fe les donna, ou quelle
fut s’en pafîer à force d’ame & d e talent. Elle débuta
le 14 mai 1717 , par le rôle d’Ele&re, elle
eft repréfentée dans fes gravures, en - Cqrnélie ,,
pleurant fur l’urne de Pompée; mais c’e ft, dit-
on, dans le rôle de Phèdre qu’elle mettoit le plus
de perfeôion ; elle paroît avoir été ^ la Charnp-
mêlé de M. de Voltaire; il a chante avec [éloquence
de la douleur & de l’amour
Ces lèvres charmantes ,
E t ces yeux d'où partoient ces flammes éloquentes »,
Eprouvant de la mort les livides horreurs»
Non, s’écrie-t-ilt
Non , ces bords déformais ne fèront plus profanes
I ls contiennent ta cendre t & ce txifte tombeau
Honoré par nos chants ; confacré par tes -mânes ,.
E ft pour nous un temple nouveau.
Vo ilà mon Saint-Denis oui , e’eft - là. que. j’adore-
Ton efpric , tes talens ,. tes grâces , tes appas
Je les aimai v iv .a n s je les encenfo encore
Malgré les horreurs du trépas >
Malgré, l’erreur & les in gra ts,
Que feuls. de ce tombeau l’opprobre déshonore.
On fait quel fut ce tombeau ; M. de Voltaire
If explique aufli en vers dans la préface de Zaïre :
Et que l’aimable le Couvreur»
A qui j'ai fermé la paupière
N’ a pas eu même la faveur
D e deux cierges & d’ une bière »,
Et que monfleux de Êaubinièr,e
Borta la nuit par charité
©ç corps autrefois fi- vanté
Dans un vieux fiacre emgaqueté-
Vers' le bord de notre rivière».
Voyez - vous pas à ce récit
E’amour irrité qui gémit
Qui s’envole en brifant.fes armes»,
Et Melpomène toute en larmes,.
Qui m’abandonne & fe bannie.
Des lieux ingrats qu’elle embellit
Si long-temps-de fes nobles charmes ?"
Dans la comparaison dé ces deux morceaux
©n reconnort l’ouvrage dtitemps ; dans le premier,
c’étoit l’amant qui par loi t » la plaie étoit feignante
dans le fécond, c’eft le poete» il fe permet dès
fissions & même unq forte de badinage ; il fe fou-
venoLt de fa douleur , il ne ktfentoit plus. Adrienné
le‘Couvreur étoit morte. le.za mars 1730. Zaïre ne
fut jouée qu-en 173.2»- '
Mademoifelle le Couvreur avoït auftî été fa maf-
trefle du maréchal de Saxe; elle avoit vendu ou
mis en gage des diamans pour lui procurer de
l’argent, lorfque les états de Curlande & de Se.-
migalie l’avoient élu leur duc*.
COWLEY (A b r ah am ) (Hifi.-Utt. mod.Jrpoète:
anglois -célèbre, conftamment attache Charles-
premier dans fes malheurs ; il fervit en France la
reine fa femme, & s’attacha de même à Charles II
leur fils. Celui - c i , qui ne S’atrachoit à perfonne ,
dit à la mort de Cowley :■ je viens de. perdre l ’homme
du royaume qui ni étoît le plus attaché, M. Hume
repréfente Cowley comme un po- te médiocre. I l
mourut ^quarante-neuf ans. Il étoit né à Londres,
en 1618. 11 mourut en 1667»
COWPER ( G uillaume ); ( Èifi. lïtt. mod J) *
fameux chirurgien anglpis, auteur d’un Traité des
mufcles fort eftimé, qu’il publia en 1.694,,. Si dura
fupplément à L’anatomie de Bidloo». ,
COTER ( l ’abbé). ( Hifi^litt..mod. ) , écrivain,
eftimable & par fon cara&ère & par fes talens ; c’eft-
un des auteurs,contemporains que M_ de Voltaire;
a le plus conftamment bien traité dans fes écrits.
& dans fes lettres ; il l’appelloit toujow&philofophe
& dans fon intention ce n’étoit pas un médiocre:
éloge ; M . l’abbé Coyer Tèroit en e ffe t ; il b a d in o it;
-plus philofophiquement que légèrement „ quoiqu’il
voulût toujours être léger , mais - la nature:'
l’av-ok fait lourd & dans, fon ftyle & dans fon ton».
Cependant la découverte- de la-pierre- phüàfophale 9,
Vannée merveilleuse,. &c,. opufc-ùles réunis- fous le,
titre de bagatelles morales, l’a.voient d.abord an**-
noncé comme le'Swift françois \fa noblejjecommerçante
eut du fuccès » & fut f u m e d’une loi qui
pour encourager le commerce, p r ô m e tto iîd a no-
blcffe aux commerçans diftingués. Son petit roman
de Chinki fut attribué un moment à M. de
, Voltaire; fon ouvrage le plus férieux, & qui ne:
l’èft peut-être pas; encore aflez-, eft Thifloirc de So-
bieski. On a encore de lui un voyage d’Italie & de:
’ Hollande, & de nouvelles dbfèrvatïons fur l’Angle-
; terre. Il defira beaucoup l’académie, il fit tout pour
L'obtenir ,. & moins heureux que l’abbé Trublet, il
mourut fans avoir eu cette fatisfeefion ; on ne peut
pas accufier l’académie d’injuftice à cet égard , &
; dû n’a u roi t pas en non plus de reproches à lui
faire fi e lle e û t c o n fe n li de remplir des: voeux fi;
ardèns & fi conftans. L’abbé Coyer^ né en Fraache-
Comté , mourut à Paris en 1.7820. Il avoit. été;
quelque temps jéiuite..
CRAIG ( N i c o l a s ); ( Hifl: lut. modCraigius
fevant danois né à Ripen , employé par le rOi
de Danemarck en plufieurs négociations impor-
: tantes. Il fit une^chofe peu fenfi e , il fe maria &
fe mit à voyage'r beaucoiip & long-temps fans fa
i femme, qui de fon, côté fit deux enfans. fehs lui>
& les lui pré fe nia à fon retour. Il fit cafier- (pn
mariage & fe remaria ; on ne fait rien de ce fecond
mariage, & tout .ce qu’il importé de favoir en
■ tout fur ce fevant, c’eft qu’on a de lui un ouvrage
latin très-eftimé fur la république de Lacédémone, '
& des annales de Dannemarck, depuis la mort de
Frédéric I en 1534 jufqu’en 1550. Craig mourut
«n i6ox.
Deux autres Craig, tous deux ecoflbis , Thomas
•& Jean , l’un jurifconfulte, l’autre mathématicien;
l’un mort en 1608 , l’autre vivant à la fin du même
ïfiècle , fefont fait quelquemom ; le premier , par
•un Traité des fiefs d'Angleterre & d’Etoffe, Sa par un
traité du droit de fuccéder au royaume d’Angleterre ;
le fécond, par un petit.ouvrage intitulé , Théologie
Chrifiïane pnncipià mathematica, contenant fur
la durée de la probabilité dès calculs contraires à
tout principe de mathématiques , de théologie,
de chriftianifme. Une probabilité eft plus ou moins
grande; il prétendoit, lui, qu’elle étoit plus ou
moins longue , & que la probabilité de la vérité :
dg la religion chrétienne (car elle ne lui paroît que
probable) pouvoit durer encore. 1454 ans,,à partir
du temps où il écrivoit, mais le fécond avènement
du Chrift préviendra cette prefeription ,
comme le premier avènement a prévenu celle de
la probabilité de la religion judaïque. L’abbé Hput-
teville a pris la peine de réfuter férieufement ces
ïêveries.
CRAMER ( J e a n F r é d é r ic ) ( Hifl. lut. mod. ) ,
réfident du roi de Pruffe à Amfterdam , mort à la
Haye en 1715 , eft auteur d’uiî livre intitulé : Vindicte
nominis 'Germanici contra quofdam obtreftatores
gallos. Ces obtre&ateurs françois font le P. Bou:
Leurs, qui s’étoif permis cette- jolie plaifanterie :
un Allemand peut-il être bel efprit? Cramer a aufli
traduit en latin, l’introdûSüon à Vhifioirepar Puffen-
dorf.
Gabriel Cramer, génevois, eft beaucoup plus
célèbre encore ; digne difciple de Jean Bernoulli,
c’eft à lui qu’on doit une excellente édition des
oeuvres de Jacques & Jean Bernoulli;il eft l’auteur
d’une introdu&ion à la théorie des lignes courbes ,
ouvrage eftimé. Il étoit profeiTeur de mathématiques
à 19 ans; les académies de Londres , de Berlin
, de Montpellier, de L y on , de Bologne, l’a-
voient adopté; il mourut à quarante-huit ans en
1752, à Bagnols en Languedoc , où il étoit allé
dans Tefpérance de rétablir une fente ruinée par
le travail. Sa famille n’a ceffé de foutenir fon nom
avec éclat à-Genève.
CRAMMER ouCRANMER(Th om as) {Hifl.
'eVAnglet. ) , archevêque de Cantorbery , eft un de
ces hommes fur lefquels l’hiftoîre n’offre Lguéres
que des jugemens di&és par l’efprit de .parti. Ju-
geons-le par fes principales aélions.
Cramrfier n’étoit encore connu que dans l’univerfitè
de Cambridge, lorfque l’affaire du divorce
de Henri V III lui fournit une occafion de m lever.
Ce fut: lui qui propofa de confulter les univerhtés
de l’Europe. Le roi voulut connoître l'auteur de
ce confeil, il trouva chez lui le favoir & les lumières
unis à la candeur & à la modeftie, il aima
Crammer, il fe l’attacha.
Ce que Henri & Crammer avoient prévu , arriva
; ils eurent des confultations favorables, à tout
prix.
Crammer devenu courtifàn , écrivit en faveur dtî
divorce, & par conféquent il n’auroit jamais dû:
être juge dans cette caufe. Voilà ce que les pro-
teftgns n’ont pas afféz remarqué.
Henri VIII nomma Crammer à l’archevêché de
Cantorbery, Crammer parut vouloir refufer ; les
proteftans vantent ce refus, les catholiques n’y
croient pas, ou le regardent comme un traitd’hjr-^
pocrifie de la part de Crammer.
Lorfque Crammer fut nommé , la rupture avec
le feint fiége étoit déjà fort avancée ; mais il fallait
encore, pour prendre pofleflion de la primatie, prêter
ferment au pape. Henri VIII & Crammer imaginèrent
eiifemble l’expédient malhonnête de pro-
tefter contre ce ferment avant de le faire. Cette
conduite déroge un peu à la candeur de Crammer.
Il cafta le mariage de Catherine d’Arragon ^
confirma celui d’Anne de Boulen, concourut à
établir de plus en plus la fuprématie du r o i, qui'
entraînoit un accroiftement de jurifdiéfion pour la
primatie; mais on ne peut pas dire que Crammer
n’eût d’autre religion que celle du prince, il étoit
proteftant au fond du coeur , il s’en cachoit même
foiblement, & on fait que Henri V III, au milieu
du fchifme , confervoit du zèle pour la foi catholique
, ou du moins contre les proteftans.
Crammer fut le feul qui ofa refter fidèle à la
malheureufe Anne de Boulen dans fa difgrace ; il
écrivit pour elle à Henri V III, & fut éloigné pour
quelque temps de la préfence du monarque. Il lui
écrivit aufli très-fortement en faveur de Thomas
Cromwel, décapité comme proteftant ; mais en
cela il étoit moins hardi, Cromwel étant plutôt
une vi&ime fecrifiée aux catholiques qu’un ennemi
pôurfuivi par l’implacable Henri.
Il s’oppofa aux fix fameux articles connus fous
le nom de ftatut de fang, parce qu’ils prononçoient
la peine de mort contre les proteftans. Le troifième.
article défendoit le mariage aux prêtres , & Crammer
étoit marié. Aufli-tôt que lebill fut pafte, il
renvoya fa femme en Allemagne, où elle étoit
née : elle étoit nièce dii fameux Ofiandre.
Henri VIII ne pardonna qu’à Crammer de s’être
oppofé au ftatut de fang ; les autres évêques oppo-
; fans furent emprifonnés.
i II s’éleva même de violens orages contre Cram-
L1 2